~15~ Renald

Monsieur Oregon, vénérable soixantenaire, avait passé sa vie à travailler dans les bureaux de la marque d'automobile "Fondeslia". Il devait créer des nouveaux modèles de voitures volantes, tous plus ingénieux et pratique les uns que les autres. Son métier passait avant tout et il l'exerçait sans relâche, avec un sérieux et un professionnalisme qui marquait le respect de ses collègues. Mais sa famille passait avant, c'était la seule chose auquel il se réjouissait chaque matin d'être encore en vie. De se lever, voir sa femme, à qui les décennies n'avaient pas entraîné leur amour dans une routine conjugale. Ses trois enfants étaient sa fierté, ils travaillaient dans d'autant de domaines différents, mais ils avaient tous finit par réussir dans la vie. Ses cinq petits enfants venaient souvent le voir, ils adoraient ce grand père qui leur apprenait tant de chose et leur contait d'innombrables anecdotes qui les faisaient de temps à autre rire, mais qui cela les captivaient à chaque fois. Monsieur Oregon aimait les emmener dans divers endroits comme la piscine, la bibliothèque ou encore des parcs d'attractions, qu'ils raffolaient. Ce mari, ce père ou encore ce grand père... Est mort, pensa le docteur Renald en regardant la fiche de son ex-patient.

-Le 50ème cette semaine, déclara-t-il à son infirmière.

-Dans notre hôpital, précisa-t-elle. Je n'imagine même pas tout ceux qui en sont morts à travers tout l'Empire.

-Ce n'est pas une pandémie, ce n'est pas un virus. L'empire devra revoir tout son système avant de faire face à cette crise. Mais ils ne la reconnaîtront pas aussi facilement, cela donnerai raison à l'ancien président d'Alcatram Aldresdan que le gouvernement a assassiné ! Et en ces temps critiques, ils n'assumeront pas le fait que la pollution tue de plus en plus de monde et que cela ne cesse de croître à une vitesse fulgurante !

Pendant que l'infirmière, aidé de trois autres infirmiers, prirent le corps du corps du vieil Oregon pour l'emmener dans la chambre mortuaire, le docteur Renald s'étonna :

-Et la famille ? Elle ne l'a pas vu une seul fois depuis sa venue ici...

-Ils craignent tous d'être contaminés, pourtant on leur a bien dit que ce n'était pas par contamination mais par la pollution ! Dit-elle d'un souffle en soulevant le corps et en sortant.

Renald s'occupa aussitôt d'une patiente situé à côté du lit où fut Oregon.

-Mme... Leman, salua-t-il en regardant la pancarte sur le devant de son lit. Vous êtes venu la semaine dernière, c'est bien ça ?

-Oui, oui. On s'occupe très bien de moi, ma foi, je dois l'admettre, vous faites du bon travail !

Elle a 30 ans. Trop jeune. Elle est là depuis trop longtemps... Et on a trop de demandes.

-Pas de douleurs au ventre, des difficultés à respirer ?

-Mon ventre a toujours des tâches noires et il me faut à certains moments mon respirateur, sinon j'étouffe !

-Veillez à ne pas faire trop d'efforts, évitez toute parole inutile et reposez-vous !

-De toute façon je ne bouge pas de ce lit, dit-elle sur un ton de plaisanterie.

Renald prit une inspiration avant de rajouter :

-Quand j'entends "reposez-vous", je parle de chez vous, dans votre gratte ciel. Pour vous dire la vérité, les hôpitaux et cela va de même pour le nôtre, sont surchargés. Nous n'avons plus de lits disponibles. Votre cas n'est pas le plus préoccupant, si je puis dire, alors respectez mes consignes et rentrez chez vous, un infirmier va vous raccompagner.

La concernée se fit toute pâle : yeux écarquillés.

-Vous ne pouvez pas... murmura-t-elle, tremblante. Vous ne vous rendez pas compte, j'ai...

Mais le docteur était déjà partit, interceptant un infirmier dans le couloir.

-Jeremor, tu t'occupes de débrancher et de raccompagner la dame du bloc 504 !

Celui hocha la tête et pénétra dans le bloc. Le couloir était jonché de câbles électriques qui pensaient au plafond jusqu'à toucher le sol pour certains. La lumière crépitait et on pouvait apercevoir les brancards qui occupaient tout le couloir, rendant les déplacements difficiles. Sur ces lits improvisés dû au manque de place, des hommes et femmes de tous âges gémissaient, certains même semblaient morts. Après s'être frayé un chemin sur une partie du couloir, il s'arrêta sur un lit où un homme dans la force de l'âge avait un filet de sang qui lui coulait sous la bouche. Renald sentit son poul, et emmena le lit jusqu'au hall.

-Le patient 7 054 est mort ! Cria-t-il pour se faire entendre à travers tout le chahut des malades. Emmenez le dans la chambre mortuaire !

-On a plus de place là bas ! Lui répondit un docteur qui venait d'entrer.

Renald soupira, ferma les yeux et reprit :

-Enterrez le dans le jardin, vous pouvez le faire ?

-Pas le temps, répondit-il simplement.

Renald regarda autour de lui. Tout le monde était pressé, occupé.

-Ok, brûle le, alors, tu penses pouvoir le faire ?

Il hocha la tête et prit le lit pour l'emmener. Renald alla à l'accueil et annonça à la dame qui s'occupait de la réception :

-Korinne, 2 places se sont libérées, tu peux envoyer les 2 dossiers qui ont le plus besoin d'un lit... Sans qu'ils soient trop âgés, dans ce cas laisse !

Elle hocha la tête d'un air entendue et consulta ses fiches.

-Dr Renald, vous tombez bien ! S'écria un infirmier en faisant rouler un brancard. Cet enfant de 5 ans se met à cracher du sang, il a de grosses difficultés à respirer, vous avez un lit ?!

-Bon laissez tomber Korinne, je m'en charge, déclara le docteur.

Il prit le brancard des mains de l'infirmier et fonça au bloc 504 en évitant soigneusement les câbles et les lits d'autres malades. Une fois arrivé, il prit le corps de l'enfant pour le déposer sur l'ancien lit du défunt Oregon. Aussitôt, il lui brancha le respirateur tout en enlevant le sang de la bouche qui avait arrêté de couler. Avec une crainte, il souleva le T-shirt de l'enfant : son ventre avait des tâches noires. Un des signes de la maladie. Mais le premier symptôme était bien le crachat d'un sang presque noir pour la plupart, d'autres avaient au début de la maladie du sang qui coulait de leur narine. Renald ne perdit pas une seconde, il mit le mouchoir du sang sombre dans la poubelle et quitta le bloc. Un enfant, priorité aux jeunes. Un adolescent pourquoi pas mais vite. Le patient le plus jeune du couloir était une femme d'une trentaine d'années, il prit le brancard et non sans un effort mit le corps de la jeune femme sur le lit de la patiente qui avait quitté de force l'hôpital un temps plus tôt. Je ne vais pas aller à l'autre bout de l'hôpital pour chercher quelqu'un de plus jeune, sinon je ne m'en sortirais pas, il faut gagner le plus de temps possible.

Le docteur lui brancha le respirateur sans tarder et quitta en courant le bloc. Dans le couloir passant de l'obscurité à la lumière toutes les secondes, un malade d'une cinquantaine d'années en sueur, bavant du sang noir de la bouche, le stoppa par le bras de son lit.

-Docteeeeuuuur... Murmura-t-il, s'étouffant avec son sang.

-Ne parlez pas, monsieur, on s'occupera de vous mais ne parlez pas, vous aggravez votre cas, c'est mauvais pour les poumons !

Il aperçut alors Fontelio au bout du couloir, c'était un des seuls pilotes de l'hôpital.

-Fontelio ! Cria-t-il pour se faire entendre

Des crépitements d'électricité eurent lieu, couvrant une partie de sa voix.

-Vous disiez ?! Fît répéter Fontelio en s'arrêtant.

-Il me faut un vaisseau secouriste pour ramener des poumons ! J'ai une centaine de patients qui aurait besoin d'une greffe, mais je doute qu'une telle demande me soit accordé !

-Venez avec moi, il y a un départ de vaisseau dans deux minutes, les seuls poumons disponibles sont à Paumos, dépêchez-vous je crains que vous leur serez utiles là bas !

Renald couru le rejoindre quand il aperçut à un angle du couloir le cadavre de Mme Leman, celle à qui il lui avait dit de retourner chez elle, faute de place. Elle avait vomi du sang, et avait à présent des tâches noires jusqu'au cou. Elle a dû faire une crise de panique devant tous ces malades et cet hôpital qui part en ruine, mauvais ça...

-Renald, vous attendez quoi ?! Insista le pilote.

Celui-ci se dépêcha de le rejoindre, ouvrant la porte de la sortie de secours qui le menait jusqu'au toit. L'air chaud y fit aussitôt éruption. Il y avait de multiples emplacements marqué d'un cercle, mais seul un était encore occupé par un vaisseau de taille modeste pour deux à trois place avec un coffre suffisamment grand. Le vaisseau secouriste était blanc, marqué de deux épées rouges croisées formant un X, une variante du symbole de Xandora. Renald enleva aussitôt son masque, étouffé par la chaleur. Fontelio fit de même tout en actionnant la clef à distance qu'il avait sortit de sa poche. La portière latérale s'ouvrit et tous deux s'engouffrèrent d'un pas rapide, sans perdre un seul instant. Le temps est compté. Plus nous tardons, plus les poumons seront donnés à d'autres hôpitaux. Fontelio mit son casque et démarra le vaisseau tandis que Renald ferma la portière. Aussitôt ils décollèrent et s'élèverent dans le ciel Xandorien.

-Nous quitterons la région de Delaria dans cinq minutes, l'informa le pilote.

-Où sont entroposés les poumons exactement ? Demanda le docteur, assis à la place du co-pilote.

-À l'hôpital de Stendorm, c'est une cité assez importante pas loin de la capitale Terebor, vous pourrez même saluer l'Empereur ! Dit-il sur un ton plaisantin.

-J'y compte bien, lui répondit sérieusement Renald, il faut que j'essaye de convaincre l'Empereur de l'urgence de la situation, s'il ne fait rien, il n'y aura plus de trace de vie d'ici une décennie !

Fontelio le regarda alors, étonné de l'audace du docteur.

-Ma foi, vous pourrez toujours essayer mais votre place est à l'hôpital, vous manquez justement de personnel ! Lui fit remarquer le pilote en évitant de contrarier Renald, car il le connaissait bien, et savait que quand il avait une idée en tête, il ne la lâchait plus.

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