~15~ Oswalda
Elle mangeait seule, sur une immense table, différents mets y reposaient, couvrant la quasi totalité de celle-ci. Deux gardes gardaient impassiblement la salle à manger privée de l'Impératrice. A côté d'elle de larges vitres montaient en lancettes, bien que seul le clair de lune arrivait jusqu'à elle. C'était le soir, les longues lumières au plafond éclairaient son festin, bien qu'elle ne soit pas d'humeur à festoyer.
J'ai tué mon père, pensa-t-elle soudainement, se surprenant elle-même. Est-ce donc cela qui me rend triste ? Je devrais plutôt m'inquiéter de cette guerre qui n'est pas aussi simple qu'elle aurait dû être. Mais bien qu'elle s'efforça de penser à ce qui était le plus important pour son empire, ses pensées la ramenèrent au moment où elle avait empoisonné Walden. Après l'avoir empoisonné, juste avant que Walden ne meurt, elle le réécoutait dire qu'elle, Oswalda Asterian, était sa fille. Elle avait été adoptée par Walden depuis qu'elle avait fuie sa vie misérable pour se présenter au palais en clamant être une Asterian. Mais ce qu'elle ignorait, c'est qu'elle était née dans ce palais, que sa mère qui était une Asterian, chose que Walden avait maintenu dans le secret, l'avait fait fuir avec une servante pour éviter d'avoir une vie dénuée de liberté dans cette cour. Elle a trahit le sang des Asterian en m'éloignant du pouvoir. Si elle n'avait pas fait cela, j'aurais été une héritière plus que légitime aux yeux de tous, je n'aurais pas eu besoin de manipuler Walden et je ne l'aurais pas tué. En tout cas je ne pense pas, finit-elle par songer. Ma mère m'a causé une enfance minable, mon père m'a caché nos filiations de sang... Mes parents n'étaient pas dignes de leur ancêtre Aracorn l'Unificateur. Malgré ça, elle ne pu s'empêcher d'éprouver de la tristesse et au fond d'elle une pointe d'horreur à l'idée d'avoir tué son père. Elle avait peur à l'idée de le voir assis en face de lui, à l'autre bout de la tablée, dans son fauteuil roulant.
-Ma fille je regrette autant que toi ce qui s'est passé entre nous, déclara-t-il en dégustant une cuisse de poulet.
-Es tu sûr que je le regrette ? Je ne pense qu'à la dignité dont devrait jouir la famille Asterian, ta famille ! Répliqua-t-elle, pincée.
Son père soupira, but une gorgée de vin avant de lui dire :
-Je ne te crois pas. Tu t'es enfermée dans ce personnage, tu t'es perdue mais une part de l'enfant que j'ai connu est toujours en toi !
-Cet enfant n'aurait pas disparu si tu ne lui avait pas caché toute sa vie que tu était mon père, pourquoi ne me l'as tu pas dit ? Lui demanda-t-elle, ses mains crispées sur sa coupe de vin, la gorge sèche.
-Votre Altesse, tout va bien ? Demanda l'un des gardes, perplexe en écoutant son Impératrice parler toute seule.
-Oui, se reprit-elle en clignant des yeux et en déglutissant. Tout va bien.
Le lendemain, nouveau conseil de guerre. Encore, pensa-t-elle, se surprenant une nouvelle fois. Tu as recherché le pouvoir, tu es née pour ça, assume ces responsabilités, tu veux donner raison à ta mère ? Nouvelle table. Ronde. Baignée cette fois-ci par la lumière du soleil. Elle portait fidèle à elle-même une tenue rouge couverte d'un long manteau blanc à fourrure.
-Avez-vous de nouvelles informations concernant cette guerre ? Demanda-t-elle d'un visage froid.
Hidro, son ministre de la guerre, prit la parole.
-Elles ne sont pas très bonnes, Votre Majestée...
-Contentez-vous de nous les donner, le coupa-t-elle sèchement.
Voyant l'humeur glaciale de l'Impératrice, Hidro alla droit au but.
-Il ne nous reste plus qu'une centaine de soldats à Darkatras au Nord-Est se réfugiant sur les îles de la région.
Ne voyant aucune réaction sur le visage d'Oswalda, il continua :
-L'armée de Kelton a continué son vol en bombardant Atlantiss, il ne reste plus rien.
-Ils n'ont laissé aucune troupe pour contrôler la population ? Demanda l'un des généraux.
-Je crains que vous ne m'ayez mal comprit. Il ne reste plus rien à la surface d'Atlantiss. Les fondations ont été touchées, le continent est à l'heure actuel en train de couler.
Des murmures horrifiés s'élevèrent alors, même Oswalda ne put réprimer un frisson.
-Le travail de Rodney. Mon père. L'œuvre de plus d'une vie que j'ai moi même inauguré... réduit à néant, déclara Walden, assis à l'une des chaises de la table, le visage attéré.
En fermant longuement les yeux, la vision de son père disparue et elle pu voir les regards de tous les membres présents fixés sur elle, attendant une réaction.
Mais elle ne prit la parole.
-Les soldats qui restent sur les îles de Darkatras ne devraient ils rejoindre les Îles du bout-du-monde dans le but de protéger les entrepôts nécessaires à la construction des vaisseaux ? Demanda l'un de ses ministres. C'est après tout sur leur route. Votre Altesse, je crains que le départ pour la lune ne devienne notre priorité...
Walden la regarda alors à nouveau.
-Soit, dit-elle enfin.
Ses membres du gouvernement, n'osant espérer une telle réponse, ne purent que sourire chaleureusement.
-Cela veut dire que vous autorisez le départ de ces vaisseaux vers la Lune, Votre Altesse ? Demanda un ministre afin de s'assurer de la position d'Oswalda.
-Vous m'avez bien comprit, allez-y si cela vous chante, en ce qui me concerne je reste ici.
Je n'aurais besoin des déserteurs.
-En revanche, vos départs resteront secrets jusqu'au bout. Je ne veux pas que mes soldats croient qu'il n'y a plus d'espoirs. Ils se battront tant que cela est possible.
Les membres du conseil restèrent silencieux avant que l'Impératrice ne rajoute :
-Si vous m'avez mal comprit, personne ne part avant la fin de cette guerre !
Ils se regardèrent alors entre eux, n'osant montrer leur tracassement. Le lendemain, elle se tenait sur un balcon des bas étages de la tour du palais pour regarder ses troupes s'entraîner dans la cour. La plupart, voyant leur dirigeante les observer, redoublèrent d'efforts dans les combats. Se battraient-il avec autant d'ardeur s'ils savaient que la plupart n'auraient pas de places dans ces vaisseaux ? Ils se révolteraient sans doute. Je me dois de rester avec eux. En même temps l'idée même de s'envoler pour la Lune signifierait qu'il n'y a plus de raisons de se battre pour ces terres. Dans tous les cas, attendre la fin de la guerre pour organiser les vols est la meilleure option, convint-elle. Son père, s'avançant à côté d'elle en fauteuil roulant, hocha la tête :
-Ce n'est jamais simple de gouverner mais je reconnais que c'est ce qu'il y a de mieux à faire.
Toujours en fixant les soldats, n'osant regarder Walden, elle soupira avant que Hydro, son jeune chef de guerre, n'arrive au balcon, se tenant respectueusement à deux pas derrière elle.
-Votre Altesse, Alistair est arrivé.
Son visage s'illumina alors.
-Faîtes-le venir de suite
-Là, sur le balcon ? Demanda-t-il, perplexe.
-Oui il n'y a pas de raisons que nous soyons toujours enfermé dans des salles obscures pour parler de la guerre. On est à une trop grande hauteur pour nous entendre, de toute façon.
-Bien, dit-il avant de faire demi-tour.
Quelques instants plus tard, elle entendit une voix s'approcher :
-On m'a fait part d'un tas de mauvaises nouvelles à mon arrivée.
-Alistair ! S'exlama-t-elle en se retournant avant de se ressaisir. Ne t'emporte plus jamais comme ça, se promit-elle. J'espère que vos nouvelles ne seront pas de la même couleur.
-En effet, dit-il en la rejoignant et en scrutant à son tour les entraînements des soldats. Tout s'est passée exactement comme je l'avais prévu.
-Kandall brise l'alliance avec Kelton ?
-Oui, d'ailleurs Kandall aurait pu mourir ce jour même. Le gouverneur de Verradien était dans la même pièce que Kandall et le gouverneur de Kratagne qui signait une reddition. Quand je lui ai révélé la vérité sur la mort de son père, les soldats de Verradien ont protégé leur gouverneur et ils n'étaient pas loin de lui tirer dessus.
-Cela aurait été parfait.
-Malheusement pour Xandora, Kandall à réussit à tuer Dresdan et a convaincu son armée de le rejoindre.
-Mais comment peuvent-ils lui obéir si facilement ? S'exaspéra-t-elle.
-Il faut dire qu'il a un cran à toute épreuve, admit-il. C'est un redoutable adversaire tant dans la guerre que... et bien disons dans une sorte de diplomatie très persuasive...
-Épargnez-moi vos remarques...
-Je suis votre humble conseiller...
-Le gouverneur de Kratagne aurait pu le faire tuer, le coupa-t-elle. Dresdan n'aurait eu d'autres choix que le suivre et ils seraient retournés dans notre camp.
-Mais cela ne s'est pas passé comme ça, dit-il simplement. Kandall a du cran, je vous l'ai dit, le temps que le gouverneur de Kratagne hésite, le fils d'Aldresdan est intervenu et a coupé court à toute discussion.
-Enfin... Quoi qu'il en soit, Kandall et Kelton s'affronteront, celui qui en réchappe en sera affaiblit et nous lui donneront le coup de grâce.
Pour seul réponse, Alistair hocha doucement la tête.
-Mais cela ne sera pas suffisant. Kelton a massacré une population entière. Un génocide de près de 5 milliards d'être humains. Je ne peux l'accepter. Il faut montrer à tous les Xandoriens qu'il doit y avoir une contrepartie. Que les Atlantissiens seront vengés.
Alistair attendit, redoutant ce qu'elle pourrait évoquer.
-Alcatram brûlera, lâcha-t-elle simplement.
-Non, vous ne pouvez pas, dit-il aussitôt. Alcatram fera pleinement partie de Xandora, en exterminant sa population vous ne règnerez que sur des cendres ! Il y a déjà eu assez de morts comme ça !
-Des morts surtout de notre côté. Nous ne pourrons vivre avec une telle population. Alcatram n'est gardé que par un millier de soldats, toute l'armée est sur le continent. Ils ne pourront résister.
-Justement ! Croyez-vous sincèrement que vous montrerez à tous votre puissance alors que le combat est inégal. Ce sera un massacre, non une bataille ! Et dois-je vous rappeler que la population n'y est pour rien, ce sont les actes de Kelton qui entraîneront l'anéantissement du peuple de Kandall !
-La population n'y étais pour rien, sur Atlantiss...
-Votre Altesse, n'agissez pas comme eux ! Se reprit Alistair, désespéré.
-Ma décision est prise, conclu-t-elle, baissant les yeux.
Son conseiller tourna alors aussitôt les talons, abbatu, ne pouvant rien d'autre espérer. Elle détourna alors de nouveau les yeux, évitant de croiser le regard de son père qu'elle imaginait aussi triste.
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