Prologue
Mélinda
J'avais réussi à rejoindre le puits et trouvé la grille pour nous dissimuler dans la cavité que m'avait indiqué Anya. Mais nous ne pouvions pas vraiment nous cacher, cela était impossible avec un nourrisson. Isaïah avait indéniablement ressenti le danger et il faut dire que j'avais beaucoup de mal à lui dissimuler ma propre peur.
Je ne savais pas tout du combat d'Izi et de Yaël, j'avais compris qu'ils avaient besoin d'un refuge et que quelque chose se tramait, mais je n'avais jamais posé de questions. Je n'avais pas besoin de savoir s'ils avaient besoin de moi pour leur offrir mon aide. Je serais là pour eux. Ils n'avaient pas été mis sur mon chemin par hasard et peu importait qui ils étaient, ils avaient redonné du sens à ma vie.
Je considérais Isaïah comme un petit-fils, je savais que je ferais tout mon possible pour le protéger, mais en étais-je capable ? Si je me sentais particulièrement bien ces derniers jours, je n'en oubliais pas mon âge. Cette course n'avait pas été de tout repos. Que ferais-je si Anya ne revenait pas ? Cette question m'avait obnubilée dès notre séparation, mais j'avais été finalement assez vite fixée.
Comme je vous le disais, il était tout simplement impossible de se cacher avec un enfant en bas âge. Isaïah se mit très rapidement à pleurer et mon angoisse grandissante aux sons de ses pleurs ne l'aidait sans doute pas à se calmer. J'étais impuissante et même si j'essayais bien de le bercer, de le distraire, de le faire rire, on nous trouva bien avant que je réussisse à arrêter ses cris.
On me laissa le choix de sortir par moi-même. On me le conseilla plutôt fortement. J'hésitai un instant, mais que pouvais-je faire ? Je n'avais pas le courage d'Anya et si elle n'avait pas réussi à les arrêter, j'en serais bien incapable.
Je m'excusai auprès d'Isaïah qui pleurait toujours à gorge déployée. Je n'étais pas une héroïne.
Je sortis avec difficulté de notre cachette tant j'avais du mal à contenir mes tremblements. Je n'étais qu'une vieille dame, cette triste réalité s'imposait à moi. Je tenais néanmoins fermement Isaïah contre moi qui, ironie du sort, avait arrêté de pleurer.
Quand je sortis de ma cachette, je fus surprise de découvrir un couple. Je m'étais attendu à des soldats. Que voulaient donc ces deux jeunes personnes à Isaïah ? Pourquoi en voulaient-ils à Izi et Yaël ? Et surtout quelles étaient leurs intentions à présent ? J'avais peur, si peur...
L'homme avait le visage juvénile malgré son épaisse barbe rousse. Il ne devait pas avoir plus de trente ans et la femme qui l'accompagnait devait avoir le même âge. Elle était brune, les cheveux courts, coupés à la garçonne. Elle porta immédiatement son regard sur Isaïah.
- Comment on sait si c'est lui ? demanda-t-elle à son compagnon.
- C'est lui, grogna-t-il. Pourquoi le cacherait-elle ?
Ils échangèrent sans se soucier de moi, tous les deux sur la défensive. Je regardai tout autour, cherchant un moyen de me sortir de cette situation. Si je courais, nul doute qu'ils me rattraperaient. Il y avait bien quelques cailloux qui pourraient me faire office d'arme, mais là encore je doutais de faire le poids. Une petite voix dans ma tête me disait pourtant que j'avais le champ libre. Je reculai d'un pas discrètement, sans les lâcher du regard. Puis, un deuxième. Il fallait que je retourne chez moi, il fallait que je retrouve Anya.
- Où crois-tu aller ? trancha la voix de la jeune inconnue.
- Où... où est Anya ? balbutiai-je.
Je prenais conscience de ce que son absence pouvait signifier et je l'imaginais déjà seule, attachée et prisonnière, sans pouvoir se défendre.
- Elle ne peut plus rien pour toi là où elle est, répondit le rouquin.
Anya... Elle était si pleine de vie, que t'avaient-ils fait, ma pauvre enfant ?
- Que voulez-vous ? osai-je demander.
Ils ne prirent pas la peine de me répondre.
- Que fait-on d'elle ? se renseigna la femme auprès du rouquin.
- Seul l'enfant nous intéresse. Prends-le, on doit partir.
Elle s'approcha aussitôt de moi pour se saisir de l'enfant, mais je la coupai dans son élan.
- Attendez, ripostai-je. Emmenez-moi avec vous. Je pourrais vous être utile, je pourrais m'occuper du bébé durant le voyage.
La jeune femme haussa les épaules. Elle semblait se satisfaire de cette proposition, n'ayant sans doute pas très envie de devoir s'en occuper elle-même. Mes deux assaillants échangèrent un regard.
- D'accord, on t'emmène l'ancêtre, mais attention, au premier faux pas je te ferais regretter que ta vie ne se soit pas finie aujourd'hui, me menaça froidement l'homme.
- Merci. Merci, je ne vous décevrai pas, m'empressai-je de lui assurer.
- Mouais, c'est ce qu'on verra.
- Elle risque de déchanter lorsqu'elle va devoir nous suivre, intervint la brunette.
L'homme ricana.
- Quel est ton nom ? finit-il par me demander.
- Mélinda.
- Je suis Geoffrey et voici ma femme, Millie. N'aie crainte de ce que tu vas voir. Mon épouse va nous faire voyager de façon plus rapide que par les moyens traditionnels, me dit-il avec un sourire que je qualifierais de dérangeant.
Millie se mit à agiter sa main, créant des tourbillons avec ses doigts. Je remarquai alors qu'elle avait de très longs ongles qui donnaient à son mouvement quelque chose d'envoutant. Mais que faisait-elle ?
- Geoff, il y a un problème, s'alarma Millie.
- Comment ça ? demanda Geoffrey.
- Je ne sais pas, je n'arrive à ouvrir aucun vortex.
Geoffrey s'affola à son tour.
- On ne peut pas rester là, précisa-t-il, inquiet.
- Je sais bien !
- Qu'est-ce que cela veut dire ? s'agaça-t-il.
Ils me fusillèrent tous deux du regard. Je pensai immédiatement au collier que m'avait confié Anya. J'étais persuadée que cela avait un lien.
- Est-ce que c'est toi, sorcière ? vociféra Millie.
- Non, répondis-je précipitamment.
Il fallait que je trouve une solution.
- L'enfant est béni, affirmai-je, il dispose de certaines aptitudes, c'est pour ça qu'il a trouvé recueil au sein de mon foyer.
- L'enfant !? répéta Millie, étonnée.
- Après tout, il est l'enfant d'Izi et de Yaël, on aurait dû se douter qu'il avait un don, s'agaça le dénommé Geoffrey.
- On ne pouvait pas savoir, ce n'est pas un astréien, ce n'est pas normal !
- Ils n'ont jamais rien fait de normal ces deux-là ! s'exclame-t-il.
- Et qu'est-ce qu'on fait maintenant ? Yaël va vite être informé des évènements et je préférai être loin d'ici à ce moment-là, si tu vois ce que je veux dire, renchérit Millie.
- On va devoir marcher, on ne peut passer par la Grand'Astrée, répondit Geoffrey.
- Alors, partons, trancha sa femme, la route sera longue.
Je me félicitai que mon mensonge soit passé inaperçu et qu'ils soient convaincus qu'Isaïah soit la cause de... De quoi d'ailleurs ? Je n'avais pas vraiment compris. En revanche, j'avais la certitude qu'ils ne comptaient pas faire de mal à l'enfant, sinon ils ne m'auraient pas gardé avec eux, ce qui me rassurait un tant soit peu.
À peine les premières centaines de mètres franchies, je compris que Millie n'avait pas menti et que le chemin serait long. Ils voulaient faire preuve de discrétion et au regard de la direction que nous prîmes, il était clair que nous éviterions soigneusement la ville la plus proche.
Je priai tous les Dieux pour qu'ils viennent en aide à Izi et Yaël et qu'ils puissent retrouver leur fils. De mon côté, je veillerai à sa santé, c'était tout ce que je pouvais leur offrir.
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