Chapitre 31
Le ciel s'empourprait d'une lueur écarlate ainsi que d'une légère fumée grise. La meute s'était rassemblée autour d'un amas de bois d'où partaient de grandes flammes aux multiples nuances orangées. Le feu crépitait et projetait une ambiance chaleureuse sur la petite clairière. Alors que Gabe exprimait sa joie et son soulagement de les retrouver, Amélia observait sa sœur qui ne quittait pas l'alpha des yeux. Les mains accrochées à la veste qu'il lui avait prêtée, elle rêvassait. Alors que des lueurs orange dansaient sur son visage, son regard était habité d'une flamme dévorante. La sorcière d'air approcha ses mains du feu, ferma les yeux quelques instants pour savourer pleinement cette douce sensation de chaleur. Elle inspira longuement, s'imprégnant pleinement de la bonne odeur de bois de pin brûlé. Lorsque Gabe eut fini de parler, elle leva ses prunelles grises vers lui et lui posa enfin la question qui lui brûlait les lèvres depuis leur arrivée. Celle de sa séparation avec le reste de la meute.
À l'origine, Gabe faisait partie de la meute des Rocheuses, son frère en étant l'alpha. Mais lorsque celui-ci a décidé de ne pas prendre part à la guerre, il les a quitté avec une vingtaine de loups. Après des jours de marche acharnée pour rejoindre le palais, ils avaient établi un campement en lisière de forêt pour reprendre des forces. Dans la nuit, les Stark les ont attaqués et trois des leurs ont perdu la vie sous l'effet de surprise. Non sans avoir essayé de se battre, ils ont fini par prendre la fuite. Afin de les distancer, la nouvelle meute s'était séparée en deux groupes menés respectivement par Gabe et Scott. Les Stark étaient bien plus nombreux et décidèrent de ne suivre que l'équipe de l'alpha. En quelques minutes, cinq de ses compagnons étaient morts et les survivants fait prisonniers. Ils étaient devenus leurs trophées. Après des semaines de torture à Argo, ils n'étaient plus que deux et incapables de se transformer à cause de l'injection d'un poison. Alors que l'espoir était maigre de s'en sortir, le sacrifice d'une louve très courageuse permit à Gabe de s'échapper. Anna s'était battue pour la survie de son alpha.
— Elle était l'une des meilleures personnes que je connaisse. Je lui en serai éternellement reconnaissant, prononça Gabe la voix pleine d'émotion.
— C'est ma sœur tout craché ça, murmura Scott les yeux brillants.
— Je m'en voudrais toute ma vie de ne pas l'avoir protégée, elle comme tous les autres...
— Rien de tout ça n'était de ta faute Gabe. Elle connaissait les risques, nous les connaissions tous.
— Maintenant que je vous ai retrouvé, je vous promets que nous allons venger leur mort et que nous allons tuer jusqu'au dernier de ces tricheurs, grogna l'alpha avec un mélange de rage et de tristesse.
— Tricheurs ? releva Amélia.
— Nous les avons surnommé ainsi, commença Arya.
— Car ils se dotent de pouvoirs qui ne sont pas les leurs, finit sa jumelle.
Soudain ce surnom prit sens pour la sorcière d'air, mais elle n'eut pas le temps d'aller plus loin dans sa réflexion que Gabe continua.
— La bataille finale approche et nous devons être prêts. Avec Scott, nous nous rendrons demain au palais pour assister à une réunion de guerre afin de fixer une stratégie. Durant les quelques jours qu'il nous reste, je veux que vous doubliez les temps d'entraînement, votre condition physique doit être parfaite, tout comme votre mental.
L'ensemble de la meute acquiesça sans bruit aux directives de leur alpha. La journée était déjà bien avancée, il était temps pour Amélia de rentrer. Olivia et Gabe avaient décidé de rester sur le camp des lycanthropes. La sorcière d'air ne fit aucune remarque, mais ne put s'empêcher de glisser un regard plein de sous-entendus à son aînée qui essaya tant bien que mal de cacher sa gêne. Après avoir dit au revoir à la meute, Amélia accompagnée de Scott se dirigea vers la clairière où elle devait rejoindre Elion.
— Alors, dis-moi, tu n'es pas du coin, n'est-ce pas ?
— C'est si évident que ça ?
— Un peu oui. Tu regardes ce monde avec des yeux remplis de curiosité et d'émerveillement, constata le loup.
— Et tu ne penses pas que c'est une bonne chose ?
— Oui et non. Juste ne te fais pas avoir, tout n'est pas rose et paisible ici.
— J'en suis consciente.
La démarche du loup était assurée tout comme l'était sa posture. La jeune femme ne pouvait s'empêcher de l'observer. Elle avait d'abord été très intimidée par sa prestance et sa beauté, mais désormais elle arrivait à voir derrière cette apparence. Depuis le récit de Gabe, le visage de Scott semblait s'être imprimé d'un voile de tristesse. Amélia avait déjà été confronté au deuil et savait que parler des défunts pouvait être un bon moyen de se sentir mieux, d'évacuer.
— Comment était ta sœur ? demanda-t-elle alors après quelques minutes d'hésitation.
Visiblement surpris par sa question, Scott fut incapable de répondre immédiatement, mais finit par lever ses yeux brillants vers la jeune femme.
— Anna me ressemblait beaucoup physiquement bien qu'elle soit de deux ans ma cadette. Elle avait de magnifiques cheveux de jais et de grands yeux dorés. Il y avait de la douceur dans son regard et de petites taches de rousseurs parsemaient son nez et ses joues. Pourtant, ma sœur n'avait rien d'un ange. C'était une battante qui ne laissait rien se mettre en travers de son chemin ou de ses convictions. Elle était très impulsive, ce qui lui avait valu pas mal d'ennuis d'ailleurs, mais elle avait un cœur immense et une loyauté sans faille. Je l'aimais plus que tout, conclut-il tristement.
— Je suis désolée. J'aurais tant aimé la connaître, s'exclama doucement Amélia en posant une main réconfortante sur son avant-bras.
— Merci, sourit-il. Nous avons tous nos démons et nos histoires tragiques, n'est-ce pas ?
— Oui, j'imagine que tu as raison, répondit-elle vaguement.
— Raconte-moi, comment t'es-tu retrouvée ici ?
— À la mort de mes parents, et à la disparition de ma sœur, j'ai été placée en famille d'accueil. Malheureusement tout ne se passait pas très bien et, lors d'une fugue, Elion m'a sauvée la vie et amenée dans un sanctuaire. C'est là-bas que j'ai pris connaissance de ce monde, de la guerre et de mon rôle.
— Tu as perdu des êtres chers toi aussi. Tu as traversé beaucoup d'épreuves, ta vie a changé du tout au tout en un instant et pourtant tu restes toujours si pleine d'espoir. Et pour ça, je t'admire Amy, dit-il sincèrement.
— Je te remercie Scott. Vraiment, ça me touche, sourit Amélia.
— Ce n'est rien, sourit-il à son tour, nous allons arriver, tu devrais appeler ton pégase ou faire je ne sais quoi.
— Je vais le faire oui, rigola doucement la jeune femme.
Quelques minutes plus tard, Elion se posa avec sa douceur habituelle au centre de la clairière. Après un timide au revoir de la main pour le loup, Amélia s'approcha en trottinant de son amie. Elle la serra dans ses bras un bref instant puis se hissa sur son dos. Très vite, la pégase déploya ses ailes et s'élança dans le ciel. La jeune femme emmêla ses doigts aux soyeux crins d'Elion et ferma les yeux de bien-être. Ses cheveux volaient au gré du vent et une douce et fraîche brise caressait son visage. Elle se sentait si libre et à l'écart de tout problème. Cela pouvait peut-être paraître égoïste mais, parfois, elle aurait aimé rester dans les airs avec Elion à jamais. Malheureusement ces moments ne duraient pas éternellement. En peu de temps ils arrivèrent et se posèrent dans le jardin du palais d'Edora. Amélia resta cependant, quelques minutes encore, enlacée à son encolure, puis elle finit par se séparer d'elle, à contre cœur.
« Ne t'inquiète pas. Une fois cette guerre gagnée, nous pourrons passer beaucoup plus de temps ensemble. Mais pour l'instant tu te dois d'accomplir tes devoirs et je serai toujours là pour te soutenir. »
« Merci Elion de me comprendre si bien. »
Elle lui embrassa le bout du nez puis la regarda s'envoler. La jeune femme se dirigea alors vers la grande porte de bois. Droit comme des piquets et la main sur le pommeau de leur épée Caty et Greg gardaient l'entrée.
— Bonsoir, s'exclama poliment la sorcière d'air.
Greg, toujours très sérieux et peu bavard, la salua d'un signe de la tête. Caty, à l'inverse de son camarade, lâcha sa prise sur son arme et se dirigea vers elle, un petit sourire aux lèvres.
— Amy, Salut ! Comment vas-tu ?
— Je vais bien et toi ?
— Ça va, j'en ai juste un peu marre de rester plantée là. Surtout que Greg n'est pas le plus grand des bavards, se plaignit-elle.
— Je comprends, le temps doit passer doucement.
— Oui très, j'ai hâte qu'il y ait un peu d'action, ricana-t-elle.
— La bataille ne te fait pas peur ? s'étonna Amélia.
— Non, pas vraiment. Je suis née pour être un soldat et j'ai eu un dur et long entraînement pour devenir l'une des meilleures. Cette guerre sera l'aboutissement de tous mes efforts. Et toi Amy, que ressens-tu ?
— Tout le monde compte sur moi, mais je suis terrifiée..., marmonna-t-elle.
— La peur n'est pas une faiblesse. C'est une bonne chose d'avoir peur, ça prouve au moins qu'on a encore quelque chose à perdre, une chose pour laquelle se battre. Il faut juste que tu ne laisses pas ce sentiment te dévorer, mais plutôt te pousser à te surpasser. Je suis sûre que tout le monde doit te le dire, mais tout ira bien, j'en suis certaine, lui sourit la guerrière.
— Merci Caty. Je vais te laisser, à la prochaine ! s'exclama Amélia en commençant à s'éloigner.
— Attends ! s'écria-t-elle en lui attrapant le bras. Ethan m'a chargé de te dire qu'ils t'attendaient tous en salle de réunion.
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