5 décembre

Nous avons aujourd'hui le texte de sapetinette ! Bonne lecture.

La voix grave de notre hôte nous arrête dans notre dispute. Je me tourne vers lui, et demande avec précaution :

— Avait-il un bonnet rouge avec deux boules de laine suspendues aux oreilles ?

La lumière qui s'éclaire dans les yeux du barbu parle à sa place. Il semble revigoré par la nouvelle que quelqu'un ait aperçu l'enfant.

— Nous l'avons vu sur la route, dit Apolline, c'est lui qui nous a obligées à dévier brusquement. Le temps que l'on se remette de l'accident, il avait disparu. A vrai dire, j'ai même cru que c'était une hallucination tellement il était furtif.

— Vous êtes sûres de ne pas avoir vu la direction dans laquelle il est parti ? Demande Aaron, à la fois soulagé et paniqué.

Je secoue la tête de gauche à droite pour affirmer que non.

Nous arrivons devant une petite cabane. On voit de l'extérieur que l'intérieur est encore éclairé. Aaron nous fait entrer, prend nos manteaux trempés qu'il dépose près d'un feu, puis nous dit de s'installer comme on le souhaite.

Il se met alors à marcher dans la pièce de plus en plus rapidement, faisant des tours de tables et se passant la main dans les cheveux. C'est un petit salon, les murs en bois, une table en chêne taillée au centre. Le chalet de bûcheron par excellence.

Après une minute de silence, je demande où se trouvent les cabinets. Aaron m'indique un couloir, puis une porte, avant de déclarer qu'il s'en va préparer de quoi manger en attendant un véhicule de secours. Je l'entends discuter avec cette Apolline depuis mon emplacement :

— La neige tombe de plus en plus fort, je pense qu'il va falloir attendre une heure avant de pouvoir sortir, dit-il.

— Je peux prévenir des proches par téléphone ? Dit Apolline. Le mien ne s'allume plus depuis l'accident.

— Bien sûr, je n'ai pas trop l'habitude de l'utiliser, je vais le chercher.

J'entends les lourds pas du barbu s'éloigner alors que je me relève.

Je reviens dans la salle à manger. Apolline me toise du regard, un doigt sur son menton, le coude sur la table. Le bruit du vent soufflant sur le toit masque les crépitements du feu. Il me semble que l'habitation grince.

— On ne peut pas quitter...

— Je sais, dis-je sèchement, la coupant dans son élan.

Ce n'est pas que je n'ai pas envie de parler avec elle, bien au contraire, j'ai beaucoup de choses à lui dire. Seulement, tout ce qu'elle dit me semble inutile. Vide. Et cela me met sur les nerfs.

Aaron revient vite, bien heureusement, coupant le silence qui s'installe entre nous deux. Il sourit :

— Je l'ai trouvé, je pense qu'il faut le mettre à charger, ça prendra un instant, dit-il en soufflant la poussière de l'écran du portable. J'ai aussi réchauffé une soupe, si ça vous intéresse.

Je réalise alors que j'ai faim, et accepte, tout comme Apolline, d'y goûter. C'est en vérité un potage délicieux et je le mange avec entrain.

Dehors, la tempête fait grincer les murs en bois de la cabane. Les cliquetis de nos cuillères, irréguliers, sont les seuls bruits brisant le silence. Apolline et moi avons haussé la voix au début de la soirée, mais maintenant que l'on se trouve chez Aaron, rien ne sort.

Les cliquetis de cuillères. Le vent sur les murs. Le feu. J'ai besoin d'air.

Je sors de table, prétextant une nouvelle envie d'aller aux toilettes, et me dirige vers le couloir. En vérité, j'erre entre les portes des pièces, intriguée par les petits panneaux rustiques qui indiquent une chambre ou une salle de bain.

J'entends au loin Apolline qui essaie de faire fonctionner le vieux téléphone, tandis que Aaron se ressert de la soupe.

Au fond du couloir, un petit cadre, poussiéreux, retient mon attention. Je m'avance, plisse les yeux. Alors, les battements de mon cœur s'accélèrent. Dehors, la tempête gagne en puissance, les flocons volent en face des vitres, et devant moi, suspendue au plafond, se trouve une photographie usée d'Adam.

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