Chapitre 21
— Réveille-toi, marmotte !
La rose, indifférente aux secousses impatientes de sa sœur, demeurait plongée dans ses songes. Rien, pas même l’ardeur de Sunshine, ne semblait vouloir troubler son sommeil. Pourtant, cette dernière ne baissait pas les bras. Elle redoubla d’énergie, et enfin, Erina quitta son monde onirique pour revenir à la réalité.
En ouvrant les yeux, la jeune femme aux mèches couleur pétale croisa le regard pétillant de sa jumelle, qui lui décochait son habituel sourire espiègle. Un souffle de soulagement envahit Erina. Que cela faisait du bien de la revoir ! se dit-elle, une chaleur douce se propageant dans son cœur.
— Bonjour, murmura-t-elle en se redressant et en raclant légèrement sa gorge. Combien de temps as-tu été debout ?
— Deux heures, répondit Sunshine avec légèreté. Mais dépêche-toi, Blaze vient nous chercher dans moins d’une heure.
Erina acquiesça et se leva sans protester.
— Attends-moi dans le salon, je me prépare.
Sunshine hocha la tête et s’éclipsa. Pendant ce temps, Erina s’affairait sous l’eau chaude, se laissant envelopper par sa chaleur avant de s’habiller et d’appliquer quelques touches de maquillage. Lorsqu’elle rejoignit sa sœur, un délicieux parfum de gourmandises flottait dans l’air.
— Tes petits-déjeuners m’avaient tellement manqué ! s’exclama-t-elle, les yeux brillants.
— Je sais, répondit Sunshine en lui désignant une place à table. Installe-toi.
Devant elles, une véritable fête pour les papilles : des pancakes dorés, des cookies moelleux, des jus fruités aux teintes éclatantes, et bien d’autres douceurs qui faisaient briller les yeux d’Erina. Sans attendre, elle se servit, ses gestes trahissant l’impatience d’une enfant devant ses friandises préférées.
Sunshine, quant à elle, remplit deux verres de jus d’ananas. Elles trinquèrent doucement, leurs regards chargés de complicité.
Une fois le petit-déjeuner terminé, les jumelles s’installèrent dans les canapés de cuir du salon. Erina, pensive, rompit le silence.
— Alors, dis-moi… Qu’as-tu fait toutes ces années ?
Sunshine détourna son regard vers la fenêtre, où des oiseaux virevoltaient avec insouciance. Inspirant profondément, elle murmura :
— Après le secondaire, je suis allée en tertiaire, tout comme toi, je suppose. Les débuts furent difficiles, mais grâce à Kalyss, j’ai tenu bon. Trois ans plus tard, diplôme en main, je me suis dirigée vers la pédiatrie, par hasard… mais j’ai adoré. Aujourd’hui, je suis en cinquième année, prête à concrétiser ce rêve.
Erina, émerveillée, sourit tendrement.
— Je suis tellement fière de toi… Mais, Kalyss, c’est qui ?
Sunshine, un éclat malicieux dans les yeux, répondit :
— Mon copain. C’est un chargé d’études marketing. Il va être muté à East Land, c’est une des raisons de mon retour.
— Et vous allez vivre ensemble ?
— Non, pas pour l’instant. On veut prendre notre temps, murmura Sunshine, l’air rêveur.
La conversation dériva vers les ambitions d’Erina, qui partagea ses projets dans la communication, les yeux brillants d'ambition.
Quelqu’un toqua à la porte ; Erina supposa qu’il s’agissait du bleu. Elle se leva avec grâce et alla ouvrir.
Lorsqu’elle entrouvrit la porte, son cœur s’emballa à la vue de son amoureux. Son éternel sourire, éclatant comme un soleil au zénith, illuminait son visage.
— Salut, murmura-t-il, sa voix chaude emplissant l’espace.
— Salut, répondit-elle dans un souffle.
— Tu es ravissante, chérie.
Un feu doux, presque timide, s’alluma sur les joues d’Erina, tandis qu’un sourire rêveur se dessinait sur ses lèvres. Au creux de son ventre, les papillons semblaient s’éveiller en un ballet frénétique. Jamais elle n’aurait imaginé qu’un simple compliment de la part du bleu pût provoquer une telle réaction en elle.
L’amour ne se définit pas, pensa-t-elle, il se ressent, il se vit. C’est une évidence, une vérité lumineuse.
— Toi aussi, tu es charmant, finit-elle par murmurer.
Le jeune homme, avec ses boucles d’un bleu profond, répondit par un baiser tendre, déposé sur ses lèvres avec une infinie douceur, avant d’entrer dans le cocon chaleureux de sa dulcinée.
Quand Sunshine aperçut le bleu, son visage s’illumina d’un sourire éclatant.
— Salut, Blaze ! lança-t-elle joyeusement.
— Salut. Comment vas-tu ?
— Bien, je suis contente d’être rentrée. Et toi ?
— Je vais bien aussi. Vous êtes prêtes ?
Les deux sœurs acquiescèrent d’un hochement de tête, leurs regards complices répondant à la question muette.
— Parfait, allons-y ! déclara-t-il avec entrain.
Une demi-heure plus tard, le bleu et les jumelles arrivèrent devant l’école du plus jeune de la famille Brizer. Blaze gara la voiture avec précision, puis sortit, suivi de sa bien-aimée et de sa meilleure amie d’enfance.
Erina aperçut les membres de sa famille, rassemblés à gauche de la porte d’entrée. Sans un mot, elle saisit la main de sa sœur et la pressa doucement, comme pour lui transmettre un fragment de son assurance. Sunshine tourna un regard inquiet vers elle, l’angoisse visible dans ses prunelles. Erina, consciente de la fragilité de cet instant, chercha à la rassurer avant qu’elles ne se présentent au reste de la fratrie.
— Ne t’inquiète pas, murmura-t-elle avec douceur, tout ira bien. Je suis là, et je ne te laisserai pas seule.
— Et s’ils ne veulent pas me voir ? Et si Connor refuse de me parler ? répondit Sunshine d’une voix tremblante.
Erina se souvenait qu’enfant, sa jumelle partageait une complicité unique avec leur frère aîné. Aujourd’hui, elle nourrissait l’espoir qu’il réagirait avec bienveillance en revoyant Sunshine.
— Tu as raison, tout ira bien. Marche derrière nous, on te dira quand on sera arrivés, dit-elle d’une voix apaisante.
— D’accord, merci de me rassurer. Je vous aime.
— Nous aussi, on t’aime, répondit le couple à l’unisson, leurs regards se croisant dans une tendre harmonie.
Quand ils arrivèrent devant le reste de la famille Brizer, Erina se retourna discrètement et chuchota à sa jumelle :
— On est arrivés.
Sunshine hocha la tête et tâcha d’ignorer l’angoisse qui montait en elle, son cœur battant à tout rompre.
Dayson, le premier à remarquer leur présence, ne semblait pas encore avoir aperçu Sunshine.
— Salut ! lança-t-il joyeusement.
Le reste de la famille se tourna vers le couple, un sourire accueillant aux lèvres.
— Salut ! répondit Blaze, accompagné d’un signe de tête.
Erina s’avança pour embrasser les membres de sa famille, serrant son frère dans ses bras avec affection. Pendant ce temps, Blaze restait en retrait, légèrement en retrait de Sunshine, qui se dissimulait toujours derrière lui.
— Comment ça va ? demanda Lilian Brizer, le patriarche de la famille, son ton chaleureux.
— Bien, et toi, papa ? répondit Erina.
— Je suis heureux. Mon fils va enfin être diplômé, déclara-t-il avec une fierté à peine dissimulée.
— Et nous nous retrouverons bientôt seuls dans cette grande maison, ajouta Lunaris, la mère de famille, un soupir mélancolique dans la voix.
— Ne vous inquiétez pas, on continuera à vous rendre visite, promirent en chœur les jumelles Lounéa et Nostra, dans un élan de tendresse.
Connor, le cadet de la fratrie, intervint alors, une ombre de nostalgie dans le regard :
— Si seulement Sunshine était là… Elle vous aurait tenu compagnie jusqu’à la fin de ses études de pédiatrie.
Un frisson parcourut Erina. Elle lança un regard à Blaze. Il lui répondit par un simple hochement de tête, l’encourageant. C’était le moment.
— Malheureusement, elle n’est pas là, soupirèrent leurs parents, la tristesse marquant leurs visages fatigués.
— Vous n’avez pas reçu mon message d’hier soir ? demanda alors Erina, tentant de garder son calme.
— Quel message ? s’enquit son petit frère, intrigué.
— Regardez vos téléphones, ordonna la jeune femme, d’un ton presque solennel.
Les membres de la famille Brizer s’exécutèrent sans un mot. Lorsqu’ils découvrirent le contenu du message qu’Erina leur avait envoyé la nuit dernière, un silence lourd tomba sur la pièce. Chacun releva les yeux, hébété, en direction de la jeune femme.
— Où est ma fille ? murmura Lilian, la voix tremblante d’émotion, des larmes menaçant de troubler son regard.
Erina se décala légèrement, poussant doucement pour que sa sœur prenne place entre elle et son amant. Le regard d'Erina, empli de douceur et de tendresse, se tourna vers la scène qui se déroulait devant elle, et un frisson de nostalgie parcourut son âme.
Lorsqu’elle aperçut les membres de sa famille, Sunshine sentit les larmes monter à ses yeux, ses lèvres tremblant de toute l'émotion qu'elle éprouvait. Dix longues années s’étaient écoulées depuis qu'elle n’avait pas vu ses parents ni ses frères et sœurs. Elle se promit, avec une ferveur silencieuse, de ne plus jamais les quitter, de rattraper ces années volées par la distance et l’absence.
La famille Brizer était enfin réunie, comme un puzzle dont chaque pièce retrouvait sa place.
Le bleu, ce regard d’amour et de promesse, se retira en douceur, laissant la douce Sunshine et sa meilleure amie entourées de leurs proches. Il se dirigea vers l’école de Dayson, trouvant sa place parmi les autres membres du groupe, emportant avec lui l’écho de ce moment de retrouvailles.
Le silence qui s'était installé fut soudainement brisé par la voix douce de Sunshine, un murmure fragile mais porteur d'une immense tendresse.
— Ne pleurez plus, je suis là maintenant.
— Viens dans nos bras, lui dirent ses parents d'une voix émue.
Elle se jeta dans leurs bras, cherchant refuge dans cette étreinte qui effleurait les frontières du temps. Sa lutte contre les sanglots, contre l'émotion trop forte, était presque invisible, mais ses bras tremblaient sous l’intensité de son amour retrouvé.
Erina, émue au plus profond de son être, observa cette scène, les yeux brillants de larmes. Ce moment, elle en était sûre, resterait gravé dans leurs mémoires à jamais.
Sunshine se détacha lentement de l’étreinte de ses parents, ses bras s’étendirent ensuite vers ses frères, puis vers ses sœurs, chaque geste imprégné de l’amour pur et ancien qu’elle leur portait. Le poids de l’émotion, lourd et doux à la fois, laissait encore son cœur ébranlé.
Quelques instants plus tard, la rose aux cheveux lisses, d'un geste délicat, interrompit le flot d'émotions en percevant que la cérémonie touchait à sa fin.
— Désolée de mettre fin à ce moment magique, mais il est temps pour Dayson de recevoir son diplôme, dit-elle, un sourire triste mais plein de fierté sur les lèvres.
— Je vous expliquerai tout quand nous serons à la maison, leur promit-elle, sa voix emplie de tendresse.
Ainsi, la famille Brizer entra dans l’école de Dayson, les yeux rougis mais le sourire illuminant leurs visages, comme un rayon de soleil après la pluie.
Quelques heures plus tard, dans le salon du domicile familial, l’atmosphère était empreinte d’une douceur nostalgique. Des souvenirs infiniment précieux envahissaient la jeune femme aux cheveux lisses couleur guimauve. Elle aurait voulu ne jamais quitter cette maison, ce havre de paix aux murs de soie et aux sols en carrelage de satin. Mais la vie, avec ses méandres imprévisibles, en avait décidé autrement.
Erina se retrouva assise entre Dayson et sa sœur jumelle. En face d'eux, les aînés de la famille, Lounéa, Nostra et Connor, semblaient tous aussi émus qu’elle. À leur droite, leurs parents, souriants et les yeux brillants, complétaient le tableau.
Sunshine, la voix chargée de tout ce qu'elle portait en elle, ouvrit le bal.
— Je vais commencer à tout vous raconter. S'il vous plaît, ne me coupez pas.
Le reste de la famille hocha la tête, trop tendu pour répondre quoi que ce soit. L'ambiance était étrange, le suspense à son comble, chaque membre de la famille attendant avec impatience de découvrir les circonstances de la disparition de la jeune femme à la crinière lisse, ainsi que la vie qu'elle avait vécue, loin d'eux, pendant dix longues années.
— Le jour où je suis allée manger des pâtisseries avec Erina, tout se passait bien. Nous étions dans la dernière boulangerie quand Mona m'envoya un message pour que je vienne la rejoindre au "Jewels Park". Je le dis à Erina, en ajoutant que nous nous retrouverions à la maison, mais ce jour-là, je ne rentrai pas. En arrivant au parc, Mona me tendit un gâteau à la cannelle. Comme j'en raffolais, j'ignorais qu'il contenait de la mélatonine. En une bouchée, je m'endormis instantanément. Lorsque je me réveillai, je me trouvais dans une chambre qui n'était pas la mienne, face à un couple qui ne ressemblait en rien à papa et maman. Bien évidemment, je demandai des explications. Mona m'avait donné rendez-vous au "Jewels Park" pour que son oncle et sa copine me kidnappent. Selon eux, j'étais la fille qu'ils avaient toujours rêvé d'avoir. Ils m'expliquèrent que je devais vivre avec eux à Safran Hills, comme si j'étais leur enfant, sinon ils s'en prendraient à vous. Je ne voulais pas qu'ils touchent aux personnes que j'aimais plus que tout, alors j'acceptai. Pendant presque dix ans, j'ai été Sunshine Perkinson. Vous m'avez terriblement manqué, mais je ne pouvais pas revenir. J'étais jeune, et je ne connaissais pas assez Séos pour revenir à East Land de mes propres moyens. Quand j'atteignis ma majorité, je remerciai Kaiden et Maya de m'avoir accueillie, et grâce aux économies que j'avais accumulées avec mes petits jobs, je m'installai seule à Safran Hills. Je commencai mes études de pédiatrie. J'avais appris, au fil de mes voyages, à connaître tous les recoins de Séos, mais je n'étais pas prête à revenir dans vos vies. Il y a quelques mois, je croisai Jayfron dans un bar, et grâce à lui, je suis de retour. Je suis enfin de retour, pour de bon.
Erina n'aurait jamais cru que sa sœur ait pu être une ancienne victime de kidnapping. Mais à présent, elle s'en moquait. Elle avait retrouvé sa moitié. Elle espérait qu'elles retrouveraient leur complicité, les habitudes de jumelles, et qu'elles ne se sépareraient plus jamais.
— Nous ne te laisserons plus partir, désormais, lui dirent ses parents, ses frères et sœurs.
— Ne vous inquiétez pas, je me suis définitivement installée à East Land.
— Oui, elle vit avec moi maintenant, ajouta la rose.
— Tu ne veux pas revenir avec tes vieux parents ? demanda Lilian à la jeune femme à la crinière raide.
Sunshine se tourna vers sa sœur.
— Ça ne te dérange pas si je reviens à la maison ?
— Pas du tout, ils auront de la compagnie. Dayson va habiter avec sa copine.
— D'accord.
— Je viendrai t'aider à t'installer dans la semaine, lui dit Connor, d'une voix calme mais pleine de promesses.
— J'ai hâte que tu fasses la connaissance de ma petite famille, s'exclama Lounéa, les yeux brillants d'excitation.
— Je suis contente que tu sois présente lors de la naissance des triplés ! s'enthousiasma Nostra, un sourire radieux éclairant son visage.
— Je suis tellement heureuse d'être de retour. Je vous aime, murmura-t-elle, la voix emplie d'émotion, comme si ces mots étaient enfin libérés d'un long silence.
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