26 Décembre - le Cadeau de Shad_Eau

Et commençons par Shad_Eau qui met à l'honneur dans cette première partie notre très chère Nina !

De quoi sûrement effacer quelques zones d'ombres persistantes tout au long des chapitres et peut-être corriger quelques incohérences (on les a vu ! - humour).

En tout cas, nous vous souhaitons une très bonne lecture !

Son cœur, il battait. Elle plus jamais ne se battait, mais son cœur si.Elle le trouvait bien trop bruyant, et un jour se mit en tête de le faire taire.

En fait, ça lui arrivait d'aimer la vie. Elle aimait par exemple le vent. Le vent heurtant, le vent qui hurlait, grâce à lui elle aimait bien hurler. Elle aimait bien hurler la vie, elle aimait bien hurler le vent, elle aimait bien hurler d'envies, hurler dans le vent et en vie, mais elle finit par trouver ça triste de ne jamais se faire écouter.

Tous les soirs, elle s'asseyait à son bureau, fredonnant sa petite comptine, fredonnant pour les autres, criant dans ça tête, et ça faisait : « Vole, vole, aussi haut que les oiseaux », parce qu'on lui avait volé sa vie et ses oiseaux. Ça faisait : « Danse, danse,danse, aussi légère que leurs plumes », parce qu'elle enviait l'ardeur, le tourbillon dans le vent, leur liberté. Ça faisait :« Rêve, rêve, rêve, monte au ciel, tout là-haut », parce que toujours elle avait été convaincue de la liberté des étoiles, et avait souhaité en devenir une – très sûrement elle l'était déjà. « Et ris, ris, ris, qu'il fasse beau ou qu'il y ait de la brume... », elle riait car elle aimait bien tromper, rire de ce qui faisait pleurer, rire à la place de pleurer, voilà pourquoi ses yeux toujours étaient secs. Cette comptine se terminait toujours en un éclat de rire.

Aujourd'hui,dans sa tête elle compris, elle murmurait sa chansonnette. Ellen'avait plus la force d'hurler. Elle voulait agir, faire quelque chose, de jour en jour elle se sentait plus minuscule, infime,profondément solitaire, et il n'y avait que sa petite Nolwenn pour lui redonner le sourire, sourire qu'elle perdait lorsqu'elle était confrontée à elle-même.

Elle voyait l'admiration béate que sa sœur lui vouait, admiration telle que ça lui redonnait confiance, parfois, ces fois où sa grand-mère ne la regardait pas dégoûtée, « elle n'est jamais présente, elle, même lorsqu'elle est avec nous, jamais ne prend la peine d'habiller son regard, de faire sourire ses yeux,d'éclairer son expression, comme si elle était blasée de tout,comme si elle s'en fichait de tout, faut qu'elle apprenne, Nina,faut qu'elle prenne à s'adapter à la société ! », et ces paroles murmurées dans son dos, elle les entendait quand-même,peut-être pour la simple raison qu'elle en était elle-même convaincue, mais comment pouvait-elle apprendre à mimer le bonheur ?

Elle se retrouvait souvent seule, Nina, et alors elle fermait les yeux,parce qu'elle aime bien le noir. Elle s'imaginait que quand on meure, on voit noir, alors elle voulait attraper une parcelle de cette vision apaisante ; elle ne comptait pas se tuer, avant, mais elle voulait imaginer ce que cela faisait !

Parfois,elle se regardait dans le miroir, et elle se demandait si elle existait vraiment. Elle avait une bouche fine, un nez étiré, des pupilles grandes-ouvertes, des bras maigres, un corps, plus généralement, et portait bien souvent une belle robe blanche, qui,ample et légère, s'agitait au vent, mais est-ce que tout cela suffisait pour exister ? On l'aurait dit fantôme, avec son teint blême et ses yeux éteint. Ou une fée, de celles qui n'existaient que par les récits – ou les paroles de Nolwenn –, peu importe,un être qui existe qu'à moitié et oublié par la majorité des humains censés. Eux qui n'avaient pas le temps de gaspiller aux balivernes.

Aujourd'hui,en ce jour de comptine murmurée, Noël inévitablement arrivait. Les rues s'emplissaient de magie, les gamins braillaient des chants affreusement niais, mais cela avec tellement de joie et de bon cœur qu'on ne pouvait qu'être remplis de béatitude, on voulait encore et encore voir les sourires, alors on leur offrait plus de cadeaux, je ne vous parle pas non plus de l'odeur s'échappant des cuisines, un fumet délicieux laissant entrevoir l'après-midi de préparation chargée, et les épines des sapins qui piquât celui qui distrait les caressants, et les papiers déchirés, et le gamin d'un an se traînant sur ses pattes, d'yeux émerveillés il regardait ses cadeaux, on aurait dit qu'il découvrît le monde,cela par les bateaux de plastic coloré, on aurait voulu faire ce voyage avec lui, voyage en plein cœur du nouveau, il ne sait pas parler mais déjà il en veut d'autres, il ne sait pas déchirer mais impatient il essaie, c'est beau cette innocence, c'est beau les Noëls en famille, chaque fois c'est unique, chaque fois l'on se couche plus tard, et une bambine gémit « Quoi, déjà, y'a plus d'cadeaux ? », mais c'est magique ces moments-là...

Nina,elle marchait dans la rue, s'emplissant de l'ivresse du bonheur des autres, comme une voleuse qui par la fenêtre dérobait les scènes ne lui appartenant pas, que des inconnus ceux qu'elle observait, elle était ombre derrière les rideaux, personne ne la remarquait, mais comme jamais on ne l'entendait ça ne changeait pas de d'habitude. Je ne sais pas si elle souriait ou si elle riait, mais elle s'était dit vouloir connaître le jour de sa mort ce bonheur, elle aurait dû rejoindre sa famille mais égoïstement elle voulu se faire un cadeau : celui d'aujourd'hui-même disparaître de la Terre, elle décida qu'il valait mieux se tuer que de connaître pire. Elle mourrait heureuse, au moins, et elle l'avait toujours voulu !

Elle ne pensa pas à Nolwenn... Enfin... si, énormément en fait, sans cesse elle revoyait son visage, mais jamais elle n'imaginait que sa disparition puisse effacer ses sourires, à vrai dire comment pouvait-elle, avec l'image de l'expression éclairée de sa sœurette en tête ? Elle l'aimait de tout son cœur cette petite,cette petite pleine de candeur, de tendresse, mais aussi de maturité,si touchante, elle regretta de ne pas lui avoir offert son cadeau de Noël avant de partir, peut-être néanmoins Nolwenn fouillera-t-elle dans sa chambre et trouvera-t-elle le paquet...

Elle prit un rasoir. Ses veines battaient, son cœur aussi, mais ni l'un ni l'autre n'allaient continuer de la narguer, elle posa la lame sur son poignet, elle appuya – tiens, du sang ! Elle trouva que c'était une belle couleur, le pourpre n'est-il pas charmant ?Elle relâcha la pression de sa lame, à peine s'était-elle encore entaillée, elle posa son indexe dans le liquide visqueux – ça faisait pas trop mal finalement –, elle traça un N, un O, un L, un W, un E, un N, un N, puis elle effaça vite ; ça ne se faisait pas de marquer un nom quand on se tuait !

Cette fois, elle sélectionna une artère qu'elle coupa avec son âme de fortune. Pourpre, belle couleur, mais pas lorsqu'il y en a trop,parce que lorsque son corps heurta le sol, la flaque rougeâtre qui se format n'était pas des moindres, cela semblait former une rivière de sang, partant de son poignet pour creuser les pavés.

Ellen'avait pas mal, non, Nina... Elle voyait noir, de plus en plus,tout s'obscurcissait, mais depuis longtemps elle s'était habituée à cette teinte charmante. Seulement, elle ne ressentait pas la douleur aiguë, celle qui va jusqu'à presser votre tête sous l'étau du mal-être, lorsque le cœur crie, bondit dans la poitrine, lorsqu'on a mal, quoi...

Elle ferma les yeux, la tête posée contre le sol glacée, elle se dit enfin mais en fait ce n'était pas fini, je crois qu'elle a eu le temps de penser à Nolwenn avant de perdre connaissance.

La chambre était blanche. Le paradis existait donc ? Zut ! Jusqu'alors,elle s'était préparée au noir, ça la déconcentrait de voir ses plans bouleversés, mais bon, le noir est plus facile d'accès que le blanc, elle aimait bien le blanc mais que pour sa robe, ça la décevait un peu mine de rien.

Néanmoins,elle trouvait ça bizarre de respirer, de ressentir l'air tiède lui caresser la peau, de voir la lune briller, dehors, ce fut là qu'elle comprit : elle a merdé. Attachée à un fil respiratoire,elle semblait d'autant plus fragile, infime, dont l'existence-même dépendait d'une machine et non plus d'elle-même. Elle devina sans difficulté que l'hôpital lui avait ouvert les portes, par qui elle se demandait, elle eut peur de la réaction de sa famille,elle se leva, se décrocha du fil, elle respirait avec des soubresauts, sans, mais au moins elle dépendait d'elle-même, et si sa tête tourna quelques instants, si dans son état de faiblesse elle dut se soutenir à un mur, elle parvint à approcher la fenêtre,à regarder, ça faisait même pas un étage, pas idéal pour crever,d'autant plus que se situer devant un hôpital augmentait ses chances de sauvetage, de nouveau, alors elle sauta quand même, se fit un peu mal à la cheville en ne se réceptionnant pas bien, mais elle se releva, elle était dehors, elle voyait le sapin illuminé,elle marcha, elle partit vers la rivière, ce qu'elle aimait cet endroit paisible, peut-être pourrait-elle sauter du pont, mourir sur l'asphalte et au pire se faire écraser comme un animal mort.

Elle réfléchit. En marchant. Elle réfléchit à la connerie dans laquelle elle s'était embarquée, maintenant qu'elle l'avait fait en partie – ses marques on-ne-peut-plus visibles sur son poignet en témoignaient, ainsi que sa vision qui s'obscurcissait par instants –, il fallait terminer, puis elle se dit que de toute façon elle avait toujours été à moitié morte, alors autant tuer le corps puisque l'esprit dans les étoiles s'en était déjà allé.

En fait, ça confirmait bien des pensées, elle était une fée des étoiles. Tombée sur la terre, elle ne pouvait s'y plaire, –elle demandait le ciel et on lui offrait la boue ! – et elle était devenue fantôme, quelque chose comme ça, une étoile qu'on ne voit pas, il n'y a que sa Nolwenn qui l'avait comprise spéciale,mais elle voulait rejoindre la nuit aujourd'hui, elle avait déjà essayé, et persisterait.

Debout sur le pont, immobile, figée dans l'instant présent, les yeux fixés sur l'eau, le vent la fouettait, mais autour d'elle faisait tourbillonner de la poussière d'étoiles, de la poussière de la Terre aussi, à ce moment elle vit un garçon, elle comprit rapidement qui, Raphaël, les étoiles avaient murmuré son nom un jour, elle lui dit de prendre soin de sa sœur, elle sauta, elle espéra atterrir dans les étoiles, mais non, on ne lui voulait pas même ça, l'air revint à elle et le ciment dur frappa son corps.Elle avait l'impression d'être dans une rivière, là où les courants la déposèrent au bord, les larmes de son rire se mêlèrent à l'eau, elle coula jusque dans ses yeux, c'était pas beau à voir comme ils étaient rouges et gonflés, je crois qu'elle est restée longtemps comme ça, sur la rive, à geler, à frissonner, on lui refusait la mort, ce n'était pas encore son heure, pas encore,bientôt peut-être, mais on décidera pour elle, elle qui aurait voulue être seule maîtresse de son existence, qui avait prononcée« mort » alors qu'on l'avait ignorée, triste à voir son air éteint, en particulier lorsque ses larmes se tarirent, son expression devint neutre, son cœur hurlait, mes ses lèvres ne se mirent qu'à chantonner sa comptine en boucle, obsédées par les paroles, obsédées par l'envol des oiseaux... Eux réussissaient,toujours. Mise à part sur le mur du zoo... Mais dans le chant, ils s'envolaient en de notes aiguë, ils perçaient les tons sombres ;ils s'envolaient.

Elle se releva, toujours au même endroit. Membres douloureux, lassitude au bout des doigts, alla en ville, marcha, erra, mais continuait de fredonner sa musique, elle pensait beaucoup aux oiseaux enchaînés du zoo, alors elle prit un malin plaisir à mettre tant de force dans ses paroles que les voilà déchaînés.

Elle retourna sur le terrain, après quelques fois avoir croisé Raphaël,les yeux tristes elle récitait sa comptine, à chaque mot son cœur tremblait, son corps restait froid, c'est fou comme ça peut être contradictoire là-dedans !

Mais au zoo elle se rendit. Elle pensait aux oiseaux derrière les barreaux. Depuis longtemps elle souhaitait les libérer, pour qu'ils soient aussi libres que ceux de la comptine. Eux rêvaient d'atteindre les étoiles, mais se retrouvaient à un mur enchaînés.Quel triste sort ! Longtemps, devant cette magnifique peinture, elle avait pleuré. Ou rit, pardon, elle avait rit, elle ne voulait pas pleurer, donc elle riait tout le temps. Elle se disait que ces oiseaux eux aussi étaient des bêtes des étoiles, éphémères, qui sous peine d'être ternis jamais en cage ne devraient être représentés.

Quelle ne fut pas sa surprise, son ébahissement, en voyant que déjà Raphaël et Nolwenn se tenaient là, prévoyant sa venue, la devançant, une multitude de pots de peinture à la main ! Elle comprit alors que les oiseaux des étoiles n'avaient pas besoin de rejoindre le ciel pour briller, qu'en vie leur splendeur illuminait avec plus encore d'ardeur, si ils se battaient ensemble pour sortir de la cage.

Nina, elle n'a pas rit, elle a pleuré. 

*

Et voilà pour ce premier cadeau offert par les modos !

N'hésitez pas à nous dire ce dont vous en avez pensé et à demain pour le cadeau suivant !

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top