~3~ Fendalyn

Son père : Gondal, faisait sa valise d'un geste consciencieux, faisant attention de ne rien oublier. Sa jeune fille de dix ans le regardait, effrayée, à l'autre bout de la pièce.

-Papa..., put-elle dire, les yeux embués de larmes.

Celui-ci s'arrêta alors, souffla légèrement et vint voir Fendalyn en s'agenouillant et en lui prenant sa tête entre ses mains.

-Je ne peux rester là sans rien faire, en regardant les miens se faire déchiqueter par l'armée de Kelton Follet, comme il l'a fait sur Nysteria.

-Tu te dois de faire honneur aux Kartafeç ! Clama Lendalen, la grand mère maternelle de Fendalyn, depuis son fauteuil.

A ces mots, Gondal soupira avant de chuchoter à l'oreille de sa fille :

-Je compte sur toi pour prendre soin de ton petit frère, tu t'en occuperas mieux que ta grand mère, je suppose !

Fendalyn ne put s'empêcher de sourire en regardant Doloron, qui dormait sagement dans le salon sur son lit.

-Ce n'est pas que j'ai envie de défendre ce satané gouvernement, reprit-il à voix haute pour se faire entendre de sa belle mère. Mais de ce qu'on dit dans le journal, Nysteria serait à feu et à sang, et je n'ai nullement envie de voir ma région ravagée.

-Si tu te montres brave, on te décorera peut-être et la maison Kartafeç retrouvera sa splendeur d'antan ! Psalmodia une nouvelle fois Lendalen, somnolant et cousant en même temps.

-Ce Kandall Torcatram avait de bons principes, mais cette alliance avec Kelton le fera chuter et d'une certaine façon je le regrette. Peut-être qu'avec cette guerre l'Impératrice prendra conscience de l'enjeu climatique. C'est là, la vraie guerre, ne vous y trompez pas. Si la seule option est de prendre ces vaisseaux nous menant dans l'espace, ce serait une bien triste conclusion de cette humanité.

Puis il boucla sa valise, fit le tour de la maison pour voir s'il n'avait rien oublié, et embrassa Doloron sur le front avant de voir sa fille.

-Je vais me présenter dans le centre de volontaires qu'ils ont aménagé. Ca ne durera pas, ma chérie, t'en fais pas.

Fendalyn ne put retenir ses larmes et se jeta sur son père.

-Ne pars pas, papa, ne pars pas, ne me laisse pas !

-Une Kartafeç ne pleure pas, s'exaspéra sa grand mère sur son siège à bascule.

-Ecoute, ce sera une histoire de jours, veille sur ta grand mère et ton frère, ta mère serait fière de toi !

A l'évocation de sa mère, la petite fille brune se décolla de son père, tenta de se redresser et sécha ses larmes tout en s'imaginant le visage de sa mère, qu'elle n'avait jamais vu. Elle la voyait toujours avec de long cheveux brun mais très clairs, un visage avec quelques tâches de rousseur, des yeux bleus à la limite du vert qui pétillaient de joie et surtout un sourire vraie, sincère, qui savait toute la bonté que vous avez en vous. Bien sûr tout ça est dans ma tête elle n'est pas exactement comme ça malgré ce que me dit papa mais j'm'en fiche, c'est comme ça que je l'imagine.

-Oui... Je veillerais sur eux, t'en fais pas ! Lui répondit-elle, en s'imaginant sa mère se tenant à côté de son père.

Celui-ci paru satisfait, bien que sa fille perçut de la tristesse en lui qu'il s'efforça tant bien que mal de cacher. Papa est aussi triste que moi mais on doit être forts, peut importe notre nom on doit être forts. Il se tourna ensuite vers la vieille dame octogénaire, les cheveux blancs bien coiffés en un grand chignon avant de lui dire :

-Au revoir Lendalen.

Celle-ci hocha d'un air imperceptible la tête, mais Gondal avait bien vu qu'elle saisissait que la situation s'annoncerait plus compliquée que ce que prétendait son beau fils. Après un dernier regard vers son fils, il regarda une dernière fois sa fille d'un air entendu avant de refermer la porte, laissant ses deux enfants et Lendalen seuls. Si seul, pensa-t-elle désespérément. Ne pleure pas ne pleure pas, t'es une grande fille maintenant, c'est sur toi que papa a confié la protection de la famille t'as une grande responsabilité, montre toi à la hauteur...pour maman.

-Il ne tardera pas à revenir, dit la grand mère comme si cela était d'une évidence frappante. En attendant que cela ne change pas tes habitudes. Les écoles sont toujours ouvertes, tu continueras d'étudier à Ouran, cela va de soi. Tu feras les courses aussi je ne suis plus comme il y a vingt ans, mon dos me fais si mal et mes poumons se serrent si violemment parfois...

Après avoir eu le regard perdu dans le vide pendant quelques secondes qui glaça Fendalyn, Lendalen se ressaisit et continua de coudre comme si le départ de Gondal n'était qu'un lointain souvenir. Doloron se mit alors à émerger de son sommeil et tout en se frottant les yeux, se mit debout sur son lit.

-J'ai faim, lâcha-t-il d'un air épuisé.

Fendalyn regarda sa montre avant de conclure :

-On mangera dans une heure.

Doloron protesta à peine avant de descendre de son lit et de prendre ses voitures miniaturisées pour s'amuser avec. Sa grande soeur ouvrit la porte du frigo pour constater toute la nourriture industrielle servit dans des sachets. Papa a fait des provisions, tant mieux.

-Papa est partit faire les courses ? Demanda le jeune enfant de cinq ans.

Fendalyn se figea avant de se retourner lentement pour voir Lendalen. Celle-ci était retombée à la contemplation de sa couture mais semblait somnoler également. Je dois me reposer sur personne d'autre que moi ici, pensa-t-elle avant de refermer le frigo et de s'agenouiller vers son petit frère. Inutile de lui mentir, des fois il faut bien dire la vérité.

-Papa est partit aider l'armée de Xandar pour défendre notre Empire. Ca ne durera pas longtemps, il sera là dans quelques jours mais en attendant...

Elle toucha le nez de Doloron avant de rajouter :

-C'est moi qui m'occupe de toi, compris ?

Celui-ci ria avant de s'exclamer :

-Compris madame !

Fendalyn soupira, regardant son frère s'amuser avec ses voitures. Il en a de la chance d'être aussi insouciant. Mais bon, ce n'est qu'une affaire de jours, et au moins à l'école on se préoccupera moins de moi.

Quand elle dû regagner l'école d'Ouran deux jours plus tard, c'est exactement ce qu'il se passa. Les élèves étaient faussement concentrés pendant les cours, leur visage exprimant toute l'inquiétude d'une guerre qui avait déjà débuté. Pendant les pauses, tout le monde ne parlait que de ça, il y avait bien quelques regards mauvais à l'encontre de Fendalyn, mais cela n'allait pas plus loin. Au moment où elle allait se rendre à la cantine, un des élèves derrière elle dans la queue lui lança :

-Tu dois être contente, hein vermine ? Toute cette guerre, t'as envie qu'on tombe tous dans le chaos pour que ta famille de rats prenne le pouvoir ? T'as envie d'une vengeance ?

Oh non pitié pitié ils ne me laisseront donc jamais.

Les élèves autour souriaient, d'autres étaient dans leur discussion, et certains encore étaient gênés mais quand l'un d'entre eux lui dit de se taire il repartit de plus belle :

-Non je ne me tairais pas ! Des gens de ma famille ont vu son père s'engager parmi les volontaires ! Le culot qu'il a cet enfoiré de Kartafeç comme s'il pouvait salir l'uniforme xandorien ! Je peux te dire qu'ils lui ont passé un bon savon, dans l'armée ! S'exclama-t-il en souriant, montrant toutes ses dents et guettant une réaction de l'intéressée.

Celle-ci ne se fit pas attendre, elle d'habitude si calme se jeta sur lui en lui hurlant :

-Qu'est ce que vous avez fait à mon père ?!!

Pris de court, le garçon tomba et ivre de rage donna un coup de poing dans le visage de la fille de dix ans. Alors elle lui griffa le visage :

-Jamais plus tu ne parleras de mon père ! Tu ne lui arrives même pas à la cheville !!

Mais déjà quelqu'un l'enleva du garçon et la poussa solidement vers l'arrière. Alors seulement elle regarda et le reconnu.

-Sernec ?

Celui-ci l'amena à l'écart de la foule.

-Ils ne sont plus qu'une minorité à se soucier de toi, écoute il voulait juste...

-Mais comment il sait que mon père a rejoint les volontaires ?

Les larmes lui vinrent alors aux yeux :

-S'ils font du mal à mon père... Comment je pourrais faire... Je m'occupe de mon frère, de ma grand mère mais s'il y a mon père en plus...

Puis elle se mit à respirer bruyamment en rajoutant :

-Ou même pire... S'il ne revient plus du tout... Je pourrais pas m'occuper éternellement d'eux, je suis trop jeune je...

Puis elle se mit à pleurer. Sernec, décontenancé dans un premier temps, finit par lui dire :

-Si jamais t'as envie de souffler un peu après t'être occupé de toute ta famille, tu peux venir chez moi, mes parents ont rejoint l'armée ils m'ont laissé de la bouffe mais j'crois qu'ils en ont pas grand chose à faire de moi donc je m'ennuie un peu tout seul.

Alors elle sécha ses larmes. Petite sotte, y'en a qui sont dans des situations plus graves que la tienne, je m'occupe de mamie et de Doloron mais ils me tiennent en quelque sorte compagnie. Si j'étais toute seule...

-Oui, c'est vrai, ce serait super. Mais... T'as pas des amis qui peuvent venir te voir ? Dit-elle en regardant autour de lui comme pour en trouver qui l'attendraient.

Sernec se mit alors à rire légèrement avant de lui répondre en écartant les bras :

-J'aime pas trop sociabiliser, j'ai toujours eu du mal avec ça. Ou p'tete c'est que j'crois que y'a personne de suffisamment intéressant pour que j'aille lui parler. Quand tu vois comment les gens te traitent, ça te donne pas trop envie d'être leurs amis. Certains préfèrent ça que d'être seul. Pas moi. Moi j'men fiche.

-Mais t'es mon ami ? Demanda-t-elle timidement.

-Toi ouais, t'es quelqu'un de vraie, pas de méchants comme eux. Je pense que tu peux avoir le privilège d'être mon amie ! Dit-il en souriant.

Puis ils se mirent à rire et une nouvelle fois, Fendalyn oublia un bref instant le départ de son père ou encore son traitement subit d'ordinaire à l'école.

-Me feriez vous l'honneur de manger avec moi ? Lui demanda-t-elle, se prêtant au jeu.

-Avec joie, répondit-il en souriant.

Pendant ce temps une surveillante était venue pour constater les griffures qu'avait subi le garçon. Quand celui-ci montra du doigt Fendalyn qui arrivait, elle vint aussitôt vers elle.

-Sale petite...

Sernec prit alors les devant :

-Vous avez vu le visage de Fendalyn ? Le coup qu'il lui a donné ? Elle devrait aller à l'infirmerie !

-Menteur ! Cria le garçon griffé.

-Trop de monde à l'infirmerie, dit simplement la surveillante. J'ai trop de choses à gérer avec cette guerre, la moitié du personnel a rejoint cette putain d'armée, débrouillez-vous !

Il y a encore quelques jours, la petite fille de dix ans auraient été choqué d'un tel évènement, au lieu de quoi elle se mit à rire :

-Allons manger, Sernec !

-T'es sûr que ça va, quand même ? Ton visage va enfler, je te préviens.

Il faut parfois savoir se réjouir de petits évènements quand on est au plus mal. Quand ils passèrent devant le garçon au visage griffé, celui-ci ne put s'empêcher, rouge de rage, de les insulter mais les autres enfants le poussaient, voulant eux aussi manger.

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