V.

Neuf jours plus tard, HoSeok est dans une voiture qui roule sur l'autoroute. Son départ un peu précipité lui laisse un goût acide dans la gorge et il regarde amèrement la bande de bitume grise. Assis à l'avant, à côté de NamJoon qui conduit, les mains posées à plat sur ses genoux, HoSeok se mure dans le silence. Il ne répond que par grognements ou voyelles inaudibles jetées rapidement. Il ne veut pas rentrer, vraiment pas ; son ventre se tord et se distord. Sa tête lourde rebondit sur l'appui-tête et NamJoon accélère. Ils sont partis depuis longtemps déjà, pourtant il ne réalise toujours pas son retour à la capitale.

Le voyage continue, jusqu'à ce que les lumières naturelles s'éteignent pour allumer les réverbères artificiels et que leur couleur jaune inonde les trottoirs. Quand NamJoon arrête la voiture dans un parking et que l'air froid fouette le visage de HoSeok, il est au cœur de tout ce dont il voulait s'éloigner.

Puis YoonGi arrive derrière lui ; laisse sa main un peu trop longtemps dans son dos et repart. HoSeok regarde son ombre sur le sol jusqu'à ce que l'autre ne se tourne vers lui pour lui demander d'avancer. NamJoon tend le manche de sa valise, et HoSeok le prend, le visage fermé. Il ne veut rien entendre, rien voir, rien croire. Il veut juste repartir en courant au milieu des voitures et fuir cette ville qui ne veut plus de lui.

Il a été convenu que HoSeok dormirait chez YoonGi, car étant celui qui avait déjà vu ses crises, il savait plus ou moins comment les gérer.

Alors quand YoonGi lui donne une clé, il la prend simplement.

Derrière eux, NamJoon rentre dans sa voiture et repart, ses phares éclairant la nuit.
« - J'ai un appartement, mais je passe tellement de temps au bureau qu'il est un peu inutile. Je ne sais même pas si on y sera beaucoup durant ton séjour.
- C'est quel étage ?
- Le troisième. »

HoSeok hoche la tête et s'engage dans les escaliers, avant que YoonGi ne le rappelle devant la cage d'ascenseur.
« - Tu voulais te taper les marches avec ta valise de trois cent kilos ? »

HoSeok secoue la tête, ne dit toujours rien. YoonGi s'apprête à parler, peut-être à bouger, mais le tintement de la boite en métal le coupe. Alors, il monte dedans, son sac virevoltant près de sa jambe.

Pour la première fois depuis qu'ils sont arrivés, HoSeok desserre les lèvres. Il ne parle pas très fort, juste assez pour YoonGi l'entende.
« - Où est-ce que NamJoon habite ?
- En périphérie, pas très loin du QG.
- Le QG ?
- Le commissariat, mais JungKook trouvait plus drôle de l'appeler comme ça. Le nom est resté, depuis.
- C'est sympa. Vous avez l'air de bien vous entendre.
- Si on exclue TaeHyung qui parfois réellement étrange, ils sont agréables. Et puis, on est tous d'accord sur les bienfaits d'une ambiance saine au travail. Et comme on se voit plus que la famille de certains, autant ne pas chercher querelle.
- C'est une bonne philosophie. »

YoonGi sent la tension entre eux, comme une brise glaciale qui alourdie ses membres et ses esprits. Alors il demande doucement :
- HoSeok ?
- Oui ?
- Comment tu te sens ?
- Mal, YoonGi.
- Pourquoi ? »

HoSeok le regarde, les yeux humides empreints de toute sa peur, et son souffle se coupe. Il tourne la tête et regarde droit devant lui quand il répond, les mâchoires serrées et le cœur démoli.
« - Parce que j'ai peur de te refaire du mal si on dort au même endroit. Je ne sais pas comment maitriser mes crises. Je ne sais pas du tout. J'ai peur de te blesser encore.
- Moi, je n'ai pas peur. Parce que j'ai confiance en toi.
- Tu ne devrais pas.
- J'ai aussi confiance en la porte avec une serrure spéciale et résistante que j'ai fait installer.
- C'est judicieux. »

Les portes s'ouvrent dans un grincement lancinant et YoonGi sort le premier, puis se dirige vers son appartement. HoSeok le regarde avancer devant lui, manteau noir dans les couloirs blancs. Il ouvre la porte, s'engouffre à l'intérieur, HoSeok dans son dos. Sa valise racle sur le parquet.
C'est beau, mais froid et inhabité.

L'appartement ressemble à un magazine de décoration, avec les coussins au bon endroit sur le canapé lisse, les tableaux abstraits et la propreté absolue qui règne en maître.
YoonGi l'entraine dans sa chambre, en enlevant son manteau, puis ses chaussures. Lorsqu'il se retrouve en chemise, HoSeok lorgne sur les muscles de ses bras.
« - Laisse ta valise là. »
HoSeok la cale contre un mur et contemple le visage de YoonGi sous la lumière rasante de l'ampoule de sa chambre. Il se rapproche de lui, doucement, sans bruit, et YoonGi pointe un doigt vers la porte en le regardant dans les yeux.

Sa voix, basse et rauque, souffle des mots dans l'espace vide.
« - C'est la porte de sécurité. Si tu essayes de me faire du mal, je sors et t'enferme en attendant que tu te réveilles.
- Tu veux dire qu'on va dormir ensemble ?
- Oui. Je ne peux pas dormir sur le canapé et je ne veux pas que tu ravages mon salon.
- YoonGi...
- Tu es désolé. Je sais. Mais je te le répète : j'ai confiance en toi.
- Je ne me souviens pas. Je ne me rappellerais de rien si je te fais du mal.
- Tu n'as pas besoin de te souvenir puisque tu ne m'en feras pas.
- Tu sais bien que ça se passera comme la dernière fois. »

YoonGi ne répond pas ; pose sa main sur le cœur d'HoSeok, et il frissonne.
HoSeok a envie de le prendre dans ses bras, d'entourer son corps de cette sécurité, de ce sentiment d'être compris que YoonGi lui offre. Et il le fait, le cœur battant fort contre ses côtes. Il plaque trop doucement le torse du devin contre le sien et enfonce son visage dans ses cheveux doux. Il sent le souffle de YoonGi contre sa peau, et ses bras qui se glissent dans son dos.

Il bascule sur le lit, encore habillé, mais il s'en fout.



Il s'endort avec YoonGi tout contre lui, sa chaleur contre la sienne et des craintes qui frémissent jusque dans ses doigts.

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