2 décembre
Ce deuxième chapitre est l'œuvre de DreamEatRead11 ! Bonne lecture de cette finaliste de The Book 2020.
La jeune femme à mes côtés semble penser autrement, mais j'en suis certaine. Je sens ces choses-là, c'est inné en moi. J'essaie vaguement de continuer à engager la discussion, mais c'est peine perdue. Entre ses larmes, son nez qui coule, sa voix qui tremble et le peu de volonté qu'elle met, c'est comme... Comme se poser plein de questions extrêmement précises et espérer obtenir des réponses précises de la part d'un pain d'épices.
Je souris de ma propre comparaison. Noël doit me monter à la tête... Concentration ! Plus on roule, et plus l'obscurité enveloppe ma voiture. Je déteste conduire dans le noir, alors avec cette tempête...
En d'autres circonstances, je me serais attelée à dessiner ce tourbillon de neige, la beauté de chaque flocon qui danse dans le ciel, la magnificence des éléments indomptables qui nous entourent et nous recouvrent. J'aurais tracé les lignes de cette fine pellicule blanche, invitant à la rêverie.
Mais je dois me concentrer sur cette route noire et faire fi de l'ambiance glaciale qui régit l'habitacle. Les pneus glissent, les freins crissent, mes mains se crispent. Je me rassure avec un bref coup d'œil au GPS. On n'est plus très loin de chez mes parents. Et quand est-il de cette femme ?
— Je peux vous déposer quelque part ? demandé-je doucement.
Seule une violente bourrasque vient me tenir compagnie. Et sur cette absence de réponse de la part de l'inconnue, le silence se fait encore plus oppressant. Elle semble toujours aussi paniquée. Dans son regard, je peux voir qu'elle craint que l'histoire recommence encore une fois, et que je la laisse dans le froid, seule, sans aucune protection.
Je tente de ne pas l'assaillir d'œillades insistantes, mais malgré tout, il me faut savoir quoi faire. Aider, je le fais sans problème. Je n'ai pas hésité avant de lui venir en aide. Mais Noël, c'est sacré. Je ne peux pas risquer de briser la tradition familiale en ramenant une inconnue... Il faut que j'en apprenne plus sur elle et que je sache où je peux l'emmener !
— À défaut de cela, que diriez-vous d'enfin faire les présentations ?
Je me tourne vers elle, bien décidée à entendre un nom sortir de sa bouche. Encore une fois, sa réponse se fait attendre. Au bout de quelques minutes d'hésitation, elle finit par me révéler son identité.
— Je m'appelle Apolline Eberherz, 28 ans. Je... Je suis actuellement sans logement ni emploi. Et... Je ne pouvais pas vous répondre sur où je voulais que vous me déposiez, car je n'ai nulle part où aller..
Ce nom... Eberherz... Est-ce ce que je pense ? Lui, me tourmantant encore aujourd'hui ? Et... Pourquoi ne l'ai-je pas reconnue plus tôt ? Mon corps entier semble secoué de spasmes de terreur lorsque je réalise l'inimaginable. Je nage en plein délire. Je ne fixe plus que la route. Rien que la route, seulement la route. Face à mon mutisme, Apolline semble se demander si ce qu'elle a dit ne m'a pas vexé.
— Et vous, quel est votre nom ?
— Elena, Elena Meketo. J'ai 34 ans.
Mon ton est sec, je ne veux pas lui parler.
— Je ne voulais que savoir votre nom, vous savez..?
Je ne voulais rien, moi non plus, enfin pas grand chose. Un réveillon en famille, la chaleur d'un feu de bois, la douceur d'un morceau de chocolat qui fond sous la langue. Alors que Apolline se confond en excuses et paraît fortement culpabiliser, je fais la liste de tout ce dont j'ai besoin, maintenant.
Je dois arriver chez mes parents, me garer, descendre, marcher sans glisser jusqu'au perron de leur maison. C'est tout. Je n'ai pas besoin de regarder à nouveau à mes côtés. Peut-être que si je ne la vois pas, elle n'est pas réelle ? Peut-être qu'elle va finir par lâcher l'affaire et changer de voiture ? Dans mon esprit, il est clair qu'il ne peut en être autrement.
— Je crois avoir compris pourquoi vous êtes si sèche...
Non... Ne dis pas un mot de plus, Apolline. Ne franchis pas cette barrière, ne brise pas cette limite invisible, ne romps pas ce fil qui me retient dans mes gonds.
— Vous étiez la fiancée de mon frère, non ?
Oui, je l'étais... jusqu'à sa disparition.
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