11. Klara

Dans la soirée, quelqu'un frappa à la porte de la chambre que Klara partageait avec sa sœur Oxana. Klara marmonna quelque chose. La porte s'ouvrit et sa mère apparut dans l'embrasure, le visage sombre.

- Klara, dit-elle, il faut qu'on parle.

- Oui ?

- Mme Cassegrain vient d'appeler. La mère de Louis Charbonneau lui a dit ce que tu lui as fait.

Klara, qui savait où irait cette conversation et voulait éviter la punition à tout prix, s'efforça de prendre l'air innocent et s'écria :

- Mais j'ai rien fait !

- Mme Cassegrain t'a aussi vue par la fenêtre.

- Quoi ? Mais... Je l'ai juste un peu poussé. C'était pour jouer ! Pourquoi il le prend aussi mal ?

- Il a eu raison. Tu n'avais pas le droit de le frapper.

- Mais Maman... Tout le monde est contre moi dans l'équipe ! Ils me détestent parce que je suis une fille et qu'on est un peu immigrés !

La mère soupira. Klara avait touché un point sensible : elles savaient toutes les deux que quand on vit en France, on galère davantage pour avoir une vie décente si on s'appelle Ivanova que si on s'appelle Charbonneau. Il n'y avait qu'un moyen de régler tout ça.

- D'accord. Tu n'iras plus au foot.

- QUOI ?!!

- Si tu ne t'entends plus avec eux, c'est la meilleure solution.

- Mais Maman...

- Ne discute pas.

Klara se tut. Elle savait ce que cela voulait dire quand sa mère prenait cette expression sévère. Elle n'avait plus qu'à faire profil bas pendant un moment.

*

Plus tard dans la soirée, elle prit une décision. Elle allait quitter Songibaud à tout jamais, ou tout au moins pendant quelques années. Puisqu'on ne voulait pas d'elle ici, elle se ferait engager par le cirque Malbono et elle gagnerait sa vie en faisant des spectacles. Elle deviendrait la plus grande artiste de France. Et dans vingt ans, quand elle serait devenue riche et célèbre, elle reviendrait ici pour montrer à Elias, à Louis et aux autres à quel point elle était géniale et tout le monde regretterait de l'avoir méprisée.

Elle vida son sac d'école en cachette. Elle y glissa tout ce dont elle pensait avoir besoin : de l'eau, une pomme, des biscuits, une petite lampe, un opinel... Elle prendrait sa brosse à dents au dernier moment pour ne pas éveiller les soupçons. Elle attrapa aussi l'enveloppe qui lui servait de tirelire mais elle préféra glisser le peu d'argent qu'elle contenait dans la poche de son jean. Si quelqu'un lui arrachait son sac, elle garderait au moins l'argent.

Elle cacha le sac sous son lit juste à temps pour le dîner. Il fallait que personne ne le découvre pour qu'elle arrive à s'échapper.

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