La lettre
Je marchai lentement vers la porte de mon sombre appartement. Sur mon parquet reposaient mes lettres comme à tous les matins. Des matins sans autres convoitise que de voir autre chose que des relevés de comptes. Comme à mon habitude, je me penchai, souffrant de ce mal de dos qui me tiraillait depuis mon plus jeune âge, et je pris mes lettres. Elles n’étaient pas bien lourdes, mais pas légères non plus, pour mes vieilles mains rongées par l’arthrite. Il me fallait m’avouer que je n’étais plus très jeune. Il y avait du nouveau dans ces lettres. Ainsi, ce que je désirais le plus allait peut-être se réaliser.
C’est à ce moment que je la vis. Une lettre d’une importance capitale. En ouvrant la lettre, je vis son écriture désordonnée, me donnant son adresse. C’était presque illisible, mais je savais que j’allais être capable de la lire correctement. Je parcourus les premières lignes. Cette personne m’était chère. Je la revoyais, toute petite, courant dans les champs, naïve et insouciante. Mon cœur s’emballa lorsqu’elle mentionna son amour pour moi. Mais le contraire arriva bien vite. Mon cœur s’emplit de colère et mes yeux, de rage. Comment osait-elle? Comment cette personne pouvait-elle, sans même me voir ou me toucher, me blesser ainsi? Comment cette personne, à qui je tenais tant, pouvait-elle avoir le scrupule de me faire cela, à moi? Je sentis à ce moment que je n’allais jamais le savoir, car la vengeance envahit mon corps. J’en radiais, à un tel point que le temps sembla soudainement s’arrêter.
Il était injuste que cela puisse se passer ainsi. Dès le moment où je sortis de chez moi, mon plan prit forme. Comme elle m’avait donné son adresse, je m’y rendis sur le champ. Je frappai à la porte. Ce fut quelqu’un d’autre qui m’ouvrit. Je vis rouge. La lucidité quitta mon esprit durant toute l’opération. Lorsque je sortis, mes vêtements étaient tachés, mais je ne m’en rendis pas compte.
J’avais toujours la lettre sur moi. Cette personne était maintenant libre. Et elle me donnait rendez-vous, ce soir, au parc, à 23 heures. Durant le reste de la journée, je me préparai psychologiquement à ma rencontre avec elle. Mais j’arrivai en retard à la rencontre. Je m’étais endormi sur une pensée d’elle puis je m’étais réveillé trente minutes passé 23 heures. Elle était toujours là. Lorsqu’elle me vit, elle me serra dans ses bras. Je décidai de lui dire ce que j’avais fait. Je me rendis alors compte que j’étais tombé dans une embuscade. Il y avait des policiers partout. Ils vinrent m’arrêter.
Je fus arrêté pour les meurtres des cinq derniers petits amis de mon frère. Je m’expliquai devant le juge, lui disant que mon frère n’aimait que moi, qu’il était injuste qu’il se tourne vers un autre homme que moi. Je fus envoyé en psychiatrie puis en prison.
Cela faisait dix ans que j’étais en prison. Ce fut un matin, en me levant, toujours souffrant d’un mal de dos, qu’on m’appela. J’avais reçu du courrier. Je pris la lettre avec violence. L’écriture que j’y vis me mit sens dessus-dessous. C’était mon frère. J’ouvris la lettre doucement et sortis le papier de ce même geste comme si j’avais peur qu’il se désintègre dans mes main. Il me disait qu’il m’aimait toujours, malgré ce que j’avais fait. Un petit sourire apparut aux coins de mes lèvres, qui disparut presque aussitôt. Il avait un autre homme dans sa vie.
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