21. Courage, Olive !

   Il arrive sur le flanc arrière du catamaran de Salomon et coupe le moteur. Johan fronce des sourcils, tentant de repérer la trace d'Olive à l'arrive de celui-ci. Le soleil l'aveuglait et la seule chose qu'il perçu fut la couleur blanche du bateau. Confondu à la blancheur du soleil, elle percutait comme un flash de lumière vive, lui éclatant au visage. Ça le brulait, il se frotta les pupillaires pendant qu'elles étaient affaissées. Puis, il remarqua quelque chose d'inhabituel dans le décor. Une couleur rose fluorescente. Un maillot – un bikini, pour être plus précis – apparu en face de la balustrade.

  — Johan ? siffla une petite voix timide.

  — Salut, Olive ! répondit le jeune homme avec un rictus beaucoup trop suspect. Je ne pensais pas te voir ici. Je croyais qu'on était là pour Coralie.

  Accrochée à la balustrade du catamaran de Salomon, elle n'arrivait pas à réfléchir. Johan porte une attention particulière tout en bas.

  « Wow, vu de cet angle, j'arrive à analyser ta voute plantaire. Elle est agréablement courbée. Plus que je ne le pensais. Si seulement y avait pas tout ça de monde, j'aurais essayé de prendre une... Bon, bon ! C'est pas le moment de parler de ça ! Il faut que je trouve un moyen pour te faire monter sur le bateau ! »

  La grande attention qu'il porte à ses pieds lui permettent de voir ses orteils trembler. Ses ongles s'enfoncent dans la coque, menaçant de la transpercer. Bientôt, elle fissure la magnifique pédicure blanche qui arborait son grand orteil. Johan grince des dents en voyant cela et secoue sa tête, essayant à tout prix d'arrêter le massacre.

  La jeune fille cambre son dos – comme si elle s'apprêtait à effectuer un soulevé de terre – puis fixe la devanture du bateau sur lequel Johan commençait à s'avancer. « Non » se dit-elle en fermant les yeux. Olive enjambe la balustrade. Les mains de Layana, bien que minuscules, arrivèrent à perforer leurs ongles dans son torse. « Mince ! Je crois qu'elle vient de m'attraper un téton »

  — Tatie, zé peur !

  — Calme-toi, ça va bien se passer, la rassurait Olive en posant sa tête contre la sienne.

  Lorsqu'elle lui colla un bisou sur le front, Olive ne savait pas si elle tentait de rassurer sa nièce ou son for intérieur.

  — Ils sont tous malades, là-bas ! disait-elle à mesure que son visage se froissait.

  — T'inquiètes pas, je sais. Tu ne risques rien, avec moi.

  — Adrian n'est pas avec toi ?

  — Il est sur le bateau de Salomon, j'en ai profité pour venir te chercher.

  Elle se penche vers la balustrade du catamaran et fronce des sourcils lorsqu'elle calcule la distance qui la sépare du bateau de Carl.

  — Wow, sauter d'ici... ça fait un peu haut, quand même. Je vais attendre que le catamaran coule un peu plus et après je viens.

  — Arrête de trop penser et saute ! dit-il en fixant Olive.

  Cette fois, Johan ne comptait pas se laisser devancer par les méthodes peu orthodoxes d'Adrian. Il serait bien capable de menacer Olive de la tuer si elle hésitait encore à monter. Ses petits yeux fins semblaient se remplir d'eau tandis qu'on voyait ses sourcils froncés à mesure qu'elle observait la surface. Son côté peureuse lui donnait un air « mignon et à la fois séduisant » comme se disait Johan qui ne cessait de l'admirer trembloter sur la balustrade.

  — M-mais, c'est haut !

  — Ne t'inquiètes pas, ça va bien se passer. Tu peux me faire confiance.

  — Tu es sûr ? dit-elle alors que sa respiration saccadée hachait ses mots.

  — Et certain ! s'exclama Johan.

  Il s'approcha au maximum d'Olive, la regardant paniquer du haut du catamaran de Salomon. Il ne savait pas si cela était véritablement utile mais se contenta de tendre ses bras en l'air pour lui faire comprendre qu'il serait là pour la rattraper.

  La salive se coince dans la gorge d'Olive. Elle est à deux doigts de s'étouffer – ou vomir – en voyant la hauteur monstrueuse qui la séparait de Johan.

  Toujours en lacérant Layana contre sa poitrine par le biais de son bras gauche, Olive commence à lâcher la barre. Un doigt après l'autre. Puis, au moment où elle s'y attendait le moins, Layana commence à s'agiter sur elle lorsqu'elle constate le vide qui lui fait face. Olive est entrainée dans le vide.

  Ses talons tournèrent. Elle se retrouva propulsée dans le vide, avec sa nièce dans ses bras et devenait sourds aux encouragements de Johan à cause du vent qui soufflait dans ses oreilles. Ses ficelles de bikini flottent comme une bannière. Elle a l'impression de voler.

  En moins de temps qu'il lui fallut pour commencer à hurler, le vent qui soufflait dans ses oreilles s'estompa. Elle sentit une pression lui claquer le dos. En ouvrant les yeux, elle apercu la balustrade du bateau de Carl juste au-dessus d'elle. Elles avaient réussi à atterrir sur le bateau que conduisait Johan. Layana, agrippée à sa tante, gardait les yeux fermés pendant qu'elle tenait les seins de celle-ci avec une prise presque impossible à défaire sans s'arracher quelque chose.

  — Aïe, aïe, aïe ! marmonna Olive.

  En se redressant, elle fixa sa cheville. Il y avait comme une sensation de pincement qui la lançait. Bientôt, quand elle essaye de se mettre debout, Olive ressent comme une lame lui transpercer cette même cheville.

  — J'arrive pas à me lever ! sanglote la jeune fille en se relâchant complètement sur la coque.

  — T'as vite fait tapé la balustrade avant de tomber, mais rien de méchant.

  — Comment ça, rien de méchant ? Ça me fait trop mal !

  Olive lui tend Layana après que la petit ait enfin réalisé qu'elles étaient bien arrivées sur le bateau de Johan. Elle lui lacère le cou et le garçon se concentre pour ne pas tomber asphyxié à la renverse.

  — Ça me fait trop mal !

  Johan se mord la lèvre en remarquant le visage d'Olive se décomposer. « Tu es tellement mignonne quand tu pleures. J'ai envie de faire pleins de bisous sur ton grand front, mais ça t'énerverait plus qu'autre chose »

  — Tu veux que je te fasse un massage ?

  — Non, non, non ! marmonne-t-elle, en tentant de masser sa cheville, les yeux plissés de douleur. Il me faut une béquille, surtout !

  — Une béquille ? Euh, je crois pas que...

  — Allons rentrer ! J'ai trop mal ! Il faut que je mette des glaçons dessus...

  Johan avait bien tenté de s'approcher, mais le haussement de ton que prenait Olive à chaque fois qu'il faisait un pas en avant l'en dissuadait. « Est-ce que je t'agace ? C'est l'impression que tu me donnes »

  Il fait demi-tour dans la cabine et pose Layana sur une petite chaise en plastique, collée au bas d'un hublot, pendant qu'il tournait le gouvernail à toute.

  Bientôt, le bateau rebrousse chemin et s'arrête à la devanture du catamaran de Salomon.

  — Te revoilà ! J'allais trouver un moyen de retourner sur terre et là je t'aurais noyé !

  C'est Adrian qui hurle comme un cinglé. Coralie ne dit aucun mot, elle semble accroupie derrière lui. Johan penche sa tête pour observer se qu'il s'était passé mais le corps d'Adrian couvrait la posture de Coralie.

  En coupant le moteur, une fois suffisamment proche du catamaran, Johan sursaute en voyant le corps de Salomon complètement ratatiné sur le sol. Coralie, accroupie à ses côtés, donne l'impression de tenir un sachet de glaçons contre son visage.

  Bien qu'il observait tout depuis sa cabine, Johan pouvait percevoir des traces rougeâtres apparaitre sur le sachet transparent que Coralie s'amusait à tapoter sur le visage de Salomon.

  — NON ! Je t'interdis de prendre ce pédé avec toi !

  — Mais, Adrian...

  — Il va rester sur son bateau de merde !

  « Putain de merde. Je suis pas assez fort pour le dissuader de laisser Salomon ici. Il lui a complètement refait le portrait, là ! » Par crainte, Johan se contente d'observer. Il se surprend à trembler des mains, elles glissent du gouvernail.

  — Ne t'en fais pas Coralie...

  Le coquard qui venait de gonfler en une bosse traversait son front et l'empêchait d'ouvrir les yeux. Salomon se contenta de ressentir la présence de la jeune femme à ses côtés pour savoir qu'elle se tenait auprès de lui.

  — Je trouverai un moyen de rentrer...

  — Je peux pas te laisser là ! Adrian est allé beaucoup trop loin !

  — Ça va aller, je te dis. J'ai une issue de secours.

  Il tenta de faire un clin d'œil mais se mit à couiner en se rappelant de la douleur qu'il ressentait au simple fait de sentir ses paupières enflées.

  — Je te jure que si je te revois pas dans le quartier d'ici demain, je te frappe ! s'écria Coralie avant de se relever.

  — Ne t'en fais pas, tout va bien. Je fais le mort jusqu'à ce que vous partez et je vais faire le nécessaire, dit-il en tournant sa tête vers la direction d'Adrian. Si celui-là s'aperçoit que je suis suffisamment lucide pour m'échapper, je suis dans la merde.

  Son visage commençait à prendre une teinte courroucée. Elle sauta d'une traite du bateau avant de regarder Salomon continuer à geindre sur le sol. En passant sur la coque de Carl, Coralie met une claque au visage d'Adrian pendant que ce dernier essayait de lui glisser une main au niveau des hanches.

  — Johan, démarre le bateau ! dit-elle d'un ton agacé.

  En s'installant au fond de la cabine, Coralie aperçoit sa sœur en train de gémir sur le sol.

  — Bah, t'es là, toi ?

  — Tu comptais partir sans moi ?

  — Je t'avais presque oublié. J'espère que t'as pas noyé ma fille, au moins ?

  — Re... regarde bien, elle est sur les jambes de Johan !

  Olive n'arrivait pas à supporter la douleur lui qui torturait la cheville couplé aux remarques de sa grande sœur.

  — Qu'est-ce qui t'arrives, encore ? Ton visage est plus laid que d'habitude.

  — Je me suis foulé la cheville, j'ai mal.

  — Oh, rien d'étonnant. On appelle ça le karma, chérie.

  Les paroles de Coralie eurent comme un effet anesthésiant sur la douleur qu'Olive ressentait. Elle se tourna vers sa sœur en fronçant des sourcils.

  — Ça t'apprendra à essayer de draguer ton cousin, espèce de petite traînée.

  « Pardon ?! Mais de quoi est-ce qu'elle parle ?! » Johan ressentit comme un pincement dans la poitrine. Il continua de piloter sans montrer qu'il portait une oreille attentive.

  — Tu racontes n'importe quoi. Je voulais juste faire une petite balade en bateau. Maman dit tout le temps que je ne sors pas assez.

  — Yann est au quartier. Pourquoi c'est avec moi que t'as besoin de sortir ? Comme par hasard quand Salomon me propose de faire un truc. Tu es un peu trop bizarre pour moi.

  « Je suis sûr qu'elle raconte des bobards. Tu ne peux pas être assez stupide pour t'intéresser à ton cousin Salomon. Non, pas toi. Avec toutes les personnes qu'il y a sur l'île, qui serait assez tordu pour prendre une balade en famille comme une vulgaire tentative de date ? Coralie est trop vicieuse et conne pour interpréter quoique ce soit. Elle a beau être ta sœur, elle ne te connaît pas aussi bien que moi, Olive Cichlidé ».

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