À son arrivée dans la salle, les voix fusaient dans tous les sens. Alors que les nouveaux gardes se tenaient un peu à l'écart, Ethan et Malik semblaient très énervés. La nouvelle d'une traîtresse au sein même du palais les avait mis hors d'eux. Amélia remarqua très vite que Pauline ainsi que Keido étaient absents. Elle s'assit aux côtés des jumeaux et d'Olympe. La jolie servante avait l'air plus que jamais proche d'Axel qui avait nonchalamment posé une main au bas de son dos. Pendant quelques secondes Amélia fronça les sourcils et tenta d'interpeller Sidney pour plus d'explications mais le souverain la coupa dans son élan.

— Où sont Gabe et Olivia ?

— Ils sont restés sur le campement pour la nuit, ils seront de retour demain matin pour la réunion.

— Très bien. Avant de parler de la révélation de Pauline, je souhaiterais féliciter les nouvelles recrues pour leur investissement dans l'entraînement. La plupart d'entre vous sont prêts pour le combat qui nous attend. Pour ceux à qui il manque encore un peu de technique, Adrian et Malik se tiennent à votre disposition.

Ethan marqua une légère pause afin de regarder l'ensemble des occupants de la pièce.

— Comme vous le savez tous, la petite Pauline a découvert qu'il y avait une espionne dans le palais. Je vous demanderai alors de ne pas la déranger jusqu'à ce qu'elle trouve son identité. Je ne vous cache pas que je suis très énervé par cette révélation, mais il ne faut pas céder à la paranoïa non plus. Nous découvrirons très vite son identité et nous la punirons comme il se doit. Il n'y a pas de place pour les traîtres et les lâches au palais ! s'emporta-t-il.

— Pour renforcer la sécurité, nous avons décidé que la réunion de demain se tiendrait en comité réduit, commença à expliquer Adrian. Seules les personnes se trouvant dans cette salle hormis les nouvelles recrues pourront y assister.

Les murmures de mécontentement des volontaires furent coupés court par la voix dure d'Ethan.

— Je n'ai d'autre choix que de prendre cette décision. Votre aide nous est précieuse, mais je ne peux pas à l'heure qu'il est, avec cette révélation, vous faire entièrement confiance.

— Nous comprenons, finit par dire Castiel après avoir jeté un rapide coup d'œil à ses camarades.

— Je veux que vous restiez tout de même sur vos gardes, au moindre indice suspect venez m'en informer immédiatement.

L'ensemble de la garde acquiesça et la réunion se termina après qu'Amélia eut raconté rapidement sa rencontre avec la meute de Gabe. Peu à peu la salle se vida, Sidney ainsi que le couple de sorciers se rendirent à la salle d'entraînement alors qu'Axel et Olympe s'éclipsèrent discrètement. Les volontaires s'étaient, quant-à-eux, rassemblés dans le petit salon pour faire plus ample connaissance. Amélia aurait aimé partager ce moment avec eux, mais elle devait se rendre à la bibliothèque. Depuis son arrivée à Edora, elle n'avait pas eu une minute à elle. Les évènements, rencontres, révélations et missions s'étaient très vite enchaînés. Elle avait dû accepter ses nouveaux pouvoirs en très peu de temps, mais elle ne pouvait s'empêcher de se poser de nombreuses questions à leur sujet. Son lien télépathique avec sa sœur l'intriguait beaucoup lui aussi malgré le fait que, dès qu'elle eut retrouvé son aînée, les visions avaient cessé. Slalomant entre les allées, elle finit par prendre un livre sur l'origine des sorciers. Elle y lut, comme lui avait révélé Sidney, que seul le premier né d'une famille pouvait recevoir des dons. Comme dans toute situation il existait des exceptions. Cependant, elle ne trouva rien sur l'existence d'un lien psychique entre deux sorcières de la même famille. Ne se décourageant pas, la jeune femme s'attaqua à un autre livre, mais le résultat fut le même. Il semblait que ce pouvoir ne soit répertorié nulle part. Et sans information dessus, il lui sera impossible d'apprendre à le maîtriser rapidement. Déçue, Amélia reposa son livre et partit à la recherche d'un nouvel ouvrage. Elle se hissa sur la pointe des pieds pour regarder l'étagère du dessus quand soudain, deux mains se posèrent sur sa taille. Surprise, elle se retourna vivement et sans pouvoir dire quoi que ce soit il apposa sa bouche contre la sienne. Ses lèvres étaient douces et chaudes, elles imploraient une réaction, la défiait de le rejoindre et de céder, même brièvement. Mais la jeune femme garda ses lèvres closes et recula d'un pas, jusqu'à buter contre le mur de livres. Une main posée sur sa bouche, elle le regardait surprise.

— Je suis désolé ! s'exclama-t-il juste avant de s'enfuir comme un voleur.

— Connor, attends ! tenta la jeune femme, mais il était déjà trop tard, le métamorphe avait quitté la bibliothèque à toutes jambes.

Les doigts encore sur ses lèvres rougies, Amélia était sous le choc. Elle ne réalisait pas encore ce qui venait de se passer. Depuis son arrivée, elle avait toujours été proche du métamorphe et s'entendait à merveille avec lui. Si elle avait pu douter par le passé de la nature de leur relation, elle savait, désormais, qu'il n'était pas l'homme qu'elle aimait. Ce baiser, maladroit et surprenant, lui avait fait réaliser qu'elle ne voulait pas dépasser le stade de l'amitié avec lui. Levant les yeux, la jeune femme s'aperçut de l'heure tardive, elle n'avait pas vu le temps passer, la tête plongée dans ses bouquins. Mourant d'envie de raconter ce qu'il venait de se passer aux jumeaux, Amélia fit d'abord un crochet par la chambre d'Elena et Pauline. Alors que la sorcière de terre lisait un livre à plat ventre sur son lit, la fillette courait dans la chambre poursuivie par Keido. Amélia les observa quelques instants s'amuser avant de faire remarquer sa présence. Elena leva le visage de son ouvrage et s'assit sur le lit. Pauline, quant-à-elle, s'élança pour prendre l'Élue dans ses bras.

— Il est temps d'aller dormir. Je viens récupérer Keido sinon vous ne dormirez pas tous les deux, je le sens, sourit-elle.

— Oh oui tu fais bien, ils sont incapables de se tenir tranquille lorsqu'ils sont ensemble, approuva Elena.

— Allez Keido, tu viens, s'exclama Amélia.

Visiblement triste, la chimère donna un coup de langue à la fillette avant de suivre sa maîtresse la queue basse. Après avoir souhaité une bonne nuit aux deux filles, Amélia referma la porte. Mais alors qu'elle commençait à prendre la direction de sa chambre, elle s'aperçut que Keido ne la suivait pas. Ce dernier était assis devant la porte. La jeune femme tenta de l'appeler, mais il ne bougea pas. Elle s'approcha et lui parla plus fermement, mais la chimère se mit à grogner en fixant la porte close, ses cornes se mettant à scintiller.

— Tu la retrouveras demain matin ne t'inquiète pas, allez viens maintenant !

Amélia dut finalement pousser la chimère sur quelques mètres avant qu'elle ne se décide à arrêter de grogner et à la suivre. La jeune femme s'étonna de l'attachement si rapide que la créature avait développé pour la fillette. Poussant la porte de sa chambre, la sorcière d'air découvrit Sidney, encore en habit de sport, en train de faire des étirements. Quand elle l'aperçut, elle se releva d'un bond.

— Toi, il s'est passé quelque chose ! s'exclama-t-elle.

— Où est Axel ? demanda à la place Amélia en parcourant des yeux la pièce vide.

— Il est dans la salle de bain. Et ensuite c'est mon tour, il est hors de question que tu me piques ma place ! Déjà que cet idiot est plus long qu'une fille, me dit-elle très sérieusement.

— Ne t'inquiète pas, rigola Amélia.

— J'ai tellement envie d'une douche ! se lamenta-t-elle en finissant d'étirer ses bras.

Amélia quitta ses chaussures et s'assit sur son lit. Bizarrement, Keido n'y était pas et avait décidé de se coucher sur le tapis. Il avait posé sa tête entre ses deux pattes avant et fixait la porte. La créature restait malgré tout calme alors la jeune femme décida de ne pas plus l'embêter pour ce soir. Axel sortit enfin de la salle de bain habillé de son pyjama et les cheveux encore humides. Il embrassa rapidement le haut du crâne d'Amélia avant de lui demander comment elle allait.

— Elle va très bien, mais moi non ! Tu as encore passé une vie entière à la douche. La prochaine fois c'est moi la première.

— Veuillez m'excuser, votre altesse royale, je vous laisse l'honneur d'y aller, ricana-t-il en faisant une petite courbette.

— À tout à l'heure mes loulous, finit-elle par rigoler non sans donner un petit coup de coude à son frère.

Quelques minutes plus tard, Sidney revint, les cheveux attachés dans un chignon décoiffé. Une fois au chaud dans son lit, Amélia décida de leur parler de Connor. Sidney s'était immédiatement redressée et écoutait attentivement le récit de son amie.

— Alors vous ne vous êtes même pas expliqués ? s'étonna Axel.

— Non, il est parti sans que je n'aie eu le temps de réagir...

— Il faut à tout prix que tu lui parles demain, pour mettre les choses au clair ! s'exclama Sidney.

— Bien sûr, je le ferai dès que l'occasion se présentera, acquiesça-t-elle.

Très rapidement, la conversation dévia sur Axel et sa relation avec Olympe. Ce fut avec un grand sourire qu'il annonça aux deux jeunes femmes qu'il était officiellement en couple avec la jolie servante. Amélia lança un regard complice à Sidney et elles sautèrent littéralement de joie en lançant des petits cris et en agitant les bras. De son côté Axel n'avait jamais été aussi rouge de gêne.

— Mais attends ! s'arrêta brusquement sa sœur. Comment ça officiellement ?

— On a préféré prendre notre temps, voir si cela fonctionnait avant de vraiment officialiser...

— Depuis combien de temps ? s'exclama Sidney.

— Deux jours même pas mais je...

— Et tu ne nous en parles que maintenant ? se vexa-t-elle.

— Laisse-le un peu tranquille. Il a le droit d'avoir ses petits secrets, la calma Amélia. Je suis heureuse pour toi, continua-t-elle.

— Merci, sourit-il.

— Moi aussi je suis contente. Mon frangin devient enfin un homme ! ricana-t-elle en lui ébouriffant les cheveux.

- Edora – 9 septembre 2024 -

Amélia fut réveillée par les aboiements de Keido. La jeune femme se redressa sur son lit et tenta de faire taire l'animal en vain. Le soleil devait-être levé depuis quelques heures et Sidney était déjà parti pour faire son jogging. Soudain une alarme stridente retentit et Keido redoubla ses hurlements. Amélia et Axel se levèrent d'un bond. La chambre était tellement envahie de bruit qu'Amélia fut incapable de penser correctement. Elle ne savait qu'une seule chose : un terrible événement venait de se produire.