Chapitre 34


Ad augusta per angusta

« Vers les sommets par des chemins étroits »


- Non ! C'est hors de question. Prépare ta valise, avec un peu de chance on peut encore récupérer un avion pour partir.

- Il n'y a pas d'autres choix ! Ta grand-mère t'a choisie parce que les autres ne sont pas à la hauteur, si on lui prouve le contraire tu pourras retrouver ta vie normale. Ce n'est pas ce que tu veux ?

Je voyais du coin de l'œil mon père acquiescer aux paroles de Keigo, mais sur le moment je m'en fichais. Hors de question que j'accepte la situation si facilement.

- Mais qui te dis que je veux aider Sixtine ? Elle n'a qu'à faire ses preuves toute seule et c'est sûrement ce qu'elle fera. Elle n'acceptera pas mon aide et ça me va parfaitement. Si elle a les capacités, ma grand-mère reviendra sur sa décision, et si elle ne les a pas... Elle trouvera quelqu'un d'autre que moi ! Je ne suis pas un jouet qu'on utilise. Mon ton commençait à monter au fur et à mesure de la conversation. L'angoisse d'une vie perdue, d'une manipulation à mon encontre, de mes rêves brisés, me faisait monter les larmes aux yeux. J'avais l'impression que personne ne comprenait à l'instant ce que je pouvais ressentir. Comment pourrais-je mettre mon destin dans les mains d'une seule personne, que je n'aimais pas ?

- Kuro ! (La voix de mon père résonna en moi et me sortit de mes pensées) Calme-toi. Tu sais aussi bien que moi que c'est la meilleure solution qui se présente à toi. Cesse donc un peu de fuir le conflit et vas-y. A cette heure-ci, Sixtine doit être en train de se morfondre et le reste de la famille Polizzi ne doit pas être en meilleur état. Si tu viens leur proposer un coup de main pour qu'ils récupèrent le pouvoir, crois-moi qu'ils le prendront.

Un long silence se fit dans la pièce avant que mon hurlement se fasse entendre.

-Ah ! Allez au diable ! fis-je en me laissant tomber dans le siège le plus proche pour bouder. Ils avaient malheureusement raison, mais je refusais encore de l'accepter. Acquiescer si facilement à cette proposition serait donner raison à mes cousines sur la façon dont elles m'avaient traité jusqu'alors. Si je devais faire de Sixtine la prochaine cheffe de famille pour sauver mes fesses, j'allais faire en sorte d'imposer mes conditions au passage.

-Par contre il y des choses qui ne sont pas claires dans cette histoire... Pourquoi Cynthia veut-elle laisser sa place ? Et pourquoi avoir accepté ce défi ? Vous êtes sûr de n'être au courant de rien de cela Monsieur Takami ?

Mon petit ami déglutit bruyamment sous le regard inquisiteur de mon père. Bien sûr qu'il savait des choses, il ne voulait juste pas nous le dire. Il ne se serait pas précipité dans mes bras en me demandant pardon sinon.

- Je ne peux rien vous dire, je l'ai promis. Dit-il le regard plongé dans celui de mon père pour le confronter. Ce dernier soupira avant de reprendre

- Dans tous les cas, ce n'est pas ça qui nous aidera. (Il laissa un silence avant de reprendre.) Si j'étais vous j'irai prendre un bain chaud et me coucher tôt. La visite à la demeure Polizzi s'annonce musclée. Vous allez avoir besoin de toutes vos capacités pour vous en sortir de ce mauvais pas.

-C'est un miracle qu'il nous faudrait tu veux dire. Je ne pus m'empêcher de répliquer.

Xxx

- S'il te plait, aide-moi.

Entendre cette voix me supplier, gonflait de plus en plus mon égo alors qu'en face de moi mon oncle trépignait de rage.

- J'ai quelques conditions à poser avant. Souriais-je de plus en plus.

- Arrête tes sottises immédiatement. Tu n'auras rien de nous, comment penses-tu qu'on pourrait s'abaisser à te demander de l'aide. Dans quelques jours, ta grand-mère verra que te choisir était une erreur et proclamera Sixtine comme son héritière. Coupa mon oncle, les joues plus rouges qu'un enfant qui s'était pris une claque.

- Voyons, toutes les personnes autour de cette table ont conscience que tu viens de dire une énorme connerie. Cynthia Polizzi ne revient jamais sur ces paroles, surtout sur un sujet pareil, tu penses vraiment qu'elle n'a pas pleinement réfléchi à qui elle léguerait son affaire ? Ce genre de remarque est une insulte envers sa personne. Je prenais du plaisir. Beaucoup trop sûrement, mais voir mon oncle perdre de ses couleurs avait le don de faire apparaître en moi un plaisir des plus malsains, une jouissance de mon pouvoir et de mon contrôle. Dans tous les cas, même si tu ne veux pas de mon aide ce n'est pas à toi de décider, alors Sixtine, que penses-tu de ma proposition ?

Son regard craintif tourna vers son père avant de revenir à moi.

- Je te l'ai déjà dit ! Aide-moi !

- Parfait alors ! On va passer un contrat écrit ! On respectera toutes les deux nos engagements comme ça. J'ai justement pris le temps de rédiger un petit quelque chose avant de partir. Je vous laisse le lire, le parapher et le signer en bas de page. Lentement, j'extirpais de mon sac les contrats que j'avais préparés le matin même sous l'œil accusateur de Keigo et amusé de mon père. Même si je savais que je jouais avec le feu et que je pouvais perdre beaucoup dans cette histoire, je ne pouvais pas laisser le reste de la famille s'en apercevoir. Ils étaient, bien heureusement pour moi, trop nombrilistes et trop avides de pouvoir pour s'apercevoir que ma petite vie me suffisait amplement. Je tendis un exemplaire à ma cousine ainsi qu'un à mon oncle, qui rouspétait encore de la façon dont je lui avais parlé.

Les yeux de Serena se plissèrent au fur et à mesure de la lecture, tandis que je conservais tant bien que mal mon sérieux et mon calme. Afficher un large sourire en pareille occasion aurait signalé que le contrat avait été rédigé dans l'unique but de l'embêter.

-Je ne comprends pas le premier terme...

- C'était ça que tu visais depuis le début, n'est-ce pas ? la coupa la jeune femme aux cheveux blonds.

Visiblement elle avait compris plus vite que ce que je n'aurai cru, elle n'était peut-être pas le cas désespéré que j'aimais croire.

- A toi de voir si tu acceptes. Les termes sont plutôt très simples à réaliser et vu ce que tu as à y gagner c'est entièrement bénéfique pour toi. Alors ? Ses lèvres se crispèrent, elle semblait hésiter à accepter. C'est bien toi qui me demandais mon aide, il y a deux minutes... Cette phrase illumina une lueur dangereuse dans ses yeux, elle venait de craquer et de réfléchir à tout ce qu'elle aurait à y gagner en échange de quelques petites demandes de ma part. Sans un mot, je lui tendis un stylo pour qu'elle signe le papier qu'elle avait en main avant d'imposer à mon tour mon sceau.

- Je te propose qu'on commence dans l'après-midi histoire de réfléchir aux « cours » et de voir comment on va te préparer à prendre la relève. On se retrouve à quatorze heures à la bibliothèque du manoir. C'est là où on aura le plus de calme et de place. Ne sois pas en retard.

Je sortis de la pièce sans un regard en arrière, du coin de l'œil, je pus voir Keigo se pencher pour les saluer avant de me rejoindre rapidement.

-Tu ne m'as toujours pas dit ce que tu avais écrit sur ce contrat. Commença-t-il après s'être assuré que nous étions loin des oreilles traînantes.

- Juste de quoi assurer qu'on ne m'embête pas, rien de bien important.

- Vu la tête qu'elle a tiré, je peux assurer que tu ne dis pas tout.

- Juste de quoi lui apprendre une leçon importante dans sa vie, mais il semble qu'elle est déjà prête à l'accepter puisqu'elle a signé sans rechigner. Je pense qu'on va bien s'amuser cet après-midi en tout cas, dommage que je ne puisse pas filmer.

- Parfois, tu me fais vraiment peur...

Cette dernière phrase ne fit qu'agrandir mon sourire, Sixtine avait touché à ce qui m'appartenait et allait maintenant en payer pleinement les conséquences.

Xxx

- Pour un bon "dogeza" la personne doit tout d'abord joindre ses mains, se mettre à genoux puis poser le front contre le sol. Les mains et les coudes sont contre terre. Rapproche un peu plus ta main droite de ton corps, elle se doit d'être alignée avec l'autre pour une belle ligne.

- Je peux savoir en quoi ça va m'aider de savoir ça ? Grogna la jeune blonde qui avait suivi les indications.

- J'y viens, cesse donc de t'impatienter. (Je pus voir mon héros s'empêcher de rire, assis sur une chaise au fond de la salle, il avait compris où je voulais en venir.) Vois-tu le "dogeza" se fait pour s'excuser, voire pour s'incliner devant une personne hiérarchiquement supérieure!

D'un coup elle releva sa tête, son regard me fusillant de toute part.

- Comment oses-tu te penser supérieure à moi ? Tu n'es rien dans cette famille ! Elle se remit sur ses genoux prête à se relever.

Avant qu'elle n'en ait le temps, je la coupais dans son élan.

- Tu sembles oublier quelque chose. Sortis-je de ma poche le contrat signé tantôt. Vois-tu, il est stipulé dans le premier paragraphe que tu t'excuserais de ce que tu as fait hier, à moi et à Keigo bien entendu, le second paragraphe stipule que tu ne contestes pas mes décisions.

 - Il est aussi stipulé que tu n'as aucunement le droit de m'humilier en public !

Sixtine commençait à élever la voix. Je pouvais la comprendre, si je m'étais retrouvée dans une telle situation j'aurais sûrement réagi de la même façon. Mais cette fois, c'était moi qui maîtrisais la situation. Elle avait réagi exactement comme je l'avais espéré, en colère et laissant parler son ego avant tout, il était temps pour moi de lui apprendre les premières leçons.

- Tu te sens humiliée alors ? Pauvre petite chose, qu'est-ce que ça fait de se retrouver à la place de tous ceux sur qui tu as marché ? Dont tu t'es éperdument moqué ? Ça fait mal ? Tu veux te venger ? Ce que tu ressens en ce moment n'est qu'une infime émotion comparée à ce que j'ai ressentie quand tu as volé ce qui était mien. Tu vois, l'homme que tu as embrassé au coin de la pièce ? Oui ? N'oublie plus jamais qu'il est avec moi. La prochaine fois que tu, ne serait-ce penses à l'approcher, je peux te jurer que je te tuerai. Je ne possède peut-être pas d'alter mais une femme jalouse et prête à défendre son territoire est bien plus dangereuse que le pire des méchants. Tandis que je déblatérai ce que j'avais à lui dire, son visage perdait de ses couleurs, lui faisant avoisiner un magnifique teint cadavérique. Seuls ses yeux continuaient à me provoquer, une lueur dangereuse qui montrait qu'elle se vengerait si elle en avait l'occasion.

Aussi étrange que cela puisse être, j'aimais cette lueur. Elle prouvait qu'elle était prête à aller de l'avant et surtout à écraser les personnes qui tentaient de l'humilier. Elle ne disait rien car elle était en tord mais dès qu'elle en aurait l'occasion je serai celle qui me retrouverait acculée.

- Tu vois la haine que tu ressens en ce moment ? Garde là toujours en tête, c'est comme ça que Cynthia a avancé. Elle en a bavé dans sa jeunesse mais dès qu'elle a pu se venger de ceux qui la prenait pour faible, elle l'a fait. C'est cette hargne qui fait d'elle une femme forte et respectée de tous. Elle a su surpasser les échecs et les moqueries pour en faire une force. Voilà la première leçon que je devais t'enseigner. L'humilité peut cacher la plus grande des forces.

-C'est-à-dire ? me demanda Sixtine, ses couleurs réapparaissant quelque peu.

-Parfois c'est mieux de fermer sa gueule et de frapper après. Ricanais-je.

- Il y avait sûrement un autre moyen de m'apprendre ça mais j'ai compris où tu voulais en venir. Ne t'en fais pas, je n'oublierai jamais cet affront. On peut passer à une autre leçon. Sans même me regarder ou me demander, elle s'était relevée de sa position accroupie, en enlevant les poussières imaginaires qui s'étaient mises sur ses vêtements.

-Oh mais tu as déjà commencé à expérimenter une autre leçon.

Cette fois ci elle se retourna vers moi, un sourcil levé.

-Je peux faire tout ce que je veux de toi tant que ce n'est pas en public, j'espère que tu es prête. Ne pas lire les contrats, ne pas poser des questions dessus et les signer sans même négocier est la pire des erreurs à faire. Tout bon travailleur sait ça, on voit que tu n'as jamais eu à te soucier des choses. D'ailleurs, avec le costume de soubrette, tu préfères les oreilles de lapin ou de chat ?

Ces derniers mots ne durent guère lui plaire, car au moment même où je finissais ma phrase elle m'empoigna par le col, mes oreilles commençaient soudainement à bourdonner et sa voix ne me paraissait qu'être qu'un cri au creux de mon oreille. Pourtant malgré la panique que je ressentais intérieurement je ne laissais rien paraître.

-Tu dois faire de moi la prochaine héritière, pas un clown de foire, essaye encore de te foutre de ma gueule et je t'assure que tes tympans exploseront.

- Si tu la lâches pas de suite, je te tue.

Même si j'avais du mal à percevoir immédiatement ce qui avait été dit, la voix me rassura aussitôt. Keigo n'avait visiblement pas apprécié que ma cousine me menace et avait décidé de s'en mêler à sa manière. La lame de plume qui frôlait le cou de Sixtine la fit frissonner d'horreur et elle me lâcha d'un coup avant de se reculer. Son alter se désactiva et je pus retrouver l'utilisation de l'ouïe sans trop de dégât. Son pouvoir ainsi que celui de sa sœur n'étaient pas très puissants mais c'était toujours très désagréable d'en faire les frais.

- Calme toi Keigo, commençais-je en japonais avant de continuer en français pour ma cousine. Il ne comprend pas ce que tu dis, tu dois t'en douter. Tu vois c'est pour ça que Cynthia ne t'a pas choisi, tu réagis toujours au quart de tour. On sait exactement comment tu vas réagir, aucun doute n'est possible avec toi. Si la moindre chose te perturbe ou si une personne t'insulte, on saitd'avance que tu vas en venir aux mains ou au cri. Tu es juste une enfant pourri gâtée.

-Bien sûr, c'est bien connu que quand on t'insulte tu ne réagis pas.

- Oh si je réagis, mais je pense à l'action d'après. Mettre une gifle à un machiste montre juste que tu es susceptible et que ses remarques te touchent. Le mieux c'est de lui faire cracher son venin devant son supérieur ou de lui refiler dès que tu peux, des tâches ingrates. En même temps que je parlais, je repensais à mes deux collègues policiers qui ne cessaient de me provoquer. Plus d'une fois j'avais voulu les taper mais je m'étais toujours retenue pour les apparences et pour ne pas me mettre dans des situations embarrassantes. J'avais eu de la chance que l'inspecteur Tsuragamae intervienne en ma faveur. Plus j'y repensais, plus je remarquais que mon travail me manquait, il fallait vraiment que Sixtine change de comportement et arrive à devenir un minimum digne aux yeux de ma grand-mère.

- Ecoute, je m'excuse de mon comportement. C'est vrai que j'ai voulu me venger de tout ce que tu as m'as fait et te donner une leçon. On ne s'aime pas et on ne s'aimera sûrement jamais, mais j'ai autant besoin que toi que tu deviennes cheffe de famille.

- C'est vrai que tu ne pourras jamais faire resplendir la famille, tu ne seras qu'une bonne pochtronne. A mon regard accusateur, elle se reprit immédiatement. Mais tu as raison, si je t'ai demandé ton aide c'est que je savais que tu pourrais m'aider. Je m'excuse également du potentiel mal que je t'ai fait et d'avoir embrassé ton « fiancé », j'avais les nerfs et je voulais me venger. On ne s'aimera jamais c'est une certitude mais j'accepte de faire une trêve pendant une semaine le temps d'écouter ce que tu as à m'enseigner.

- Deal ?

- Deal. Accepta-t-telle me serrant la main. 


xxx

Le petit chapitre sortie pour Noël! J'espère qu'il vous aura plu! 

Sixtine s'est bien bien calmé quand même avec le coup de pression de Hawks, elle l'a un peu cherché aussi.... 

Merci beaucoup pour votre soutien, ses dernières semaines j'ai reçu énormément de vote sur cette histoire donc je vous en remercie! J'avoue avoir hâte de finir cette histoire pour me concentrer sur sa correction et vous présenter une version plus propre et mieux écrit. 

Allez petit teaser pour la prochaine fois 

"L'homme que j'aimais souriait de toutes ses dents à présents, il retira sa main de ma joue avant de la passer derrière mon cou pour mieux me coller à son corps. Ses lèvres trouvèrent rapidement les miennes et il y déposa une multitude de baiser plus langoureux les uns que les autres. Ce toucher provoqua en moi une multitude de frisson, je me sentais comme la plus belle chose au monde dans ses bras. Une véritable reine à qui on montrait tout son amour.

-Je t'aime, je t'aime tellement. Murmura t-il entredeux baiser. "

Alors, vous la sentez venir la bonne scène ? 

A très bientôt pour de nouvelles aventures~

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