Chapitre 13 :

Je me lève d'un bond.

- Va te coucher ! Je crie à Aron en me précipitant vers la porte.

Je dévale les escaliers et déboule en courant dans le parc. C'est l'alarme pour signaler un incendie en ville, ils ont besoin de nous. J'accélère, dégaine mes dagues et déchire le bas de ma robe pour ne pas être gênée dans ma course. Foutue robe, je savais bien que c'était une mauvaise idée ! Je coupe par les bois du parc pour aller plus vite et tends l'oreille pour capter ici et là des informations qui se passent parmi les Rafales en train de courir. L'incendie s'est apparemment déclenché dans un immeuble de cinq étages de la banlieue à moins d'un kilomètre d'ici et les habitants sont coincés dedans. Le feu va s'étendre rapidement, s'il n'a pas encore atteint tous les étages. C'est une question de minutes avant que les habitants soient asphyxiés par la fumée !

Je bondis au-dessus d'un tronc couché, faisant tomber au passage un pain volé de ma robe et je surgis devant la Porte Nord de l'Atrium. Une queue de Rafales et de Bourrasques s'est déjà formée derrière les postes de garde pour passer en ville et s'occuper du feu. Je cherche du regard Kaïcha et Laaja dans la file et les repère quelques places plus loin. On échange un rapide regard. Je hoche la tête.

Les toits, c'est plus rapide.

La file avance avec la rapidité de l'efficacité des gardes et je me retrouve au poste de contrôle. Je tends aussitôt mon bras, on m'injecte un traceur qui me localisera dans l'incendie, on me donne un masque à oxygène et je m'engouffre dans la ville en direction de l'avenue Kath ; immeuble 46. Je bifurque dans une rue parallèle et vise un bâtiment de taille moyenne assez vieux, mais avec des bonnes prises de mains. Je suis à ses pieds en quelques foulées, monte d'un mouvement à une fenêtre, m'accroche à la barre du premier balcon et me réceptionne souplement dessus. Je recommence à chaque balcon avec la rapidité d'heures entières à répéter les mêmes mouvements en entraînement. J'atteins enfin le toit et me redresse. À cette heure de la journée, les rues sont trop encombrées par les travailleurs qui rentrent chez eux pour courir dans les rues. Je m'élance sur les tuiles. Il n'a pas plu depuis longtemps et elles sont assez sèches, ce qui facilite ma course, mais ma robe me gêne. Je décide de la garder quand même pour avoir une couche qui protégera ma peau du feu dans l'incendie.

J'accélère sur le toit, les immeubles sur mes côtés deviennent flous et j'arrive en quelques secondes au bout du toit. Je m'appuie d'un pied sur le rebord, exécute un salto pour prendre de la hauteur et retombe souplement d'un roulé-boulé pour amortir ma chute sur l'autre toit avant de reprendre ma course. J'enchaîne les toits et me rapproche de plus en plus du bâtiment enflammé. Mes poils se dressent sur ma peau. La colonne de fumée qui s'élève au loin est impossible à rater et l'odeur de cramé s'intensifie dans l'air à mesure que j'approche, me prenant à la gorge malgré la distance. Je décroche mon masque à oxygène de ma ceinture et l'enfile d'un geste rapide. Plus je vais me rapprocher, plus l'air deviendra toxique. Ce masque sera mon bien le plus essentiel pour survivre dans l'incendie. J'atterris sur un dernier toit, me relève, et me retrouve face au numéro 46.

L'immeuble, noirci de fumée et léché par des flammes d'un rouge hypnotisant, se dresse devant moi comme un navire en train de couler, oscillant dans un équilibre incertain. La chaleur de l'air autour crée de la buée sur la visière de mon casque et me force à plisser les yeux. Les flammes s'élèvent jusqu'au ciel, crépitant avec rage et crachant de la cendre, des débris de verre et de bois au sol où les Atrimiens qui sont arrivés commencent déjà à s'activer en criant. Je repère rapidement l'échelle la plus haute au quatrième étage. J'en tire mes propres déductions. Les deux premiers niveaux doivent être déjà évacués, et le troisième et le quatrième en cours de sauvetage. Le cinquième, lui semble être livré à lui-même. Vu la vitesse d'évacuation, ceux en bas n'arriveront pas au cinquième étage avant au moins cinq minutes. S'il reste des personnes à l'intérieur de ce niveau, ils vont mourir.

Je fixe l'immeuble, la gorge sèche. Les flammes enveloppent le bâtiment comme une langue mortelle. Chacun de ses craquements et de ses sifflements hurlent à mon instinct de fuir. J'essuie la fine pellicule de sueur sur ma nuque. Même à cette distance, la chaleur est assez torride pour faire éclater du verre.

Je jugule ma peur, ou du moins, j'essaye. Pas facile de se précipiter dans le feu en étant sereine.

J'évalue la distance, recule de quelques pas, prie pour que le parquet tienne le coup et m'élance. Je m'appuie d'un pied sur le bout du rebord et bondis en l'air. Pendant une fraction de seconde, plus rien ne me retient.

Puis je ramène mes bras devant mon visage, et la fenêtre vole en éclats devant moi.

Je me réceptionne en roulant sur un parquet jonché de tessons de verre brûlants et de bouts de bois brisés. Je me relève en grimaçant à cause des tessons de verre plantés dans mes paumes et mes bras et ressens aussitôt un énorme coup de chaud. L'air lui-même est si brûlant que je me brûle la gorge chaque respiration. Je m'exhorte à bouger aussitôt. Il ne faut surtout pas que je reste immobile là-dedans. Je me mets à quatre pattes, car l'air est plus frais en bas et je commence à avancer sous la fumée. Je grogne. Les éclats de verre dans mes mains s'enfoncent douloureusement dans ma chair, mais je n'ai pas le temps de m'arrêter. Le feu rampe vers moi en sifflant, m'encerclant de partout, mais je suis plus rapide que lui. Les flammes rampent sur mes vêtements comme des vers mortels et je les étouffe rapidement avant qu'elles ne prennent de l'ampleur. Je sue à grosses gouttes sous la chaleur. Au moins, ma transpiration m'offre un peu de protection contre les flammes. Je remonte mon col par-dessus mon masque pour protéger mon cou, et je m'efforce de me concentrer sur la seule chose qui compte.

Les habitants.

Je m'oriente à l'oreille, mais avec tous les craquements, grincements et crépitements, déceler une respiration ou le bruit d'un tissu qui frotte là-dedans n'est pas une mince affaire et le feu me bouche la vue de toutes parts. Je perçois un bruit étouffé à ma droite et me retourne brusquement. Je me rapproche de l'origine du bruit, mais je ne distingue plus rien et je commence à douter. J'avance à l'aveugle durant ce qui me semble être une quinzaine de mètres sans rien voir.

Soudain, j'entends à nouveau un bruit, plus proche.

Ma respiration s'accélère. Je bifurque dans cette direction et soudain, ils apparaissent à travers un rideau de fumée.

Une femme extrêmement pâle est avachi contre un mur, un bébé enveloppé dans des lange allongé sur ses genoux et un autre enfant est affalé contre sa chemise, leur visage aussi blanc que la cendre qui les entoure.

Je me presse vers eux en essayant de voir si leur poitrine se soulève, mais avec la fumée, c'est difficile à dire. La peur me tord les tripes.

Soudain, une quatrième silhouette apparaît dans mon champ de vision.

Elle prend le bébé des bras de sa mère en toussant d'une voix rauque. Une mèche cendrée tombe sur son front et je laisse échapper un cri de surprise :

- Ash !



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Hi ! Désolée pour ce suspens, mais c'était vraiment trop tentant ! ;) Promis, la fin du prochain ne sera pas aussi atroce !

N'hésitez pas à voter et commenter pour me dire ce que vous penser de ce chapitre ^_^

D'ailleurs, est ce que vous trouvez qu'on est bien plongé dans l'atmosphère des flammes ou vous aimerez un peu plus de description sensorielles pour vous y aider ?

Rendez-vous au prochain chapitre, mercredi prochain ! <3




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