II.

Dix-huit avril.
Gendarmerie de Mokpo.

Le ciel est gris et la rue est pavée de flaques d'eau grandes comme des petites rivières. Les passants se pressent en frôlant les murs, évitent les gouttes et passent sans le regarder. Il y a une odeur de pluie et de pollution qui règne partout comme une trainée d'odeur fugace.  Quand il entre dans le commissariat, il est ébloui par la froideur des néons et la blancheur des murs.
Il s'adosse au comptoir, marmonne :
« - Bonjour. Je cherche Min YoonGi.
- Qui êtes-vous ?
- Je ne sais pas. »

L'hôtesse d'accueil relève sur lui des yeux douteux, et demande d'une voix stridente :
« - Pardon ?
- Jung HoSeok. Je suis Jung HoSeok. 
- Neuvième bureau, à gauche.
- Merci. »

HoSeok quitte l'accueil et resserre son manteau autour de son corps. Il ne fait pas vraiment froid, mais il n'est pas à l'aise. Il a l'impression que tout le monde le regarde, dès qu'il bouge. Les gens dans les bureaux le voient traverser l'allée centrale puis toquer sur une porte en bois.

Le jeune homme inspire, expire.
Le battant s'ouvre.

Un homme le regarde, yeux sombres contre peau pâle. Il lui tend la main sans parler, et HoSeok la saisit.
« - Je suis Min YoonGi. Réellement enchanté de faire ta connaissance. »

HoSeok hoche la tête mais ne lui rend pas son sourire. L'autre l'invite à entrer dans la pièce, ferme la porte, traverse la petite salle et passe derrière son bureau noir en lui indiquant la chaise. Puis, il pose sa tête dans ses mains et l'observe.

Quand il parle, HoSeok se redresse en posant ses mains à plat sur ses genoux.
« - Pourquoi êtes-vous venus ? 
- Je crois que je voudrais tirer un trait sur mon passé pour arrêter de penser à mon amnésie. C'est pourquoi je ne voulais pas venir, au début. Et aussi parce que je pensais que vous n'étiez pas complètement équilibré. Mais je me suis dis que j'avais besoin de savoir qui étaient mes parents et pourquoi j'ai cette cicatrice.
- Celle qui longe tout l'intérieur de votre avant-bras ?
- Comment savez-vous ? -HoSeok remet sa manche sur sa peau, puisque que YoonGi en a parlé avant qu'il ne lui montre sa balafre.-
- Je l'ai vu. »

HoSeok s'apprête à lui demander comment, mais un grand homme entre dans la pièce et lance et repart:
« - C'est l'heure, YoonGi. Salle de réunion, maintenant. »

Le devin se lève, ses doigts frôlent un instant la main d'HoSeok  et dit en détournant les yeux :
« - Je suis désolé, mais nous allons devoir reporter notre rendez-vous. Vous ne pouvez pas assister à la réunion.
- Je comprends. »

YoonGi sourit, pas très grand mais assez pour qu'une étincelle atteigne ses yeux. Il pose sa main sur l'épaule d'HoSeok et se penche vers lui doucement en disant :

« - Mais je suis à présent sûr que vous pouvez nous aider. Revenez demain, même heure. Je m'arrangerais pour que nous puissions discuter convenablement. »

HoSeok hoche la tête, serre sa main tendue et sort du bureau.

Mais avant de partir, le devin l'arrête et  souffle faiblement :

« Puisse votre avenir être plus favorable que votre passé. »

HoSeok ne répond pas et rentre chez lui.

Il ne dort pas cette nuit-là.

Il pense.

Mais il ne se souvient pas. De rien.

C'est juste noir dans sa tête.

Ça le rend encore un peu plus triste.

Un peu plus vide.

Un peu moins vraiment lui.

Mais c'est comme ça, alors il ne se plaint pas.
Quand bien même ses souvenirs le rattrapent dans ses rêves pour s'oublier au réveil, en ne lui laissant que des traces physiques ; il ne dit rien.

Quand bien même il écrit sur tous les murs de son appartement des mots sans logique dont il ne se rappelle pas ; il se tait.

Quand bien même un homme au visage d'enfant lui laisse des lettres étranges et brûle sa peau de ses doigts ; il ne bronche pas.

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