Le Conte des Esprits, anonyme, date inconnue
Au commencement, il n'y avait rien. Seulement du vide, de la poussière et une Conscience lasse et solitaire. On l'appelait l'Omniscient. Il voyait tout, comprenait tout, contrôlait tout... mais il n'y avait rien à voir, rien à comprendre, rien à contrôler. Seulement du vide, de la poussière et lui. Malheureux, la solitude et l'ennui le plongèrent peu à peu dans une profonde torpeur.
La puissance de ses rêves donna vie à un compagnon : une créature des cieux, au plumage fauve et au bec rutilant, dont le battement de ses larges ailes faisait la pluie ou le beau-temps. Par son vol éternel, l'Oiseau-Tonnerre créa ainsi sans le vouloir l'eau et le soleil. Ainsi naquirent le Kelpie, Esprit des Océans et des Rivières, et le Dragon, Maître du Feu et la Lave. Au contact de l'eau, la poussière s'aggloméra ; au souffle brulant du Dragon, elle prit forme. Le Golem, Souverain de la Terre et de la Nature, apparut. Quatre nouveaux Amis dont l'agitation joyeuse réveilla peu à peu l'Omniscient, dont la solitude et la morosité étaient à présent chassées.
Mais ils se lassèrentrapidement de leurs jeux célestes, l'ennui les rattrapa. Il leur fallait créerun divertissement. Quelque chose d'ambitieux, de distrayant, qui ne cesseraitde les occuper... Alors le Golem puisa dans sa glaise et façonna une énorme boulede terre bosselée, craquelée, irrégulière ; nos montagnes, nos gouffres etnos falaises. Le Kelpie compléta son œuvre en déversant son eau le long de sesrainures et qui vint s'amasser dans les combes ; nos rivières, nos lacs,et nos océans. Le Dragon, quant à lui, aspirait à quelque chose de plusspectaculaire, aussi enfouit-il de son feu dans la terre. Là où il en mit trop,des montagnes déversèrent soudain des torrents en fusion ou crachèrent de lavapeur ; là où pas assez, de nouvelles roches apparurent. Nos volcans, nosgeysers, et nos gisements. Enfin, l'Oiseau-Tonnerre, de son battement d'aile,invoqua le vent, la pluie et le soleil, insufflant ainsi un cycle à leurcréation. Au fruit de leur labeur et beaucoup de patience, ils créèrent ainsiles conditions idéales à la Vie et à la Mort. Mais les êtres qui peuplaientleur création semblaient vides, éteints. La déception des Quatre Esprits futtelle que l'Omniscient ne put se résoudre à accepter leur tristesse, alors ilinsuffla un petit peu de sa conscience dans chaque être, une formed'intelligence différente pour chaque espèce ; les plantes, les animaux etles hommes. Leur Monde était à présent parfait et, par équité, chacun s'octroyaun domaine à gouverner, à l'exception de l'Omniscient qui préférait contempler.
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