Chapitre 7 :

Bah, après tout, on me reproche toujours de ne pas être sociable...

L'homme a un sourire réjoui qui éclaire ses jolis yeux vert-gris : il tient une prise, aujourd'hui. Ses vêtements usés laissent deviner un corps maigre qui ne s'est pas lavé depuis longtemps. Il empeste le coca a dix mètres de distance, mais il n'a pas l'air végétatif des autres. Il doit en vendre. Apparemment, il diversifie aussi ses activités.

Il glisse un deuxième couteau dans son autre main en m'observant. Joli, avec un manche cranté, mais ce n'est pas un couteau de combat. La lame est émoussée et la peinture sur le bout s'écaille : ça fait longtemps qu'il n'a pas servi. Je me demande si la lame tient toujours au manche.

- Salut. Tu as une jolie face, j'ai l'impression de t'avoir déjà vue quelque part, dit-il d'une voix rauque en jouant avec ses couteaux.

Je le considère en silence. Les gagnants des tournois font parfois parler d'eux jusqu'aux oreilles des quartiers les plus éloignées. Mais s'il m'avait reconnue, il ne serait pas en train de me menacer.

Une étincelle sauvage brille dans ses yeux. Je me demande bien comment il va pouvoir s'en sortir. Je n'aime pas frapper pour frapper, mais il est sur mon chemin - et en plus il m'agresse. Je veux bien le protéger, mais s'il se met en danger tout seul, ce n'est pas mon problème.

- Peu importe. Donne-moi tout ce que tu as sur toi et il n'y a pas de raison que cela se passe mal, il ordonne brusquement en s'approchant.

Je dégaine mes dagues d'un mouvement rapide et me gratte nonchalamment la nuque en le laissant s'approcher. Des reflets métalliques dansent sur les lames en acier, je le sais. Je les ai affûtées ce matin.

- Tiens, dis-je d'un ton détaché, il semblerait que tu aies perdu ta langue, d'un coup...

L'homme jette un regard méfiant à mes dagues et recule légèrement. Sans doute se demande-t-il si c'est du toc, car quasiment personne sauf les Rafales et les Bourrasques n'ont de vraies armes en ville. Un éclair de peur s'allume dans ses yeux. Bien.

Il grogne. Ses deux compagnons sortent enfin de la ruelle et se postent de chaque côté de lui, réduisant leur chance de s'en sortir de moitié. Je vise toujours les côtés en premier. L'exaspération et l'agacement commence à me monter au nez. Ces diablotins me font perdre mon temps !

- On est trois, tu es seule. Donne-nous ce que tu as !

Une droite dans ta face, possiblement.

- Grouille-toi, putain !

L'homme a repris un peu contenance. Celui à gauche s'avance brusquement en me menaçant d'un autre couteau - décidément, ils ont dévalisé la cuisine.

- Reste polit, je gronde.

Soudain, une forme sombre atterrit souplement entre eux avec autant de majesté qu'un fauve. Sauf qu'un fauve n'a pas la taille qu'un homme. Et qu'il n'a pas non plus d'arme.

L'homme aux yeux verts n'a pas le temps de tourner la tête que l'inconnu l'assomme d'un coup nonchalant du pommeau de son arme. Il esquive le poing de celui de derrière, le désarme et l'assomme - ils ne savent pas tenir debout sur leurs jambes ou quoi ?

Le troisième recule et commence à s'enfuir, mais l'agresseur bondit et retombe avec une grâce dangereuse devant lui. Il se relève lentement et je me tends. Grand, habillé tout de noir et le visage couvert d'une capuche, il dégage une aura si menaçante que la sent d'ici.

Un tueur.

Ses doigts tapotent le manche de son arme, qu'il a rangé d'un geste fluide dans un fourreau à sa ceinture. L'homme recule et jure, le visage pâle. Il n'a pas le temps d'élargir son panel d'insultes, néanmoins, que le pommeau de ma dague le frappe à l'arrière de la tête.

Il tombe au sol, assommé.

L'agresseur s'accroupit en silence et prend son pouls à sa gorge. Il bat encore : je ne l'ai frappé qu'à la tempe. Il se réveillera dans quelques heures au milieu de cette ruelle avec un gros mal de crâne.

Je plisse les yeux. Est-ce que je suis tombée sur une guerre de gangs ? Il en existe plusieurs en ville, mais ils sont trop occupés à essayer de ramener à manger chez eux pour se faire la guerre. Pourtant cet homme n'est pas comme les trois autres. Il est venu pour un but précis et il ne l'a pas encore atteint. Je peux le sentir. Je fais pivoter mes dagues dans mes mains. Il serait une erreur de sous-estimer celui-là.

Il se relève fluidement et rengaine d'un mouvement souple son épée dans le fourreau à sa ceinture. Il est droitier, je note. Je suis stupéfaite en identifiant l'arme à sa ceinture : une parazonium, une épée courte dont nous n'avons aucun spécimen à l'Atrium en raison de sa rareté. Je me demande où il a pu l'avoir... certainement pas dans une simple armurerie, en tout cas.

- Joli coup.

La colère s'embrase dans mes tripes. Je n'arrive pas à voir son visage sous sa capuche, mais ça ne m'empêche pas de le fusiller du regard. Il frappe mes agresseurs, et en plus il se permet de me donner son avis sur la façon dont je les gère ! Pour qui il se prend ? Je vais lui faire un briefing, moi, à cet encapuché de mes deux !

Il s'approche de moi d'un pas souple, puissant et silencieux. Je grogne. C'est la démarche d'un combattant expérimenté, qui a l'habitude de se déplacer sur ses appuis. Je fronce les sourcils. Qui est-il ? Il n'y a pas beaucoup de gens dans cette ville qui me donne cette impression.

Dangereux.

L'adrénaline afflue dans mes veines. Il sait se battre. Et je suis sa prochaine cible. Mon corps est en alerte, prêt à réagir au moindre stimulus. Il s'arrête à deux mètres de moi, et un éclair blanc transparaît dans la pénombre de sa capuche. Il esquisse un sourire.

- Tu ne dis plus rien ?

Je me suis trompée. Je suis son but. Il m'a parlé, il ne prendrait pas le temps de blablater s'il avait autre chose à faire. Les hommes avant étaient juste des dommages collatéraux. Il est là pour moi.

Je le scrute.

- Qui t'embauches ?

L'ombre de ses lèvres se relève.

- Qui sait ? Pas toi, en tout cas.

Je grogne. Le cuisiner ne servira à rien. Seuls les poings diront la vérité, avec lui. Ses vêtements sombres dessinent un corps souple à la musculature puissante et fine qui annonce un homme entraîné, mais il ne peut pas être aussi rapide que moi. Néanmoins, il pourrait prendre avantage de la situation s'il a des complices. Je dois le battre vite.

Il amorce un mouvement et je suis un mètre en arrière, mes dagues levées devant mon visage et mon cou. Mais il rabattait juste sa capuche et son visage affiche maintenant une lueur sarcastique. Je lui renvoie un regard noir en abaissant lentement mes dagues.

Ce sourire va vite disparaître de ton visage.

Il est plus jeune que ce que j'imaginais pour quelqu'un qui paraît aussi expérimenté au combat, il est presque de mon âge, ou un peu plus. Il a des pommettes acérées comme la lame de mes dagues, des lèvres délicatement ourlées et des étranges cheveux blonds cendrés désordonnés qui ressemblent à une crinière, tantôt sombre tantôt lumineuse selon si on se concentre sur ses mèches blondes ou noires. C'est le genre de type qui fait chuchoter les filles de la ville sur son passage. Le genre de type qui le sait. Le genre de type que j'aime pas. Trop confiant.

Je les gagne grâce à ça, dans l'Arène.

Son visage aux traits fin et anguleux possède des marques de précédents combats, une coupure au coin de son œil et un bleu sur sa pommette qui ressort sur la teinte dorée de sa peau. Ma méfiance se renforce. Il a l'air coutumier à tomber sur des gens au détour d'une ruelle.

Mes yeux rencontrent soudain les siens. Je me fige. Le choc vrombit à mes oreilles. Des yeux ambrés. Ce même éclat que j'ai vu à la fin du combat. Un torrent glacé et bouillant se déverse dans mon ventre.

Ce type.

C'est pas un humain.


________________________________________


Hi ! Alors voilà, j'ai finis ce chapitre qui m'a donné pas mal de fil à retordre ! N'hésitez pas à voter et à me dire ce que vous en pensez en commentaire, je suis particulièrement curieuse de lire vos retours pour ce chapitre ! ^_^

Eh bien, ça promet ! Qu'est ce qu'il va essayer de faire ? Pourquoi il est intervenu ? La suite risque d'être encore plus déstabilisante !

Ce chapitre était un peu plus long que d'habitude parce que il y avait pas mal de choses à dire !) N'hésitez pas à voter et à me dire dans les commentaires ce que vous en pensez !

D'ailleurs, est ce que vous trouvez ce chapitre trop long ? Et est ce que vous pensez que cette dose d'action pour un chapitre est bien, ou vous en voudriez plus ?

Sur ce, rendez-vous au prochain chapitre ! ^_^

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top