Partie 1 Chapitre 3
Je me réveille de bonne humeur ce matin sans savoir exactement pourquoi. Je descends les marches qui me mènent au salon et une délicieuse odeur de pain grillé me donne faim. Je me précipite sur la terrasse où mes parents prennent leur petit déjeuner en leur offrant un petit sourire. Ma mère embrasse ma joue alors que mon père ébouriffe ma tignasse.
En discutant, j'apprends qu'aujourd'hui nous allons visiter un château dans les environs et je ne verrai donc ni Isa, ni Raphaël. J'essaye de voir le bon côté de la chose en me disant que cette journée en famille me permettra peut-être de mettre des mots sur ce que j'ai ressenti hier soir. J'ai le temps du trajet pour y réfléchir et si jamais j'ai besoin, mes parents pourraient m'éclairer, sans que je ne leur dise de qui il s'agit bien sûr... Je ne me sens pas capable d'aborder ce genre de sujet avec eux parce que ça me parait assez étrange. Oui c'est ça, étrange est le mot qui décrit le mieux ce qui se passe dans ma tête mais aussi au niveau de mon cœur qui cogne un peu plus fort quand je pense à Raphaël.
Au moment du départ, alors que je fourre un livre dans mon sac à dos pour la route, nous sommes rejoints par le grand châtain qui arrive avec un immense sourire. Je regarde mes parents en ne comprenant pas ce qu'il se passe. Je pensais que nous serions simplement nous trois. Je m'approche de ma mère et lui lance un regard interloqué.
-Hier soir, nous avons invité Raphaël à se joindre à nous car il ne connaît pas la région. Je pensais que nous te l'avions dit.
-Et bien non.
-Ça ne te dérange pas?
-Non, bien sûr.
Moi qui voulais profiter de cette journée pour essayer de comprendre toutes ces choses qui se passent en moi. Je vais devoir repousser mon introspection à plus tard et faire comme si rien d'étrange ne me prenait par surprise à chacun de ses regards ou des mots qu'il m'adresse.
Je rassure ma mère en lui faisant un petit sourire entendu. Je me place à l'arrière du siège passager qu'elle occupe en prenant soin de ne surtout pas montrer que quelque chose me dérange. Raphaël dit bonjour à mes parents d'une manière des plus polie et moi je ne lui fais qu'un signe de tête accompagné d'un petit sourire. J'ai l'impression de n'être qu'un gosse mal élevé mais je dois avouer que je ne sais pas comment me comporter avec lui. Il y a cette peur en moi de paraître anormal en disant quelque chose qui pourrait être déplacé.
Je suis un peu chamboulé quand il s'installe à mes côtés et que je m'aperçois aimer l'odeur qu'il dégage, je ne sais pas comment agir avec lui sans paraître idiot comme hier soir devant les toilettes. Il y a toujours eu Isa qui était là pour faire le lien entre nous jusqu'à aujourd'hui. Jamais nous n'avons été seuls une journée entière et même si mes parents sont présents, ça ne sera pas pareil. Je m'installe correctement et attache ma ceinture. Mon casque qui était autour de mon cou se pose sur mes oreilles, mon livre dans les mains je suis prêt pour ces cent cinquante kilomètres. On pourrait croire que je suis asocial d'agir ainsi mais j'ai du mal avec les trajets en voiture si je ne suis pas occupé par une activité, je suis malade. Mes parents ont l'habitude de me voir faire ainsi et je ne prends pas la peine de l'expliquer à mon compagnon de route.
La voiture roule depuis plus de vingt minutes, je suis plongé dans l'histoire du docteur Jekyll et mister Hyde que je lis pour la troisième fois quand une main se pose sur mon genou, ce qui me fait sursauter. J'enlève mon casque qui hurle Come as you are de Nirvana.
-Désolé je t'ai fait peur?
-Non ça va.
Je regarde mes parents à l'avant, voir si l'un deux a vu son geste ou bien ma réaction. Une peur que je ne comprends pas me prend littéralement les tripes. Ma respiration s'accélère alors que je repousse sa main. Elle me gêne, me dérange, m'oppresse, me donne chaud. Mes parents pourraient la voir et je n'aime pas ça. J'avoue que je panique un peu d'avoir une réaction qui serait inappropriée mais c'est pourtant ce qui arrive si j'en juge par le regard de Raphaël.
-Excuse-moi. Je voulais juste te demander si tu étais déjà allé où nous allons.
-Non jamais. Je vais le découvrir comme toi.
-D'accord.
Il détourne son visage pour regarder le paysage défilé, ses bras croisés sur son torse. Il a mis plus de distance entre nos corps, n'a plus dit aucun mot du trajet, ne m'a plus touché de la journée et ne m'a pas regardé une seule fois non plus.
Cette journée a été très longue. J'avais la sensation d'être insignifiant à ses yeux et ça m'a blessé. Je sais que tout était dû à mon comportement durant le trajet et je m'en suis voulu mais je n'ai pas réussi à m'excuser. En rentrant, il a remercié mes parents en discutant avec eux, leur a souri et à même ri avec mon père puis il est parti de son côté sans m'adresser un mot. Je me sens tellement nul d'avoir agi comme je l'ai fait. Son geste n'était ni déplacé ni rien mais sentir sa main sur moi a provoqué des choses que je n'arrive pas à contrôler et je ne voulais pas que quelqu'un le voit et encore moins lui. Si seulement j'arrivais à saisir le pourquoi de mes réactions à son toucher. Jamais rien de pareil ne m'était arrivé avant lui.
Une semaine vient de s'écouler sans que je ne l'ai vu. Les journées, il allait à la plage quand Isa et moi restions à l'intérieur et il restait dans sa chambre quand nous décidions d'aller à la plage. Je ne comprends pas ce qu'il a. Souhaite-il m'éviter ? Je ne lui ai rien dit ou fait qui aurait pu conduire à ce changement radical entre sa première semaine avec nous et la seconde. Isa m'a dit qu'il était plutôt solitaire d'habitude mais ce n'est pas l'impression que j'ai eu de lui depuis son arrivée, pas avec moi en tout cas. Il a toujours été très gentil, souvent à me demander mon avis sur certaines choses ou encore à me donner l'impression d'être comme un ami... Me serais-je trompé sur lui? J'aimerais lui demander si je suis la cause de son éloignement mais je n'ose pas. Peut-être s'est-il rendu compte de mon comportement bizarre lorsqu'il était près de moi.
Ce soir, Isa, ses amis et moi allons à une sorte de bal organisé dans le village. Elle a dû insister lourdement pour m'y entraîner parce que je ne suis pas friand de ce genre d'événements d'ordinaire. Tous les jeunes se retrouvent là-bas et tous les plus vieux sont ainsi tranquilles pour la soirée. Je suis dans ma chambre, devant mon armoire à chercher comment m'habiller. Je décide finalement d'enfiler un jean simple et un t-shirt blanc assez basique. Je me recoiffe vite fait puis je pars chercher Isa chez elle. Je ne sais pas si Raphaël sera là, mais si c'est le cas, j'aimerais lui parler et mettre les choses au clair.
Je traverse l'allée de mon jardin et aperçois Isa m'attendre devant mon portail alors que je devais venir devant chez elle. Il semblerait qu'elle soit impatiente vu les grands gestes qu'elle fait pour que je me dépêche. J'arrive enfin à sa hauteur et constate qu'elle est très jolie et porte une robe à bretelle bleue azur qui lui va super bien. Elle a relâché ses cheveux et a même mis un peu de maquillage.
-Tu comptes draguer ce soir?
-Pourquoi pas! dit-elle en haussant les épaules et me faisant un clin d'œil appuyé.
-Alors bonne chance au futur petit copain.
-Mais euh...
Elle me frappe l'épaule en faisant une moue boudeuse qui me fait rire.
-On y va?
-Non, on attend Raph. Il va nous emmener en voiture.
-Oh... Ok.
Je ne l'ai pas revu depuis notre escapade avec mes parents et je ne sais pas comment je dois agir avec lui. Je suis gêné, intimidé et surpris quand il débarque devant nous au volant de la voiture de la mère d'Isabelle. Ses cheveux sont coiffés en arrière et il a même rasé sa barbe de quelques jours qu'il a d'habitude. Suis-je le seul à n'avoir fait aucun effort pour cette soirée?
Il m'offre un hochement de tête en guise de bonjour auquel je réponds un petit salut en pinçant les lèvres. Comment avons nous pu passer de parler pendant des heures à un simple geste de la tête pour nous saluer ...
Je m'installe derrière lui tout en prenant soin de ne pas trop fixer le rétroviseur intérieur dans lequel reflète son visage et surtout son regard si profond. Je n'ose pas dire quoi que ce soit et réponds par des monosyllabes quand Isabelle m'inclut dans la conversation.
Nous arrivons à la fête de village une vingtaine de minutes plus tard alors que j'ai eu l'impression que des heures s'étaient écoulées. Je suis descendu aussi rapidement que possible quand Raphael a enfin pu trouver une place et n'ai attendu aucun des deux pour me diriger vers la place central où se déroule le fameux bal. Il y a une buvette, des chaises et des tables pour ceux qui veulent manger. Une sorte de podium avec un DJ qui passe les tubes du moment ainsi que ceux des années 80 dont raffolent mes parents. Isa qui arrive une minute après moi, part rejoindre ses amis à qui elle présente son cousin et je me retrouve seul.
Après plusieurs chansons sur lesquels je suis resté à regarder les gens se trémousser, je suis allé m'asseoir sur une chaise blanche en plastique libre, un verre de vodka soda, que j'ai soudoyé au barman, à la main et j'observe Raphaël. Il danse depuis quelques minutes avec une fille, Marie une amie d'Isa. La fille se colle à lui et il lui sourit. Le premier sourire que je lui vois depuis une semaine et il l'adresse à cette gourde. Ses mains s'accrochent à la taille fine de cette danseuse du dimanche quand un slow commence. Ils se rapprochent encore et encore et si ça continue, bientôt, ils vont fusionner.
Les amis d'Isa sont extrêmement bruyants à côté de moi, ils parlent sport, filles ou encore musique mais je ne m'y intéresse pas, mon cerveau n'arrive pas à se décrocher de lui. Même si j'essaye de regarder ailleurs, je finis toujours par revenir sur lui. Ma poitrine se comprime quand je les vois si près l'un de l'autre... Leurs visages sont beaucoup trop près... Leurs lèvres finissent par se toucher et ils s'embrassent sous les applaudissements et acclamations des abrutis qui m'entourent. J'ai un haut le cœur, les yeux qui me brûlent alors j'avale mon verre d'une traite et pars au bar me chercher autre chose pour faire passer ce goût de bile qui est remonté. Je demande une bière au barman. Je n'ai pas l'âge légal de boire de l'alcool mais j'en ai besoin ce soir. Il me regarde de bas en haut, me scrutant quelques longues secondes ou je m'impatiente puis il finit par me la servir en haussant les épaules.
Je reste accoudé ici à avaler cette boisson qui a un goût horrible mais qui me fait du bien parce qu'elle fait taire la douleur. J'en demande une autre mais Isa me rejoint et me supplie de danser avec elle. Le serveur dépose ma commande que j'avale un peu trop rapidement. Ma vue devient floue, je n'ai pas l'habitude de boire mais je pars me déhancher avec elle en me laissant traîner par la main. J'aurais voulu me défouler sur cette piste mais ce sont toujours des slows qui passent... Je n'aime pas ces chansons mièvres qui n'existent que pour que les filles puissent pleurer en les écoutant, se remémorant un chagrin d'amour débile.
Je reste néanmoins avec ma meilleure amie qui m'attrape par le cou alors que je la serre à mon tour. Son petit corps se presse contre le mien, sa tête glisse dans mon cou et nous dansons entourés de tous ces autres couples d'une soirée ou peut-être d'un été. J'essaye d'oublier le pourquoi de mon trouble en me focalisant sur ma partenaire mais c'est assez difficile parce que je me sens observé. Je lève les yeux et rencontre deux billes chocolatées qui me scrutent. Il se tient à quelques mètres de moi, toujours avec cette fille dans les bras. La douleur me vrille la poitrine, la même que j'ai ressenti quand il l'a embrassé. Je détourne le regard et me concentre sur Isa. C'est mieux ainsi. Je baisse la tête pour ne plus avoir à les apercevoir et ainsi faire taire ou mieux disparaître cette étrange sensation. Isabelle tourne légèrement son visage vers moi et nos lèvres s'effleurent sans faire exprès. Son souffle se mélange au mien et je ne sais pas ce qui la pousse à faire ça, mais elle m'embrasse. Un simple baiser inoffensif, tout juste un peu plus appuyé qu'un effleurement.
Ses mains partent dans mes cheveux et cette fois son baiser se fait plus insistant. Ses lèvres bougent sur les miennes et sa langue caresse ma lèvre supérieure. C'est plutôt agréable et je me laisse emporter, aidé par l'alcool qui embrume mes idées, puis à mon tour je décide de presser son corps un peu plus contre le mien en la maintenant par sa chute de reins. Nos langues se trouvent et nous échangeons un baiser plutôt enflammé et sensuel. J'ai déjà embrassé avant elle et à chaque fois je n'ai rien ressenti de particulier, du moins pas ce que ressentent les personnages des livres que je lis. Pas de bouleversement, pas de battements de cœur qui s'accélèrent, pas de passion, juste de la salive qui se mélange à une autre salive. Et cette fois c'est tout aussi plat que les précédentes. Agréable mais ça s'arrête là.
Je mets fin au baiser quand quelqu'un me bouscule. Je n'ai pas pu voir de qui il s'agissait mais ce qui est sûr c'est que maintenant je reprends mes esprits. Une horrible envie de vomir remonte dans ma gorge, j'ai besoin d'air, besoin de partir de là, ma tête tourne beaucoup trop et ce bruit que fait la musique me martèle le cerveau. Je laisse Isa en plan et je pars en courant jusqu'à me retrouver seul dans une ruelle où tout mon repas est expulsé sur le sol dans une flaque immonde.
Je m'éloigne de plusieurs mètres en me tenant au mur tout du long. Je m'assois sur un trottoir, j'essaye de respirer calmement mais je sens une crise de larmes et de panique m'envahir. Je ne comprends pas ce qu'il m'arrive. J'allais bien, j'étais bien mais tout s'est mis à tourner dans ma tête, pas juste à cause de l'alcool mais à cause de lui, à cause d'elle aussi... Et je n'arrive pas à gérer. J'essaye de me relever, mes mains glissent à cause de la sueur, je suis seul et j'ai peur... J'ai mal à la poitrine... J'ai l'impression de suffoquer, peut-être vais-je mourir ici? Seul...
Mes yeux s'ouvrent mais ma vision est floue et je me retrouve allongé. Ma tête repose sur quelques chose qui n'est pas aussi dure que la pierre. Je crois qu'il s'agit d'une paire de cuisses. Une veste est posée sur le haut de mon corps. Je tente de me relever mais quelqu'un me dit de rester là et de ne pas bouger. Je n'arrive pas à reconnaître cette voix , tout est encore embrouillé dans ma tête et pourtant je sais que je la connais. Je me rends compte que j'entends des pleurs, des plaintes, mais surtout je comprends que c'est moi quand une main essuie ma joue et que des paroles rassurantes me sont adressées.
-Chut, ça va aller Val. Reste là. Je suis avec toi, tu n'es pas seul.
J'essaye de me calmer et cette main qui caresse mon dos m'y aide énormément. Une douce chaleur me parcourt depuis la pression de cette main jusque dans les plus profondes cellules de mon corps. J'ai envie de rester ici, ne pas bouger, ne pas partir loin de cette force qui m'apaise. J'entends des pas claquer sur le bitume et s'approcher.
-Il va bien? demande une voix de fille.
-Oui, retourne avec les autres. Laisse-le se reposer un peu.
-Mais c'est mon ami, Raph.
-Je sais mais là il a besoin de calme. S'il te plaît Isa, va là-bas.
Isa semble s'éloigner, ses talons cognent fort contre le sol. La main de Raphaël vient caresser mes cheveux et des frissons se font sentir sur la totalité de mon corps.
-Tu as froid?
-Non ça va.
-Tu vas mieux?
-Je crois que oui.
Je me relève à contrecœur. J'essuie mes joues et plonge mon menton entre mes genoux. Je me sens ridicule d'avoir pleuré ainsi alors je me cache derrière mes bras pour ne pas montrer mon visage hideux à celui qui est avec moi. Sa main vient se poser sur mon dos mais seulement quelques secondes car il la retire rapidement quand je me tends.
-Tu veux un peu d'eau? J'ai une bouteille si tu veux.
Je hoche la tête, j'ai besoin au moins de me rincer la bouche et enlever ce goût horrible de vomi. Il me tend la petite bouteille et je me tourne pour qu'il ne me voit pas recracher, je trouve ça malpoli de le faire devant quelqu'un. Je le remercie dans un souffle à peine audible et je ne suis pas sûr qu'il ait entendu.
-Tu veux rentrer?
-Je vais appeler mes parents.
-Je peux te ramener si tu veux.
-Non. Ta copine.
-C'est pas grave, je la verrai plus tard ou une autre fois.
-Non. Je vais me débrouiller. Tu peux aller rejoindre les autres.
-Je ne veux pas te laisser comme ça.
-C'est bon, je vais ...
-Écoute, je ne partirai pas. Si tu ne veux plus que je t'approche, dis le mais je refuse de te laisser comme ça, tout seul et pas en forme.
-Je n'ai jamais rien dit dans ce sens.
-Non mais tout porte à croire que tu ne me veux pas auprès de toi.
-Je ... Si jamais je t'ai dit ou fait quelque chose de méchant je m'en excuse. Ce n'est pas ce que je voulais. Je suis désolé.
-Je le croyais.
-Tu avais tort. C'est toi qui a décidé de t'éloigner et de ne pas être avec nous cette semaine. Je n'ai jamais voulu ça.
-Désolé. Je pensais que c'était mieux.
-Mieux? Pourquoi?
-Rien, laisse tomber. Viens je te ramène.
-Je ne veux pas te priver de ta soirée. Je vais me débrouiller, vraiment.
- Ecoute, je te le demande comme une faveur. S'il te plaît laisse-moi te ramener. Je ... disons que j'aimerais échapper aux griffes de Marie. Elle est gentille mais très collante, dit-il avec un petit sourire.
-Je comprends. D'accord.
Raph m'aide à me relever bien que ma tête tourne encore. Je tangue et me raccroche à ses épaules. Son bras passe autour de ma taille et il me serre contre lui pour m'éviter une chute. Je baisse la tête, honteux de ce que mon cœur, qui bat frénétiquement, me fait ressentir quand je suis si proche de lui. Je m'excuse mais il me sourit en disant que ce n'est pas grave. S'il savait . Bien sûr que c'est grave parce que ce n'est pas normal.
Nous nous dirigeons vers sa voiture, son bras est autour de mes épaules et je dois avouer que j'aime ça. Ce sentiment d'être protégé est assez bizarre mais il me plaît aussi énormément. Il m'installe sur le siège passager et me passe la ceinture avant de la boucler. Son corps si près du mien fait palpiter mon cœur déraisonnablement, surtout quand je sens l'odeur de son parfum qui m'enivre tel l'alcool que j'ai bu avant. Isabelle s'avance vers nous en appelant son cousin. Il referme la portière et s'approche d'elle. Il lui parle tout bas, je n'entends pas leur échange mais elle me regarde puis hoche la tête. Il revient quelques secondes après et s'installe derrière le volant en m'offrant un sourire rassurant. Je n'ai pas la force de lui demander ce qu'ils ont bien pu se raconter. Je savoure simplement cet instant que je vole éhontément à la fille avec qui il aurait dû être.
Le trajet s'effectue rapidement, nous n'habitons pas loin du village. Je me sens tellement gêné de m'être montré à lui ainsi que je ne parle pas, lui non plus et c'est tant mieux parce que je ne sais pas si j'aurais été capable de lui répondre sans vomir à nouveau. Voyant que je n'étais pas d'humeur à discuter il a alors mis la radio en fond, ça m'a aidé à ne pas me focaliser sur ce qui venait de se passer et j'ai pu me détendre un peu. Arrivés devant ma maison, il coupe le moteur, se détache et vient ouvrir ma portière. Il m'aide à m'extirper et m'accompagne jusqu'à ma porte.
-Tu vas réussir à monter jusqu'à ta chambre ou tu veux que je t'aide?
-Non merci, ça devrait aller. Et euh... Merci pour ... tu sais.
Je baisse la tête encore honteux qu'il ait pu assister à ce spectacle horrible venant de moi.
-De rien.
Le silence s'installe entre nous, il n'y a aucun bruit à part quelques animaux nocturnes par là. Raphaël reste devant moi, il triture ses doigts sans doute en attendant de pouvoir me dire au revoir.
-Au fait, je te rends ta veste. Merci encore.
-Garde la, le temps que tu sois rentré et que tu puisses te changer.
-D'accord, je te la rendrai demain.
-Ça marche.
Il me sourit et je le lui rends à mon tour, le mien est bien moins grand et bien moins joli que le sien mais il est sincère. Nous ne sommes apparemment plus fâchés même si je ne sais toujours pas exactement ce qu'il s'est passé pour qu'il ne me parle plus et même m'évite pendant la semaine. Nous nous reverrons donc demain, je suis soulagé.
-Au fait est ce que tu pourrais ne pas en parler à mes parents s'il te plaît.
-Promis. Mais ça t'arrive souvent ou bien c'était les bières?
-Ça m'est déjà arrivé une fois... mais l'alcool n'a pas aidé.
-Je vois. Prends soin de toi. Bonne nuit Val.
-Ouais, bonne nuit à toi aussi Raph.
Il se penche vers moi et embrasse ma joue, assez près de la commissure de mes lèvres. Il se recule, me sourit et repart à sa voiture sans se retourner alors que je reste sans esquisser le moindre mouvement sous la surprise de ce baiser.
Je passe mes doigts là où sa bouche s'est posée. Et malgré que ce n'était pas un baiser sur mes lèvres j'ai ressenti ces choses étranges, mon cœur qui s'est mis à battre plus vite, mon estomac qui s'est retourné, mes joues qui ont chauffé et surtout un immense plaisir et désir de recommencer. J'ai même plus qu'une envie de recommencer. J'aimerais sentir ses lèvres sur les miennes, j'aimerais goûter à son baiser. C'est la première fois que je ressens ça pour quelqu'un et je dois avouer que c'est déroutant parce que je n'aurais imaginé le vivre avec un autre garçon.
Sa voiture s'avance dans notre allée et s'éloigne, mais malgré mon passage à vide je suis heureux.
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