Adrian leva son katana d'un coup et le fit tournoyer autour de sa tête. Quand il abaissa de nouveau le sabre, il exécuta un coup de pied papillon et ses jambes s'envolèrent parallèlement au sol. L'extrémité de son arme dessina dans l'air une courbe fatale avant de s'abattre dans la poitrine de son adversaire. Il était si rapide que ses gestes en devenaient flous, on ne voyait au milieu du champ de bataille qu'une brume de noir et d'acier étincelant. Le vampire fut soudainement coupé dans son élan meurtrier lorsqu'une flèche transperça son épaule. La violence de l'impact lui fit lâcher son katana qui vola à quelques mètres de lui. Grognant de douleur, il retroussa ses lèvres pour laisser apparaître ses canines pointues. Il n'eut pas le temps d'identifier la provenance du tir qu'une nouvelle flèche traversa sa cuisse, manquant de le faire tomber. Plus rapide encore que sa réactivité d'immortel, les projectiles en métal noir fusèrent dans sa direction, lui déchirant chair et muscles. Les flèches étant attachées à de solides câbles, Adrian se retrouva très vite cloué au sol. Le dos courbé, la respiration haletante et crachant du sang sur le sol boueux, le vampire était dans l'incapacité de bouger. Le visage déformé par la douleur et la haine, il leva tout de même la tête vers un Stark qui lui faisait face. Ignorant la satisfaction qui se lisait dans les yeux noirs du soldat, son regard se posa sur le dragon écarlate derrière lui. Adrian sourit alors, du sang s'échappant de ses lèvres fendues. L'incompréhension du Stark ne dura que quelques instants, très vite remplacée par un cri de douleur lorsque les griffes de la créature lui transpercèrent la poitrine. Quelques secondes suffirent pour tuer les cinq hommes qui l'avaient attaqué. À coup de dents et de griffes, le dragon trancha les câbles et libéra son bras droit.

— Je vais me débrouiller maintenant ! s'exclama Adrian devant l'hésitation de l'animal à le laisser seul.

Le dragon rugit avant d'étendre ses grandes ailes et de s'envoler quelques mètres plus loin, écrasant plusieurs soldats Stark sous son poids.

Les dents serrées, Adrian retira les multiples flèches qui avaient meurtri son corps. Le sang s'arrêta rapidement de couler, signe que la régénération était en cours. Ignorant la fatigue causée par l'immense énergie que lui prenait cette cicatrisation accélérée, l'immortel se releva. Il essuya d'un revers de main sa bouche, créant une traînée de sang écarlate sur sa joue. Son répit fut de courte durée. Trois adversaires se dirigeaient, épée levée, dans sa direction. Il ramassa son katana et, les yeux brillant de rage, il se prépara à les accueillir.

— Couvre moi, je m'occupe de ceux-là, ordonna une voix derrière lui.

Adrian n'eut pas besoin de se retourner pour identifier la présence de June. Une fraction de seconde lui suffit pour se positionner devant le vampire. Les jambes légèrement écartées, sa lame scintillante devant elle, elle attendait ses adversaires. Bien que plus petite que lui, Adrian savait qu'il était en sécurité et qu'elle était plus que capable d'anéantir ces hommes. Il ne put s'empêcher de la trouver redoutablement belle. Ses yeux argentés glacials la rendaient indéchiffrable et ses cheveux blonds vénitiens ondulaient comme des vagues le long de ses épaules, descendant jusqu'au milieu de son dos. Quelques mèches poisseuses de sang étaient collées sur ses joues et son front, mais cela n'enlevait rien à sa beauté.

Alors que June combattait avec souplesse et rapidité, Adrian se laissa tomber près d'un cadavre. Ses lèvres se retroussèrent et, ignorant le dégoût qu'allait lui procurer ce geste, il mordit la gorge du soldat. Bien que mort depuis seulement quelques minutes, son sang avait déjà un goût âpre et Adrian se força à en avaler plusieurs gorgées. Peu à peu, il sentit ses forces lui revenir. À peine fut-il à nouveau sur ses pieds qu'il trancha la gorge d'un assaillant l'attaquant par la gauche et, dans la continuation de son mouvement, acheva le dernier adversaire de June. Une fois à hauteur d'Adrian, la vampire, à peine essoufflée, porta une main à son visage. D'un simple revers de pouce, elle recueillit le sang qui était resté au creux des lèvres de l'immortel puis le lécha avant de sourire :

— À toute à l'heure, lança-t-elle en s'élançant sur le premier Stark qu'elle aperçut.

Adrian s'accorda un sourire avant de reprendre lui aussi le combat. Beaucoup de soldats de la Garde Royale étaient en difficulté, croulant sous la fatigue de cette longue bataille. Rejoints par les jumeaux, ce fut ensemble qu'ils leur portèrent main forte alors qu'Ethan continuait quant à lui de réduire en cendre les Stark sur son passage.

~

Sous l'attaque soudaine d'un ennemi mi-homme mi-ours, Castiel esquiva le coup en pivotant légèrement, de sorte que son poing, au lieu de percuter son visage, heurta son épaule où il provoqua malgré tout une douleur cuisante. Profitant du fait que son torse soit exposé, l'ange frappa à son tour dans l'estomac de la créature. Il laissa échapper un grognement animal et recula de quelques pas avant de repasser à l'offensive. Castiel devait reconnaître que son adversaire ne manquait ni de force ni de ténacité. Cela dit, cela ne faisait pas tout. En un battement d'aile puissant, l'ange s'éleva à un mètre au-dessus du sol et, avant même que son attaquant n'eut le temps de réagir, il décrocha un violent coup de pied dans son visage, le projetant plusieurs mètres plus loin. L'ange, planant toujours, ne lui laissa pas le temps de se relever et planta sa dague dans son cou.

Mais Castiel n'eut pas le temps de savourer sa victoire, Il hurla de douleur et tomba lourdement au sol.

Cinq hommes, armés d'épées et de poignards, venaient de surgir pour venger leurs camarades. D'un geste ample et rapide, l'un d'eux avait tranché la pointe de l'aile droite de l'ange, coupant net plusieurs plumes. Immédiatement déséquilibré et paralysé par la douleur, Castiel s'était écrasé face contre terre. Profitant de cet instant de faiblesse, les Stark se jetèrent sur lui pour tenter de le maîtriser. Dans cette lutte, des plumes, si fragiles et sensibles, de l'ange furent arrachées, tordues ou transpercées par des lames tranchantes. La souffrance fut telle que Castiel manqua s'évanouir.

Lorsqu'Amélia arriva sur les lieux, trois hommes le maintenaient au sol. L'un d'eux bloquait ses bras au-dessus de sa tête et un autre ses chevilles tandis que le dernier était assis sur son ventre, le rouant de coup. Ses ailes meurtries reposaient, de part et d'autre de son corps, dans la boue et le sang du champ de bataille. Une rage immense assombrit ses pensées et elle fonça sur l'homme qui était sur le point de trancher une nouvelle fois les ailes de l'ange. Son attaque fut si rapide qu'il n'eut pas le temps d'esquiver la lame d'Amélia qui se planta dans sa gorge. Du sang jaillit sur son visage lorsqu'elle retira sa dague et l'homme s'écrasa sur le sol.

Castiel était toujours inconscient et Amélia devait maintenant faire face à quatre adversaires plus enragés que jamais.

— Tu n'aurais pas dû intervenir, grogna l'un d'eux, tu vas le regretter.

— C'est plutôt vous qui allez le regretter, répondit amèrement Amélia.

Un premier Stark se mit en position, un sourire provocateur plaqué sur son visage crasseux. Amélia inspira longuement, ignora la douleur aiguë qui lui parcourait le corps à chaque respiration et, alors qu'elle s'apprêtait à attaquer la première, son adversaire perdit son sourire en reculant d'un pas.

— Alors on ne rigole plus ? s'exclama une voix féminine.

À ces mots, les épaules d'Amélia se relâchèrent. Sa sœur, accompagnée de Gabe sous sa forme animale, se positionnèrent devant-elle, faisant ainsi front pour protéger l'ange inconscient. D'un simple regard, Olivia fit comprendre à Amélia qu'elle s'occupait des Stark. L'affrontement fut rapide. La sorcière de feu, aux yeux flamboyants de rage, s'occupa de deux Stark alors que l'énorme loup gris s'occupa des deux autres. Amélia, pendant ce temps, s'était précipité au chevet de Castiel qui finit, au grand soulagement de la jeune femme, par ouvrir les yeux. Son visage, son corps et ses ailes étaient en piteux état, mais il était en vie.

Le dernier des adversaires que combattait Olivia fit mine de partir vers la droite, mais au lieu de ça il fonça tout droit. Préoccupée par l'état de sa sœur et de Castiel, la sorcière de feu eut un temps de retard. Elle réussit malgré tout à bondir vers lui et à lui agripper les jambes pour le plaquer au sol. Le Stark lui envoya un coup de pied dans la joue, diffusant une douleur cuisante à son visage, puis se releva pour détaler.

Poursuivant son adversaire, Olivia grogna de frustration. Elle leva ses yeux flamboyants vers la silhouette qui arrivait à la distancer petit à petit, elle tendit alors le bras dans sa direction et lança trois boules de feu. Toutes atteignirent leur cible. La première toucha l'arrière de son genou pour le faire fléchir, la deuxième et la troisième enflammèrent son torse.

~

Après la transformation d'Ethan, l'affrontement perdit en intensité et commença à s'essouffler. De la clairière s'échappait de grandes colonnes de fumées et des râles d'agonie. Le dragon, planant parmi les pégases, avait tué ou fait fuir bon nombre de Stark, sauvant par la même occasion ses alliés.

Malgré la fatigue, tous se battaient encore sous l'ombre rassurante du dragon. Amélia ne saurait dire depuis combien de temps la bataille avait commencé, ni depuis combien de temps elle était ici à se battre sans relâche. Elle ne savait pas non plus combien de Stark étaient morts sous ses coups et sa lame. Elle avait perdu toute notion du temps. Elle ne faisait que se battre, mécaniquement, sans même envisager le fait que les guerriers en face d'elle puissent eux aussi être des êtres vivants. Alors qu'elle s'acharnait sur le corps d'un hybride mi-loup mi-coyote mort depuis plusieurs minutes déjà, une main toucha son épaule. Instantanément, elle se retourna, prête à riposter, sa dague levée.

— Amy ! C'est moi, Axel !

— Axel, souffla-t-elle en baissant son arme.

— Viens, nous devons rejoindre Ethan. C'est terminé.

— Terminé ? répéta-t-elle ahurie.

Elle se releva et regarda autour d'elle. Un chaos inimaginable régnait. Le sol était recouvert de sang, d'armes, de cadavres ou de corps agonisant. Il n'y avait cependant plus aucun signe d'affrontement. Le champ de bataille était devenu étrangement silencieux.