8. Bonne année !

  Un feu de bois ronflait au beau milieu de milliers de grains de sables. Un type, dont les dreadlocks se couvraient par le biais d'une capote, faisait des allers-retours toutes les dix minutes avec du bois de plus en plus gros. Bientôt, le feu s'empara de ses plus longues branches et arrivaient à illuminer le reste de la plage.

  Les enceintes, à la guise du DJ qui composait ses meilleurs mix, nimbaient les abords de la plage. Il y avait un grand homme barbu, d'environ une trentaine d'années, qui surveillant un amas de glacières. Johan s'avança vers lui pour lui demander une Despérados Red.

  Il sent une odeur de vanille juste à côté de lui. Deux belles filles, dont les cheveux ondulés et la peau caramel relevait un somptueux métissage, attendaient leurs tours. Yann mourrait d'envie de tordre son cou, mais il n'avait aucune raison de le faire, au risque de passer pour un chien affamé.

  — Regarde un peu !

  Johan tord son cou pour regarder dans son dos ce qui se tramait. Il y avait une foule qui ne cessait de hurler. Les hurlements strident arrivaient à couvrir le bourdonnement des enceintes.

  Dans une partie d'ombre que la lumière du feu de bois n'arrivait à toucher, un bikini fluorescent se cambrait et semblait bouger ses fesses autour d'une foule enjouée.

  — Bordel de merde ! Je sais pas qui c'est, mais elle sait parler avec son corps ! s'exclame Johan.

  Yann ne répondit même pas, comme s'il savait à l'avance de qui il s'agissait. Il se contente de grincer des dents et regarder Johan d'un air évasif.

  — Allons s'approcher. Y a du mouvement par-là, dit-il en faisant un geste de la tête à Johan.

  — C'est clair qu'en restant à côté de la dame qui vend des glaces et de quoi ce saouler, on va pas s'ambiancer bien longtemps, disait Johan.

  Après avoir constaté qu'elle entendait ses dires, il se contenta de la fixer d'un air béat avant de prendre Yann par le col et l'entraîner en direction du bikini qui semblait exécuter une danse du ventre.

  En s'approchant de plus près, ce n'était pas qu'un simple corps qu'il était en train de voir mais bien une véritable œuvre d'art. Les fesses biens galbées, retenues par un simple fil. Une poitrine bombée, exactement à la bonne taille pour ne pas qu'elle déborde, rebondissait au rythme de son déhanché.

  Il fallut encore quelques secondes pour que Johan reconnaisse Coralie. Lorsqu'il réalisa que ce corps bien formé et élancé était le sien, le garçon manqua de vaciller après que son pied ne s'enfonce dans une crevasse de sable. Il ferme les yeux et se met à souffler en voyant partir la pression qui commençait à gonfler son entrejambe.

  — Allez, relève-toi, imbécile ! lui ricane alors Yann au nez quand Johan réalise qui danse en face de lui.

  — M-mais, balbutia Johan, elle va pas avoir froid avec tous ces types qui versent du champagnes sur son magnif... son corps ?!

  — Je peux parier ce que je veux que tante Marie-Lise n'est même pas au courant qu'elle fait ça, répondit Yann avec un sourire en coin.

  Lorsque le DJ change le tempo de la musique, Coralie se redresse. Johan et Yann, constatant cela, décidèrent de marcher à reculons pour éviter de la croiser du regard. La réaction parfois démesurée de sa grande cousine avait tendance à effrayer Yann. Cependant, leur tactique se retrouve entravée lorsqu'ils butent sur quelque chose dans leurs dos.

  En faisant volte-face, Olive était là. Son grand front reluisait à la lumière du feu de bois qui se consumait à quelques mètres de là.

  — Par pitié, ne dites pas à Coralie que je l'ai suivie ! s'exclama-t-elle d'une voix tremblante.

  Johan et Yann se lancent un regard oblique avant d'éclater de rire.

  — On cherche nous mêmes à l'éviter. Alors t'imagines bien que c'est pas nous qui allons faire ça, disait Yann.

  Il s'avance au niveau de sa joue pour lui faire la bise. Johan, quant à lui, n'arrive pas la regarder dans les yeux, craignant le moment où il allait devoir la saluer, lui-aussi.

  Quand il s'approcha de suffisamment près, une odeur de vanille – cette même fichue odeur – commença à l'asphyxier. Il ne savait pas si les palpitations qui cognaient dans sa poitrine hurlaient à l'aide ou s'ils elles adoraient ce parfum qui lui devenait son familier.

  — Ça va ? demande-t-elle en remarquant sa respiration saccadée.

  Johan tente alors d'arrêter de respirer mais se retrouver bientôt le visage reluisant de sueur.

  — V-vaux mieux que je te check du poing. J'arrête pas de transpirer, c'est chiant ! dit-il avant d'afficher un sourire qui ressemblait davantage à une rage de dents.

  — OK.

  « Mais quelle merde je suis ! Vaux mieux que je te check du poing, et puis quoi encore ?! » pensait-il avant coller son poing contre le sien.

  — Alors, les gosses !!! LA FORME OU QUOIII ?!!!

  Johan, Yann et Olive sursautèrent. Coralie venait de leur tomber dessus, se frayant un chemin discret dans le sillage de la fouler déchainée. Johan jurerait d'avoir entendu Olive susurrer un « Oh non ! » affolé, avant de se glisser dans son dos. Elle accroche ses mains autour des poignets de celui-ci. Il retrouve à nouveau cette sorte de douceur, qui lui donne un étrange regain d'énergie et de courage pour faire face à la grande femme qui se trouvait en face de lui.

  — Eh, Coralie, m-ma cousiiineee ! s'exclamait Yann, en prenant le même ton enjoué qu'elle. T'as vu comment ça pète, ici ?!

  Elle s'avance d'encore plus près avant d'attraper Johan et Yann. Ils manquent de s'étouffer quand elle les étouffent entre ses bras.

  — Vous êtes jeunes ! ON est jeunes ! C'est le moment de profiter, les gars ! Ce soir, y a pas d'histoires de tapettes ! Vous dégotez des petites choues...

  — Ça va être difficile, on est dans la Queue du Hareng.

  Johan venait de poser un froid qui n'eut visiblement aucun effet sur Coralie. Elle avait les yeux qui tournaient, comme si elle était étourdie.

  — Mais noooon, le couz ! T'as juste à demander à la fille « excuse-moi, bébé, t'es l'enfant de qui » et si elle te donne un nom que tu connais pas, tu peux y aller !

  Johan, qui venait à peine de découvrir l'existence de cette fille, était la preuve vivante que l'argument de Coralie était bon à jeter. Après quoi, il commence à se demander si elle n'avait tout simplement pas trop bu.

  Elle pousse un crie de loup-garou avant d'ingurgiter le fond d'une bouteille de champagne qu'elle avait coincé à l'arrière de son bas de bikini. L'attention de Johan l'attirait presque vers le bas de son corps, ayant une brèche suffisamment évidente pour apprécier les fesses de la jeune fille, mais sa peur le força à détourner le regard.

  Yann lance un regard à Johan et fait un geste de la main à Olive, toujours encastrée dans le dos de celui-ci, pour lui faire signe de se montrer. En imite un grognement en tapant du pied.

  — Coralie, qu'est-ce que tu fais ?! Le DJ t'attend !

  Johan plissa des sourcils en voyant le type qui s'approchait. Il le reconnaissait : c'est lui qui avait donné les résultats de la course nautique, l'autre jour. Ce type au teint caramel et aux cheveux crépus. Il se sent soudainement plus léger : Olive lui lâche les poignets et le rejoint à sa droite. Elle le surveillait sans bouger ni même cligner des yeux.

  — Roooh, qu'est-ce qu'il y a ?! On a plus le droit de parler avec ses petits cousins, maintenant ?! grommèle-t-elle dans une voix ralentie par les effets de l'alcool.

  Olive ne savait toujours pas si Coralie était ivre ou non, habitué à cette dégaine abrutissante. Elle comprend que sa sœur est dans les vapes uniquement à partir du moment où cette dernière croise son regard sans lui voler dessus : elle détestait par dessus-tout que sa petite sœur la suive partout, qui plus est dans des événements comme celui-ci.

  — Tiens, tiens ! J'en profite pour te présenter tes cousins ! Voici Johan et voici Yann ! dit-elle en resserrant davantage son étreinte sur eux. Les garçons, lui, c'est Salomon ! Il pêche de ces grosses bébêtes !!!

  Juste après la phrase de Coralie, le visage d'Olive prend un rictus étrange. Johan l'observe se décomposer du coin de l'œil. Était-ce par rapport à ce fameux Salomon ? Ou peut-être la façon dont Coralie pointait étrangement le bout de la bouteille en direction de son front ?

  « Et moi ? » souffle-t-elle dans un murmure presque inaudible que seul Johan avait visiblement entendu. Coralie et Salomon continuent à se taquiner, l'un essayant d'effectuer une prise de catch sur l'autre pour l'envoyer valser dans le sable, sans prendre en compte la question d'Olive.

  — Vous venez avec nous ? demande Salomon, qui avait enfin réussi à plaquer sa comparse.

  Johan et Yann s'échange un regard en poussant un « euh » à rallonge. L'un attendant une décision de l'autre.

  — C'est là-bas que ça va le plus péter, les gars ! Vous ratez tout ! s'exclame Coralie en se relevant, les cheveux emplis de sable.

  « Ne me laissez pas seule ! » murmure à nouveau la petite voix à côté de Johan. Olive garde les sourcils froncés et baisse les yeux vers le vernis reluisant de ses pieds à chaque fois que Coralie continue sa ronde à côté d'elle.

  — On a des brochettes de fruits de mer, si vous voulez, continue Salomon.

  — Super ! s'exclame Johan en caressant son estomac. Je suis chaud, alors !

  — M-moi, je sais pas trop... balbutie Olive. Je suis intolérante aux fruits de mer.

  — Tu sais à quoi cette salope est allergique ? À la vie ! détonne Coralie en la ciblant du regard.

  Toute l'euphorie de la bouteille de champagne venait de se dissiper à partir du moment où sa petite sœur hausse suffisamment la voix pour qu'elle puisse enfin réaliser sa présence.

  — Voyons, les filles ! On ne va pas se battre, ce soir ! Pas vrai, Johan ? bégaye Yann, sentant que la situation commençait à lui glisser des mains.

  — P't'être pas ce soir, comme dit le couz. Mais ça sera demain matin, t'inquiète même pas pour ça ! vocifère Coralie en se rapprochant toujours plus de sa petite sœur.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top