Chapitre 6

La femme me regarde d'un oeil mauvais depuis que je suis entré. Elle est appuyée sur une table sur laquel j'aperçois une carte annotée au feutre rouge. Quand elle se rend compte que j'observe ce plan, elle le plie et le range dans sa poche arrière. C'est là que je vois le 9mm situé dans un holster dans son dos. Ça correspond parfaitement à l'impression de femme forte et indépendante qu'elle renvoie.

"C'est donc toi le messager ?" Me lance-t-elle sèchement avec un mouvement de la tête. J'ai été surpris, elle a un accent. Je ne m'y attendais pas. C'est un accent assez chantant que je connais. J'ai pensé en premier à un pays de l'Est car j'y ai déjà séjourné mais en l'entendant parler avec mon nouvel ami je crois plutôt que c'est une langue latine, du Sud.

"Il est muet ou quoi ? lâche-t-elle en me sortant de mes pensées.

- Nan... Mais je suis pas messager hein, j'ai juste une lettre à apporter mais c'est exceptionnel !

- Tu m'en diras tant ! Files-la-moi !

- Nan ! Ça ne vous regarde pas !

- Un conseil : quand tu demandes mon aide tu suis mes règles! Je me fous de lire tes histoires de cul ou je sais pas trop quoi mais moi je m'assure que t'apporte pas de message codé de l'autre côté! On risque déjà suffisamment, j'ai pas envie d'être accusée de trahison en plus !

- Ah mais c'est pas des histoires de... Nan laisse tomber mais de l'autre côté de quoi ?

- Il est pas des renseignements lui, ça c'est sûr! Pour info : le No Man's Land est tombé, maintenant la ligne de front nous sépare de votre destination !"

Et merde ! Je ne m'attendais absolument pas à ça! Je dois aller chez l'ennemi pour apporter la lettre à son propriétaire... Si on se fait choper c'est le peloton d'exécution! Mais quelle idée il a eu de vouloir faire ça !?

Je remarque que sa main est tendue vers moi depuis tout à l'heure. Je sors donc l'enveloppe de ma poche pour lui donner car là j'avoue que j'aurai besoin de son aide pour une telle opération. Mais qu'est ce que je raconte !? Je sais même pas qui elle est, comment je peux être sûr qu'elle puisse m'aider !?

En attendant elle a fini de lire et a posé mon colis sur la table.
Apparemment elle n'a rien a y redire. En le récupérant aussi tôt, je m'attire les regards moqueurs de mes compagnons d'un jour.
Elle rouvre sa carte et continue de l'annoter avec le feutre qu'elle sort de sa poche avant de nous expliquer le déroulement des opérations.

Mon hôte et moi partirons en voiture jusqu'à un canal d'où nous montrons dans un bateau avec lequel nous rejoindrons un réseau souterrain d'écoulement des eaux qui nous permettra de ressortir de l'autre côté de la ligne de front. Pendant ce temps, la jeune femme, elle, passera à pied par la forêt pour pénétrer discrètement dans un avant-poste ennemi y voler des papiers qui nous permettront de ne pas être abattu si on contrôle notre identité. Elle est courageuse de le faire seule, c'est très risqué ! Si c'était un mec j'aurais dit qu'il est couillu !

Elle se relève et se dirige vers une pièce à l'arrière du restaurant en nous invitant à la suivre, ce qu'on fait aussitôt.

Lorsqu'elle allume la lumière, les rangées d'armes accrochées aux murs de la pièce me font marquer un temps d'arrêt. C'est un véritable arsenal ! Il y en a pour toutes les catégories et tous les calibres. Pour qu'ils aient besoin de tels équipements c'est qu'ils doivent avoir une véritable raison de ne pas vouloir m'en dire plus sur leur vie.

Elle sort trois grandes manettes de transport d'armes et y range trois fusils d'assaut perfectionné et trois pistolets avec toutes les munitions et les accessoires nécessaires à une opération d'infiltration des lignes ennemies.
"Je prends celle-là et vous les deux autres" dit-elle en montrant la manette dans laquelle elle a mis le fusil le plus puissant.

C'est logique vu la répartition des tâches!
Elle me demande maintenant de lui remettre la lettre :
"Si je ne met pas le tampon de l'avant-poste sur l'enveloppe, elle sera immédiatement repérée comme étant une lettre clandestine lors d'un contrôle!"
En vue de mon hésitation à lui donner, elle ajoute :
"Et qui dit clandestine dit qu'on est morts ! La loi est plus... stricte là-bas"

De toute façon, je n'ai pas le choix de lui faire confiance, bien que cette lettre soit le dernier hommage que je rend à mon meilleur ami, je lui confie et elle le range dans la poche de son pantalon. "Vous pouvez y aller" dit-elle comme un inspecteur de police.
Mon nouvel associé prend sur le champs une des deux mallettes et, après avoir silencieusement attendu que je l'imite, rejoint la voiture, moi sur ses traces.

On aurait dit un rituel de soumission hiérarchique.

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