Chapitre 10

La course n'avait jamais été le point faible d'Amélia, pourtant elle avait beaucoup de mal à ne pas se faire distancer par le souverain, deux ou trois mètres les séparant. Alors qu'Ethan traversait sans même regarder, la jeune femme prit peur en voyant une calèche arriver à toute allure. Elle redoubla d'effort et se jeta sur le roi, le poussant de l'autre côté de la route. Elle n'eut même pas le temps de dire un mot qu'Ethan se dégagea d'une bourrade pour reprendre sa course vers la forêt. Amélia se releva en soupirant mais c'était déjà trop tard, elle arrivait à peine à l'apercevoir devant elle.

Soudain, un craquement retentit.

Amélia sursauta et regarda l'édifice qui se trouvait derrière elle, certaine qu'il avait dû être frappé par la foudre, cependant tout paraissait normal. Quand elle entendit un deuxième craquement, elle réussit à voir d'où cela venait. Elle découvrit alors Ethan au pied d'un pin, poings levés et muscles bandés. Dans cette posture, il faisait penser à un guerrier s'attaquant à un géant de dix mètres.

— Pourquoi ? hurla-t-il.

Il pivota et frappa une nouvelle fois le tronc avec force. L'arbre oscilla comme si un camion venait de le percuter, les aiguilles tombèrent et les branches fouettèrent l'air. Une odeur de résine et de sang parvint alors à Amélia. Elle se rendit compte qu'elle ne savait même pas pourquoi elle s'était élancée à sa poursuite, sûrement par réflexe, ou peut-être qu'elle avait simplement eu l'envie de le réconforter. Son cœur se serra en le voyant ainsi. Bien qu'Ethan n'exprimait que rarement ses sentiments, Amélia comprit instantanément la raison de sa fuite : il ne voulait pas paraître faible devant ses hommes, mais après tout, il avait beau être roi, il restait un être humain. Il se prépara, le poing levé, à asséner un autre coup. Ses articulations étaient en sang et le pauvre arbre avait déjà une belle fissure. Amélia sortit de sa torpeur et se plaça entre l'arbre et son poing. Ses yeux remplis de haine se posèrent alors sur elle. Lentement, elle enveloppa son poing de sa main et appuya légèrement sur son bras pour qu'il s'aligne avec le reste de son corps raide et fébrile. Elle le regarda quelques instants avant de se décider à poser une main sur sa nuque. Le roi n'opposant aucune résistance, elle caressa et massa celle-ci puis enfouit ses doigts dans ses cheveux. Ses yeux azur ne quittaient plus Amélia depuis plusieurs minutes déjà. Étrangement, cette dernière ne se sentait pas gênée par ce regard insistant, bien au contraire.

— Tu n'as pas à te sentir coupable, commença-t-elle.

— Si Liam a pu me trahir si facilement sous mes yeux, qui sait ce que je rate encore ? Qui sera le prochain à me décevoir ? Olympe ? Olivia ? Malik ? Ou même toi ? s'écria-t-il.

— C'est une bonne chose d'avoir découvert ça maintenant plutôt que la veille de la bataille. Il faudrait augmenter la vigilance, mais cela ne doit pas t'empêcher de faire confiance à ceux qui ont toujours été là pour toi, murmura Amélia.

Son visage était toujours marqué par la colère, mais elle put voir son regard s'adoucir, la présence de la jeune femme semblant l'apaiser.

— On devrait y aller, lui dit-il finalement sans la quitter des yeux.

Amélia acquiesça d'un hochement de tête. Ethan se releva et lui tourna le dos pour se mettre en route.

— Merci, lâcha-t-il après plusieurs minutes de marche dans le silence.

Surprise, Amélia tourna la tête vers lui. Le souverain continuait de marcher, les yeux rivés au sol, semblant prêt à tout pour ne pas croiser le regard de la jeune femme.

— Ai-je bien entendu ? s'étonna Amélia.

— Je ne le répéterai pas une seconde fois et je veux que tout ça reste entre nous, d'accord ?

— Promis, sourit-elle.

Ethan lui jeta un rapide coup d'œil avant de reprendre la contemplation de ses pieds. Amélia ne put s'empêcher de le trouver extrêmement craquant. Elle profita de ce moment pour l'observer quelques secondes. Ses cheveux noirs lui tombaient sur les yeux et son visage demeurait inexpressif, hormis un léger sourire en coin qui apparut subrepticement et qui réchauffa le cœur d'Amélia. Elle se rendit alors compte qu'Ethan n'était froid qu'en apparence, sa réaction d'aujourd'hui lui prouvait qu'il était très attaché à son peuple et qu'il ferait tout pour le sauver. Son attitude autoritaire n'était qu'une carapace, cachant une réelle sensibilité. Depuis la mort de son père, il se sentait contraint d'être à la hauteur de ses espérances pour le rendre fier et continuer ce qu'il avait commencé.

Amélia se souvint brusquement d'un détail sur sa rencontre avec Liam. Les trois hommes aperçus dans la forêt portaient tous une veste avec une araignée d'un bleu électrique, brodée sur la poitrine. Avec tous ces événements, elle n'avait pas eu le temps d'en parler et de demander la signification de cet animal.

— C'est le symbole des Stark. Jefferson l'a choisi en l'honneur de sa machine.

— Olivia m'a parlé de cette machine, elle ressemble à une araignée ?

— En quelque sorte. Je ne l'ai jamais vue, mais mon père oui, il a même assisté à sa construction. Elle est énorme et possède huit longs bras de métal, d'où l'origine du symbole des Stark.

— Cet appareil a vraiment l'air horrible.

— Il l'est. Jefferson est un homme très intelligent, mais au lieu de s'en servir pour le bien, il a préféré construire un outil qui lui permettrait de prendre le pouvoir en dictant qui aurait le droit d'avoir des aptitudes ou non.

— Je n'en reviens toujours pas que cet homme soit mon oncle, marmonna Amélia.

— Ne t'inquiète pas. Ce n'est pas parce que vous êtes de la même famille, qu'Olivia et toi lui ressemblez, loin de là.

Amélia n'arrivait vraiment pas à réaliser que Jefferson soit son oncle, elle avait toujours pensé que sa famille se résumait à ses parents et à sa sœur. Elle n'arrivait surtout pas à imaginer qu'il ait pu commanditer le meurtre de son propre frère. Et pour ce crime, elle se jura de l'anéantir.

Lorsqu'ils retournèrent dans la salle de réunion, Amélia fut surprise de voir que personne n'avait quitté la pièce. L'ambiance était pesante, Malik s'emportait contre Liam alors que sa petite amie tentait de le calmer, en vain. Tout proche, Adrian semblait, lui, bouillonner de l'intérieur, sa mâchoire était serrée et ses yeux argentés remplis de haine. À la vue d'Ethan, Olympe se précipita vers lui pour observer avec minutie son poing ensanglanté.

— Si vous apercevez à nouveau Liam, ramenez-le-moi vivant. Je veux le tuer de mes propres mains, dit-il fermement.

Les membres de la garde acquiescèrent, personne n'osant dire un mot de plus. La jeune servante afficha une mine triste et poussa son roi vers la sortie, afin de le conduire à l'infirmerie.


~


— Ça vous dirait de venir vous entraîner avec Adrian et moi à la salle de sport ? demanda Connor.

— Avec plaisir, je pense que me défouler me fera du bien, s'exclama Amélia.

— Moi je suis toujours partante ! s'écria Sidney.

— J'aurais aimé passer du temps avec Olympe, mais je ne sais pas où elle se trouve, dit doucement Axel.

Sa sœur était sur le point de faire une remarque quand Amélia lui donna un petit coup dans le pied et lui fit les gros yeux pour la faire taire. Sidney soupira, mais accepta de ne rien dire. Alors que Connor montrait la direction de la piscine à Amélia et Axel, Sidney se rendit à la salle d'entraînement avec le vampire. En ouvrant la porte, Amélia sursauta.

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