Prologue

La faible lueur du croissant de lune baignait la clairière d'une douce lumière argentée. Au centre de la trouée, une chatte noire était allongée sur le flanc, telle une ombre reflétant la lune. La femelle haletait bruyamment, son ventre était énorme. Elle était pleine, et la mise-bas avait commencé. La chatte noire avait toujours préféré la solitude, c'est pourquoi elle avait quitté le groupe pour s'isoler. Mais à présent, être seule la rendait nerveuse, et elle aurait tout donné pour enfouir son museau dans le pelage de son compagnon. Elle se souvenait encore comment elle l'avait rejeté, le soir même, lui disant qu'il ne comptait pas pour elle et qu'elle ne voulait pas de ses chatons. Il était alors entré dans une colère noire et était parti sans dire un mot en fouettant l'air de sa queue. Mais c'est pendant leur dispute qu'elle avait comprise qu'elle allait bientôt mettre bas, rongée par l'angoisse et la peur, elle ne lui en avait pas parlé et avait dit des choses qu'elle regrettait à présent. Son compagnon, ne pouvant pas savoir que ses petits arrivaient, ne serait certainement pas à ses côtés pour la réconforter comme il lui avait promis, quelques lunes auparavant.

Emportée par la douleur, la femelle poussa une plainte déchirante, qui stoppa tous les bruits alentours. Mais à peine avait-elle fermé les yeux que la dure réalité revint à elle. Une contraction la fit hurler de douleur, elle crut qu'un chaton allait naître, mais non aucun petit n'arriva.

Soudain, à plusieurs longueurs de queue de la chatte, un bruissement se fit entendre et un matou sortit du couvert des arbres. C'était un mâle de grande taille, son pelage ocre rayé de noir prenait des teintes argentées sous la lune. Il entra dans la clairière, et s'approcha de la femelle couchée au milieu. Quand cette dernière le reconnut, elle voulut se relever, mais n'y parvint pas. Le matou comprit l'intention de la femelle, il vint s'allonger contre elle.

- Ne bouge pas, lui murmura-t-il au creux de l'oreille.

- Pourquoi es-tu venu ? demanda la chatte. Je pensais que tu ne voudrais plus me parler. Je...je suis désolée pour t...

- Mais non, c'est oublié, la coupa-t-il. Je ne pourrais jamais t'en vouloir.

- M....merci

- Garde tes forces, tu en auras besoin, lui ordonna-t-il en lui donnant un coup de langue entre les deux oreilles.

Soulagée, la future mère se blottit un peu plus contre son compagnon. À nouveau, une contraction ébranla son corps, cette fois, un petit paquet visqueux tomba sur l'herbe fraîche. La chatte qui avait déjà assisté à plusieurs mises bas, eu le bon reflex. Elle prit délicatement le chaton et le lécha à rebrousse-poil pour activer la circulation de son sang et réchauffer le nouveau-né. Soudain, il poussa un faible gémissement, et les deux chats furent soulagés.

Le petit était un mâle gris sombre, un peu plus clair que sa mère. Il avait une petite tache blanche autour de son œil droit. Le minuscule félin semblait robuste.

- Il est magnifique, murmura le matou ocre.

La jeune mère acquiesça avant d'être à nouveau secouée par une contraction, elle confia le rejeton à son compagnon qui lécha à son tour le petit. La femelle était épuisée, mais elle savait pourtant que le travail venait à peine de commencer. Elle savait déjà depuis une lune, que quatre chatons bougeaient dans son ventre. La jeune mère se demandait si c'était une sorte d'instinct maternel, car c'était sa première portée. Elle sentait gigoter les trois petits restant dans son ventre, ils avaient l'air excités de sortir et de découvrir le monde.

La chatte noire avait l'impression que trois saisons et deux lunes s'étaient écoulée depuis que son premier fils était né. La jeune mère voulut tourner la tête pour admirer son premier-né, mais elle n'en eut pas l'occasion. Un deuxième chaton naquit juste après qu'elle eu ressenti une douleur intense.

Le jeune père prit le petit, et à son tour, le lécha vigoureusement à rebrousse-poil comme il avait vu le faire sa compagne. Le chaton après plusieurs secondes interminables pour les parents, poussa un faible gémissement.

C'était une petite femelle brun foncé. Son minuscule poitrail se soulevait au rythme de ses inspirations. Comme son frère, elle semblait forte et robuste.

Peu après, au grand soulagement de la jeune mère, les deux derniers chatons arrivèrent. Ils furent aussi bien léchés que leurs ainés et poussèrent chacun leur tour un couinement aigu signe qu'ils respiraient. Ce furent un jeune mâle et une jeune femelle, le petit matou, au contraire de son frère, était aussi blanc que le givre qui recouvrait l'herbe à la saison des neiges. Il semblait néanmoins plus fragile que son aîné. La femelle, quant à elle, avait un pelage roux qui rappelait les couleurs de la saison des feuilles mortes. Elle semblait très faible et avait moins de chances de survivre que ses frères et sœurs.

Une fois la mise-bas terminée, la chatte noire était exténuée, elle se demandait comment elle avait fait pour survivre après cette épreuve douloureuse. Mais une partie de la fatigue et de la souffrance s'envola quand elle regarda les petits, ses petits, callés au creux de son ventre, cherchant aveuglemment les mamelles de leur mère. Leur instinct de chaton les conduisit dans la bonne direction et bientôt, ils purent téter avidement. Mais la petite femelle rousse, la dernière de la portée, était repoussée par ses frères et sœurs et elle n'avait pas accès au lait. Sa mère la poussa du bout du museau vers une mamelle libre et la femelle rousse poussa un petit couinement comme si elle remerciait sa mère. On entendit des faibles couinements satisfaits et la chatte noire comprit que ses rejetons se régalaient.

Son ventre se mit soudain à gargouiller, la mise-bas lui avait pris toute son énergie, et maintenant que c'était fini, elle se rendit compte qu'elle mourait de faim. Avant qu'elle n'ait eu le temps de faire le moindre geste, son compagnon se leva et murmura :

- Je vais chasser, la mise-bas a dû t'affamer. Je reviens de tout de suite.

Il lui donna un coup de langue affectueux sur la joue et partit ventre à terre en direction de la forêt. Il revint bientôt, un moineau et une souris dans la gueule. Le matou roux clair déposa son butin au sol et poussa l'oiseau vers sa compagne. Il savait depuis leur première rencontre qu'elle raffolait de ces volatiles, même si il ne comprenait pas trop ce qu'elle y trouvait. Lui, préférait de loin la chair tendre et chaude des rongeurs, notamment des souris.

- Merci pour le moineau, miaula la chatte noire.

- Eh bien, ça n'a pas été facile d'en dénicher un en pleine nuit, mais j'en ai finalement trouvé tout un nid. Je te montrerai, si tu veux.

À ces mots, il englouti la souris en une bouchée. La jeune mère rapprocha le volatile, puis à petites bouchées, elle dégusta l'oiseau.

Après leur repas terminé, le mâle  proposa :

- Nous devrions leur trouver un nom.

- Bonne idée, répondit la chatte noire.

- Tu veux commencer ?

La femelle hocha la tête et se pencha sur le petit-gris sombre avant de murmurer :

- Toi, tu t'appelleras Orage.

- Mais, protesta son compagnon, tu veux dire Petit Orage n'est-ce pas ?

- Non, tu m'as bien compris, il s'appellera Orage.

- Nous étions d'accord, il faut que j'emmène ses petits au Clan du Tonnerre. Je suis sûr que le clan se doute de quelque chose à mon sujet, j'ai bien peur qu'il me bannisse bientôt. Ses chatons seront nos espions, le clan ne pourra se douter de rien. La bande à déjà approuvé l'idée. Tu te souviens ?

- Oui bien sûr, répondit-elle, mais je voudrais garder celui-là, il est robuste et pourrait m'être fort utile. Pour les trois autres, je te laisse leur choisir un nom et emmène les dans ton "Clan" à Tâche de Coccinelle, ta fausse compagne si ça te fait plaisir.

- D'accord, murmura le matou ocre qui savait que ça ne servait à rien de protester. Je les emmènerai demain à l'aube.

J'espère juste qu'ils survivront pendant le trajet, continu a-t-il pour lui.

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