Chez Fanny (suite)

Fanny m'attendait appuyée à un portail bancal à l'entrée d'une grande ferme, elle m'a interpellé alors que j'accrochai mon vélo. "Salut Laurie, tu as trouvé sans mal."

─ Ça a été, mais merci de m'avoir attendu. Tu as un nouveau pull, ai-je fait, en l'examinant.

─ C'est un vieux qui me serre mais je pensais que tu l'aimerais bien et j'ai jeté mes deux gilets. Je compte vraiment sur toi pour cet après-midi, on va trier mes fringues.

─ Promis !

─ Comme je l'avais crains je suis en tête dans la liste des loosers, dit Fanny.

La liste comportait une vingtaine de nom et je n'en faisais pas parti, mais on se demandait bien pourquoi. C'était extrêmement injurieux car ils avaient collé des affiches partout dans le lycée et le proviseur ne les avait pas fait enlever. C'était nul, il laissait se produire ce genre de chose et on aurait même dit qu'ils les encourageaient. C'était un sale type qui avait été viré du parti politique de ma mère car il avait harcelé plusieurs femmes dont ma mère. La seule chose que je ne comprenais pas, c'est sa peur de la mère de Fanny.

Pour le concours des ploucs, ils avaient fait un classement avec des catégories, Fanny avait été proclamée la gagnante toute catégorie, en second ex-æquo il y avait Yvan, un garçon mal dans sa peau souffrant de pelade, cela voulait dire qu'il perdait des morceaux de peau à cause d'une maladie dermatologique. Il y avait la gagnante gothique Maya, la plus pouf c'était la pauvre Aurélie Martin qui avait quitté le lycée enceinte.

─ Je m'en fiche de toute façon, dit Fanny.

Elle m'épatait par son courage et était hyper motivée par son régime. Fanny me considérait comme une experte en fringue et en beauté, bien a tort. Cependant ma mère avait du gout et je lui répétais ce qu'elle n'avait cessé de me seriner, bien que cela me faisait étrange de conseiller quelqu'un.

Elle avait joué le jeu et mettait ses lentilles. Le vendredi nous avions longuement parlé de nos mères, de nos goûts.

Il n'y avait qu'une chose que je regrettais c'était de ne pas oser lui parler de mes voyages dans le temps, je m'en voulais de ne pas lui faire assez confiance.

Fanny poursuivait son laïus : Tu aurais vu la tête de ma mère quand je lui ai demandé de ramener de la soupe de la maison de retraite. Mais elle l'a fait, et elle a été stupéfaite de me voir en manger. D'ailleurs ce n'est pas si mauvais, elle en mange aussi et elle va nous ramener aussi les restes de fruits et des yaourts puisque je veux manger équilibré.

─ Vous mangiez quoi en dessert avant ?

─ Des gâteaux, des glaces, les fruits coutent cher et ça ne tient pas le ventre, et toi ?

─ Plutôt laitage ou fruits.

Fanny a poursuivi sur sa lancée : " En tout cas je fais attention depuis 4 jours et je me sens déjà beaucoup mieux."

Je lui ai tendu le sac que j'avais apporté pour elle. "J'ai fouillé chez nous et j'ai trouvé des vêtements qui pourrait te plaire. "

Elle a lâché le portail et m'a embrassé merci encore.

─ C'est calme ici ai-je fait examinant les environs, des champs à perte de vue.

─ Oui que des fermes aux environs. Le chemin là-bas mène à la ferme de Rosalie Meunier et si tu retournes vers Fleurville à gauche, le chemin c'est le vignoble de la famille de Petula.

─ Viens, a-t-elle dit en me désignant la maison.

La cour de ferme était boueuse, les bâtiments mal entretenus et une multitude de vieilles cagettes, objets abandonnés trainaient. La maison basse avait une porte et trois fenêtres en enfilades. L'ensemble était miteux, Fanny m'a fait signe de la suivre et a ajouté, ma mère travaille, on sera tranquille.

Chez Fanny on rentrait directement dans la cuisine avec des murs bruns et un carrelage de tommette brique. Une table en bois avec une nappe cirée à carreau rouge et le long d'un des murs des éléments de cuisine disparates en bois entourait un vieil évier et une gazinière. Je me suis forcée à penser ce n'est pas rouge mais brique, mais je ne me sentais pas très bien. La porte vitrée était la seule source de lumière avec une petite fenêtre au-dessus de l'évier qui donnait sur l'arrière de la maison et les champs, malheureusement la vue était bouchée par un rideau orange. La pièce était en bazar avec de la vaisselle non faites, des reliefs de repas.

Cela m'a fait penser à mon oncle Nicolas, maniaque et qui m'avait sans doute transmis un peu le virus, tout comme Babeth. Quand à ma mère elle voit un nid à microbe dans toute chose.

Mon oncle est prof d'anglais et Sophie sa femme traductrice, dire qu'ils sont sévères est un euphémisme et les vacances chez eux c'est ménage à fond tous les jours que ce soit dans leur appartement à Paris ou dans la maison de campagne dans le Surrey en Angleterre. On s'y met à trois et ils nettoient même les prises aux cotons tiges et le soir on passe à nouveau la serpillère. Ma mère les a diagnostiqué maniaque compulsif.

Une fois quand j'étais petite, je m'étais mal assise dans un fauteuil et mon oncle m'a fait ressortir 4 fois de la pièce et recommencer, jusqu'à ce que je m'assoie correctement et j'ai obligation de bien parler anglais avec l'accent d'oxford.

Ils n'ont pas eux d'enfants, ma tante est stérile, ce qui explique peut être leur dureté. D'après ma mère s'ils avaient eu des enfants, ils auraient été beaucoup plus tolérants.

J'étais la seule petite fille dont la mère lui recommandait de ne pas être sage chez son oncle et sa tante et de ne pas trop obéir. Je me suis habituée à leur sévérité et je ne fais plus attention. Tout est éducatif chez eux et ils m'emmènent dans les musées et à toutes les expositions. Ce qui est sympa, c'est qu'il me parle de mon père et bien sûr on va souvent en Angleterre.

Ils m'ont proposé de faire un autre procès à ma mère pour demander ma garde, mais j'ai pu les dissuader dans leurs projets, cependant par leur attitude ils ne favorisent pas la paix familiale. Ils critiquent constamment ma mère et j'ai dû leur demander d'arrêter même si moi aussi elle m'énerve.

Ma mère ne me parlait jamais d'eux, essayant sans doute d'être fair-play, mais elle s'était contentée de me rappeler que théoriquement mon oncle n'a pas connu mon père puisqu'ils ont été séparés à l'orphelinat alors que mon père avait 8 ans et mon oncle 11 et ils n'ont plus jamais vécu ensemble.

En tout cas si mon oncle avait vu la cuisine de Fanny il en aurait fait une attaque.

Sur le côté gauche le mur était coupé avec une arche qui donnait sur une pièce encore plus encombrée que la cuisine, avec un lit comme ceux qu'on trouve dans les hôpitaux et un capharnaüm monstre.

─ Ne fait pas attention ma mère ne range rien, a dit Fanny en me désignant la pièce, c'était notre salon mais c'est devenu la chambre de ma mère, car elle ne peut plus monter l'escalier. Le problème c'est qu'on a qu'une seule salle de bain et elle est là-haut.

Je n'ai pas demandé comment elle se débrouillait et j'ai enlevé mon imper et posé mon sac.

Je peux regarder les fringues que tu m'as apportées, a demandé Fanny.

─ Vas y regarde si cela te plait, c'est pour toi.

Fanny ouvrit le sac et eu l'air ravi en examinant la veste en cuir, les foulards et les sacs de marque.

─ C'est super. Génial les sacs !

─ J'ai plein de choses chez nous et on peut récupérer des trucs sympas. En fouillant dans nos placards, j'avais trouvé une veste en cuir, un gilet noir et un gris et deux foulards des vêtements de marque, indémodable et de taille 52.

Pour les sacs de marque, c'est une histoire entre ma mère et moi. J'ai toujours la besace de toile bleu marine que mon père m'a offert en CM2, je l'ai réparé et cousu a de nombreuses reprises et même teintée. Ma mère essaye de me tenter pour que j'en change, avec des sacs dont un Longchamp, ils seront utiles à Fanny.

Fanny a retiré les foulards et sorti les gilets Burberry, Ils sont super bien, ils étaient à qui ?

─ Pas la moindre idée mais ils sont revenue à la mode en tout cas.

─ Merci Laurie mais tu les vends combien ?

─ Je te les donne si ça te plait. Tu veux qu'on range d'abord ou je te coupe les cheveux ?

─ Tu es sérieuse.

─ Oui je suis venu pour cela à l' origine. C'était agréable d'être utile, j'avais regardé les coupes de cheveux sur internet et j'avais repéré celle qui irait à Fanny, un dégradé sur cheveux mi long pour épaissir sa chevelure et je me sentais capable d'y arriver.

Soudain la petite cuisine s'est assombrie et un homme nous regardait par la fenêtre.

─ Allez-vous en, cria Fanny vous n'avez pas le droit d'être là. L'homme haussa les épaules, cracha par terre et reparti lentement vers son tracteur. "Il est vraiment bizarre, a dit Fanny en frissonnant, c'est lui qui a repris la ferme et il traine tout le temps devant chez nous."

─ C'est vrai qu'il m'a fichu la trouille, ai je fait.

Fanny nous a servi deux verres d'eau.

Pendant ce temps j'ai dégagé la table de cuisine puis j'ai sorti mon modèle et installé une chaise.

─ Je me lave les cheveux ? a demandé Fanny en regardant mes préparatifs.

─ Tu les laveras après, car c'est plus facile de couper sur cheveux secs, comme ça j'ai la bonne longueur. Je lui ai démêlé longuement les cheveux qui lui arrivaient en bas des reins. ─ J'y vais ?

─ Oui.

Je les ai coupés sous les épaules et ensuite par mèche j'ai fait des longueurs dégradées en suivant mon modèle, j'ai pris mon temps mais le résultat n'était pas mal du tout. Les cheveux avaient gagné en volume et cela lui allait bien.

Elle se regarda et sourit. C'est beaucoup mieux, tu es très douée.

─ Il ne faut rien exagérer.

─ Je vais aller me laver les cheveux ?

─ Oui va y, comme ça je pourrais vérifier la coupe et moi je vais ranger ta cuisine pendant ce temps

─ Merci Laurie tu es super sympa.

─ Attends de voir si cela te plait ! Il est où ton aspirateur ?

Elle m'a montré le rangement, sous l'escalier, où on trouvait tout le nécessaire pour le ménage.

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