[CHAPITRE 10] Potterveille.


« Comment... je n'ai pas les mots nécessaires pour exprimer mon soulagement, et même le rythme saccadé de mes battements de cœur me paraît encore improbable. Et pourtant. Il est bien là. En face de moi. Sain et sauf. Sans une égratignure. Seulement quelques excuses que je ne parviens pas à entendre, tant le soulagement domine tout le reste. Ron est revenu. Nous avons détruits un Horcruxe. Et tu es en vie. »


Janvier balaya les mauvais souvenirs de l'année. Un souffle nouveau secoua les rues du Chemin de Traverse, bien qu'encore trop chargées de désespoir et de mort. Mais les sorciers avaient envie de croire que cette année qui commençait juste, allait mettre un terme à ce climat de terreur qui planait au-dessus de l'Angleterre. Chacun avait le secret espoir que, un jour viendrait, où le règne de Lord Voldemort prendrait fin. Que Harry Potter, le Survivant, viendrait les délivrer de ces chaînes qui entravaient leur liberté.

Quelque part au nord de Londres, un jeune homme remontait à contre-sens une rue pleine de moldus. Inconscients du danger qui les entouraient, ceux-ci avaient décidé de sortir dans les rues pour fêter le passage à la nouvelle année. Leurs rires se répercutaient en écho contre les murs de pierre des bâtisses qui les dominaient. Les décorations de Noël, éteintes à une heure aussi matinale, se balançaient doucement au grès du vent, comme pour saluer cette démonstration de joie. 

Le visage à demi recouvert par une épaisse écharpe en laine, Fred se faufilait tant bien que mal à travers cette marée humaine. Des cernes violettes dessinaient le contour de ses yeux, dans lesquels brillaient une certaine lassitude. Réveillé à l'aube, il n'était pas parvenu à retrouver le sommeil et avait décidé de se promener un peu dans les rues de Londres. Changer d'air lui faisait le plus grand bien. Quitter, pour quelques heures, l'ambiance lourde et pesante qui régnait chez la tante Muriel, était un soulagement. Il ne supportait plus de voir sa mère, le visage collé contre les vitres, dans l'attente de voir son fils franchir de nouveau le seuil de la maison. 

Il se souvenait encore du sentiment de surprise qui l'avait envahi lorsque Bill avait transplané dans le jardin de Muriel, un Ron épuisé et affamé à son bras. Il se remémorait de l'étonnement de son père, de la fêlure dans sa voix en prononçant le nom de son fils. Le sourire désolé de son petit frère, avant que celui-ci ne s'évanouisse, terrassé de fatigue.

Les larmes sur les joues des femmes de la famille, lorsqu'ils avaient transporté Ron à l'intérieur de la demeure. Des caresses incessantes de Molly sur les joues de son cadet, alors qu'elle veillait sur lui, pendant que Ginny lui préparait un bol de soupe. 

Le voir, sain et sauf, avait ravivé une lueur d'espoir dans le cœur de Fred. Après plusieurs heures de sommeil, Ron leur avait raconté quelques détails de leur escapade à travers le pays, sans pour autant annoncer clairement la raison de leur départ précipité. Il disait simplement qu'ils avaient une tâche à accomplir, que Harry avait une mission à mener avant de pouvoir détruire définitivement le Seigneur des Ténèbres. 

Il avait parlé de leur dispute, de son départ en pleine nuit et de son errance de plusieurs jours à travers des pubs sorciers, dans lesquels il avait failli se faire arrêter à plusieurs reprises. Incapable de retrouver ses amis, qu'il avait regretté de quitter à la seconde où il avait transplané, il avait trouvé refuge chez Bill. Celui-ci lui avait dit que la famille s'était réfugiée chez la tante Muriel par mesure de sécurité. 

Mais ce que Fred désirait savoir plus que tout, c'était si Hermione était encore en vie. La dernière fois que son frère l'avait vu, elle était en parfaite santé. Fatiguée, lassée de ces transplanages, mais bien vivante. Ron lui avait dit qu'elle prononçait souvent son nom en dormant et cette déclaration serra fortement le cœur du plus âgé. Savoir qu'Hermione pensait encore à lui avait légèrement atténué le manque. 

Mais pas suffisamment.

Après plusieurs jours de repos, Ron avait brusquement décidé de partir à leur recherche. Molly avait grandement protesté, mais Arthur, qui comprenait les raisons de son fils, avait su la convaincre. En dépit de ses larmes, de ses contestations, et de ses cris, la matriarche avait été contrainte de laisser partir son fils. Fred revoyait encore la peur dans les yeux de son petit frère, alors que, saluant une dernière fois sa famille, il transplanait vers l'inconnu, incertain de pouvoir retrouver ses amis. 

La foule se fit plus dense alors qu'il arrivait au bout de la rue. Les chants de Noël résonnaient à ses oreilles et l'accompagnèrent alors qu'il franchissait le seuil d'un immeuble à l'aspect délabré. Une odeur nauséabonde d'ordures envahissait le hall d'entrée et sans perdre de temps, il s'engouffra dans l'étroit escalier, montant aussi rapidement que possible les marches qui le menèrent au quatrième et dernière étage.

Il donna quelques coups secs contre la porte du numéro seize et attendit patiemment que le propriétaire des lieux ne vienne lui ouvrir.

Un sourire chaleureux se dessina sur ses lèvres gercées par le froid de Lee Jordan. 

―Fred Weasley, lâcha-t-il avec une joie qui émut son ami. Entre, entre, je t'en prie. Ne fais pas attention au désordre...

Le rouquin s'engouffra dans un corridor étroit et sombre qui déboucha sur un salon au plafond bas et aux murs recouverts d'articles de journaux. La pièce ne contenait qu'un canapé défraîchi, un fauteuil à bascule et une table de salle à manger, sur laquelle reposait fièrement, une installation d'antenne radio sorcière. Une chaise complétait le mobilier spartiate de l'appartement. 

―Désolé, fit Lee. Je ne reçois pas beaucoup de monde ici. En général, j'invite mes amis chez moi.

―Pas de soucis, répondit Fred en retirant sa cape. 

―Alors, quel bon vent t'emmène, mon ami ? reprit le métisse en se laissant tomber sur le canapé, qui émit une étrange protestation. Laisse moi te dire que j'ai été surpris de recevoir ta lettre. 

―Je comprends, mais j'avais peur que ma lettre tombe entre de mauvaises mains. Je ne voulais pas prendre le risque que cet endroit soit repéré par des Mangemort. 

―Ouais, ces sales types contrôlent le courrier, maugréa Lee. On a failli se faire prendre plusieurs fois.

―On ? répéta Fred en fronçant les sourcils.

Lee lâcha un petit rire amusé avant de répondre.

―Les jumelles Patill et moi, expliqua-t-il. Leurs parents ont refusé qu'elles retournent à Poudlard pour finir leurs études et je ne sais pas trop comment, nous sommes entrés en contact. Elles ont proposé de m'aider avec tout ça, ajouta-t-il en désignant les lieux de la main. Leur père paie le loyer tous les mois, par mesure de sécurité.

―Je vois que tout est pensé dans les moindres détails, sourit le rouquin.

―Que veux-tu ! rit Lee. Je tiens trop à ma vie pour me faire prendre si bêtement. Et puis, je ne suis pas seul sur ce coup-là. Je ne peux pas dire et faire ce que je veux derrière le micro. On est plus à Poudlard.

Non, ils n'étaient plus à Poudlard. Ils étaient dans la vraie vie. Ils étaient adultes à présent et il leur fallait faire face à la dure réalité de leur monde en péril. Fred avait parfois l'impression que des flammes géantes le retenaient prisonnier dans un cercle qui ne cessait de s'effondrer au fil du temps. 

―Et toi ? reprit le métisse. Comment tu vas ? J'ai appris pour...

Il ne prononça pas le nom de la jeune femme mais Fred comprit. Son sourire se fana et son ami regretta presque d'avoir poser la question.

―On fait avec, répondit-il après quelques de silence. Je suis mort d'inquiétude mais je n'ai pas le choix. Elle est partie faire je ne sais quoi pour sauver le monde, alors qui suis-je pour la blâmer ?

―La blâmer non, rectifia Lee. Mais tu as le droit de t'inquiéter pour ta copine, mon vieux. C'est normal. 

―Ouais... 

―Assez parler de sujets qui fâche, s'exclama Lee. Et si tu me disais précisément pourquoi tu es ici ? 

Fred se pencha vers lui et, comme de crainte que les murs puissent entendre et répéter leur conversation, il chuchota les détails du plan mis au point par l'Ordre la veille au soir. Au fur et à mesure de son discours, il vit le regard de son ami se mettre à pétiller et il sut qu'il avait choisi la bonne personne pour cette mission. 

Potterveille verrait bientôt le jour, ravivant un feu d'espoir sur le point de s'éteindre.

[...]

―Je ne sais pas si je te l'ai déjà dis, mais j'adore ces feux que tu crées. 

Je relevais la tête du livre que j'étais en train de lire pour croiser le regard de Ron, penché sur moi. Ses mains étaient serrées autour d'un petit bocal en verre dans lequel, crépitant doucement, se consumait le feu que j'avais fabriqué quelques heures plus tôt et qui me permettais de lire, en dépit de la pénombre environnante. 

Sans répondre, je l'observais prendre place sur le fauteuil à mes côtés, avant de reposer le récipient sur la table d'appoint devant moi. Il poussa un soupir de dépit avant de se tourner de nouveau vers moi, un faible sourire au coin des lèvres.

―Hermione, je crois qu'il est grand temps que l'on parle, lâcha-t-il en passant une main nerveuse dans ses cheveux beaucoup trop longs. 

―Je ne vois pas de quoi tu veux parler, répliquais-je.

Je n'étais pas en colère contre lui, du moins, ne l'étais-je plus, mais je voulais qu'il comprenne que je lui en voulais encore de nous avoir abandonner comme il l'avait fait. Jamais encore il n'avait fait preuve d'une telle lâcheté envers nous et même si je me savais prête à lui pardonner, j'avais envie qu'il comprenne combien je m'étais sentie trahie et seule après son départ. Combien sa fuite nous avait affecté, Harry et moi.

―Je t'en prie, soupira-t-il. Je sais que j'ai merdé, que j'ai complétement foiré mais...

―Il n'y a pas de mais, Ronald Weasley ! m'exclamais-je en le pointant d'un doigt accusateur. Tu es parti, tu nous as laissé alors qu'on avait besoin de toi ! 

Je le vis se ratatiner sous la véhémence de mes propos et m'en voulus aussitôt de m'être montrer aussi méchante. 

―Oui je sais, dit-il sans me laisser le temps d'ajouter quoi que ce soit. Je sais et crois-moi, j'ai regretté mon geste à la seconde où j'ai transplané ! Mais ce truc, ce putain de collier, il...

―Je sais, soufflais-je, d'une voix légèrement plus calme. Je sais.

Je me souvenais encore de cette sensation d'abandonner qui m'avait envahi lorsque j'avais constaté que Harry ne se trouvait plus dans la tente, l'autre soir. L'âme de Voldemort qui vivait dans le médaillon, avait décuplé mes sentiments et j'avais complètement perdu pied. J'avais eu l'impression que le poids sur mes épaules me clouait sur place et que le monde ne tournait plus rond. Je m'étais retrouvée seule, perdue et déboussolée et l'âme noire m'avait complètement retourné. Les choses s'étaient calmées lorsque Ron m'avait aidé à enlever le collier, mais j'avais encore en mémoire toutes ces mauvaises émotions. 

―Je ne suis pas là pour que tu me pardonnes, mais pour que tu saches que je regrette et que je ferai tout pour pouvoir revenir en arrière et effacer ce que j'ai fais. Je ne suis qu'un crétin, je sais.

―Je n'ai jamais dis ça, contredis-je. Et non, tu n'es pas un crétin. 

Ron sourit et s'enfonça plus profondément dans son fauteuil, sans répondre. Je l'observais quelques secondes, avant de me replonger dans la lecture du recueil de contes que le professeur Dumbledore m'avait légué.

Le symbole qui revenait sans cesse au fil des pages attira une nouvelle fois mon attention et je me souvins soudainement que je l'avais également aperçu sur une des tombes du cimetière de Godric's Hollow. 

―Hermione ?

Je sursautais et relevais la tête, pour croiser le regard interrogateur de Harry. Debout face à moi, il terminait d'enfiler un pull. 

―Oui ?

―Tout va bien ? demanda-t-il. 

―Euh oui... je...

Retournant le livre, je lui montrais l'étrange triangle sur le coin de la page, en précisant que ce symbole avait été ajouté à la main et qu'il ne faisait pas parti des histoires.

―Je l'ai déjà vu, fit Harry en fronçant les sourcils. Pendant le mariage de Bill. Le père de Luna portait un collier avec ce symbole. Il était plutôt fier de me le montrer.

―Tu es sûr ? demanda Ron. 

―Certain, confirma Harry. Un triangle, avec un rond et un trait à l'intérieur. 

―Je veux voir Xenophilius Lovegood, dis-je en me redressant. Je veux le voir tout de suite.


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