Hécatombe de frites
« Alors, vous avez fait votre choix ?
– Tout à fait, réponds-je avec assurance tandis qu'Iphi' me regarde avec intérêt. Je vais prendre une kriek et des frites. »
Regard de surprise d'Iphi', dont je me délecte.
« Et toi ? Comme d'habitude ?
– Ouaip, merci !
– C'est noté ! Je vous apporte ça quand c'est prêt !
– Merci Antigone, dis-je avec un hochement de tête. »
Quelques secondes de silence. Une expression triomphante se moule sur mon visage.
« Alors, que dit mon augure ? la nargué-je.
– Que tu es très sale, et pas effrayée par les travaux manuels.
– Ah oui ? l'interrogé-je sans me départir de mon grand sourire de lama.
– Tu vas manger tes frites avec les doigts et tu auras plein de gras dessus, donc ça te dérange pas de les salir en général.
– Alors, c'est vrai, c'est mon petit côté butch.
– Tu es aussi un peu enfantine.
– Eh oh, les frites, c'est très sérieux ! C'est un bon indicateur de la qualité du resto !
– Et tu as une facette analytique, ajoute-t-elle avec un sourire malicieux.
– Tu triches, ça vient pas directement de mon plat !
– Eh j'ai pas dit que c'était scientifique, hein !
– Bon, bon... C'est tout ?
– C'est déjà pas mal. Même si je dois avouer que ça dénote une certaine originalité – ou du moins que tu te fiches pas mal des conventions sociales – de commander des frites à un date.
– Ah parce que c'est un date maintenant ? exulté-je.
– Roh ta gueule ! rit-elle.
– Tu oublies un dernier point, qui va bien avec ce que tu viens d'avouer.
– Oh ? Qu'est-ce donc ?
– Que les frites, ça se partage facilement, proclamé-je très fière. »
Elle se tait et me regarde, les yeux agrandis d'admiration.
Je bous.
« Eh ben, pas mal du tout ! Un très bon choix, donc.
– Merci ! Et en plus, je pourrais t'admirer en train de te lécher les doigts, lâché-je avec un air affecté.
– Oh punaise ! T'es vraiment une perv' ! s'esclaffe-t-elle.
– J'avoue tout !
– Bon, plus sérieusement, commence-t-elle avec une vroix grave.
– Oui ? dis-je prête à l'écoute.
– Ya plusieurs points que j'aimerais mettre au clair. »
Elle prend une grande inspiration, semble chercher les mots ou du courage ou la résolution au fond d'elle. Pointe d'angoisse en stalactite depuis mon sternum.
« Je veux pas que tu le prennes mal parce que t'as l'air d'être une personne super, et que c'est vraiment pas contre toi... Rah merde, je le tourne super mal, on dirait que je m'apprête à te foutre un râteau ! Bon. Tu te souviens quand tout à l'heure je proposais un after tisane ? Ben j'étais sérieuse. On couchera pas ensemble, précise-t-elle en voyant mon air interloqué, je suis ace. C'était aussi en partie ce à quoi je faisais allusion tout à l'heure, quand je parlais de mes regrets.
– Oh oki !
– Et j'ai besoin d'un peu de temps avant de dormir avec les gens, question de confiance, tu vois ?
– Je vois très bien.
– Genre, tu me plais et tout, 'fin t'as bien vu quand on attendait le bus, mais... Tu vois, je suis plutôt extravertie, super tactile, j'adore les câlins, l'affection, tout ça, et souvent, c'est interprété comme de l'attirance, parce que je suis un petit canard awkward qui mesure pas bien la portée de mes actes (surtout quand je suis euphorique et que j'ai un peu bu). Or, dans ton cas, c'en est, de l'attirance, mais juste pas sexuelle.
– Non mais t'inquiète, je connais l'asexualité, c'est ok, vraiment, la rassuré-je.
– Merci, t'es choue. Après, je préfère aussi parler avec mes copaines avant de relationner de manière sérieuse avec quelqu'un.
– Et c'est tout à ton honneur !
– Mais enfin voilà, je suis désolée si je t'ai fait miroiter des trucs, des fois je me rends pas compte des signaux que j'envoie et j'oublie que tout le monde n'est pas ace, finit-elle avec l'air très gênée.
– Vraiment, ya pas de soucis ! Merci d'avoir clarifié tout ça.
– Tu m'en veux pas ?
– Ben non pourquoi ?
– Euh, je... Tu devais te dire qu'on allait pécho et tout. Excuse-moi, j'ai plutôt l'habitude de réactions moins sympathiques, alors je suis un peu étonnée !
– Alors oui, faire du sexe avec toi, j'avoue que ça m'aurait pas déplu, mais... J'aime bien comme ça aussi, affirmé-je en lui souriant avec chaleur (et une pointe de tendresse). Ça enlève rien au fait que tu es ultra craquante et que tu es une personne ultra cool. Juste, en rentrant chez moi si je suis pas claquée, je me masturberais et pis tout ira bien, expliqué-je avec légèreté.
– Merci, t'es gentille ! Je suis vachement rassurée !
– Oh, c'est normal.
– N'empêche. Le nombre de dates qui se sont barré•es quand je leur ai dit...
– Je suis désolée que tu aies vécu ça... Si ça peut te rassurer encore plus, j'ai très envie de te serrer dans mes bras et de t'embrasser.
– Haha profiteuse ! »
Nous échangeons un regard de pur désir, et Iphi' se penche vers moi pour déposer un baiser sur mes lèvres qui secoue mon corps à la façon d'un caillou jeté dans une flaque : sinusoïdales qui serpentent sur mes vertèbres et je frissonne de plaisir. J'ai envie d'elle, de plus, sa langue caresse mes lèvres et je l'accueille et tout éclate : c'est une porte enflammée qui s'ouvre dans ma poitrine, le souffle coupé net par un mordillement de ma lèvre supérieure, suivi par un coup de langue sur mon labret, et je lance mes mains à la rencontre de son visage bouillonnant que je veux serrer fort contre le mien jusqu'à ce qu'elle fasse partie de moi. L'impression d'être une tasse d'eau frémissante et elle la boule à thé.
Ouaip, il faudra que je change de sous-vêtements en rentrant.
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