22 décembre

Plus que quelques jours ! Nous espérons que ce chapitre, écrit par BlanNina! Bonne lecture !

— Et pourquoi croire en moi ?

Avachie par terre, mon regard se perd dans le vide. J’effleure distraitement le fer glacial qui emprisonne mon cou, rattaché au mur de la pièce humide. Je ne tente même pas de me lever. Lorsque je reprends la parole, je ne tente même pas de croiser les yeux de l’énorme lapin face à moi :

— J’en ai marre.

J’entends de puissants bonds avancer vers moi, jusqu’à ce qu’un tintement stoppe tout mouvement devant moi.

— Elena… souffle-t-il. Vous devez me faire confiance.

— Pour quoi faire ? ris-je. Qu’est-ce que j’en ai à foutre de faire confiance à… à un lapin géant en costume ! (Je prends mon visage entre les mains, quelques mèches me chatouillant le front.) « Sauver la magie ? » C’est complètement stupide. On dirait un film pour gosses, oui.

Je suis sèche, méchante, frigorifiée et blessée. J’en ai marre de cette journée cauchemardesque sans ni queue ni tête. À la base, je rejoignais simplement ma famille pour le Réveillon de Noël. S’il n’y avait pas eu cette idiote d’Apolline sur la route… Je regrette tellement de l’avoir remarquée ! Pourquoi la tempête ne l’a-t-elle pas emportée au loin, telle une Mary Poppins flinguée que personne ne voulait comme nourrice ?

Je m’allonge sur le sol aqueux et me mets en boule. Ma joue caresse la pierre mouillée, sale, et je sens l’eau s’infiltrer dans ma peau, mes cheveux, mes vêtements, tout mon être.

Quelle journée nulle à chier.

— Allez sauver le monde, articulé-je à l’intention du gibier anthropomorphe, lui faisant un petit signe de la main par-dessus mon épaule. Je suis certaine que le célèbre Lapin de Pâques s’en sortira bien mieux que moi. Je vais vous attendre ici, perso. Adios amigos.

— Elena, je vous en prie, reprenez-vous… J’ai besoin de vous.

Je pouffe. Bien entendu qu’il a besoin de s’encombrer d’une pauvre nouille sur pattes comme moi. Allons bon, qu’est-ce qu’il ne fallait pas entendre.

— Laissez-moi, je vais vous ralentir, blablabla. On connaît tous la musique.

— Vous ne comprenez pas la situation ! soupire-t-il dans un élan de désespoir. Si la magie disparaît de ce monde, que pensez-vous qu’il va arriver ?

— Hum, que je devine… Les mythes vont s’évaporer d’un coup ? présagé-je en claquant des doigts. Et qu’est-ce que vous voulez que ça me fasse ?

— Mais enfin, la magie, les enfants… !

Je me relève précipitamment et fais volte-face au Lapin.

— Eh ben, moi, je vais vous dire ce que j’en pense : on s’en fout du Père Noël, de la Petite Souris, de vous et du reste ! On pense jamais à vous, sauf quand ça nous arrange bien que vous existiez. Parce qu’on aime recevoir des cadeaux à Noël, des pièces sous l’oreiller et du chocolat à Pâques ! explosé-je brutalement. Les enfants vous adorent qu’un jour par an, c’est tout ! Et la Reine des Neiges, pour nous, c’est juste un film Disney avec une chanson énervante qui nous hante depuis des années. Alors, que vous disparaissiez pour de bon, on s’en fiche pas mal ! On a déjà des magasins et des cinémas qui vous remplacent sans problème.

Essoufflée, je ne dis plus rien. Alors que je me concentre pour reprendre ma respiration, la prison tombe dans un silence digne d’un cimetière. Le Lapin de Pâques m’observe, mi-peiné mi-offensé. Le museau tremblant, ses moustaches tressautent dans un rythme saccadé.

— Si nous vous laissons indifférente, reprit l’être mythique, pourquoi êtes-vous ici ?

— Ah ! Si Adam n’était pas mêlé à toute cette histoire, croyez-moi bien que je ne vous taperais pas la causette en ce moment-même. Tout ce que je veux, c’est retrouver mon fiancé ! Et rien d’autre, ajouté-je d’un ton plus maussade.

— Je vois.

Il se retourne, dos à moi désormais, et saute vers la porte. Il pose un coussinet sur la matière dure et gelée de la porte. Cependant, sa bouille poilue me scrute une dernière fois.

— Je reviendrai, soyez-en sûre.

Et il s’est évaporé. J’aurais pu m’extasier face à ce véritable tour de magie. Pourtant, je me suis contenté de retrouver ma véritable place : le pavé mouillé.

Je ne sais pas combien de temps s’est écoulé depuis que le gros lapin est parti. Une heure, peut-être deux ? Je ne sens plus ma gorge tellement elle est engourdie par la chaîne. En tout cas, je reste là, par terre, à fermer les yeux pour m’endormir. Je veux juste me réveiller et que tout ceci ne soit qu’au final un mauvais rêve.

Un bruit sourd, suivi d’un grincement lourd, me fait sursauter, me sortant de ma torpeur.

— Elena !

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