Chapitre 21 (2/2)

Tys leva les yeux vers l'entrée du canon. L'espace était minuscule, mais ça tombait bien ; Tys lui-même était bâti comme un spaghetti. Plutôt grand, mais très mince. Il se faufila entre les bords de bois, se tortillant de gauche à droite et avançant un centimètre à la fois, puis tomba de l'autre côté, tout près des quelques boulets qui trainaient là. Il se redressa avant de se cogner la tête dessus, épousseta rapidement ses vêtements trempé de gouttes de la mer et imprégné de la poussière du sol, puis observa longuement autour de lui.

Il était dans la cale. Quatre canons s'alignaient sur sa droite ; à gauche, des lits à baldaquin, tous vides, se balançaient au rythme du roulis des vagues. Des portes closes menaient à d'autres pièces, sur le mur d'en face ; Tys devinait des dortoirs privés pour les privilégiés, la sale des cuisines, les toilettes, entre autres.

Personne en vue. Il y avait au moins ça de bien. Tys pouvait explorer comme bon lui semblait, et surtout, chercher Egrim et Danayelle. Il tenta d'entrer en contact avec Egrim, mais il n'y avait personne pour lui répondre. Ce qui signifiait qu'il dormait... ou qu'il était évanoui... ou pire encore.

Il dort, s'efforça de se convaincre Tys. Mais il n'y croyait pas.

Il pensa cette fois à Danayelle. Même si celle-ci n'avait aucune compétence en télépathie, il pourrait tout de même communiquer avec elle, d'une façon un peu plus primitive. Il ressentait ses émotions, qui lui semblaient très confuses. Trop neutre pour la situation qu'elle vivait présentement... si elle était réellement emprisonnée quelque part ici, comme il s'en doutait.

Tys avançait vers le fond de la cale, se rapprochant d'un tas des caisses empilé tout au fond. Il s'arrêta juste avant, puis soupira entre ses lèvres. Commotion. Elle s'est pris un grave coup sur la tête. Bon sang, dans quoi se sont-ils foutus ?!

Tys reprit la marche, plus lentement cette fois. Il ressentait l'urgence, et pourtant, ça l'angoissait à un point qu'il avait l'impression de tout faire au ralenti. Il se concentra sur ses dons, la télépathie lui permettant d'entendre les pensées des gens autour de lui et, surtout, espérant capter ceux de ses amis et ainsi découvrir où ils sont. Il en était convaincu ; ils étaient tout près. Il sentait deux présences à quelques mètres de lui, masculines et féminines. C'était forcément Egrim et Danayelle.

— Hé, ho, fit-il à mi-voix. Votre sauveteur est là. Sortez de votre trou.

Puis, si vite qu'il n'eut le temps de réagir, quelqu'un bondit sur lui depuis les caisses, l'empoigna par le col de son blouson et l'entraina avec lui dans sa cachette, le projetant au sol avec assez de force pour l'assommer. Le tout s'était produit en à peine une seconde ; quand Tys se força à ouvrir les yeux, il découvrit, avec un mélange d'effroi et de stupéfaction, qu'un elfe était grimpé sur lui, un genou au-dessus de sa poitrine et une épée sous la gorge. Et à ses côtés, un petit dragon grognait en montrant les dents.

— T'es qui, toi ?! s'exclama l'autre.

Tys déglutit, incapable de répondre. Il était totalement pris au dépourvu. Qui se balade encore avec des épées ?!

Il n'a pas l'air méchant, je suis probablement un peu excessif, entendit-il depuis les pensées de son agresseur. Mais non, c'est peut-être une ruse. Il doit être de mèches avec ses pirates.

— Je ne suis pas un pirate, fit Tys d'une voix tremblante. Je suis de Nocksor.

Tys leva lentement un doigt en direction de l'île, même si elle était camouflée par les murs de bois de la coque du bateau. Se faisant, il pointa plutôt un fille qui était partiellement cachée derrière le type à l'épée. Une sirène, comme il ne manqua pas de remarquer par ses écailles violettes au visage.

Nocksor ? fit l'autre. Oh merde, pas encore...

Par cette simple pensée, Tys se posa tout un tas de questions. Qui pouvait dire « merde » pour qualifier Nocksor ? Au départ, il en fut profondément insulté. D'ordinaire, tout le monde adorait cette île paradisiaque, l'endroit par excellence pour passer les vacances. La peur d'avoir une lame aiguisée sous la gorge et un dragon enragé prêt à lui cramer les sourcils diminua d'un cran, alors qu'il se mettait enfin à réfléchir à la situation. Sans même lire dans leurs pensées, il dévisagea un instant la sirène, l'elfe et le dragon. Et quatre secondes plus tard exactement, il pouffa de rire tout en se redressant sur les coudes, obligeant Leerian à s'éloigner un peu au risque de lui trancher réellement la gorge.

— Oh, je vois ! Vous êtes Mishi et Leerian ! Et Jean ! Oh, ouah. Honoré de vous rencontrer.

Il posa un doigt sur le plat de la lame et la repoussa lentement, le sourire aux lèvres.

— Votre réputation vous précède, Celeyste. Je crois même que je devrais être étonné que vous ne m'ayez pas tué directement.

Leerian leva à nouveau son épée, insulté de ses paroles, mais Mishi l'attrapa par le coude et le força à s'éloigner. Elle lui lança un regard lourd, comme une conversation muette, que Tys entendit clairement résonner dans son crâne.

Encore une première impression de gâcher !

— Comment tu nous connais ? demanda Mishi.

— Parce que tout le monde me connaît, fit Leerian dans un grognement.

— Toi, oui. Pas moi, lui rappela-t-elle. Et encore moins Jean.

Tys leva les mains et recula d'un pas. La sirène semblait gentille malgré son ton sérieux, alors que le Celeyste jouait les machos tout en s'efforçant de s'empêcher de trembler.

La rencontre était à peine entamée que Tys avait déjà tout compris de ce drôle de personnage. Tout le monde le prenait pour un gros dur, mais il suffisait d'être télépathe pour comprendre en quelques secondes que c'était sa façon de camoufler sa peur. En plus, maintenant qu'il était debout devant lui, il remarquait qu'il était plus petit que ce à quoi il s'était imaginé.

— En fait, oui, ton nom était dans le journal, dit-il pour Mishi. Mais ce n'est pas comme ça que je connais votre histoire. (Il sourit, se donnant des airs mystérieux, avant d'ajouter :) Je suis un ami d'Egrim et Danayelle. À l'Institut, Egrim était mon seul ami. Puis il a volé au secours de Danayelle. Puis Danayelle est revenue, et elle m'a tout raconté. Puis, enfin, je suis devenu l'ami de Danayelle. Jusqu'à ce que, il y a une semaine, nous partions chacun de notre côté. Elle à Stanmore et moi ici, à Nocksor. Et si je suis là, c'est parce que j'ai entendu un appel à l'aide, et j'ai de bonnes raisons de croire que ça vient d'Egrim. Donc je le cherche.

Mishi et Leerian s'échangèrent un regard. Tous deux se souvenaient clairement d'Egrim disant avoir eu un seul ami à l'Institut ; un télépathe. Pourtant, ils étaient bien incapables de se rappeler de son nom.

Mishi décida de procéder à un test tout simple.

— Donc tu es télépathe, c'est ça ?

— Je le suis.

— Je pense à quel chiffre ?

Tys pouffa de rire. Elle le prenait pour un charlatan qui faisait des tours de passe-passe dans la rue ?

— Six, répondit-il aussitôt. Et je peux aussi dire que ce chiffre à une signification toute particulière et que tu n'apprécierais pas que je le dise devant tes quatre amis.

Mishi rougit si fort qu'elle en camoufla ses écailles. Leerian fronçait les sourcils, dévisageant l'un et l'autre à tour de rôle.

— Et pour dernière information ; je m'appelle Tys. Maintenant, sauf votre respect, j'aimerais bien sauver la vie de mes potes. Où sont-ils ? Derrière cette porte ? Merci.

Tys se faufila entre Mishi et Leerian pour atteindre la porte qui était derrière eux. Mais il n'avait pas fait un pas que Leerian l'arrêta dans son geste, une main sur l'épaule.

— Non, non ! Attends ! Si on ouvre, les gardes vont savoir que nous sommes là ! Ils peuvent se débrouiller sans nous.

— Alors pourquoi Egrim m'a appelé à l'aide ?

Leerian ne trouva rien à répliquer. Étaient-ils si mal en point ? Mishi l'avait convaincu de ne rien faire, mais à en croire ce télépathe, ils auraient peut-être dû.

— Oui, vous auriez dû, grommela Tys tout en tirant sur le cadenas de la porte. Ah, merde...

Il leva les yeux vers Leerian, qui était tout près de lui à l'observer. Tys était légèrement intimidé par le Celeyste qui venait tout juste de le menacer avec une épée, mais il savait qu'il ne lui ferrait rien de plus. Ce type était dominé dans l'instinct de survie.

— Toi, tu peux faire sauter le cadenas ? Tu es super fort, non ?

— Comment... non, bredouilla Leerian. Qu'est-ce qui te fait croire ça ?

Tys soupira à nouveau, puis s'arrêta de tirer pour se mettre face à lui. Leerian avait quelques centimètres en moins, ses yeux en ligne du nez de Tys. Ce n'était pas une grande différence, mais pour un membre de la famille royale, Tys était déçu. Il l'avait imaginé faisant les deux mètres de haut, minimum.

— Ils n'ont pas de temps à perdre, dit Tys en pointant la porte du pouce. Mais si tu veux vraiment des explications... je te rappelle que je suis de Nocksor. Je n'étais peut-être pas sur l'île, il y a six mois, mais la rumeur s'est répandue comme une trainée de poudre. On sait tous que t'es un loup-garou. Par conséquent, t'es assez fort pour casser ce verrou, alors vas-y.

Cette fois, c'était Leerian qui était rouge de honte. Il eut une soudaine envie de s'enfoncer la tête dans le sable, mais jugea plus productif de faire ce que ce télépathe lui avait demandé. Il s'approcha, glissa deux doigts sous la barre du cadenas et tira ; il se cassa aussitôt en deux bouts de métal tordu, tombant au sol en cliquetant l'un contre l'autre. Tys lui fit un sourire fier, puis ouvrit la porte et s'aventura à l'intérieur.

Tys fit un pas dans la pièce avec la prestance d'un super héros délivrant des otages. Mais un seul regard à ses amis lui refila une affreuse envie de gerber. Il dévisagea tour à tour Egrim, Danayelle et une fée ; tous attaché dans un coin différent par des chaines épaisses, des blessures barbouillées de sang. On aurait dit des chiens après un combat.

Mishi le dépassa, lui enfonçant un coup de coude au passage, et se précipita vers Danayelle. Celle-ci avait un sac sur la tête, que Mishi s'empressa de retirer. Elle découvrit en dessous Danayelle avec des yeux dans le vague et d'énormes cernes, et ses cheveux, d'ordinaire si soyeux, complètement emmêlé.

— Oh non, Dana, fit-elle dans un murmure. Qu'est-ce que t'as ?

— Ma tête, grommela Danayelle d'une voix faible.

Mishi passa une main sous ses mèches, derrière son crâne, et sentit une grosse bosse sous ses doigts.

Leerian s'était agenouillé aux côtés de Narsa, qui était la plus près de la porte. La fée n'était pas dans un meilleur état que la télékinésiste. Son flair surdéveloppé captait une puissante odeur de sang. Résistant à l'envie de s'éloigner, il prit son vêtement délicatement et le releva pour voir sa hanche charcutée. Il grimaça en détournant le regard, puis leva les yeux pour croiser ceux de Narsa.

— C'est dégueu, hein ? fit-elle d'une voix faible.

— Tu tiens le coup ?

Narsa ne répondit rien. Il était évident que non, mais elle s'efforçait de faire bonne figure malgré tout. Leerian ne put qu'éprouver de l'admiration pour la fée ; elle était sacrément forte rien que pour réussir à ne pas se plaindre.

Tys, lui, s'était assis devant Egrim. Celui-là était complètement dans les vapes, les yeux fermés et la tête appuyée contre le mur. Tys lui prit la tête à deux mains pour la remettre en bonne position, ses doigts sur ses tempes. L'une d'entre elles était teintée d'une étrange couleur violette, et du sang séché se mêlait à ses cheveux blancs.

Jean était à ses côtés, grattant doucement sa jambe en geignant comme un chiot.

— Toujours aussi stupide que la dernière fois qu'on s'est vu, dit Tys pour lui-même. Je savais que ça lui retomberait dessus un jour...

Tys soupira, puis ferma les yeux pour mieux se concentrer. Il pensa « réveille-toi ! » et, quand il ouvrit à nouveau les yeux, il remarqua que ceux d'Egrim s'étaient ouvert également. Deux petites fentes laissant tout juste apercevoir un bout de ses iris pâles.

— Salut, mon pote. Tu te souviens de moi ?

Les yeux d'Egrim se refermaient déjà. Tys lui tapota les joues pour le maintenir éveillé.

— Non, non, il faut que tu restes avec moi.

Derrière lui, Leerian et Mishi s'étaient approchés. Leerian s'agenouilla à ses côtés et retira le ruban qui lui enserrait la bouche.

— Soigne-toi, dit-il d'un ton pressant.

— Je n'ai pas la force, dit Egrim dans un souffle.

Tys leva les yeux vers Leerian, puis reporta son attention sur Egrim. Il savait comment soigner ? Tys eut du mal à se débarrasser de son sourire, malgré la situation critique. Il est vraiment un mage. Ça fait trop bizarre.

— Prends la mienne, dit cette fois Mishi en s'agenouillant de l'autre côté de Tys. Tu te souviens ; comme dans la forêt.

Egrim secoua la tête. Ça ne marchait pas en ce sens. Ou peut-être que si, mais il n'en savait rien, et le risque était trop grand.

Ses yeux se fermaient à nouveau. Tys jura entre ses dents et lui balança une claque.

— Moi, je vais t'en donner, de la force. Écoute-moi bien, petit crétin ; tu débordes d'énergie !

Sur ses simples mots, Egrim écarquilla yeux. Il se redressa, échappant aux mains de Tys qui maintenait sa tête en l'air et Jean qui continuait de gratter sa jambe. Il dévisagea Leerian, Mishi et Tys. Surtout ce dernier. Puis il tenta de se lever, mais ses chaines l'en empêchèrent.

— Ouah, je... je déborde d'énergie, dit-il dans un rire.

— Ça ne va pas durer, alors soigne-toi au plus vite !

— Dana en premier...

— Non ! Toi-même ! fit cette fois Leerian. Ensuite, tu pourras t'occuper les autres.

Egrim fit la moue. Son côté gentleman l'obligeait de prendre soin de la blonde en premier. Mais il devait admettre que, s'il ne se prenait pas de lui-même en charge d'abord, comment pourrait-il en faire autant pour ses amies ? À peine une dizaine de secondes était passée depuis le tour de magie de Tys qu'il sentait déjà ses jambes trembler. Il posa une main sur son bras mutilé et murmura la formule « shiernelt ». La lueur apparut entre ses doigts, le sang s'assécha sur sa peau et la blessure se referma, ne laissant qu'une petite cicatrice. Il refit de même pour sa tête. Et par le temps qu'il termine, il avait perdu tout semblant d'énergie. Il s'assit à nouveau, à bout de force. Mais au moins, cette fois, il allait bien. Il allait récupérer de lui-même.

— Détachez-moi, dit-il dans un souffle.

Leerian s'occupa de casser ses chaines à main nues. Tys le dévisagea, impressionné d'une telle puissance.

— Laissez-moi une minute, les filles, dit Egrim dans un filet de voix. J'arrive...

— Ne te presse surtout pas, dit Narsa dans son coin.

— Pas pour toi. Seulement pour Dana.

Egrim pouffa de rire pour lui-même, puis ferma les yeux en soupirant. Il resta ainsi pendant une longue minute avant d'avoir le courage de se trainer à quatre pattes jusqu'à Danayelle pour la soigner. Encore une minute de pause et, cette fois, ce fut pour Narsa. Et enfin, il se laissa tomber à plat ventre au milieu de la pièce, sans plus bouger. Jean vint aussitôt se rouler en boule sur son dos, ronronnant comme un chat.

Leerian se leva à son tour pour détacher les filles. Elles semblaient toujours mal en point, mais au moins, elles n'avaient plus de blessure ouverte. Danayelle réussit même à lui sourire.

— Maintenant, j'ai le droit de demander ce qu'il vous est arrivé ?

Tous les regards convergèrent vers Tys, qui était assis au fond de la pièce. Danayelle commençait tout juste à assimiler le présent ; elle se redressa soudain, comme si elle reprenait vie.

— Tys ?! C'est vraiment toi ?

— Salut, dit-il simplement. C'est moi. Je dirais bien « ça fait longtemps », mais, dans le fond, ça date de la semaine dernière.

Danayelle se leva et fit un pas vers Tys, dans l'idée de lui faire un câlin, mais le peu de couleur qu'elle avait retrouvé quitta son visage et elle se laissa lentement retomber dans son coin.

— J'ai encore la tête qui éclate, fit-elle platement.

— Je ferai mieux la prochaine fois, marmonna Egrim.

— Ne t'embête pas, Egrim... ce n'est plus le même genre de douleur. Plutôt de la fatigue.

— Vous avez tous besoin de soins et de repos, je crois, dit Tys. Vous serez bienvenue sur Nocksor... enfin. Pour quelques jours, pas plus. (Il lança un regard vers Leerian, qui baissa aussitôt la tête en rougissant.) La pleine lune n'est plus très loin, et j'aimerais éviter un second carnage.

— On ne peut pas aller sur Nocksor, dit Leerian.

— Tu ne veux pas aller sur Nocksor, le corrigea Mishi. T'as honte ?

— Putain, oui !

Tys pouffa de rire. Il ne s'était pas attendu à ce genre de parole de la part d'un roi. Mais en remarquant que tous les autres étaient sérieux, il ravala son hilarité.

— Il a raison, dit cette fois Danayelle. Si on quitte ce bateau, nous n'aurons probablement pas l'occasion d'y remonter avant qu'ils ne repartent. Et nous aurons fait tout ça pour rien.

Tys ouvrit bêtement la bouche. Il n'y comprenait rien. Il fut tenté de lire dans leurs pensées pour y voir plus clair, mais préféra éviter. Il s'y refusait par simple politesse, même si ça lui échappait toujours dans les moments de stress.

— Donc... vous n'avez pas été kidnappé ?

— Oui et non, dit Danayelle. C'est un peu compliqué.

Egrim se redressa, faisant tomber Jean qui grogna sauvagement. Il se frotta les deux mains sur le visage, bailla, puis expliqua :

— Nous trois, dit-il tout en désignant Danayelle, Narsa et lui-même, sommes kidnappés. Mais eux (il pointa cette fois Leerian, Mishi, et encore Danayelle) sont des passagers clandestins. (Il pouffa d'un petit rire aigu, avant d'ajouter :) Dana a été clandestinement kidnappée.

— Joliment dit, fit Danayelle d'un air faussement impressionné.

— Pas de sarcasme, prévint Leerian. C'est plus ou moins un mensonge.

Danayelle se mordit les lèvres et fit un sourire désolé.

— Mais donc, insista Tys, qui veut rester et qui veut partir ?

— Moi, je veux partir, fit Narsa.

— C'est un peu compliqué, au point où on en est, répliqua Egrim. Quand les pirates vont se rendre compte que vous avez brisé le cadenas de la porte, que nous ne sommes plus attachés, et que nous sommes cinq aux lieux de trois... en fait, plutôt six, avec Tys... Et sept avec Jean, ajouta-t-il au grognement du dragon. Pour ne nommer que ça. Ça va péter à leur prochaine ronde.

— Je les tue tous et on prend le bateau, dit Leerian avec sérieux.

— On se calme, le macho. Même si on faisait comme ça, nous n'arriverions jamais à faire naviguer ce gros machin.

— Alors on est cuit ? intervint Mishi. Notre seule chance de salut et de s'enfuir dans le temps qu'on le peut encore.

Tous gardèrent le silence, tentant de réfléchir à une solution. Surtout Leerian ; il jugeait être allé trop loin pour abandonner. Après tous, s'ils étaient au large de Nocksor, c'était déjà assez près du point le plus éloigné de Nyirdall qu'il n'avait jamais atteint.

Tys se retourna vers le mur de bois et regarda dehors par une petite fente. Au loin, il voyait son île natale. Le navire n'avait pas bougé, ou à peine ; l'encre était toujours en place, alors que les radeaux des marchands, chargés chacun de caisses d'ananas ou de minerais, s'approchaient lentement. Tys estimait qu'ils avaient, au mieux, une vingtaine de minutes avant de prendre une décision, guerre plus.

— Il va falloir que vous vous grouiller pour trouver un plan, les prévint-il. Moi, en tout cas, j'ai une alternative à vous proposer... mais ça causerait ma perte. Alors, expliquez-moi en détail ce qui se passe ici. 

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