22. Klara


D'habitude, Klara ne se réveillait jamais spontanément. C'était Oxana qui faisait toujours hurler la sonnerie de son réveil jusqu'à ce qu'elle lui balance son oreiller à la tête pour la faire taire. Cependant, ce matin-là, Klara ouvrit les yeux bien plus tôt que d'habitude. Elle était allongée sur une surface dure et il lui fallut un moment pour se rappeler où elle se trouvait. Sous une tente. Dans un supermarché la nuit. Oh merde, pourquoi les lumières étaient-elles allumées ?

Vivement, elle remit ses chaussures, sa veste, attrapa Lumière et son sac et se glissa hors de la tente. L'endroit était encore désert mais il ne fallait pas qu'elle traîne. Si on la trouvait, elle risquait de finir en prison.

Des voix lui indiquèrent que deux personnes se parlaient en marchant dans sa direction. C'était probablement les employés qui remettaient les rayons en ordre avant l'ouverture. Klara se glissa sous un rayon. Elle avait à peine la place de respirer et son dos lui faisait mal à cause de sa nuit passée à même le sol. Soudain, des exclamations retentirent :

- T'as vu ça ?!!

Ils avaient dû trouver sa tente et toutes les miettes de pain par terre. Klara se fit toute petite. Elle se détendit en entendant la voix de l'autre employé :

- Merde, on a des rats !

- Un rat n'aurait pas monté cette tente. Y'a un type ici.

- T'es sûr ? C'est peut-être Laurent qui l'a montée. Tu le connais avec ses idées...

- Non, ça doit être un SDF qui a trouvé le moyen de dormir ici. Il a dû sortir par l'issue de secours pendant la nuit.

- Il est peut-être encore ici ?

- Ouais. Préviens Nathalie, moi je fais le tour pour voir.

Klara retint sa respiration. Elle entendit des pas : quelqu'un contournait le rayon. Elle croisait les doigts pour que cette personne ne regarde pas en bas. D'autres personnes s'approchaient. Une voix de femme, probablement celle de Nathalie, donnait des ordres. Elle voulait que la zone soit bien désinfectée et la tente, isolée. Tout devait être impeccable avant l'arrivée des clients.

Klara décida de s'éloigner le plus possible de la zone à désinfecter. Elle attendit que la voie soit libre, puis se dégagea du rayon et alla se glisser vivement sous le rayon suivant. Et elle se figea. Un énorme rat la regardait.

Il fallut énormément de sang-froid à Klara pour ne pas crier. Elle se recula le plus possible, s'attendant à ce que la bestiole essaie de la mordre. À sa grande surprise, celle-ci ne bougea pas. Klara cligna des yeux et finit par comprendre que ce qu'elle avait pris pour un rat était en fait une peluche toute sale.

Quelle nuit ! Klara prit son mal en patience et attendit, immobile, les doigts crispés sur Clic et sur la lanière de son sac. Au bout de longues minutes, une odeur de produits chimiques vint chatouiller ses narines. Enfin, la voix de Nathalie annonça que c'était bon, qu'on allait pouvoir ouvrir.

Klara espérait qu'il y ait beaucoup de monde pour qu'elle puisse sortir en passant inaperçue. Malheureusement, on était en semaine : les seules personnes à se présenter dès 8h30 étaient à la retraite, sans emploi ou encore étudiant.e.s. Comment sortir sans se faire remarquer ?

Il fallait pourtant qu'elle prenne ce risque. Elle attendit, repéra une dame âgée qui lui tournait le dos, jaillit de sous le rayon et essuya vivement la poussière de ses vêtements. Ensuite, elle lui emboîta le pas. Si quelqu'un l'arrêtait, elle pourrait toujours se faire passer pour sa petite-fille.

Mais personne ne fit mine de l'arrêter. Elle franchit l'espace réservé aux caisses automatiques, s'arrêta en faisant semblant de refaire son lacet et sortit.

Une fois dehors, elle prit une profonde inspiration et partit en courant. 

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