~24~ Oswalda

Pourquoi. Pourquoi ne m'a t-il rien dit. Moi qui pensais que j'étais son héritière car je l'avais manipulé. Mais dès le début, il savait que j'étais sa fille. Pourquoi m'avoir adoptée alors qu'un simple test en public aurait confirmé ma légitimité ? Personne n'aurait osé contesté. Oswalda resta de longues secondes à scruter le corps de l'Empereur qui s'affaissait sur sa chaise. Sans comprendre. Et elle n'aimait pas ne pas comprendre. La femme en rouge finit par se lever, rinça les coupes, les rangea et sortit de la suite impériale. En longeant le couloir, elle vit à un détour l'ombre d'un soldat. La jeune femme s'arrêta alors, se concentra, ferma les yeux... Et les rouvrit humides et rougis. Elle s'avança alors en tremblant vers le soldat.

-Madame ? Dit-il, ne cachant pas sa surprise de la voir dans un tel état. Qu'est-ce que...

-L'Empereur est mort... Walden... Mon... Mon père, je vous en supplie, faites quelque chose !

-Il est dans sa chambre ?!

N'obtenant que des pleurs de la part d'Oswalda, il se précipita vers le lieu du crime. La fille de Walden recommença alors à longer les couloirs, pleurant et s'efforçant difficilement de parler tout en clamant ce qui était arrivé. Elle finit par arriver dans une salle de jeux, où même au plus profond de la nuit se trouvait toujours quelques personnes éminentes. Une dizaine de personne jouaient aux cartes en criant quand ils la virent. Là, ils constatèrent ses larmes, chose peu commune chez Oswalda, tous connaissaient sa nature froide et maîtresse d'elle-même.

-Ma dame, que faites-vous à une heure aussi...

-Walden, nous... Nous avions l'habitude de discuter le soir... Mais ce soir là, quand je l'ai trouvé il... Je ne sais s'il avait trop bu ou...

-Mais enfin, que s'est-il...

Le regard froid d'Oswalda refit surface, ce qui stoppa tout le monde. Non, ils devaient se rappeler que ce n'était pas une potiche, qu'ils ne s'adressaient pas à n'importe qui, même en ces circonstances...

-Il est mort, voilà ce qu'il s'est passé ! Elle se laissa alors tomber sur un fauteuil.

La fille Asterian n'aurait pu l'imaginer, mais elle s'endormit rapidement sur ce même fauteuil. À son réveil, elle se trouvait dans son lit avec une dizaine de personnes autour. Ce fut d'abord la surprise qui l'envahit. Comment ai-je pu réellement m'endormir ? Qu'est-ce qui m'est arrivé ? Mais la réponse était évidente. Submergée par les émotions ? Non, pas moi, c'était de la comédie tout ça. De fausses larmes. J'ai toujours su jouer quand cela m'arrangeait. Mais pourtant, elle ne voyait pas d'autres solutions. À présent, elle ne savait plus si elle avait joué la comédie la veille.

-Vous vous êtes enfin réveillée, quelle merveilleuse nouvelle ! Nous craignions de vous perdre, vous aussi, l'Empire xandorien ne s'en relèverait pas ! Déclara le chef du Sénat en se levant aussitôt de son siège, bientôt imité par tous les autres. Il avait l'air jovial et avait cet air sur le visage qui rappelait un enfant, Gorgonas donnait un air naïf et optimiste.

-Je... Elle comprit avec stupeur qu'on l'avait déplacée et déshabillée pour la coucher comme une vulgaire môme. Personne n'osait toucher Oswalda ! Et pourtant si, on l'a fait. Elle chassa cette remarque dans sa tête pour se concentrer sur ses visiteurs. Le chef du Sénat, son jeune ministre de guerre qu'elle avait nommé en glissant un mot à l'Empereur. Il y avait un ou deux autres ministres. Mais nulle trace d'Alistair. Je me demande à quel point cette nouvelle a dû l'impacter. Je vous remercie d'avoir tant guetté mon réveil, reprit-elle, se reprenant. Je suis en forme, ne vous inquiétez pas de cela, mais qu'en est-il de Walden mon père ? A-t-il survécu ? Que s'est-il passé ? Qu'avez-vous fait ?

Le chef du sénat s'éclaircit la gorge avant de lui répondre d'un air désolé.

-Les médecins personnels de feu votre père...

-Feu ? Releva-t-elle. Vous n'avez donc rien pu faire ?

-Et bien non, il était déjà bien mort, la réanimation n'a rien donné, l'autopsie nous dira plus tard...

-Non ! Ne charcutez pas son corps ! Laissez-le pour une fois en paix maintenant que vous avez été incapables de...

-Avec tout le respect que j'ai pour vous, le corps de votre père sera présentable après lors des funérailles... Mais plus nous attendions, moins nous avons de chances de savoir exactement ce qui a pu...

Mais Gorgonas s'interrompit en regardant le visage outré d'Oswalda.

-Après tout, j'en parlerais aux médecins, l'important il est vrai est de se concentrer vers l'avenir. En ces temps troublés, il faut agir vite. Si Kandall apprend la nouvelle, cela les encouragera dans leur attaque vers le continent. Je sais que cela peut paraître prématuré, mais il faut que la cérémonie ait lieu le plus tôt possible.

-Les funérailles ? Marmonna-t-elle.

-Non, le couronnement bien sûr !

Alors tout ce qui cogitait dans l'esprit d'Oswalda s'interrompit net. Je ne rêve pas. Le couronnement ! Ce dont j'ai tant espéré toute ma vie a enfin lieu maintenant ! Impératrice de Xandora ! J'ai enfin accompli ce pour quoi je me suis battue ! Mais un sentiment amer germa dans son esprit. C'est Walden qui m'a mise sur le trône. Pas moi. Depuis le début il savait quel était mon rôle. Mais elle chassa cette idée, du moins pour un temps, pour profiter de ce bonheur féérique. Elle se l'était tant imaginé, ce moment. Enfin ! La dynastie des Asterian reprenait !

5 jours passèrent alors que le solstice d'hiver approchait à grand pas. Les Xandoriens avaient été surpris de la nouvelle, tout le monde se préoccupait des annonces de l'Empereur à propos de ces voyages vers d'autres planètes pour échapper à cette maladie dévastatrice. Personne ne s'attendait à ça. Alors maintenant, le peuple voulait savoir comment Oswalda comptait régner. Quelle genre d'Impératrice serait-elle, allait-elle faire table rase de ce que Walden avait annoncé ?

La salle du trône était remplie. Les plus grands nobles de Xandora voulaient assister à cet évènement historique. C'est ce qu'elle constata en entrant dans la salle du trône par la grande porte. Quatre servantes lui tenaient sa longue robe rouge et blanche qu'elle portait pour l'occasion. Elle mit une longue minute à traverser de part en part la salle par l'allée séparant les bancs des nobles. Tous la regardaient avec un visage grave avant qu'elle atteigne le pied des marches où le chef du Sénat Gorgonas, vêtu d'une robe blanche et or, l'attendait, deux marches au dessus, la dominant. Elle savait exactement ce qu'elle devait faire. Et ce depuis longtemps. Oswalda inclina la tête, montrant sa tresse rousse à Gorgonas. Celui-ci jointa ses mains au dessus de sa chevelure et psalmodia :

-Jeune fille ayant pour nom Oswalda Asterian, digne héritière par adoption de ton père Walden Mormaint dit Le Sage...

Le Sage ? Première fois qu'on lui donne ce surnom...

-En ces temps de deuil où Xandora pleure leur protecteur, leur guide et leur souverain, nous devons nous réjouir de la venue de celle qui continuera son œuvre, brandira son bouclier pour mieux nous protéger, reprendra son flambeau pour mieux nous guider et gouvernera avec justice pour une vie meilleure ! Xandoriennes, Xandoriens, ce jour-ci marque l'avènement d'un nouveau souverain qui reprendra les sages idées des plus anciens et apportera les nouvelles idées des plus jeunes ! Tu étais Oswalda Asterian. En te redressant, te voilà Impératrice de Xandora, Reine et gouvernante de Paumos ainsi que chef de la citée de Térébor !

L'Impératrice se redressa et constata qu'un sénateur s'était approché, tendant un coussin rouge et or à Gorgonas. Et sur ce coussin se tenait magistralement la couronne de Xandora dont elle avait tant rêvé. Cette couronne sombre constituée d'émeraudes bleus, violets avec des piques en or représentant à s'y méprendre à des lames d'épées. Celle là même que fit créer Aracorn l'Unificateur de Xandora. Gorgonas, avec un mince sourire, sourire qui exprimait que l'on ne remettait pas une couronne à un Empereur tous les jours, prit l'objet symbole de monarchie et la déposa sur la tête d'Oswalda. Il s'écarta ensuite et invita la couronnée à gravir les marches. Traînant sa longue robe sur ces dizaines de marches, elle se retourna une fois arrivée en haut pour contempler l'assemblée.

-Impératrice est un si modeste mot pour désigner la personne qui a la lourde tâche de régner sur 4 continents, divers peuples réunifiés sous Aracorn en une même nation, clama le chef du Sénat qui se trouvait cette fois-ci aux pieds des marches, la regardant de haut. Que comptez-vous faire de votre règne sur ces 60 milliards de Xandoriennes et Xandoriens ?

Ca y'est, mon premier discours en tant qu'Impératrice. Le rituel en somme, qui n'a pas tellement changé depuis Aracorn. L'Impératrice tonna alors d'une voix forte pour se faire entendre, que tous imprègne son message et que les journaux rapportent mot pour mot ce qu'elle a prononcé :

-Mon peuple, mes biens-aimés, je me suis tant battue avec vous, j'ai connu votre quotidien où j'y ai passé une grande partie de mon enfance. Je connais vos joies, vos plaisirs mais aussi vos misères et vos tristesses. Je veux être une souveraine à l'image de son peuple, qui sait les écouter et agir en conséquence. Cette couronne qui m'est due ne va pas changer mes ambitions. Je me suis battu avec vous, je me battrais maintenant avec et pour vous. Ces temps troublés ne m'impressionnent pas, ce sont une raison pour faire entendre nos voix et protéger nos familles. Nous ne les livrerons pas à l'ennemi, nous ne donnerons pas nos terres, nos cultures, nos constructions, tout qu'a bâti notre société depuis des siècles. Le président d'Alcatram Kandall Torcatram nous déclare la guerre ? Allons-nous nous taire, redoutant un ennemi encerclé par les eaux ? Non. Je peux vous garantir que cette fois-ci, nous répliquerons corps et âmes à leurs offensives. Et je vous l'annonce, non seulement nous vaincrons, mais nous irons sur leurs terres, nous prendrons leur cultures et non seulement ils ne nous attaquerons plus à l'avenir mais à l'issue de cette guerre, Alcatram fera partit de Xandora ! Grâces à nos technologies de pointe, nous achèverons l'oeuvre qu'a débuté Aracorn !

Oswalda brandit un poing en signe de victoire et fut bientôt imité par l'entièreté de l'assemblée accompagnée de cris d'allégresse. L'Impératrice se retourna et alla s'asseoir sur le trône impérial, satisfaite. Mais au premier rang, un visage grave ne manifesta pas sa sympathie à l'égard de son Impératrice. Alistair Ormond, la mine plus noire qu'il ne l'avait jamais eu, contemplait avec désespoir ce qu'il avait tant redouté. Le pire commençait, le début d'un règne de terreur où Oswalda, il était sûre, serait prête à tout pour gagner cette guerre et serait prête à tout pour que ses caprices se réalisent. L'avis de ses habitants, elle les avait suffisamment entendu durant son enfance pour faire valoir ses idées, aussi noires puissent-elles être.

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