Réponses ?
« - Bon si tu as besoin de quoi que ce soit je suis juste à côté., souffla la jeune femme un léger sourire aux lèvres. »
Elle referma la porte derrière elle sans attendre de réponse. Aussitôt qu'elle eu quitté la pièce, je me ruai dans la salle de bain adjacente et vomissais mes tripes.
Cela faisait un moment que ça menaçait d'arriver et je ne voulais pas dégobiller en présence de quelqu'un ou même sur quelqu'un.
Toute ma trachée était en feu tout comme ma peau qui paraissait bouillante. Les relents de glaires étaient douloureux et violents alors que mon corps se secouait dans des spasmes brutaux.
Ce n'est qu'après quelques minutes que je me calmais et m'écroulais près des toilettes.
Ma vie avait pris ce tournant sans m'attendre. Et ça, c'était difficile. Je n'avais que questions, incompréhensions et injustices qui se bousculaient dans mon crâne.
L'image de ce « rôdeur », comme ils disaient, ne faisait que flasher dans mon esprit. Le monde était devenu comme ça...? Est-ce que mon père, ma mère, mon grand frère étaient devenus ces choses monstrueuses ? Qu'ils dévoraient les gens ?
Sur cette image je poussai une longue plainte. Ma gorge était serrée et j'avais du mal à reprendre mon souffle.
Je plongeai alors ma tête entre mes mains et fondis en sanglots. Les larmes salées dévalaient mes joues creusées par le manque de nourriture. Je n'avais jamais pleuré autant et si violemment ; mes épaules se secouaient brutalement et j'avais dû mal à respirer.
Est-ce que je vais finir comme ça ?
La panique et l'horreur fusaient dans tout mon corps, altérant mes capacités respiratoires alors que mon souffle commençait déjà à devenir chaotique. Ma poitrine se déchira et je poussais un cri de douleur. Mes poumons me torturaient, me tiraillant à chaque bouffée d'air de plus en plus rare.
Je n'entendis même pas la porte de ma chambre s'ouvrir.
Ça me brûlait. J'avais mal. J'apportais une main sur mon torse alors que ma respiration était sifflante et très douloureuse. C'était atroce.
J'allais mourir là, à côté de chiottes pleines de vomi, d'une asphyxie incongrue. Cette mort était sans doute plus belle qu'un décès auquel on aurait le droit aujourd'hui. Paraît-il que l'asphyxie est une mort très laide. Que notre corps est rigide, que la putréfaction est rapide alors que notre peau est d'une teinte bleuâtre. Mais comparé à une mort les entrailles arrachées et pendantes, les yeux blancs comme la mort et pour seul but, de ressusciter et se nourrir d'amas de chairs à son tour est loin d'être davantage séduisante.
De ma vue troublée par les larmes j'aperçus sur le seuil une paire de Rangers beige. Je tendais une main faible vers cette silhouette.
Mon souffle était pire qu'un asthmatique en pleine crise, la douleur était infernale. Si seulement je pouvais juste ne pas mourir seul et que cet homme aux Rangers me tienne compagnie ne serait-ce que jusqu'à mon dernier battement de coeur. J'avais besoin de chaleur humaine.
J'entendis une voix grave jurer. Puis des mains se posèrent sur mon corps, alors que j'accrochais le vêtement de l'homme et le serrai comme si ma vie en dépendait.
« - Respire gamin, calme-toi.
- Je... vais mourir., halètais-je
- Tu vas pas mourir, détends-toi.
- Aide-moi... »
L'homme affermit sa prise sur mon corps.
« - Il faut juste que tu te calmes et que tu respires doucement.
- Je... p-peux pas. J'ai mal...
- Jungkook, tu ne vas pas mourir. Respire.
- Me... laisse-pas m-mourir...»
J'entendis la voix soupirer longuement et se redresser, desserrant son emprise sur moi. Je paniquais directement, gémissant des « Ne me laisse pas », « aide-moi », « pars pas », du mieux que je pouvais et en tirant sur le tee-shirt beige que portait l'homme.
« - Rah... fais chier..., murmura-t-il »
Il se rapprocha de moi pour mon plus grand soulagement et m'allongea sur le carrelage froid de la salle de bain. L'homme aux rangers ne faisait que grommeler des phrases incompréhensibles que je n'arrivais à décrypter que par brides de mots comme « gamin », « chier », « depuis le début ». Ce gamin me fait chier depuis le début.
L'homme enjamba mon corps, s'assit à califourchon et inclina légèrement ma tête vers l'arrière. Puis il approcha son visage du mien. Je commençais à paniquer, voulait-il profiter de mon corps pendant mon moment de faiblesse ?! Je gigotais avec le peu de force qu'il me restait et poussait de petits couinements de peur. Ma poitrine se comprimait encore plus sous la panique.
« - Hé ! Calme-toi gamin ! J'vais pas te violer ! ».
Sous ces mots loin d'être rassurants, je me débattis plus violemment, frappant son torse de faibles coups de poings.
« - JUNGKOOK ! JUNGKOOK ! »
Il plaqua durement mes épaules au sol, glissa ses grandes mains sur mon visage et murmura plusieurs fois mon prénom, cherchant à capter mon attention. Ma vison se troubla, m'empêchant ainsi de le distinguer clairement. Je fermai les yeux, n'écoutant plus que le son de sa voix rassurante. Je relâchai mes muscles tendus et laissai mes bras retomber le long du corps. L'une de ses mains vint pincer l'arrête de mon nez avant qu'il ne dépose ses lèvres contre les miennes. Cherchant un point d'ancrage, j'attrapais ses cheveux à l'arrière de sa tête. Je compris alors de quoi il s'agissait, c'était la première fois que cela m'arrivait, mais j'avais déjà entendu parler de ces crises car une amie en souffrait. De l'hyperventilation.
« C'est un véritable enfer mais on en meurt jamais »
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Après quelques minutes, lorsqu'il détacha ses lippes des miennes, ma respiration était redevenue supportable. Elle était encore désordonnée mais je ne ressentais plus la douleur perçante au fond de ma poitrine. Il porta mon corps faible, et me déposa sur le lit. Mes larmes avaient cessé et j'observais le corps élancé de Taehyung. Je ne l'avais reconnu qu'après qu'il m'ait fait son bouche-à-bouche. Il ne semblait pas si stupide que ça, sachant que lors d'une crise d'hyperventilation il faut faire aspirer du dioxyde de carbone au malade.
Je relevai mon regard vitreux dans sa direction et remarquai qu'il avait troqué son vêtement sale pour un tee-shirt couleur sable, faisant ressortir son teint halé.
Je ne le comprenais pas. Un coup il voulait me jeter dehors, sachant que je ne survivrai pas une journée et de l'autre, il me sauvait d'une crise d'hyperventilation. Son comportement était incompréhensible.
« - On m'a obligé à te faire la visite du camp, donc tu t'habilles, t'enfiles ces chaussures et si c'est pas la bonne pointure tu te démerdes avec Mei., dit-il d'une voix dure. J'reviens dans 15 minutes le temps que tu te douches et que tu te remettes de..., il fixa mes lèvres un instant., ta crise. »
Il quitta la pièce en coup de vent, répandant son odeur boisée dans la chambre close. J'inspirais un bon coup et filai machinalement dans la salle de bain odorante.
Ma blouse verdâtre finit rapidement à mes chevilles, dévoilant mon corps nu et fragile. Et je relevai le regard sur mon reflet morbide. Le miroir était sale et ma peau tout autant. Dire que j'était choqué par ma maigreur serait un doux euphémisme, tous mes os semblaient sur le point de crever ma peau et me réduire à ces tas de charpie qui déambulaient dehors.
Ces mêmes tas de charpie qui avaient tentés de croquer ma chair manquante et dévorer mes entrailles.
Tout ça s'était passé à une vitesse incroyable.
Il y a quelques heures seulement j'étais encore entubé dans un hôpital, nageant dans les limbes d'une inconscience pesante. Maintenant j'ai échappé à la mort deux fois, sauvé par le même homme, je me retrouve dans un camp d'inconnu et c'est très probablement la fin du monde.
Génial.
Absolument génial.
Un quart d'heure plus tard, j'attendais Taehyung, assis sur mon lit. J'avais ôté la blouse pour un large t-shirt noir et je portais enfin un boxer. Ils avaient été rangés dans l'armoire surplombant la petite pièce. J'avais enfin lavé mes cheveux gras depuis 2 mois, et ma peau ne sentait plus cette odeur déplaisante d'hôpital..
Taehyung entra dans la chambre sans frapper et s'arrêta devant moi, m'observant d'un regard insistant.
« - On y va. »
Plus aimable tu meurs.
Je devinais facilement que Mei devait lui avoir fait faux bond et qu'il devait se coltiner la visite seul. Bien fait.
On sortit de la grande demeure, le ciel était magnifique. Les nuages arboraient une douce teinte rosée. Cette vision était réconfortante, comme si toute cette horreur n'empêchait pas la beauté de ce monde désormais dévasté. Que tout n'était pas fini. Je détaillai le ciel un court instant, voulant graver cette image dans mon esprit.
Durant les trois dernières semaines, j'avais pu ouvrir les yeux ; mais un plafond blanc n'était pas ce qu'on pourrait qualifier de passionnant.
J'avais retrouvé une mobilité au fur et à mesure et lorsque je m'étais réveillé, aujourd'hui, mes poumons avaient enfin retrouvé un fonctionnement digne de ce nom et j'avais pu quitter ces machines assourdissantes et retrouver le plaisir de la lumière du soleil qui réchauffe la peau. Lumière qui finalement s'était avérée souligner l'enfer de ce monde, éclairant ces amas de chairs sanguinolentes et mâchoires claquantes.
Un frisson parcouru mon échine et mon souffle commença à s'accélérer.
Calme-toi, respire.
Taehyung m'entraîna vers l'arrière de la ferme. Il me jeta un rapide coup d'oeil qui se voulait discret et fronça les sourcils. Il avait sûrement vu mon trouble qui perturbait ma respiration, mais il n'en fit rien.
« - Bon là comme tu vois, on renforce les barrières., fit-il en désignant du doigts les quelques personnes qui travaillaient.
- Vous avez eu des soucis ?
- L'un des côtés a menacé de céder mais autrement nan. »
Il me montra les plantations qu'ils avaient. Des tomates, du maïs et quelques légumes. Il m'expliqua la raison pour laquelle on avait encore le droit à de l'eau courante en me montrant une citerne.
« - La ferme avait sa propre réserve d'eau avant... tout ça et les canalisations sont basé sur cette citerne, voilà pourquoi tu peux encore te doucher et boire au robinet. Y'a la récup' des eaux de pluies qui se fait là., il désigna du menton un gros réservoir. »
Je hochai la tête.
« - C'est ta maison ?, questionnais-je voulant combler le silence qui s'installait entre-nous. »
Taehyung s'arrêta et me fit face comme si il hésitait à me parler de sa vie. Il avait toujours cet air renfrogné et ce regard de dégout qu'il me portait collé au visage. Il hésita quelques instants, mais reprit :
« - Ma maison d'enfance. J'habitais en ville avant., déclara-t-il simplement
- Comment est-ce que t'as pu revenir ici sain et sauf ?, demandais-je naïvement.»
Son regard s'assombrit et il contracta sa mâchoire. Il continua de marcher et lâcha sèchement :
« - On avait déjà inventé les voitures à cet époque. »
J'étais vraiment un boulet. Il s'était ouvert un peu et voilà que je plombais son miraculeux élan de gentillesse.
« - On mange tous ensemble ce soir, faut se pointer vers vingt heure. Tu peux rester dans ta chambre ou faire ce que tu veux, démerde toi, mais reste loin de ma vue. »
Ca avait le mérite d'être clair.
Taehyung tourna les talons et disparu.
La visite était agréable. La ferme était assez grande et donnait un bon lieu de survie. Les plantations poussaient bien donc ils avaient une bonne réserve de vivres. Ils élevaient des cochons et des poules. Seulement, je n'avais pas qu'apprécié de savoir que j'étais bien à l'abris, cette visite avait été agréable car c'était Taehyung qui l'avait faite. J'avais particulièrement aimé la présence de ce con. Ses remarques et son ton avaient beau être durs et sans émotions, l'aura qu'il dégageait était étrangement attirante.
J'étais vraiment sur les nerfs. Des centaines de questions me bouffaient toujours davantage l'esprit et je n'avais personne à qui en parler. Taehyung ? Je savais que j'allais récolter un joli silence qu'il sait si bien m'offrir. Namjoon ? Je ne le connais pas. Mei ? Elle a l'air gentille mais je ne la connais pas non plus.
J'entrais alors dans la grande maison, tombant directement sur un spacieux salon. La décoration était assez vieille mais chaleureuse. Un vieil homme était allongé sur le sofa. Il sculptait un morceau de bois à l'aide d'un opinel. Des copeaux tombaient sur son ventre rebondi alors qu'il était extrêmement concentré sur son oeuvre.
Bizarrement son visage me disait quelque chose.
Mais qu'importe, j'avais enfin une occasion d'avoir des réponses à mes questions.
« - Tu es Jungkook c'est ça ? »
Sa voix grave me fit sursauter. Il ne releva même pas le regard vers moi, continuant de ciseler. J'acquiesçais.
« Je suis ChinHo, enchanté Jungkook. »
Son visage marqué par l'âge s'étira en un léger sourire amical. Je répondais poliment.
« - Assis-toi, viens qu'on discute un peu ! Après tout, on risque de rester un moment ensemble., rit-il gentiment. Bon alors quel âge tu as mon petit ?
- 19 ans., répondis-je alors que je m'installais timidement dans un fauteuil.
- Ouah ! T'es encore tout jeunot !, il fit une pause avant de reprendre cette fois si en levant les yeux vers moi. Mei m'a confié que t'étais à l'abris dans un hôpital ?
- Oui, j'étais dans un coma artificiel.
- Ouch, pas de bol petit. J'aurais pas aimé me réveiller dans ce monde !
- Moi non plus malheureusement..., fis-je un peu perturbé par son rire, alors que ça n'avait strictement rien de drôle. »
ChinHo semblait un peu naïf mais n'en restait pas moins agréable. Il était gentil.
« - Je peux vous poser une question ? »
ChinHo accepta chaleureusement m'appelant par ce surnom qu'il semblait affectionner : « mon petit ».
« - Comment est-ce que... tout ça est arrivé ? »
Le visage ridé se tendit et son sourire s'affaissa légèrement. Il mit plusieurs minutes avant de répondre me conseillant de ne plus reposer cette question à qui que ce soit car cela ressassait trop souvent de mauvais souvenirs. J'acceptais son conseil, toujours frustré de ne pas connaître la raison de ce bordel complet. J'estimais avoir le droit d'être mis au courant.
« - As-tu rencontré d'autres personnes ?
- Non pas vraiment, j'ai juste adressé la parole à Mei, Namjoon et Taehyung.
- Oh ! Alors tu connais mon fils ? Je suis le père de Taehyung. »
Ses yeux bridés se plissèrent alors qu'il souriait sincèrement comme étant fière d'être le paternel d'un con comme Taehyung. Je comprenais alors pourquoi son visage me disait quelque chose. Certains traits de son visage étaient identiques chez Taehyung. Il est plus aimable que cet idiot dans tout les cas. Je gardais ma réflexion pour moi et m'exclamais sur leur ressemblance troublante.
« - Oui, on nous le dit souvent. Mon garçon est très beau, c'est toujours flatteur pour moi qu'on remarque notre ressemblance.
- Ahaha, j'imagine.
- Mais Taehyung est un vrai petit diable.
- Oui, j'avais cru comprendre., fis-je
- Oh. Toi, il t'a déjà fait subir !
- Il voulait me mettre dehors.
- Ne t'inquiète pas Jungkook, ils sont tous passé par là. Regarde Jimin, ça on peut dire qu'il en a bouffé !, il éclata d'un rire sourd. Mais maintenant ils sont inséparable ces petits. »
J'esquissais un sourire. J'espérais m'entendre avec tout le monde, et repartir sur de bonnes bases avec Taehyung, mais malheureusement, concernant l'autre idiot, j'avais bien peur que cela reste comme ça l'était.
« - Il a juste vécu des choses pas facile. Ne lui en veut pas Jungkook, vraiment. »
Le visage du père s'était assombri et ses yeux semblaient plongés dans le vide comme se remémorant des souvenirs. Pour lui changer les idées je décidais de le questionner sur son bout de bois.
« - Qu'est-ce que vous sculptez ?
- C'est ma femme., fit-il en glissant sa petite oeuvre dans ma main.
- Comment s'appelle-t-elle ?
- Ahreum.
- Elle est belle., affirmais-je en caressant le visage harmonieux fais de bois.
- Elle était magnifique.»
Je semblais avoir un don pour tomber sur les sujets sensibles.
Le changement d'ambiance me confirmait indirectement le départ de sa femme que ça soit dans la mort ou la séparation. Ne voulant pas encore une fois lui faire repenser à des moments lointains et douloureux, je lui redonnai sa sculpture, le remerciai et quittai la pièce.
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Merci beaucoup pour tous vos votes et vos encouragements ! ♡
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