Chapitre 1
Poudlard, juin 1942.
Les élèves de l'école de sorcellerie se pressaient dans le hall de la Grande Salle en échangeant des regards inquiets. Des murmures d'appréhension et d'angoisse sortaient de toutes les bouches et résonnaient entre les murs. Les épreuves de fin d'année allaient commencer ce matin. C'était un moment redouté par les étudiants, en particulier par les Cinquièmes Année, qui passaient leurs BUSE. Leur premier vrai diplôme magique.
Pourtant, aucune inquiétude ne trahissait les traits d'Aethra, qui se frayait un chemin à travers la foule d'élèves pour rejoindre quelqu'un. Après avoir joué des coudes avec des groupes compacts, elle s'extirpa enfin de la masse et vit la personne qu'elle recherchait.
Comme à son habitude, Tom Jedusor était seul et lisait un vieux grimoire. Aethra le connaissait depuis maintenant cinq ans mais elle n'avait jamais réussi à le percer à jour. Il était avare en paroles et ne sortait de son mutisme qu'en classe, pour répondre aux questions des professeurs ou contredire un de ses camarades. Il maniait les mots à la perfection et était capable de démonter point par point un discours. Quelle ironie, pour une personne aussi peu bavarde. Il était le meilleur élève de l'école et seule Aethra pouvait se vanter d'obtenir d'aussi bons résultats scolaires que lui. Elle était d'ailleurs la seule qui trouvait toujours de quoi débattre avec lui lors des cours. Et elle était la seule à avoir réussi, une fois, à avoir le dernier mot.
Aethra se planta devant lui.
— Encore en train de réviser ? lui lança-t-elle avec un sourire.
Sans lever les yeux de son livre, Jedusor répondit :
— C'est inutile de réviser dix minutes avant un examen. Je pensais que tu le savais, Miss Parfaite.
« Miss Parfaite ». Il l'avait affublé de ce surnom dès la fin de leur première semaine de cours, quand ils étaient en première année. S'il s'agissait au départ d'une moquerie de sa part, cela s'était révélé être bien plus profond et complexe au fil des ans. Aethra ne savait pas exactement ce qu'il ressentait pour elle : un mélange de jalousie et d'admiration, probablement.
La jeune Gryffondor ne se démonta pas :
— Je savais parfaitement que tu ne révisais pas, Monsieur l'Héritier de Salazar Serpentard.
Jedusor cessa de lire et leva les yeux vers elle. Il parut troublé un instant, comme s'il se demandait comment elle avait pu obtenir cette information, puis redevint parfaitement impassible. Il avait dû le dire à ses rares « amis » de Serpentard, mais ne s'attendait pas à ce qu'elle, une élève de Gryffondor, soit au courant.
Un éclat de fureur passa dans les yeux du jeune sorcier. Il referma son livre d'un geste sec, se leva d'un bond et se campa à quelques centimètres du visage d'Aethra, qui n'avait pas bougé.
— J'ignore comment tu as eu cette information... mais je te prierai de la garder pour toi. Je ne te permettrai pas de divulguer à tout le monde mes petits secrets. J'espère que c'est clair, sinon...
— Sinon, quoi ? le coupa Aethra.
Ils se défièrent du regard. Même si Tom mesurait une tête de plus qu'elle, la Gryffondor ne se laissait pas abattre. Elle paraissait aussi grande que lui, dans son attitude ferme et dénuée de toute crainte.
Leur face à face avait attiré l'attention d'autres élèves. En particulier les Serpentard de cinquième année, non loin de là, qui suivaient l'échange avec un sourire sardonique aux lèvres.
Tom allait répliquer quand la voix grave du professeur Dumbledore l'interrompit :
— Allons, jeunes gens, il suffit !
Aethra tourna la tête et constata que le sorcier les fixait, elle et le descendant de Serpentard.
— Rentrez dans la salle : l'examen va commencer ! tonna-t-il d'une voix plus forte.
Tom jeta à Aethra un dernier regard furieux et alla s'emparer de son sac. Il prit soin de bousculer sa camarade avant de se rendre dans la salle. Les autres Serpentard le suivirent en ricanant. Aethra les entendit lui demander pourquoi il ne lui avait pas jeté un sort.
Dumbledore ne quitta pas Tom des yeux avant qu'il ne soit bien avancé dans la salle d'examen, puis s'approcha d'Aethra.
— Tout va bien, Miss Hallow ?
— Oui, professeur. Ne vous inquiétez pas pour moi, j'ai l'habitude des petits prétentieux comme Tom : mes deux frères aînés sont comme lui !
— Je me souviens bien de vos frères, en effet, accorda Dumbledore en souriant.
Aethra se contint de rire : Erwan et Gideon étaient réputés pour être de vrais cancres et des petits plaisantins. Cela ne les avait pas empêché d'obtenir de bonnes notes à leurs BUSE et à leurs ASPIC. Erwan, l'aîné, venait de rentrer au Bureau des Aurors. Quant à Gideon, il s'occupait des créatures magiques un peu partout en Europe.
— Vous m'avez l'air d'être la seule élève à pouvoir tenir tête à Tom Elvis Jedusor, continua Dumbledore.
— Tom Elvis Jedusor... le Héros de Poudlard. Celui qui a enfin mit un terme aux agressions sur les enfants de Moldus. Et qui a permis aux examens d'avoir lieu.
Aethra murmura pour elle-même :
— Cela ne sonne pas juste...
— Vous aussi, vous avez des soupçons ? demanda Dumbledore sur le même ton.
— Oui...
Elle refusa cependant de lui avouer qu'il était l'héritier de Serpentard. Mais même en sachant cela, Dumbledore n'avait aucune preuve pour accuser ou non Tom du meurtre de Mimi Geignarde.
— Bon, je dois y aller, Monsieur.
— Oui, oui... Bien sûr.
Il posa une main sur son épaule et lui chuchota à l'oreille :
— Gardez un œil sur Tom.
Elle opina et suivit ses camarades dans la salle. Deux de ses amies l'attendaient devant les portes : Helena Rowin, élève de Serdaigle, et Matilda Barrow, de Gryffondor.
— Alors ? commença Matilda avec un sourire, en se passant une main dans son épaisse chevelure crépue.
— Alors quoi ?
— Tu as encore essayé d'avoir un rencard avec Jedusor ?
— Non, pas du tout ! répondit aussitôt Aethra, gênée. Qu'est-ce qui te fais croire ça ?
— Oh bah, c'est connu dans tout le château, que tu es folle de lui ! ajouta Helena en gloussant. Comme la moitié de la gente féminine de l'école ! Sauf que toi, tu es peut-être la seule à avoir une chance avec lui...
Aethra soupira : si elles connaissaient la vraie raison de son acharnement sur Tom, elles ne riraient pas ainsi.
— Laisse tomber : si je ne ressemble pas à un vieux livre poussiéreux, je ne l'intéresse pas. Il a toujours le nez fourré dans un bouquin, il en devient épuisant...
— Oh, tu lâches donc l'affaire ? pépia Matilda. Je crois que cette nouvelle va faire plaisir aux filles de Serpentard, alors !
Aethra se força à sourire et les laissa aller à leur place. La sienne était située sur la droite, pas très éloignée de Jedusor. Le classement alphabétique ne jouait pas en sa faveur... Il n'y avait que quatre étudiants dont les noms de famille commençaient par la lettre H, et six par I.
Elle s'assit, sortit son matériel, soupira et observa ses voisins.
Un long frisson lui parcourut l'échine, et elle sentit que quelqu'un la fixait dans son dos.
Elle tourna la tête et croisa le regard du Héros de Poudlard.
Tom Jedusor la dévisageait en faisant tournoyer un stylo dans sa main droite. Il avait l'air tranquille. Il ne doutait pas un instant de réussir ses examens, tout comme elle.
Avant de se focaliser sur sa feuille, elle lui adressa un clin d'œil.
Elle eut juste le temps de voir sa moue déconfite, ce qui suscita en elle une grande joie, et se concentra sur l'examen.
Trois heures plus tard, elle quitta la Grande Salle, pleinement satisfaite de ce qu'elle avait écrit sur sa feuille. Elle rangeait tranquillement ses feuilles de brouillon et sa plume dans sa sacoche quand un élève de Gryffondor de deuxième année s'approcha d'elle en souriant.
— Grande sœur ! Alors, ce devoir ?
— Facile, Max ! lui sourit-elle.
— Avec toi, c'est toujours facile, de toute façon ! rigola-t-il.
Les portes de la Grande Salle s'ouvrirent de nouveau et laissèrent passer Tom Jedusor. Les mains fourrées dans les poches de son pantalon, il avançait sans se soucier de ce qu'il se passait autour de lui.
Jusqu'à ce que Max s'écria :
— Waouh ! Tu as même fini avant Monsieur Je-Sais-Tout !
Tom leva les yeux vers le gamin et le toisa d'un air mauvais. Il s'immobilisa et esquissa un geste vers sa baguette avant de lui lancer froidement :
— Tu ferais mieux de respecter tes aînés, sale morveux, si tu ne veux pas finir en carpette dans la salle commune des Serpentard !
Aethra, sentant le danger venir, se plaça devant son frère et regarda Tom sans éprouver pour lui la moindre peur. Elle savait pourtant que son camarade préfet pouvait être violent et n'hésitait pas à humilier ou brutaliser les plus jeunes. Il s'arrangeait pour ne jamais être pris sur le fait, et était toujours apprécié de ses professeurs.
— Tu devrais ignorer ses paroles : il n'a que douze ans...
— Raison de plus pour le mater ! répliqua Tom en lui coupant la parole.
Il s'approcha d'Aethra et plongea ses yeux dans les siens pour lui glisser, avec toute la menace dont il était capable :
— S'il me reparle ainsi, ce morveux, il est mort.
Puis, s'adressant au jeune Gryffondor qui tremblait légèrement, il ajouta, avec un sourire carnassier aux lèvres :
— Ennemi de l'Héritier, prends garde !
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