Chapitre 12
Nuage de Pollen ouvrit les yeux tout doucement. En apercevant des roches brillants autour d'elle, elle les contempla d'un air étonné, puis se souvint : elle avait dormi ici avec Museau Aplati ! Où était-il, d'ailleurs ?
Alors que l'apprentie commençait à prendre peur, une tête grise passa entre deux pierres.
« Où étais-tu ? lui demanda la femelle, le pelage hérissé par le soulagement. »
Le mâle posa une grive au sol et expliqua :
« Je suis allé nous trouver du gibier. Étant ton mentor, j'ai remarqué que tu ne pouvais pas faire d'efforts sans nourriture, la taquina t-il. Et puisqu'on va devoir marcher jusqu'au camp... »
La rouquine fronça la truffe, vexée. Elle pouvait très bien faire des efforts ! Elle était sur le point de répliquer lorsque le matou au museau plat l'arrêta. Il avait déplumé la grive et lui tendait un morceau. La chatte aux yeux verts marmonna un remerciement et l'avala tout rond, sous les yeux surpris de son professeur.
« Donc c'est pour ça que j'ai chassé toute la matinée ? ronronna le mâle. Eh bien ! J'aurais peut-être mieux fait de le garder pour moi plutôt que le donner a cet estomac de brochet !
- Même pas en rêve ! rétorqua la novice, les yeux pétillants, signe de son amusement. Monsieur a faim ? Dans ce cas, je vais lui trouver quelque chose !
- Oh, ce n'est pas la pei...
- Si, répliqua Nuage de Pollen en agitant la queue avec dédain. Je sais chasser !
- Tu as eu un bon entraîneur... »
Elle étouffa un rire.
« On va dire que mon talent naturel a fait effet !
- Mouais c'est ça ! En attendant, c'est moi qui t'ai attrapé à manger, ronronna le chat gris. »
Elle poussa un faux soupir exaspéré.
« J'y vais, dans ce cas ! Mes talents de chasseuse feront effet en moins de temps qu'il n'en faut pour dire poisson ! »
Sur ce, elle quitta la tanière improvisée et se mit en quête d'une proie. Elle avait du mal à en repérer, avec tout le bruit que faisait la cascade. Et elle finit par se demander si Museau Aplati ne s'était pas éloigné de celle-ci pour trouver sa grive.
Dans ce cas, je ferais pareil, décida la femelle.
Elle décida de se rendre à la Combe Boisée, où poussait de l'herbe en abondance. De plus, si elle n'y trouvait pas de proies, il y avait aussi des buissons pleins de ces baies que l'on mangeait quand il n'y avait plus de poissons - ce qui était très rare, qu'elle pourrait prendre. De plus, elles étaient succulentes... l'apprentie rousse se décida à y aller. Elle n'allait pas rester là toute la journée !
Pour être fructueuse, la chasse fût fructueuse ! Nuage de Pollen réussit à attraper une mésange et un mulot dodu, elle qui n'était pas très bonne à la chasse ! Et ce en peu de temps ! Elle pu même prendre quelques baies, car il restait de la place dans sa gueule. Fière d'elle, elle se rengorgea quand Museau Aplati la félicita. Elle lui tendit la mésange - elle n'aimait pas ça - et quelques baies, se choisissant le mulot. Ce n'était pas aussi bon que le poisson... en fait, elle n'avait jamais goûté ce type de rongeur avant. C'était la première et la dernière fois qu'elle en prenait... elle donna la proie au guerrier et se contenta de trois baies. Mais, étant partageur, son mentor lui donna les siennes. Elle le remercia d'un signe de tête. Quand ils eurent fini leur repas, Museau Aplati miaula :
« Bon. On ferait mieux de rentrer au camp avant que les autres ne se réveillent. »
Nuage de Pollen haussa un sourcil. Elle ne s'était pas rendue compte qu'il était si tôt. C'est alors qu'une pensée lui traversa l'esprit.
« Mais hier, Aile de Bourdon et Griffe Fendue ont dû s'inquiéter qu'on ait disparus ! »
Le matou la rassura aussitôt.
« Non, je ne pense pas. Ils ont sûrement pensé que tu étais fatiguée et que je t'avais ramenée au camp. »
La novice était sceptique, mais acquiesça d'un signe de tête. Alors, qu'ils se mettaient en route, Nuage de Pollen commença à s'ennuyer. Alors, elle commença à lui poser des questions :
« Comment tu t'es aplati le museau ? »
Le matou gris se retourna, un peu surpris.
« Qu'est-ce qu'il y a ?
- Je te demande comment tu t'es aplati le museau, répéta la chatte rousse, un peu agacée.
- Ah ça ! Ça remonte à il y a longtemps... je venais d'être nommé guerrier avec Lac de Vase et notre autre frère. Il s'appelait Pelage de Lierre. Après notre veillée... nous avons pris de l'herbe à chat, avoua le mâle, gêné. Nous sommes allés à la rivière près des rochers du soleil... et nous nous sommes jetés à l'eau. Pelage de Lierre s'est... il s'est... »
Museau Aplati lâcha un sanglot, et la novice lui murmura :
« Il est...
- Oui. Il est... mort. Il s'est ouvert le crâne. Je vois encore le sang... »
Nuage de Pollen recula d'un pas à cette idée. Ça devait être atroce... Elle n'osa pas dire un mot, jusqu'à ce que Museau Aplati reprenne :
« Il était si gentil... si... libre. Mais son destin était autre. Enfin... J'ai eu plus de chance. J'ai failli me briser la mâchoire, mais Patte Sablonneuse, le guérisseur de l'époque, m'a sauvé. Il est mort peu avant ta naissance, tu sais. »
La femelle ressenti un frisson, ainsi qu'un élan de sympathie pour ce matou qu'elle n'avait pourtant jamais rencontré.
« Et Lac de Vase ? osa demander la rouquine. Que lui est-il arrivé ? »
Le chat gris poussa un soupir.
« Il s'en est mieux sorti que Pelage de Lierre et moi, en tout cas. Il s'est juste débattu si longtemps que son pelage noir s'est décoloré... il est devenu gris foncé. Mais il a toujours les mêmes taches blanches, par contre. Enfin bon. Je dois t'ennuyer, avec mes histoires de vieux chats... »
Elle fit un petit saut pour lui taper l'oreille.
« De un, non, tu ne m'embêtes pas, au contraire. Et de deux... tu ne dois pas dépasser les trente lunes !
- J'en ai vingt-trois, rétorqua le chat gris.
- Ben tu vois ? T'es pas vieux ! »
Il ronronna.
« Si tu le dis. Mais comparé à toi...
- J'en ai quand même neuf ! C'est pas mal ! »
Il lui donna un petit coup d'épaule.
« Après Petite Baie, tu es donc la plus jeune du clan, puisque Petite Foudre et Petit Trèfle sont... sortit avant toi. Et Petite Libellule est née avant vous. »
Nuage de Pollen grogna.
« Pas ma faute, fit-elle en affichant un air bougon. »
Ils continuèrent le chemin dans un silence gêné. L'apprentie sentait les longues herbes brunes lui frôler le ventre, et la chatouiller. Alors qu'ils étaient presque arrivés au camp, le soleil était presque levé. Nuage de Pollen se rendit compte qu'elle avait été seule avec son mentor, mais qu'elle ne lui avait pas confié ce qu'elle voulait lui dire !
Bah ! Il n'aurais sûrement pas compris ! Et puis je me sens un peu mieux...
Tandis que la femelle était sur le point de s'engouffrer dans les roseaux, son professeur l'arrêta. Elle lui lança un regard interrogateur, auquel il répondit par un battement de paupières. Ne comprenant pas, elle miaula :
« Qu'est-ce qu'il y a ?
- Moins fort ! Ils ne faut pas qu'on nous voit ici ! C'est que c'est secret...
Il lui fit signe de le suivre. Elle s'exécuta, curieuse - et un peu gênée - et le suivit dans un entrelacs de branches et de feuilles, puis se glissa entre deux énormes pierres. Ils arrivèrent alors dans une magnifique clairière fleurie, où coulait un ruisseau. Elle lui lança un regard émerveillé, et il sourit.
« C'est joli, hein ? »
Elle hocha la tête et contempla le superbe paysage qui s'offrait à elle. La clairière était entourée d'arbres verdoyants et de roches, et le doux clapotis de l'eau parvint aux oreilles de la novice. Elle se laissa bercer, quand elle entendit le murmure de Museau Aplati.
« Si tu veux je t'entraînerais ici. »
Elle ouvrit les yeux et se retrouva face aux prunelles vertes du mâle.
« Nuage de Pollen... miaula celui-ci. J'aimerais te dire quelque chose... »
Elle dressa les oreilles, le cœur battant incroyablement vite.
« Nuage de Pollen... tu es comme une fille pour moi. »
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