Chapitre 3
C'était déjà la deuxième aube qui se levait depuis le baptême de Nuage Givré et Nuage d'Agrume, malgré l'heure matinale, les chatons de Fleur d'Hiver étaient déjà réveillés.
Petit Rapace roulait et crapahutait dans la pouponnière avec Petit Hibiscus sous le regard attendri de Fleur d'Hiver. À cause d'une seconde d'inattention, le chaton brun ne vit pas l'attaque que préparait sa sœur et Petit Hibiscus réussit à plaquer son frère au sol sans difficultés.
— C'est même plus drôle de te combattre, je gagne presque à chaque fois, râla la jeune femelle noire en laissant son frère se relever.
— Presque, la dernière fois c'est moi qui ai gagné, renchérit Petit Rapace.
— FAUX, c'est moi qui ai gagné la dernière fois. Toi, c'est l'autre jour ou celui d'avant. De toute façon, tu perds tellement qu'il est difficile de se rappeler quand tu gagnes !
— Je... je suis sûr que tu as triché en plus, dit le jeune mâle en se retournant contrarié d'avoir perdu.
Petite Foudre les regardait se battre, une lueur amusée dans le regard. Le jeune mâle brun clair s'étonna de ne pas la voir proposer de faire un combat contre lui. Même s'il gagnait souvent contre elle, la jeune femelle ocre était toujours ravie de retenter sa chance et quand elle gagnait, malgré sa timidité, elle semblait se libérer et était plus heureuse que jamais. Parfois, il arrivait même que Petit Rapace, malgré son caractère de gagnant, laisse sa sœur gagner pour la rendre heureuse.
C'est pour cela que le chaton fut surpris de voir sa sœur rester assise tranquillement la queue enroulée sur ses pattes comme si elle était songeuse.
Elle doit être fatiguée, se dit Petit Rapace.
Le jeune mâle brun clair s'approcha de Fleur d'Hiver et se pelotonna contre elle, mais des bruits et des éclats de voix attirèrent son attention. Curieux, le jeune mâle brun clair sortit de la pouponnière et constata l'animosité du camp. Des félins couraient de partout, affolé, en criant :
— Le mal vert ! Le mal vert !
Petit Rapace frissonna, sa mère leur avait expliqué, à ses sœurs et lui, que le mal vert était une maladie contagieuse qui pouvait tuer un chat s'il n'était pas vite soigné. Il n'existait qu'un seul remède efficace.
Que se passe-t-il ? Qui est contaminé ? se demanda-t-il.
Plus curieux qu'inquiet, le chaton se dirigea vers la tanière des anciens. Quand il cherchait des réponses à ses questions, il allait en général les voir. Quand, le jeune mâle brun clair arriva à quelques longueurs de queue de l'arbre mort, les doyens du Clan n'étaient pas là. A leur place, un jeune guerrier noir, Aile de Scarabée, semblait monter la garde. Étonné, Petit Rapace s'approcha du garde et l'interrogea :
— Où sont Oreille de Souris et Sapin Enneigé ? couina le chaton. Je dois leur poser une question.
— Désolé, mon petit mais ça ne va pas être possibles. Oreille de Souris à attraper le mal blanc hier, qui s'est transformé aujourd'hui en mal vert. Elle a été déplacée dans l'antre de Rosée du Matin pour qu'elle puisse surveiller son état, lui répondit calmement le matou noir. Je surveille leur tanière pour que personne n'y aille, car on pourrait se faire contaminer, la maladie est sûrement présente dans l'air.
— Et Sapin Enneigé ? Il est ici ? Je peux le voir ?
— Non plus, il a aussi été déplacé dans la tanière de notre guérisseuse pour qu'elle garde un œil sur lui.
Il se pencha et chuchota à l'oreille du jeune matou :
— Mais je crois surtout que Oreille de Souris se sentait seul et que Rosée du Matin en avait marre de l'entendre râler.
Le chaton pouffa avant d'adresser un signe d'au revoir à Aile de Scarabée. Petit Rapace s'éloigna du jeune guerrier noir et se dirigea vers le Promontoire. Là, Etoile de Glace était en grande discussion avec Pluie de Feu, son lieutenant, Pelage d'Argent et Eclair Cendré, tous deux de bons amis d'enfance du matou blanc. Sans s'attarder, le jeune mâle brun clair salua Eclair Cendré, son père qu'il avait rencontré il y a environ une lune, puis fit le tour de l'immense rocher. Il arriva devant l'antre de Rosée du Matin, puis miaula pour annoncer sa venue avant de passer le rideau de lichen qui recouvrait l'entrée de la grotte.
Aussitôt, une femelle écaille aux yeux verts arriva devant le chaton.
— Petit Rapace ! Que fais-tu ici ! Sors vite avant que tu ne respires la maladie !
Et d'un petit coup de museau, elle l'envoya dehors. Penaud, le jeune mâle brun clair rejoignit la pouponnière et alla retrouver Petit Hibiscus voulant prendre sa revanche. Il alla dans le coin où il pensait trouver la jeune femelle noire, mais aucune trace d'elle. Le jeune mâle fit le tour de la tanière, mais il ne trouva que Tâche de Coccinelle et Fleur d'Hiver.
— Elle est où Petit Hibiscus ? leur demanda-t-il après avoir fouillé la pouponnière dans ses moindres recoins.
— Elle est avec Rosée du Matin, répondirent-elles.
— Avec Rosée du Matin ! Mais qu'irait faire Petit Hibiscus avec elle ? s'exclama Petit Rapace. Quand je suis allé la voir, elle m'a chassé de sa tanière !
Le jeune mâle courut jusqu'à l'entrée de la pouponnière et sorti. Il voulut s'engager dans la direction de l'antre de Rosée du Matin, mais soudain, il vit la petite silhouette de sa sœur et il s'élança vers elle. Quand enfin, il arriva devant elle, le jeune mâle s'exclama :
—Tu viens Petit Hibiscus ? On va jouer dans la pouponnière, c'est beaucoup mieux que compter des feuilles.
— Au contraire, compter des feuilles comme tu le dis et beaucoup plus intéressant que passer des heures devant un trou dans le feuillage. Bon maintenant, laisses moi, Rosée du Matin vient de partir voir Patte de Houx qui s'est foulé une griffe en revenant de la chasse. Je veux aller voir ce qu'elle va faire.
À ces mots, elle partit en trombe laissant son frère une nouvelle fois seul. Ce dernier avait perdu toute envie d'essayer de convaincre sa sœur, il retourna donc dans la pouponnière la tête basse. Le soleil commençait à descendre quand il rentra et alla retrouver sa mère. Quand il arriva auprès d'elle, il constata que Petite Foudre était allongée contre Fleur d'Hiver. En voyant son fils, cette dernière lui murmura :
— Ne fais-pas trop de bruit, Petite Foudre s'est endormie, elle était très fatiguée, j'ai bien peur qu'elle soit malade. Ne t'approche pas trop d'elle, jusqu'à ce que Rosée du Matin soit venue l'examiner.
Le jeune mâle hocha la tête et s'allongea sur son nid de mousse un peu à l'écart.
Petit Foudre est malade et Petit Hibiscus est occupé, maintenant je suis tout seul... pensa Petit Rapace avant de trouver le sommeil.
Il se réveilla quelques instants plus tard dans un lieu sombre, ses petits yeux s'habituèrent rapidement à l'obscurité et il put distinguer des arbres autour de lui.
Où suis-je ? se demanda Petit Rapace apeuré.
Avant qu'il n'ai pu faire le moindre mouvement, une silhouette sortie de derrière un arbre et vint à sa rencontre.
— Bonjour, Petit Rapace. Je suis Croc venimeux et j'ai beaucoup de choses à t'apprendre.
— Suis moi, dit-il avant s'élancer dans la forêt.
Petit Rapace étonné et inquiet voulut lui demander comment il connaissait son nom, mais le chat brun n'était déjà plus là. Il partit en courant dans la direction que Croc Venimeux avait empruntée sans savoir où il allait et qui était ce félin. Il courut un bon moment tout droit, mais ne retrouva pas la trace du mâle. Le chaton s'arrêta perplexe et chercha en vain Croc Venimeux. Petit Rapace commença à frissonner, il ne s'était pas rendu compte qu'il faisait aussi froid dans cette forêt sombre.
Très sombre.
Il leva la tête pour trouver la présence réconfortante des étoiles, mais rien, aucun astre ne brillait dans le ciel. Des dizaines de silhouettes apparurent et commencèrent à courir entre chaque arbre, des bruits de chuchotements inaudibles vinrent troubler l'esprit du chaton et le sol commença à tanguer. Puis soudain tout s'arrêta. Petit Rapace tomba au sol emporté par le poids de son corps qui était soudain devenu lourd et s'évanouit.
Petit Rapace ne sut jamais combien de temps, il resta évanoui, il sut juste que quand il se réveilla, il était toujours au même endroit effrayant. Le jeune mâle souleva lentement ses paupières et cligna plusieurs fois des yeux pour se rappeler où il était, avant de retrouver la mémoire quelques secondes plus tard. Le chaton se releva péniblement les membres engourdis. Une fois sur ses pattes, il se secoua la tête pour se réveiller complètement et tourna lentement la tête.
Des dizaines de chats l'entouraient et le scrutaient murmurant à voix basse. L'endroit était effrayant et tous ces chats inconnus, qui lui faisaient face, firent peur à Petit Rapace. Il aurait tant aimé pouvoir creuser un tunnel et s'enfuir loin de ce lieu plus qu'inquiétant. Mais le jeune mâle se reprit, il bomba le poitrail et releva la tête pour paraître plus grand et plus impressionnant et faire croire qu'il n'avait pas peur. Mais il ne récolta que quelques ricanements et des murmures amusés ou moqueur, il n'aurait su faire la différence, tout autour de lui.
Un mâle imposant se détacha de ses semblables et s'approcha du chaton qui s'était recroquevillé. Quand il fut à une distance raisonnable, Petit Rapace le reconnut aussitôt, c'était le chat qui connaissait son nom, et d'ailleurs comment il s'appelait déjà ? A oui Croc Venimeux c'est vrai. Croc Venimeux s'avança plus et se planta devant le chaton :
— Dis donc, ce n'est pas super, tu t'évanouis dès le premier jour.
— Le premier jour de quoi ? s'étonna Petit Rapace fière d'avoir réussi à parler sans bégayer.
— Mais de ton apprentissage voyons, répondit Croc Venimeux comme si c'était évident.
— De mon apprentissage ? demanda le chaton qui aimait visiblement reprendre les mots du mâle brun.
— Si on veut commencer un jour, il va falloir que tu arrêtes de répéter tout ce que je dis et que tu me suives, sans t'évanouir cette fois.
— Te suivre ?
Croc Venimeux poussa un soupir exaspéré et avança vers un petit groupe de chat. Petit Rapace courut jusqu'au niveau du mâle brun et avança à son coté même s'il devait parfois courir pour le rattraper, car n'oublions pas que Croc Venimeux faisait trois fois la taille du chaton. Ils arrivèrent bientôt au niveau du groupe de chat et le mâle brun s'adressa à un des félins :
— Pelage de Renarde, tu t'es montrée digne d'avoir un apprenti après avoir vaincu l'un de nos meilleurs guerriers il y a quelques jours.
Une femelle rousse se détacha des autres et se rapprocha d'eux en disant d'une voix fière :
— Ce serait un honneur d'entraîner ce petit au combat pour qu'il devienne le meilleur combattant de son clan.
Une lueur d'espoir vint illuminer les yeux du chaton, avait-il bien entendu ? Cette femelle comptait vraiment l'entraîner au combat et faire de lui le meilleur ? Meilleur que Petit Hibiscus ? Il répéta donc sa question à voix haute en s'approchant de Pelage de Renarde :
— Encore meilleur que Petit Hibiscus ?
— Je ne sais pas qui est cette Petite Hibiscus mais tu ne devrais pas mettre longtemps à gagner tous vos duels, et la battre de sera qu'un cap à passer, répondit la femelle rousse.
— Qu'un cap ? demanda Petit Rapace qui avait repris son habitude fatigante de répéter la fin de la phrase de son interlocutrice.
— Oui, je vais te faire devenir le plus fort et le plus féroce combattant de ton clan. Plus fort encore que les meilleurs guerriers.
— Bon, je vais vous laisser vous entraîner, je reviens bientôt voir comment ça se passe, les interrompit Croc Venimeux en s'éloignant.
— Viens allons-nous entraîner dans un endroit plus calme, dit Pelage de Renarde au chaton qui était désormais son apprenti.
Remplie de curiosité et d'appréhension, le jeune mâle brun clair suivit la femelle dans ce lieu lugubre et inconnu.
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