[CHAPITRE 29] Ensemble.


―Aïe ! Ron ! Tu m'as marché sur le pied ! souffla Hermione d'un ton exaspéré.

―Avance un peu plus vite alors ! lui rétorqua le garçon sur le même ton.

―Chut ! fit Harry.

La jeune fille soupira de nouveau lorsque le pied du rouquin vint encore écraser le sien, mais cette fois-ci, elle ne fit pas le moindre commentaire. Ils approchaient du Hall d'entrée, et vu l'heure tardive qu'il était, il y avait de forte chance pour qu'ils tombent sur un professeur, et si jamais celui-ci ne remarquait pas les trois paires de pieds déambulant dans les couloirs, alors ce serait leurs discussions qui finiraient par les trahir.

Mais fort heureusement pour eux, ils ne croisèrent personne et purent ainsi sortir dans la nuit noire du parc, où personne ne remarquerait alors les trois paires de pieds qui ne semblaient rattachées à aucun corps. En effet, les années passant, ils avaient tous les trois beaucoup grandis, et la cape d'invisibilité de Harry était devenue légèrement trop petite pour qu'ils s'y cachent tous ensemble. Une personne pouvait facilement tenir dessous sans problème, mais le trio avait refusé de se séparer pour l'escapade de prévue cette nuit.

Qui s'annonçait un peu périlleuse depuis les dispositions prises par Ombrage de demander aux professeurs d'assurer la surveillance du château. Bien entendu, les préfets étaient encore sollicités, mais l'heure de leur ronde était achevée depuis bien longtemps, et les professeurs avaient alors pris la relève.

La lune brillant haut dans le parc, éclairant le chemin qu'ils connaissaient sur le bout des doigts pour l'avoir arpenter de nombreuses fois au cours des quatre dernières années, leur empêchant ainsi d'utiliser la lueur de leurs baguettes, et ainsi prendre le risque de se faire repérer. Certes, il y avait peu de chances pour qu'ils croisent quelqu'un dehors à cette heure-ci, mais Hermione avait tenu à ne prendre aucun risque. Ce qu'ils avaient prévus de faire était déjà un peu dangereux sans Hagrid, alors en plus se faire voir...

De nuit, la Forêt Interdite parut plus dangereuse au trio qui hésita quelques secondes, arrêtés à sa lisière, essayant d'occulter les hurlements de loup-garou, et d'autres créatures inconnus vivant dans les bois. Hagrid aurait été là qu'il les aurait rassuré, avant de prendre la tête de leur petit cortège, mais ce soir, ils allaient devoir se débrouiller sans lui.

―Allez, on y va, fit Harry.

Hermione sentit son angoisse se décupler lorsqu'ils franchirent le seuil des premiers arbres, et aussitôt, un sentiment de claustrophobie s'empara d'elle. Sa respiration devint plus saccadée, et même la main de son meilleur ami qui se glissa dans la sienne en signe de réconfort, ne la rassura pas. La Forêt l'avait toujours inquiété, depuis cette nuit en première année où ils avaient été contraints d'y suivre Hagrid pour une punition.

Cette même nuit où Harry avait rencontré Lord Voldemort pour la première fois.

―On voit rien ! fit Ron quelques minutes plus tard. Si on continue comme ça, on va finir par se perdre !

Hermione jugea qu'ils avaient assez marchés pour devenir complètement invisibles aux yeux du château, et d'une main tremblante, sortit sa baguette de l'intérieur de sa poche, avant de chuchoter le sortilège de la lumière.

Lumos !

Aussitôt, les arbres, les racines et les pierres environnantes s'illuminèrent, et ils changèrent de direction en constatant qu'ils fonçaient droit sur un tronc d'arbre. Ron gémit doucement à sa droite, lorsqu'ils passèrent non loin du terrier d'Aragog, l'araignée géante qu'Hagrid avait élevé ici en secret, et que le garçon avait un jour rencontrer.

L'un des souvenirs les plus terrifiants de sa deuxième année.

―On est bientôt arrivés, commenta Harry.

En effet, l'amas de terre servant de cachette à Graup, le demi-frère géant de Hagrid, commença à se dessiner non loin, grâce à la lueur de la baguette de Hermione.

―On aurait dû faire ça en plein jour, insista Ron d'un ton dépité. Il va nous prendre pour son dîner et nous dévorer tout cru.

―Mais non, essaya de les rassurer Harry mais ses deux amis perçurent sans mal les tremblements de sa voix. Il nous a déjà vu alors...

Le grondement qui s'échappa de la masse difforme allongée à même le sol les fit sursauter tous les trois, et un gémissement pas très viril échappa à Ron. S'ils s'étaient trouvés là en plein jour, Hermione aurait pu constater que le visage du garçon avait brusquement pâli et qu'un film de sueur avait recouvert son front.

Graup, profondément endormi, ronfla de nouveau, et les arbustes environnants tremblèrent tour à tour. Une petite souris, cachée dans un massif, s'enfuit rapidement, et Hermione l'observa jusqu'à qu'elle se soit entièrement confondue avec les ténèbres, avant de trouver la force de regarder en direction du demi-géant. Elle sentit aussitôt la tristesse l'envahir en repensant à la raison principale de leur venue ici.

―Peut être qu'on devrait revenir une autre fois... commenta Ron. Il dort, et je suis sûr que ce n'est pas une bonne idée de le réveiller.

―Hors de question de revenir ! frissonna Hermione. On a qu'à le réveiller...

Doucement, elle laissa la cape d'invisibilité glisser sur ses épaules, et fit quelques pas en direction de Graup, toujours autant endormi. Elle jeta un regard par dessus son épaule, mais Harry et Ron avaient jugés préférable de rester cacher, ce qu'elle ne trouva pas du tout courageux de leur part et guère rassurant.

Prenant une profonde inspiration, elle se mit de nouveau en marche, et une fois à hauteur du géant, observa les alentours, cherchant des yeux un objet susceptible de lui faire gagner la confiance de Graup. Elle sourit en constatant le désordre qui régnait dans la forêt, et songea que, quelle que ce soit l'espèce, les mâles ne seraient jamais férus de rangement. Au bout d'un moment, elle finit par repérer un vieux guidon de vélo rouillé, auquel était restée miraculeusement accrochée une sonnette.

―Hermione... souffla Ron.

―Je sais ce que je fais.

Graup gesticula dans son sommeil, et d'une main tremblante, essayant de ne pas faire le moindre geste brusque, elle attrapa le guidon entre ses deux mains, et retourna auprès de ses amis. Après leur avoir ordonner de sortir leur baguette, au cas où, elle enclencha la sonnette qui résonna bruyamment dans le silence oppressant de la forêt.

Une fois.

Deux fois.

Dix fois avant d'obtenir une réaction de la part du géant.

Le trio se recula précipitamment lorsqu'un nouveau grondement monta du demi-géant, qui se mit à bouger dans tous les sens, avant d'ouvrir les yeux, et de les poser immédiatement sur Hermione qui s'en voulut presque de ne pas être retourner se cacher sous la cape. Elle sourit timidement, ne sachant pas trop comment réagir, puisqu'il s'agissait de sa première rencontre avec Graup sans Hagrid pour les protéger.

Le demi-géant se redressa sur ses coudes, sans cesser de fixer la jeune fille du regard, avant de constater que ce n'était pas elle qu'il observait, mais l'objet qu'elle avait entre les mains. Délicatement, sans le moindre geste brusque pouvant effrayer la créature, elle fit carillonner plusieurs fois la sonnette, au plus grand ravissement de Graup, qui se redressa d'un seul coup, venant lui arracher la guidon des mains.

Elle essaya de ne pas sursauter lorsqu'il s'approcha d'elle, ni d'esquisser le moindre mouvement de recul pouvant inquiéter la créature, se contentant de l'observer alors qu'il se laissait lourdement tomber au sol, avant de s'amuser avec la sonnette, comme Hermione l'avait fait auparavant, arrachant un sourire attendri à la jeune fille, et une grimace à ses amis.

Graup lui lança un regard, tout en continuant de faire retentir le carillon, et elle ne put s'empêcher de le comparer à un petit enfant. Un enfant en pleine découverte du monde, et qui avait tant besoin de soutien, d'aide et d'un accompagnement pour lui apprendre toutes ces choses nécessaires à sa survie. Maintenant que Hagrid n'était plus là pour le faire, elle ressentait comme son devoir d'endosser ce rôle, même si l'enfant mesurait plus de trois fois sa taille et pouvait la tuer d'un simple coup de pouce.

―Graup... finit-elle par dire après quelques minutes de silence. Graup, il faut que je te dise quelque chose.

A l'entente de son nom, le géant releva la tête du guidon, et jeta un regard étonné à la jeune fille. Hermione entendit Harry et Ron se rapprocher d'elle, et elle espéra qu'ils aient leurs baguettes en main, car elle craignait que ses prochaines révélations ne mettent la créature très en colère.

―Hagrid nous a demandé de veiller sur toi, dit-elle.

―Hagrid, répéta Graup d'un ton bourru.

―Oui, Hagrid, sourit-elle. Il nous a demandé de veiller sur toi s'il devait lui arriver quelque chose.

―Hagrid !

―Il a... hésita-t-elle. Il a été obligé de partir de l'école. C'est pour ça qu'il ne peut plus venir s'occuper de toi. Mais ne t'inquiète pas, nous on sera là pour toi.

Elle n'était pas certaine que Graup ait compris tout ce qu'elle venait de dire, puisqu'après tout, il ne savait pas très bien parler, mais elle sut qu'il avait saisi l'essentiel en voyant de grosses larmes se former au coin de ses yeux.

Et cette vision renforça sa haine envers Ombrage.

[...]

―Tu ne dois avoir aucune hésitation lorsque tu prononces ton sortilège, expliqua calmement Hermione à un Neville très attentif. Il faut que tu sois clair et audible, et ça se fera tout seul.

―Si seulement c'était aussi simple, soupira le garçon.

―C'est simple, le contredit Hermione. Il faut que tu aies confiance en toi.

L'ambiance qui régnait dans la salle commune des lions n'était pas propice à des révisions, mais Neville avait quémander l'aide de son amie pour réviser son examen de sortilèges, dont l'épreuve théorique serait la première à ouvrir le bal des BUSE. La jeune fille avait accepté avec plaisir, comprenant le besoin presque vital du garçon de parvenir à réussir ses examens.

―Vas-y essaie, lui conseilla-t-elle avec un sourire.

Timidement, Neville approcha sa baguette de la grenouille posée sur une des tables de la pièce, et prononça doucement la formule magique destinée à rendre mutique l'animal, mais le croassement qu'elle lâcha quelques secondes plus tard arracha un soupir de dépit au garçon.

Mais Hermione, elle, ne perdait pas espoir. Elle savait son ami très intelligent, mais la pression que mettait sa grand-mère sur ses frêles épaules, qui avait espoir de le voir intégrer les Auror comme son père, l'empêchait de croire en ses capacités. Et même s'il n'excellait pas dans toutes les matières, elle était certaine qu'il avait ses chances d'obtenir ses BUSE.

Et elle allait tout faire pour l'en convaincre.

―Recommence, lui ordonna-t-elle.

―Je ne vais pas y arriver, se lamenta Neville.

―Si. Recommence.

La deuxième tentative ne fut guère plus fructueuse, mais elle ne laissa pas tomber pour autant, et attendit patiemment que la grenouille ne devienne muette, avant d'annoncer au garçon qu'il avait réussi. Le sourire qui illumina son visage rond la réconforta dans l'idée qu'il avait toutes ses chances pour avoir un brillant avenir.

―Il va falloir que tu t'entraînes encore et encore pour le maîtriser à la perfection, ajouta-t-elle.

―Je ne pensais pas y arriver, avoua Neville en lui offrant un sourire de remerciements.

―Tu peux y arriver, j'en suis sûre, répondit-elle avec une assurance qui réchauffa le cœur du cinquième année.

―Merci pour tout Hermione.

―Je t'en prie, sourit-elle.

―Non, Neville, pas toi ! s'exclama soudainement une voix indignée dans le dos de la jeune fille. Ne me dis pas que toi aussi tu as succombé au syndrome Hermione Granger !

Hermione sourit avec amusement en reconnaissant la voix de Fred qui fit face à Neville, une expression indignée sur le visage, qui fit brusquement pâlir celui du cinquième année, qui jeta un regard perdu à son amie. En riant légèrement, la jeune fille donna un coup de coude dans les côtes du rouquin, qui éclata franchement de rire.

―Oh je vois, fit Neville en rougissant.

―N'écoute pas cet idiot, fit Hermione. C'est très bien que tu révises pour tes BUSE.

―Nous on a rien révisé, contredit Fred en prenant place sur la chaise près de celle de la Préfète. Et on a quand même réussi à obtenir quelques BUSE !

Le regard de Neville se mit à pétiller, ce qu'Hermione jugea très mauvais signe. Avec un regard noir, elle intima à son petit-ami de s'en aller, surtout si c'était pour des choses aussi stupides.

―Bon d'accord, soupira le septième année. Vu que Miss Granger n'aime pas qu'on la contredise, alors je vais te dire de réviser. C'est peut être la meilleure chose à faire.

―Exactement ! s'écria Hermione.

Au regard qu'il lui jeta, elle comprit qu'il avait fait exprès de la contredire pour la mettre en colère. En soupirant, elle lui tourna le dos, faisant mine de se plonger dans la lecture de son livre d'Arithmancie. Comprenant qu'il était de trop, Neville remercia une nouvelle fois Hermione avant de partir, prétextant devoir donner à manger à Trevor au plus vite.

―Allez, Hermione, fais pas la tête ! lança aussitôt Fred.

―Fiche-moi la paix, je révise ! siffla-t-elle. Ah mais oui, suis-je bête ! Ce n'est pas utile !

Le rire de Fred résonna à ses oreilles, lui arrachant un frisson qu'elle espéra être passé inaperçu aux yeux du garçon. Elle espéra même qu'il la laisse tranquille, pour pouvoir réviser comme elle avait l'intention de le faire, mais une autre partie d'elle-même, celle qui se réjouissait à chaque instant de la journée des sentiments qu'elle éprouvait à l'égard du rouquin, la rappela à l'odre, lui remettant en mémoire qu'ils ne s'étaient pas beaucoup vus ces derniers jours.

―Hermione, regarde-moi, lui intima Fred, un rictus amusé flottant sur ses lèvres.

La jeune fille se mordit la lèvre, et obtempéra au bout d'une longue minute, faisant comprendre au garçon qu'elle lui en voulait encore un peu, mais pour dire vrai, Fred ne se souciait pas de ça. Il sourit en croisant le regard sévère de l'adolescente, et ne résista pas à l'envie de l'embrasser.

―Qu'est-ce que tu veux ? souffla-t-elle, les joues rouges.

―Te convaincre de ne pas réviser ce soir, répondit le rouquin.

―Pourquoi ? s'étonna-t-elle.

―J'ai quelque chose à te dire. Mais pas ici, ajouta-t-il en la voyant prête à répliquer. Les autres n'ont pas besoin d'entendre.

Cette dernière phrase plongea Hermione dans un léger état d'angoisse. Ses sourcils se froncèrent lorsqu'elle posa son regard sur le visage de Fred, et la peine qu'elle lut dans ses traits l'inquiéta, entraînant les battements de son cœur dans une course folle.

―De quoi est-ce que tu parles ? murmura-t-elle.

Un sourire désolé étira les lèvres de Fred, qui essaya de poser sa main sur la joue de la jeune fille, mais Hermione eut un mouvement de recul involontaire qui les blessa tous les deux. Pourtant, malgré la peine qu'elle lisait dans les prunelles du garçon, elle ne pouvait s'empêcher d'être en colère.

Et soudainement, elle comprit. Elle comprit pourquoi Fred était si triste à l'idée de lui parler. Si inquiet de ses réactions. Si peu enclin à parler devant leurs camarades de maison.

―Quand ? soupira-t-elle.

―La semaine prochaine, avoua-t-il.

Hermione détourna la tête, mais Fred ne manqua pas de remarquer ses yeux brillants.

[...]

Les minutes défilaient lentement sur la montre qu'elle avait déposée sur sa table de chevet, dans le dortoir des filles. Ses yeux ne parvenaient pas à quitter les petites aiguilles de fer qui tournaient, passant sur les chiffres, avec une lenteur infinie qui l'exaspérait particulièrement.

Allongée sur son lit, Hermione observait le passage du temps, dans un silence profond, qu'elle appréciait, contente d'avoir la pièce pour elle seule. Car ce soir, elle n'aurait pas été d'humeur à supporter les jérémiades de ses condisciples, surtout celles de Lavande, qui depuis quelques temps, n'avait que le nom de Ron à la bouche, parlant de lui à la moindre occasion, ce qui avait le don d'agacer la Préfète.

Un soupir s'échappa de ses lèvres lorsqu'elle constata que seulement une dizaine de minutes venaient de s'écouler depuis qu'elle avait laissé Fred en plan dans la salle commune. Il était encore bien trop tôt pour aller dîner, et d'ailleurs, elle n'avait pas vraiment envie d'y aller, et encore plus pour aller se coucher, alors, elle allait devoir prendre son mal en patience, et continuer à ruminer ses pensées à l'égard du garçon.

Elle s'était plusieurs fois demander s'il pensait sincèrement qu'elle ne comprendrait pas où il voulait en venir. Ils n'en avaient pas reparler depuis le soir où il lui avait appris la nouvelle, et elle avait estimée que ce n'était pas à elle de remettre le sujet sur le tapis, même si le temps passant, elle commençait à regretter d'avoir été d'accord avec ce projet de vie farfelu. D'ailleurs, elle avait beaucoup de mal à croire qu'Angelina n'ait rien dit non plus.

Pourtant, au plus profond d'elle-même, elle savait qu'elle n'avait été mise dans la confidence que parce qu'elle se trouvait être la petite-amie de Fred. Sans cela, les jumeaux ne lui auraient jamais annoncé leur décision de quitter l'école. Et il lui prenait parfois à regretter que ce ne soit pas le cas. Certes, Fred avait beaucoup apporter à sa vie après la mort de ses parents, pourtant, l'idée de finir l'année scolaire sans lui l'effrayer au plus au point.

Car sans lui à ses côtés, elle avait peur de perdre pieds et de sombrer à nouveau.

Elle s'était rassurée plusieurs fois en se disant qu'elle le reverrait dès la fin de l'année, puisque les Weasley avaient accepté de l'héberger, mais l'angoisse persistait encore. Tenace. Douloureuse. Elle s'incrustait dans chaque pore de sa peau, lui donnant l'impression qu'elle ne pourrait jamais s'effacer.

Trois nouvelles minutes s'écoulèrent, et alors qu'elle fermait les yeux, avec l'espoir vain que son esprit s'apaise et que ses pensées se taisent, quelques coups furent donnés contre le portrait de la chambre, arrachant un sursaut à la jeune fille, qui releva la tête, pour croiser le regard inquiet de sa meilleure amie.

―Salut, souffla Ginny avec un sourire forcé. Comment tu te sens ?

―Qu'est-ce que tu veux ? esquiva Hermione.

Elle fit mine de ne pas sentir le regard insistant de la rouquine sur elle, et détourna la tête, trouvant plus réconfortant d'observer les moindre recoins de la pièce que de croiser les prunelles de la jeune fille, si identiques à celles de Fred.

―C'est Fred qui m'envoie, avoua d'emblée la rouquine, sachant que tourner autour du pot ne ferait pas plaisir à Hermione.

―Je m'en doutais, soupira la Préfète. Je suis désolé Ginny, mais je ne suis pas d'humeur pour parler.

―Je sais, Hermione. Mais mon frère a vraiment l'air très inquiet. Même George ne comprend pas ce qu'il a.

Je sui sûre que si, pensa aigrement la jeune fille.

―Oh crois-moi, je suis sûre que si, riposta-t-elle sèchement.

Hermione soupira avant de trouver le courage de faire face à Ginny, qui toujours près de l'entrée, la fixait avec une expression surprise. Ce qui était tout à fait normal puisque les jumeaux n'avaient pas jugés nécessaire de l'avertir de leurs intentions. Aucun autre Weasley, d'ailleurs. Encore quelque chose qu'elle ne comprenait pas.

―Je suis désolé, Ginny, mais je ne suis vraiment pas d'humeur ce soir.

Elle espérait que cette phrase convaincrait la rouquine de partir, mais c'était sans compter sur son obstination si caractéristique qu'Hermione détesta subitement. Ordinairement, elle la prenait pour une qualité, mais ce soir, vraiment pas.

―Je sais que les garçons mijotent quelque chose, fit la plus jeune. Et je suis sûre que tu le sais.

Il n'y avait pas la moindre amertume dans le ton de la rouquine, pourtant, Hermione n'eut aucun mal à percevoir son agacement.

―Ginny, même si je savais quelque chose, je ne pourrai pas te le dire, mentit Hermione.

Elle détestait mentir, et cela lui coûtait beaucoup de ne pas pouvoir avouer la vérité à sa meilleure amie, la seule personne à qui elle pouvait se confier sur sa relation, ses tracas, tous ces sujets qu'elle ne pouvait pas aborder avec Harry et Ron, mais elle avait conscience que Fred lui en voudrait véritablement si elle vendait la mèche.

Etre ainsi tiraillée ne lui plaisait pas, et cela ne fit qu'augmenter son agacement à l'égard du septième année.

Pourquoi a-t-il fallu que tout change entre nous ? songea soudainement Hermione. Sa vie d'avant, celle où elle n'avait pas à se soucier du regard des autres à cause de ses fréquentations lui manquait terriblement. Tout aurait été bien plus simple si on était resté amis.

Mais était-ce seulement vrai ?

―D'accord, finit par répondre Ginny. En tout cas, Fred voulait que je te donne ça.

Elle déposa un morceau de parchemin sur le lit de la Préfète, et quitta la pièce sans attendre, convaincue qu'Hermione et les jumeaux lui cachaient quelque chose.

La cinquième année hésita quelques secondes avant de s'emparer du papier d'une main tremblante, le cœur battant la chamade sans qu'elle ne comprenne pourquoi. Etait-ce de l'inquiétude qu'elle ressentait ? Ou bien de la joie ? Même si Fred lui en voulait de sa réaction, et de son départ soudain tout à l'heure, il semblait prêt à rétablir la paix entre eux. Et elle ne sut si c'était une bonne ou une mauvaise chose.

Il faut vraiment que l'on parle de ce que je t'ais dis tout à l'heure.

Je sais que tu m'en veux, mais laisse-moi t'expliquer. S'il-te-plaît.

Rejoins-moi après le couvre-feu dans la salle commune, je t'y attendrais.

Toute la nuit s'il le faut.

Fred

L'heure qui suivit parut étrangement longue à Hermione, qui refusa la proposition de ses camarades d'aller dîner avec elles. Elle n'avait pas faim, et de toute façon, elle n'était pas prête à faire face aux regards accusateur de Ginny et interrogateurs de ses amis. Elle n'avait pas la force de répondre à leur question, et encore moins celle de croiser Fred.

Elle hésita longuement avant de se décider à le rejoindre. Ses condisciples avaient toutes déjà rejoins les bras de Morphée, et ce fut donc sans crainte d'être suivie qu'elle quitta le dortoir.

Le garçon était là, assit à même le sol, face à la cheminée, dans laquelle s'éteignaient les dernières braises de la journée, et dans un sursaut, il se retourna lorsqu'Hermione arriva à sa hauteur, le visage en feu, le cœur lancé dans une course endiablée, les mains moites.

Il lui sourit, de ce sourire qu'elle avait appris à aimer au fil des mois, et qui lui rappela douloureusement que bientôt elle n'aurait plus l'occasion d'en profiter autant qu'elle le voudrait. Et cette pensée lui fit plus de mal qu'elle ne l'aurait cru.

―Tu sais, tu n'es pas obligé d'envoyer Ginny me parler à chaque fois qu'il y a un problème entre nous.

Un léger rire s'échappa des lèvres de Fred, qui lui jeta un regard amusé, avant de lui proposer de place près de lui, sur le tapis moelleux.

―Je ne vais pas te manger, tu sais, ajouta-t-il.

Hermione obtempéra et observa une braise rougeoyante, un peu inquiète à l'idée d'être la première à prendre la parole. Et puis, qu'aurait-elle put dire de toute façon ? Tout ce qu'elle voulait c'était s'éloigner d'ici, et oublier tout ce qu'elle savait concernant le projet secret des jumeaux. Tout ce qu'il impliquerait par la suite. C'était peut être égoïste de sa part, puisque d'après les dires de Ginny, Fred aussi vivait mal la situation, mais elle était si en colère qu'elle ne parvenait pas à prendre ce point en compte. Cela lui était impossible.

―Tu es en colère, souffla-t-il.

Sa voix résonna quelques secondes dans le silence oppressant de la pièce. Un court instant, la jeune fille ferma les yeux, parvenant presqu'à se convaincre qu'ils ne se trouvaient plus dans la salle commune, mais dans un autre endroit, où les problèmes et la souffrance ne pouvaient les atteindre. Dans un endroit où il n'y avait qu'eux, et non pas la guerre, la tristesse et la peur. Où tout ne pouvait qu'être bon, joyeux.

―Oui, répondit-elle. C'est plus fort que moi.

―Je comprends.

Hermione sentit l'agacement l'envahir, et elle se retourna à demi vers le garçon pour constater qu'il avait le regard rivé sur son visage, en une expression qui fit naître de la culpabilité au fond de son cœur.

―Pourquoi est-ce que tu es aussi gentil avec moi ? demanda-t-elle avec un peu trop de véhémence. Tu devrais être furieux !

―Pourquoi ? s'étonna-t-il franchement.

―Parce que j'ai été d'accord avec toi et maintenant, je t'en veux plus que tout de me laisser ici toute seule !

―Mais tu ne seras pas toute seule, la rassura-t-il en comprenant enfin pourquoi la jeune fille réagissait ainsi. Tu as tes amis auprès de toi.

―Tu sais bien ce que je veux dire... le contredit-elle dans un souffle, plongeant son regard embué dans le sien. Toi, tu ne seras plus là.

Un court instant, Fred ne sut que répondre face à cette déclaration. La peine qu'il lut dans le regard d'Hermione le déstabilisa. Et l'inquiéta aussi. Soudainement, il se demanda si c'était une bonne idée de la laisser ici, alors qu'elle semblait encore avoir besoin de lui. De nombreux mois avaient passés depuis la mort des Granger, et Hermione était parvenue à faire son deuil, mais il lui arrivait souvent de penser qu'elle se trouvait sur un fil, et que le moindre changement brusque risquait de la faire tomber. Tomber dans les ténèbres, la souffrance. La tristesse.

Elle n'était pas faible, non, loin de là, elle était même extrêmement courageuse, mais dans ce genre d'épreuve, persistait encore une certaine fragilité. Une instabilité qu'il semblait le seul à percevoir chez elle, le seul à parvenir à repousser dans les moments difficiles. Le seul à contrôler.

Alors, il s'en voulut. D'avoir fait passer ses intérêts personnels avant ceux de son entourage. Avant ceux d'Hermione. Il en voulut à son frère de ne pas vouloir rester auprès d'Angelina, il en voulut à cette dernière de ne pas avoir chercher à s'opposer à leur idée. Il s'en voulut d'avoir été si égoïste alors que la fille dont il était tombé amoureux avait désespérément besoin de lui.

―Je reste, fit-il brusquement, arrachant un sursaut à Hermione. Je reste avec toi.

―Quoi ? murmura-t-elle en écarquillant des yeux. Pourquoi ? Non ! Enfin, pense à George !

―Mais il faut que je pense aussi à toi ! répliqua-t-il.

―Pourquoi ? répéta-t-elle.

―Parce que je t'aime, Hermione. Voilà pourquoi.

Le temps sembla se suspendre. Le monde sembla cesser de tourner. Et Hermione sentit son cœur louper un battement alors qu'elle levait les yeux pour les plonger dans ceux du garçon, se demandant si elle avait bien entendu ce qu'il venait de dire. Si elle n'avait pas rêvée.

―Quoi ? fit-elle d'une voix tremblante.

―Je t'aime, Hermione, répéta Fred avec un sourire. Je t'aime comme un fou.

―Tu... souffla-t-elle. Tu m'aimes ?

―Oui, rit-il doucement.

La bouche de la jeune fille s'entrouvrit lorsqu'elle prit la pleine mesure de ce qu'elle venait d'entendre. Son cœur se mit à battre de plus en plus fort, lui donnant l'impression qu'il allait la lâcher d'une seconde à l'autre. Ses mains se mirent à trembler. Et des larmes se mirent à couler le long de ses joues, alors que sur ses lèvres sèches, naissait peu à peu un sourire.

―Tu m'aimes, chuchota-t-elle.

Elle ne chercha pas à savoir si Fred l'avait entendu, et plongea son regard dans le sien. Et pour la première fois, elle y remarqua tout l'amour qu'il avait pour elle. Cet amour qui s'était manifesté cet après-midi de juillet, dans le salon du Square Grimmaurd, et qui avait fait son bout de chemin dans le cœur de Fred durant ces derniers mois. Cet amour qu'il avait accepté, le prenant comme une bénédiction. Cet amour qui lui avait ouvert les yeux sur le monde et sur sa beauté.

La joie qu'elle éprouvait n'avait rien de comparable à tout ce qu'elle avait pu vivre d'heureux dans sa vie. C'était un bonheur intense, nouveau, réconfortant. Qui lui offrait à présent un point de vue différent sur toutes les choses de la vie, les bonnes comme les mauvaises. Qui donnait un éclat nouveau au monde. Qui faisait briller plus intensément tout ce qui l'entourait. Qui faisait battre son cœur d'une nouvelle façon.

Pourtant, en dépit de toute l'euphorie qu'elle put ressentir face à ces deux mots, Hermione comprit qu'elle ne pouvait pas l'obliger à rester. Ouvrir ce magasin, c'était son rêve, et elle se sentirait responsable si elle l'empêchait de le réaliser. Elle ne pouvait pas se permettre de le retenir ici, alors qu'il n'en avait clairement plus envie. Elle ne pouvait pas l'empêcher de prendre son envol.

―Non, fit-elle. Tu ne peux pas rester.

Elle eut un peu peur de croiser son regard, mais elle devait lui montrer qu'elle se montrerait forte sans lui. Qu'elle pouvait le faire. Pour lui. Pour qu'il soit fier d'elle. Et puis, il avait raison. Elle ne serait pas seule. Harry, Ron et Ginny seraient là. Tous ses camarades Gryffondor seraient là.

―Il faut que tu partes, ajouta-t-elle face à son incompréhension.

―Mais tu as besoin de moi, fit-il.

―Oui, j'ai besoin de toi, souffla-t-elle avec un sourire. J'aurai toujours besoin de toi. Mais il n'y a pas que moi, Fred. George aussi a besoin de toi. Et il compte sur toi.

―Il comprendra, rétorqua-t-il.

―Peut être, mais, moi, je veux que tu le fasses. Je ne veux pas que tu te prives de vivre ta vie pour moi.

Fred voulut répliquer une nouvelle fois, mais elle l'en empêcha en collant ses lèvres sur les siennes. Ce baiser lui donna l'impression d'être tout et rien à la fois. D'être le bonheur comme la déception. D'être un premier comme un dernier. D'être le feu et la glace.

Et pourtant, il lui fit le plus grand bien.

―Je t'aime, répéta-t-il.

―Ça tombe bien, sourit-elle. Je t'aime aussi.

**

Bonjour !

Je sais que je m'adresse rarement à vous pour vous demander votre avis sur l'histoire, mais aujourd'hui, je suis vraiment curieuse de savoir ce que vous en pensez. De l'histoire en générale, ainsi que de chapitre, qui marque un nouveau tournant dans le couple que Hermione et Fred forment ! :)

Merci pour toutes ces petites étoiles que vous laissez, ça fait chaud au cœur ! <3

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