Chapitre 6
Danayelle avait passé la pire nuit de son existence. Elle avait marché droit vers le sud-sud-ouest, comme prévu ; du moins, elle espérait. Elle avait dormi au pied d'un arbre, dans les feuilles mortes et les branches qui lui piquaient la peau, et s'était réveillée avec un énorme mille-pattes coincé dans les cheveux. Elle avait hurlé, et la panique avait déclenché sa télékinésie qui avait arraché l'arbre de ses racines. Il avait failli lui tomber sur la tête, et pour un peu, elle se serait fait écraser. Heureusement qu'elle avait eu le réflexe de se sauver, emportant ses affaires avec elle.
Elle s'arrêta cinq minutes plus tard, à bout de force. Elle n'avait pas l'habitude de courir, ni même de faire une quelconque activité physique. Elle avait maintenant besoin de manger pour recharger ses batteries.
Danayelle trouva des champignons. Convaincue qu'ils étaient comestibles, elle choisit de les prendre plutôt que gaspiller les pommes qu'elle avait dans son sac. Évidemment, ils étaient vénéneux et Danayelle passa plusieurs heures complètement dans les vapes, à halluciner et à voir des genres de fées miniatures qui se moquaient d'elle.
Quand elle retrouva le plein contrôle d'elle-même, le soleil avait déjà recommencé à descendre dans le ciel. Danayelle grogna ; elle voulait faire vite, mais elle était aussi lente qu'un escargot. Soudain, elle trouva quelque chose qui pourrait l'aider à avancer plus rapidement ; une monture.
Danayelle s'arrêta de marcher, laissant tomber son sac à ses pieds. Elle était arrivée à une clairière parsemée de petites fleurs jaunes. L'odeur sucrée qu'elles dégageaient réussit à remettre un peu d'espoir dans le cœur de Danayelle.
Tout au fond du champ, quelques licornes broutaient les plantes, balançant leur queue d'un sens et de l'autre. Il y en avait quatre ; toutes d'une robe d'un blanc immaculé, une longue corne brillante comme des perles et éblouissante dans la lumière du soleil. C'étaient de grands chevaux, faisant plus de deux mètres cinquante. Mais l'un d'entre eux était beaucoup plus petit ; c'était un poulain, âgé de quelques mois seulement, qui suivait encore sa mère à la trace.
Ils sont magnifiques, pensa Danayelle, qui avançait lentement à leur rencontre. Elle n'en avait jamais vu de ses propres yeux, mais elle avait beaucoup lu sur cette espèce. Même si c'étaient en général des animaux sauvages, ils se laissaient facilement domestiquer. Peut-être que je pourrais en convaincre un de me sortir de cette forêt...
Il ne restait plus que trois mètres entre Danayelle et les licornes quand l'une d'entre elles leva la tête. C'était le poulain qui, intrigué par la nouvelle venue, fit quelques pas lents vers l'elfe. Danayelle sourit, confiante. Tout semblait dans la poche. Elle redressa le dos, tendit les doigts vers son museau, et s'approcha encore plus.
C'était un mouvement trop brusque pour l'animal sauvage, qui henni en pointant sa corne vers Danayelle. Elle arrêta aussitôt de respirer, convaincue qu'il allait la darder en plein cœur. Elle leva les mains comme une innocente, mais c'était le geste à éviter. Lever les mains devant une licorne ; elle va croire qu'on veut l'attaquer. Alors celle-ci attaqua en premier.
Danayelle écarquilla les yeux devant la si magnifique bête qui s'élançait pour la tuer. Elle hurla, s'accroupit en se protégeant la tête de ses bras. Et une seconde plus tard, la licorne fit un vol plané, s'écrasant le dos contre le tronc, et elle tomba au sol en un hennissement déchirant de douleur.
Danayelle se releva lentement, le souffle coupé. Encore une fois, sa télékinésie avait agi à son encontre. Elle lui avait sauvé la vie sur le moment, mais en retour, elle avait blessé une licorne !
— Oh, non, gémit Danayelle.
Elle fit un pas vers l'animal, souhaitant apporter son aide, mais le reste du troupeau s'élançait déjà pour venger le poulain. Trois grandes licornes, majestueuses et dangereuses, leurs cornes tranchantes en avant, galopaient vers Danayelle.
Ça y est, ma fin est venue. Mon aventure va se terminer rapidement, on dirait.
Soudain, l'elfe sentit quelque chose la percuter de côté, la faisant dévier de la trajectoire des équidés. Elle tomba dans les fleures jaunes, plusieurs lui entrèrent même bien profonds dans la bouche. Elle entendait toujours les hennissements et les coups de sabot dans l'herbe. Et aussi, elle percevait une voix prononçant une langue étrange, comme une chanson sans rime. Lentement, sans risquer de mouvement brusque, Danayelle se redressa sur un coude.
À ses côtés, un garçon aux cheveux argentés faisait face aux chevaux, leur parlant doucement. Les mains dans le dos et la tête basse, il montrait un véritable respect aux licornes, qui relevèrent leurs cornes vers le ciel.
Leerian flatta la plus près sur le museau et lui susurra des mots réconfortants en elfique. Puis, son attitude changeant radicalement, il baissa le regard vers Danayelle. Celle-ci déglutit, remarquant la colère que reflétaient ses yeux jaunes.
— Qu'est-ce qui t'a pris ?! s'exclama-t-il soudain.
— Quoi ? fit Danayelle d'une toute petite voix. Mais je... j'ai, enfin...
Leerian ignora la suite de son baragouinage. Il courut vers le poulain blessé, s'accroupissant à son chevet. Danayelle l'observa de loin, de plus en plus nerveuse. Elle n'osait pas se relever, par peur d'attirer à nouveau l'attention des licornes sur elle.
Leerian passa sa main le long du dos, de la crinière jusqu'aux reins de l'animal, lentement pour bien sentir tous les os. Rien ne semblait déplacé, mais le poulain hennit de douleur quand Leerian toucha le point d'impact.
— Ça va aller, murmura-t-il en elfique. Tu n'as rien de cassé.
La jeune licorne cligna des yeux avec reconnaissance. Les autres membres du troupeau s'étaient regroupés autour de lui, donnant l'impression à Leerian d'être un docteur. Il sourit doucement, se leva avec lenteur, sans mouvement brusque, et revint auprès de Danayelle. Dès que leurs regards se croisèrent, Leerian ressentit une vive colère bruler dans sa poitrine. Sans ménagement, il se planta devant Danayelle, l'agrippa par les épaules et la remit debout.
— C'est quoi, ton problème ? fit-il d'un ton hargneux tout en la reluquant de haut en bas. Tu aurais pu le tuer ! À sa taille, il ne doit pas avoir plus de six mois. C'est un bébé !
— Je n'ai pas fait exprès, répondit Danayelle d'une toute petite voix.
— Pas fait exprès ? Bon sang ! Ne me dis pas que tu as trébuché contre une racine et accidentellement balancé une licorne à l'autre bout d'un champ !
— Je n'ai pas fait exprès ! répéta Danayelle avec plus de force. Je te le jure...
Leerian avait du mal à y croire, mais préféra lui accorder le bénéfice du doute. Après tout, avait-il le droit d'ignorer ses supplications ? Il était celui qui avait tué un cerf et dévoré son cœur quelques jours plus tôt.
En soupirant, Leerian lâcha les épaules de Danayelle et recula d'un pas. Il détourna le regard, embarrassé, avant de le reporter sur la blonde.
— Très bien. Il s'est passé quoi, alors ?
Ce fut au tour de Danayelle d'être mal à l'aise. Au loin, les licornes étaient attroupées autour du poulain. Celui-ci s'était relevé, ne semblant effectivement pas blessé. Mais Danayelle se sentait toujours autant mal.
— Je n'arrive pas à contrôler ma télékinésie, avoua-t-elle honteusement.
— Il existe un institut pour ça.
Danayelle serra les poings. Cet elfe aux cheveux d'argent se prenait vraiment pour plus malin que ce qu'il était ! Danayelle n'en pouvait plus de jouer aux victimes, sa mauvaise humeur explosant en elle. Elle pointa un doigt sur la poitrine de Leerian, menaçante, et cracha avec hargne :
— Toi, tu vas arrêter de te moquer de moi, OK ? J'ai passé une journée de merde ! Figure-toi que c'est depuis hier soir que je suis coincé dans cette forêt ! J'ai failli me faire écraser par un arbre, je me suis empoisonné avec des champignons vénéneux ! Et j'ai même eu un mille-pattes énorme dans les cheveux ! Et là, il y a eu cette licorne qui était sur le point de m'embrocher, et j'ai paniqué, OK ?! Et tout ce que je veux, c'est d'aller à Yglas ! Alors si tu connais le chemin, merci de me l'indiquer et j'y vais tout de suite !
— C'est quoi, Yglas ?
Danayelle s'enfonça le visage dans les mains en gémissant. Elle en avait marre ; à peine vingt-quatre heures dans le monde sauvage et elle était déjà à ça d'abandonner.
Si seulement Outré était venu avec moi...
Un bruit attira soudain l'attention des deux elfes, qui tournèrent la tête en même temps dans la même direction. Tout au bout de la clairière, Mishi faisait enfin son arrivée, à bout de force et soufflant comme un bœuf. Ignorant tout de la situation, elle s'avança avec l'énergie qui lui restait vers Leerian sans accorder un regard aux licornes. Arrivé auprès de son ami, elle s'appuya contre lui, la joue contre son épaule et ferma les yeux. Danayelle l'observait avec un sourcil plus haut que l'autre. Elle avait remarqué tout de suite qu'il s'agissait d'une sirène, grâce aux écailles qu'elle avait au visage, mais jugea préférable de ne faire aucun commentaire.
— J'en peux plus, Leerian. Va falloir que je grimpe sur ton dos pour que tu me ramènes chez moi.
Leerian sourit tout en essayant de s'en empêcher. Lui et Danayelle se regardaient toujours droit dans les yeux alors que Mishi continuait :
— Alors, il s'est passé quoi ? J'ai manqué quelque chose d'intéressant ?
— Cette nouvelle venue a accidentellement presque tué une licorne.
Mishi ouvrit un œil pour dévisager Danayelle. Puis elle pouffa de rire en le fermant à nouveau.
— Wow, elle doit être trop forte pour avoir accidentellement presque tué une licorne. Et moins peureuse que toi, c'est sûr.
— Je ne suis pas peureux, grogna Leerian.
— Bien sûr...
Danayelle eux un petit sourire en coin alors qu'elle assistait à cette drôle de conversation. Elle releva le menton et balança ses cheveux blonds derrière ses épaules, découvrant ses oreilles pointues.
— Vous faites un joli petit couple, tous les deux. Ça fait longtemps ?
Leerian grimaça ; Mishi explosa de rire, s'agrippant au bras de Leerian pour s'empêcher de tomber dans les fleurs. Même les licornes, au loin, tournèrent la tête vers elle.
— Couple ? On est à peine amis ! Ça fait tout juste une semaine qu'on se connait.
— Ah, dommage... et toi, est-ce que tu sais le chemin pour aller à Yglas ?
Mishi leva les yeux au ciel en réfléchissant. Ce nom lui disait vaguement quelque chose...
— Non, avoua-t-elle finalement. Mais j'ai une carte accrochée au mur de mon salon.
— Oh, pas besoin de carte, j'en ai une.
— Alors pourquoi tu demandes ?
— Je ne sais pas la lire, fit Danayelle en rougissant sévèrement.
Leerian pouffa d'un rire sarcastique. Danayelle et Mishi se retournèrent toutes deux vers lui pour le dévisager. Danayelle n'en fit rien, elle avait l'habitude d'être moquée à l'Institut. Mais pour Mishi, qui avait trouvé Leerian bizarre tout au long de la journée, c'était la goutte d'eau qui fit déborder le vase. Elle lâcha le bras de Leerian et s'avança d'un pas vers Danayelle.
— Alors comme ça, tu es en voyage ? Je peux venir avec toi ?
— Venir avec moi ? s'étonna Danayelle. Pourquoi ?
— Oui, pourquoi ? répéta Leerian à son tour.
Mishi ignora Leerian, faisant comme s'il n'existait plus. Son rêve avait toujours été de quitter cette forêt, et cette elfe semblait être une bonne candidate pour l'aider.
— Je veux venir, c'est tout ! Je t'assisterai dans ta quête, peu importe en quoi elle consiste.
Danayelle sourit de toutes ses dents. Ne plus être seule dans ce calvaire ? Elle ne demandait que ça !
Leerian, pour sa part, était complètement figé. Il vivait un cauchemar. Il ne voulait pas perdre son amie ; il le refusait. Mais quel monstre serait-il d'empêcher Mishi d'accomplir son rêve ?
Danayelle fit balancer son sac sur ses épaules et en sortit une vieille carte qu'elle déroula devant Mishi.
— Regarde, Yglas est juste là. Et nous, on doit être quelques par ici.
— Oh, mais c'est tout près, fit Mishi, déçu. Va vers le sud, dit-elle en levant le bras dans la bonne direction.
— Merci ! Je m'appelle Danayelle, en passant.
— Mishi.
Les deux filles se saluèrent d'une poignée de main sous le regard horrifié de Leerian.
— Il va falloir que je passe chez moi pour faire mes aux revoirs à mon père. Ça ne t'embête pas ?
— Bien sûr que non !
— C'est un homme, dit Leerian.
Mishi lui lança un regard noir.
— Vraiment ? s'étonna Danayelle. Trop cool !
Leerian serra les poings. Il avait espéré lui faire peur, mais il faut croire que Mishi avait eu raison. Danayelle était beaucoup moins peureuse que lui.
— Viens, c'est par là, continua Mishi. Et garde les mains le long du corps devant les licornes.
Les filles quittèrent le champ, abandonnant Leerian comme s'il n'avait jamais existé. Celui-ci, le cœur au bord de l'explosion, s'élança à leur suite.
— C'est définitif, Mishi ? Tu veux vraiment partir avec elle ? Tu ne la connais même pas !
Mishi s'arrêta de marcher pour faire face à Leerian, les poings sur les hanches.
— Oui, c'est définitif. Tu sais que je veux partir, et toi, tu ne veux pas quitter la forêt. Et de toute façon, toi-même, je ne te connaissais pas il y a une semaine !
— Mais elle est...
Leerian s'interrompit dans une grande inspiration. Dangereuse, c'est ce qu'il avait presque dit. Il s'était ressaisi à temps. Danayelle avait peut-être une télékinésie instable, mais lui était un loup-garou. Lequel était le plus dangereux ?
Le temps qu'il se reprenne, Mishi s'était déjà retourné pour continuer son chemin. Mais Danayelle s'était arrêté pour observer Leerian. Elle voyait toute sa détresse dans ses yeux ; il était en train de perdre son amie... et c'était sa faute.
— Tu peux venir toi aussi, si tu veux.
Leerian décocha son regard de Mishi pour le planter sur Danayelle. À ce moment précis, elle était la personne qu'il détestait le plus au monde... Mais Mishi était celle qu'il appréciait le plus.
Il avait passé cinq ans de sa vie complètement seul, et une semaine avec elle. Il ne voulait pas retomber dans sa solitude.
— OK, fit Leerian dans un filet de voix.
— OK ? s'étonna Mishi qui s'était à nouveau retourné vers lui. Tu vas venir ?
— Je n'ai pas le choix...
Mishi sourit tendrement en s'approchant de Leerian. Pauvre petit elfe, pensa-t-elle en lui prenant les mains. Elle baissa les yeux sur sa bague, glissant un doigt sur la pierre précieuse en son centre.
— Je vais seulement à Yglas, leur rappela Danayelle. Pas à l'autre bout du pays. Tu pourras retourner dans cette forêt en quelques jours.
Ça encouragea Leerian et découragea Mishi. Mais pour tous deux, c'était mieux que rien.
— OK, répéta Leerian, un peu plus convaincu. Mais je vais aller chez moi d'abord. Je vous rejoins chez ton père.
Mishi n'eut pas le temps de répondre quoi que ce soit qu'il s'était déjà élancé à pleine vitesse à travers les bois, disparaissant en quelques secondes. Mishi soupira platement, mais se reprit en se tournant vers Danayelle qui l'observait avec un petit sourire en coin.
— Vous êtes mignons, tous les deux.
Mishi grimaça, ce qui ne réussit qu'à faire rire Danayelle. Elle remonta son sac sur ses épaules et continua la marche dans la forêt. Elle pillait sur les fleurs sans y accorder la moindre importance, ce qui étonna Mishi. Elle est vraiment le parfait contraire de Leerian.
— On est loin de chez ton père ?
— Une heure de route.
— Je croyais que les sirènes n'aimaient pas marcher, soupira Danayelle.
— J'aime pas. Je le fais pour Leerian.
Danayelle eut un sourire en coin. Si elle avait bien compris, ils ne se connaissaient que depuis une semaine et ils faisaient déjà des sacrifices l'un pour l'autre.
Tout au long du voyage, Danayelle expliqua pourquoi elle devait aller à Yglas. Son don de télékinésie qu'elle n'arrivait pas à contrôler, et son professeur qui lui avait dit qu'à Yglas, elle trouverait un mage qui accepterait de lui léguer une pierre magique censée lui permettre de maitriser son pouvoir. Elle raconta aussi comment elle avait quitté l'Institut avec l'aide d'un garçon du nom de Egrim qu'elle avait choisi de surnommer Outré et qu'elle avait ensuite passé la nuit entière dans les bois. Elle avait mis beaucoup d'accent sur cette partie, démontrant toute la terreur qu'elle avait ressentie, ce qui n'avait réussi qu'à faire rire Mishi qui avait vécu toute sa vie dans cette « horrible » forêt.
— Ça pourrait être pire, tu sais, fit Mishi. La forêt de Dranhell, tout au sud du pays, est pleine de vampires... C'est que ce que m'a dit mon père, en tout cas. Celeyste, c'est vraiment un petit coin paisible. Trop paisible, même, et c'est pour ça que je veux partir.
— Aucune créature monstrueuse à déplorer dans la région ? demanda Danayelle qui regardait toujours autour d'elle avec appréhension.
Elle avait bien failli se faire tuer par une licorne ; ce qui semblait inoffensif pour Mishi pourrait bien causer la perte de Danayelle.
— Eh bien, c'est sur qu'il faut faire attention aux ours et aux cougars, mais on en voie rarement. Et les loups, évidemment. Je n'en ai jamais croisé, mais je les entends, parfois.
— Il y a des loups-garous, tu crois ?
— Oui, répondit Mishi sans la moindre hésitation. Ma mère a été tuée par un loup-garou, il y a presque quatre ans.
Danayelle en eut le souffle coupé, étonnée de la confidence. Mishi continua :
— Je ne sors jamais de chez moi, pendant les pleines lunes. Mais la dernière fois, il y a une semaine, j'ai perçu des hurlements. Ce n'était pas un loup, on aurait plutôt dit quelque chose... d'humain, mais pas totalement. Un entre-deux, tu vois. Et le lendemain, mon père avait trouvé une carcasse de cerf. Presque intact, mais le cœur avait disparu. Les loups-garous ne mangent que les cœurs.
— C'est le même qui a... tué ta mère ? fit Danayelle d'une voix tremblante.
— Peut-être... je n'en sais rien.
— Ton père n'a pas essayé de le prendre en chasse ?
— C'est bien trop dangereux... une seule goutte de sang de ce monstre pourrait le contaminer. Il reste à la maison et défend la porte d'entrée.
Danayelle hocha lentement la tête. Oui, elle le savait, et c'était bien l'une des nombreuses raisons pourquoi ces horribles créatures lui faisaient si peur. Elle préférait mille fois se faire embrocher par la licorne que de faire face à un loup-garou.
— J'ai aussi remarqué que... Leerian ? C'est son nom ?... Il avait quelque chose sur la joue. Ce sont des cicatrices ?
— Oui, répondit Mishi, les yeux rivés au sol. Mais je ne sais pas d'où elles viennent. Il ne me parle pas beaucoup de lui. Tu lui poseras la question quand il reviendra !
Danayelle n'en avait pas du tout l'intention. Pour le peu de temps qu'elle avait passé avec lui, elle avait la grande impression qu'il ne l'aimait pas.
— En tout cas, tu n'as pas à t'inquiéter pour les loups-garous. La prochaine pleine lune est dans trois longues semaines.
— Alors il vaut mieux se dépêcher d'aller à Yglas, fit Danayelle en s'efforçant de rire.
Pour qu'elle puisse laisser cette forêt maudite loin derrière elle !
Tout d'abord, il fallait aller chez Mishi. Sa toute nouvelle amie depuis dix minutes. Danayelle ne comprenait peut-être pas exactement pourquoi elle voulait la suivre dans son aventure, mais elle serait idiote de refuser un peu de compagnie ! Et ce, même si Leerian viendrait aussi.
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