Deux années s'étaient écoulées, depuis cet accident de mes dix-huit ans. J'avais énormément progressé en chant car je pris des cours pour ne pas avoir de difficultés et m'amuser avec le groupe. Je m'y sentais bien, malgré le fait que j'étais la seule fille au milieu de garçons. Leur répertoire était magnifique, et on espérait grimper les marches vers les grandes salles remplies de milliers de personnes. Leur musique me faisait penser aux vieux morceaux de rock que tout le monde connaît, comme Wonderwall de Oasis, par exemple. Mais dans tous les cas, je m'éclatais au micro, et c'est tout ce qui comptait pour moi. Mon coude droit faisait parfois des siennes, je ne pouvais pas le déplier ni le replier en entier, mais je pouvais tenir un micro et écrire, alors je ne me plaignais pas.

J'avais décidé de quitter la maison de mes parents en m'installant proche du lieu de vie des membres du groupe. Quand je leur rendais visite , je passais toujours par la salle de musique, pour « dire bonjour » à ma harpe. Je humais l'odeur de mon instrument, l'odeur de mon passé, l'odeur du révolu, l'odeur des secondes chances. Parfois, je caressais les cordes, mais ne retentais jamais de jouer. Le chant avait par contre pris une telle place dans ma vie que j'étais sans cesse en train de fredonner un air, qui me faisait sourire.

Désormais, je n'étais plus Rhéane la harpiste. J'étais Rhéane la chanteuse.