Chapitre 40

Une épée se planta dans la cuisse du souverain, déchirant ses muscles et l'obligeant à poser genoux à terre. Il serra les dents de douleur. En relevant la tête, il croisa le regard plein de rage d'Amélia, il sut alors ce qu'il lui restait à faire. À l'autre bout du champ de bataille, la sorcière d'air hocha la tête et porta sa main ensanglantée à sa poitrine. Ces gestes ne durèrent que quelques instants, mais ce fut suffisant pour rassurer Ethan. L'excitation de la bataille provoqua un afflux d'adrénaline qui étouffa quelques doutes qui lui restaient.

Le Roi Dragon était désormais prêt à prendre part aux combats.

Depuis le début de la bataille, l'animal en lui grondait d'impatience, le sang et le chaos l'appelant. Ses os craquèrent, son corps se tordit et Ethan hurla sous la douleur de la transformation. Il lâcha prise et le rugissement du dragon provoqua un mouvement de repli de la part des soldats Stark. Ethan contrôlait la bête qui sommeillait en lui, mais cette fois-ci, il se sentait différent. Le dragon n'était plus une part de lui contre qui il devait se battre constamment pour pouvoir le maîtriser, mais c'était plutôt une extension de lui, un partenaire sur qui il pouvait compter et avoir confiance. Homme et animal, voyait, agissait et pensait ensemble.


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Les Alliés semblaient être petit à petit dépassés, de nouveaux soldats Stark apparaissant sans cesse pour les attaquer sans relâche. La meute des Rocheuses se battaient avec hargne près de la lisière de la forêt, utilisant la nature à leur avantage. Certains s'aidaient des troncs des sapins pour bondir plus haut et atteindre la gorge de leurs adversaires, d'autres se tapissaient dans les hautes herbes pour bondir ensuite sur leurs proies.

Dans les airs, se déroulaient une toute autre bataille. Les pégases volaient au-dessus de la clairière en esquivant les flèches ennemies. Leurs cavaliers, principalement des elfes, débusquaient et tuaient de nombreux Stark par leurs tirs précis. La Reine Elwing, le visage toujours étonnamment calme, décochait ses flèches à une vitesse folle. Chacune d'elles transperçaient leurs cibles en plein cœur ou entre les deux yeux.


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Alors que sa meute se battait pour la plupart en lisière de la forêt, Connor se retrouva face à un colosse. Sa grandeur et sa masse n'avaient rien de naturels, il semblait gonflé à bloc de force bouillonnante. Le loup retroussa ses babines, hérissa son poil et fléchit les pattes prêt à bondir. L'homme au torse dénudé marqué de cicatrices, ne bougea pas et regarda l'animal en souriant. Il ne possédait pas d'armes, mais ses mains ensanglantées et son absence de blessures prouvaient qu'il était un adversaire redoutable.

Le loup s'élança, prit appui sur un rocher et sauta sur le guerrier qui ne fit aucun mouvement pour tenter de l'esquiver. Sa gueule se referma sur sa clavicule et ses crocs s'enfoncèrent avec difficultés dans sa peau dure. Le colosse n'eut aucune réaction. Alors que Connor s'apprêtait à relâcher sa prise pour mettre en place une nouvelle attaque, l'homme referma sa main sur son cou et l'arracha brutalement à lui. Comme s'il n'était qu'une vulgaire pierre, Connor fut projeté contre le tronc d'un arbre, quelques mètres plus loin. Il couina de douleur avant de tomber, inerte, sur le sol.

Ce fut à cet instant que les yeux d'Amélia se posèrent sur lui. Elle poussa un cri de peur. L'attaque d'un Stark l'obligea cependant à détourner les yeux, elle devait d'abord sauver sa vie avant de pouvoir lui venir en aide. Alors qu'elle se baissait pour éviter la lame tranchante de son adversaire, elle pria pour que son ami se relève. Avant de rouler sur le côté pour se remettre sur ses pieds, Amélia trancha, de sa dague, la cuisse du Stark qui grogna de rage. Malgré la fatigue, le besoin d'aider son ami lui donna un second souffle, et elle envoya son pouvoir en direction de l'homme qui tomba lourdement au sol, son épée valsant à plusieurs mètres de lui.

Soudain, une ombre passa au-dessus d'Amélia. Pensant d'abord à un pégase, sa stupéfaction ne fut que plus grande quand un dragon transperça de ses griffes son adversaire qui avait tout juste eu le temps de se relever. L'animal de légende tourna la tête vers Amélia et, l'espace d'un instant, elle crut apercevoir l'éclat bleu des yeux d'Ethan. La jeune femme ouvrit la bouche, mais le dragon s'envola avant qu'elle ne puisse exprimer sa surprise. Elle le suivit des yeux jusqu'à la lisière de la forêt et poussa un soupir de soulagement en apercevant son ami loup sur ses quatre pattes. À quelques mètres de lui, se trouvait Ethan, sous sa forme de dragon, prêt à se battre au côté de Connor contre ce colosse à force surhumaine. Amélia fut subjuguée par la beauté dangereuse d'Ethan. Les écailles qui recouvraient son corps reptilien faisaient office d'armure, les lames d'épées et les flèches ricochant dessus. Ses ailes membraneuses, toujours en mouvement, tranchaient les corps des soldats qui l'attaquaient par les côtés.

Un homme fonça soudainement dans sa direction et Amélia eut tout juste le temps d'ériger un bouclier de vent devant elle. Le choc fut violent, elle sentit l'impact jusque dans ses os. Ses genoux fléchirent et elle émit un cri de douleur. Son adversaire, pourvue de la force d'un métamorphe, pivota et porta un second coup qu'elle esquiva de justesse. Tout son corps la faisait souffrir et elle se sentait épuisée sous les assauts incessants des Stark. L'homme ne lui laissa pas le temps de souffler et chargea une nouvelle fois. Amélia ne réussit pas à esquiver tous les coups et la lame de l'épée du soldat en noir lui entailla le bras et la jambe. Un autre coup la faucha et son dos heurta la surface froide et dure du sol. L'air s'expulsa brutalement de ses poumons.

— Je m'attendais à plus de combativité de la part de l'Élue, ricana l'homme en souriant.

Amélia se força à se redresser sur ses coudes et à lancer un regard plein de rage à son adversaire.

— Vas-te faire foutre, grogna-t-elle.

L'homme semblait vouloir prendre son temps pour l'achever, c'était sa chance. Elle devait se relever. Ethan ne viendrait pas la sauver. Ses grognements inhumains accompagnés des hurlements des soldats Stark emplissaient le champ de bataille, mais elle savait qu'il était loin et qu'il avait bien trop à faire. Elle ne pouvait compter que sur elle-même. Les mains tremblantes, Amélia roula sur le côté, s'arc-bouta et se releva. La rage de vaincre fit vibrer sa magie en elle et elle trouva la force de faire taire les tremblements de ses jambes. Menaçant et ce sourire tordu toujours sur le visage, l'homme s'avança. Sa fierté masculine le poussa à lancer son épée aux pieds d'Amélia qui écarquilla les yeux.

— Ramasse. Si tu veux avoir une chance de mourir dignement, ordonna-t-il.

Elle aurait voulu l'insulter et cracher sur cette épée qu'il lui avait balancé en signe d'humiliation. Amélia n'était cependant pas stupide, elle savait pertinemment que cette arme était sa seule chance de survie. Les yeux toujours fixés sur son adversaire, elle se baissa et posa sa main ensanglantée sur le manche froid.

Soudain une flèche siffla. Elle eut la respiration coupée lorsque le projectile passa à quelques centimètres de sa tête. Un bruit sourd derrière la fit se retourner. Un homme, habillé de la combinaison des Stark, venait de s'effondrer, une flèche plantée dans son œil gauche. Le poignard qu'il tenait dans la main roula à quelques centimètres de lui et Amélia comprit qu'il avait été sur le point de la poignarder dans le dos. Furieuse, l'épée tournoya dans ses mains et elle fit volte-face. L'homme qui avait joué le rôle de diversion était mort lui aussi, gisant dans son propre sang sur la terre piétinée. À la place se tenait fièrement un elfe, mince et élancé. Ses cheveux blonds étaient tachés de sang, comme l'ensemble de ses vêtements et de sa cuirasse. Les yeux d'Amélia se posèrent sur son arc et elle inclina brièvement la tête :

— Merci, souffla-t-elle.

L'elfe l'observa de ses yeux d'or avant de replonger dans la bataille sans un mot. Plusieurs secondes furent nécessaires à Amélia pour reprendre une respiration convenable. Sa blessure au bras n'était pas inquiétante, mais celle de sa jambe l'était-elle. Du sang s'en échappait et elle devait à tout prix arrêter l'hémorragie si elle ne voulait pas s'évanouir. Serrant les dents sous la douleur cuisante qui envahissait sa cuisse, elle déchira un bout de tissu de sa tenue et en fit un garrot de fortune.

Lorsqu'elle se sentit prête à reprendre l'affrontement, un dilemme s'offrit à elle. Le champ de bataille n'était qu'un méli-mélo d'épée, de bras, de jambes et de sang. Elle repéra cependant Adrian en très mauvaise posture. Elle était prête à s'élancer à sa rescousse, tranchant ses ennemis et esquivant les coups, mais un hurlement la fit changer d'avis. Rempli de douleur et de détresse, ce cri résonna au plus profond d'elle-même. Son cœur rata un battement et elle accéléra sa course en hurlant :

— Castiel !

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