Chapitre 59

Geoffrey partit et je rejoignis mes amis, mon mari, mon fils, ma famille. Je pris Isaïah dans mes bras et le berçai avec tout l'amour dont j'étais capable. J'entendais les paroles de Mia et d'Ethan, mais n'écoutais pas vraiment. Je les remerciai pour tout et pris des nouvelles de Luka. Yaël m'apprit que ce dernier avait des révélations à me faire et qu'il pensait qu'elles allaient me plaire. Il suscita ma curiosité. Il commença à me parler du Mont d'Or et de la direction du Palais. Il me révéla avoir confié quelques responsabilités à Théo.

- Tu as bien fait, lui assurai-je. Théo est destiné à avoir encore plus de responsabilités, tu sais. J'ai lu son avenir. Il aimera notre fils comme le sien. Lui aussi, il veillera sur lui. Tu peux lui faire confiance.

- Tu lui offriras le rôle que tu désires. Ils t'attendent tous. Isaïah sera couronné sous peu. Le royaume de Hululy est entre tes mains, ma reine. Tu lui donneras la direction que tu souhaites et je t'y aiderai. Ne t'inquiète pas pour tes visions. Je sais tout pour Yöri. Tu ne finiras pas comme lui, je te le promets. Nous allons rentrer à la Grand'Astrée. Kamilla a des confidences à te faire elle aussi. Elle détient la solution.

- On ferait bien de tous y aller, intervint Ethan. Mia aussi a besoin de soins.

- Oui, allez-y, affirmai-je. Ethan, tu veux bien réunir des hommes pour qu'ils escortent Mélinda et Isaïah jusqu'au Palais. Ils ne peuvent pas passer par la Grand'Astrée.

- Bien sûr.

- Je te laisse t'en charger. Je dois parler avec Yaël. Seule.

Yaël me questionna du regard, mais j'attendis la confirmation d'Ethan, embrassai une dernière fois mon fils et les regardai tous partir avant de discuter avec mon époux.

Nous étions enfin seuls dans cette pièce devenue apocalyptique. Je ressentis l'anxiété de Yaël, il sentait que quelque chose n'allait pas. Le soleil ne franchissait pas encore les vitraux brisaient, il me restait encore un peu de temps.

Je me rapprochai immédiatement de Yaël, sans lui laisser le temps de l'interroger.

- Mon amour, lui dis-je en collant mon corps au sien.

J'étais comme aimanté par sa lumière. J'avais besoin de sentir son contact, il n'y avait que comme ça que nous étions complets.

- Tu es la plus belle chose qui me soit arrivée, lui avouai-je.

Je comblais le vide entre nous et glissai mes mains dans ses cheveux pour rapprocher son visage du mien. Je sentis mes yeux se gorgeaient de larmes, mais je les retins.

- Izi, ne t'en fais pas, tout est fini, ne te mets pas dans des états comme ça. Je ne laisserais plus jamais personne te faire du mal. Je te le promets.

Je me mis sur la pointe des pieds pour atteindre ses lèvres. Il m'embrassa en retour avec passion, posant ses mains sur mes joues pour capturer mon visage. Sa langue vint caresser la mienne, aspirer mes sanglots, effacer le goût salé de mes larmes. Je m'abandonnai totalement à lui, profitai de chaque seconde de tendresse, j'emprisonnai son amour dans mon cœur, je gravai à jamais ce souvenir.

Je l'enlaçai farouchement, enfermant son corps dans mes bras, collant ma poitrine à son torse, je ne voulais plus qu'il n'y ait aucun espace vide entre nous. Il enleva ses mains de mon visage et les descendis le long de mon corps pour me saisir par les fesses et me remontai à son niveau. J'enroulai mes jambes à sa taille pour m'agripper à lui, sans cesser de l'embrasser. Il fit quelques pas en direction de l'escalier et m'adossa contre la rambarde pour me maintenir à son niveau. Il libéra ses mains et les replaça sur mon visage pour dégager une mèche de cheveux qui s'était égarée devant mon œil.

- Tu m'avais tellement manqué, dit-il les yeux brillants. Il va vraiment falloir qu'on trouve le moyen de faire en sorte que tu ne disparaisses plus loin de moi. C'est d'un arrêt cardiaque que je vais mourir à force, essaya-t-il de plaisanter pour détendre l'atmosphère.

Je ris à mon tour.

- Je crois que tu as prouvé à tous que tu n'étais pas près de mourir ! C'était une belle démonstration de force.

- Mais il n'y a que toi qui l'aies vu. J'avais demandé aux autres de partir.

- Et tu crois que ce que tu as fait avant n'était pas impressionnant ? Tu es le maître des éléments Yaël. Tu n'es pas que l'Élu des astréiens, tu es l'Élu des deux mondes, mon amour. Je l'ai vu. La prophétie de Yöri. Tu seras à l'origine de la nouvelle ère.

- Je ne veux pas vivre dans l'ombre d'une prophétie, Izi. Je veux juste... vivre. Avec toi.

- Il y a des évènements qu'on ne peut pas changer.

- Qu'est-ce que tu as vu, Izi ? s'inquiéta-t-il.

- Tu veilleras sur nos peuples, le tien et le mien. Tu le feras pour moi, tu le feras parce que tu sais que c'est important pour moi. Nos mondes ne doivent pas mourir. Et tu dois veiller à la lignée des Weysar. Il faut que tu protèges nos descendants.

- C'est une demande ou une prémonition, Izi ?

- Les deux.

- Nous parlerons du futur plus tard, nous avons le temps. Il faut que tu discutes avec Kamilla avant de prendre une quelconque décision, c'est important, d'accord ?

Kamilla ne pourrait rien pour moi, peu importait ses dons, peu importait ce que lui avait demandé Yöri, mais il était inutile que je le dise à Yaël. Je lui souris timidement en retour. Le soleil commençait à apparaître dans la pièce. Le premier rayon jaillissait sur la porte d'entrée. Il se refléterait bientôt sur le métal du support de torches et il serait alors temps.

- Yaël, dis-je les yeux bordés de larmes, j'aurai aimé te connaître plus tôt, avoir plus de temps avec toi. J'aurais aimé vivre cette vie éternelle à tes côtés. Pardonne-moi mon amour, c'est la meilleure fin que nous ayons.

- Qu'est-ce ce que tu as, Izi ? De quoi parles-tu ? Izi, réponds-moi !

- Embrasse-moi, réclamai-je en me jetant sur ses lèvres, mais il me repoussa, bien trop inquiet pour répondre à mes attentes.

Puis, le reflet du soleil sur le métal m'éblouit. Je me détachai de Yaël, le contournai pour faire face aux escaliers contre lesquels Yaël était à présent appuyé.

- Izi, qu'est-ce que tu me caches ? s'alarma Yaël.

- Ne m'en veux pas, murmurai-je.

Je jetai un coup d'œil à la fenêtre pour capter les rayons du soleil. Je me jetai sur Yaël pour le protéger de mon corps. Le trident d'Aequor se matérialisa et arriva à toute vitesse sur nous. Yaël n'eut pas le temps de le voir qu'il transperçait déjà mon corps, jusqu'à le traverser. Les pointes s'enfoncèrent légèrement sur le thorax de Yaël, l'égratignant de façon superficielle, juste assez pour faire couler son sang.

Le trident disparut alors tout aussi soudainement qu'il était venu et je savais qu'il ne reviendrait plus désormais. C'était l'un des dons d'Aequor, une fois qu'il avait lancé son trident, ce dernier atteignait toujours sa cible, peu importait quand. Il ne s'arrêtait qu'une fois qu'il avait fait couler le sang de sa victime. C'était à présent chose faite même si cela n'avait pas tué Yaël. Il serait la première personne à survivre au trident d'Aequor. Mais à la place, il prenait ma vie.

- Non ! hurla Yaël en serrant mon corps dans ses bras. Izi, qu'est-ce que tu as fait ? Pourquoi as-tu fait ça ? Pourquoi ? s'étrangla-t-il.

Il appela immédiatement la terre à lui pour tenter de créer un passage vers la Grand'Astrée, mais j'avais aussi vu cette fin et elle ne fonctionnerait pas. J'avais même essayé d'envoyer immédiatement Ethan chercher Éléanore, mais même cela n'avait pas fonctionné.

- Arrête Yaël, ça ne sert à rien.

- Il est hors de question que je te laisse mourir, Izi, dit-il avec un regard paniqué devant mes plaies béantes. Tu te souviens, je viendrais te chercher dans le royaume d'Inaé s'il le fallait.

- Tu ne peux rien faire. Il n'y avait pas d'autres solutions, Yaël, j'ai essayé de changer le destin, j'ai essayé, mais peu importe ce que je faisais, je n'arrivais pas à te sauver autrement.

- Tu aurais dû me laisser mourir ! s'emporta-t-il.

- Je ne pouvais pas. Ma vie est moins précieuse que la tienne. Yorï le savait.

- Je me fiche des prophéties. Izi, je ne veux pas que tu meures. Accroche-toi s'il te plait, ne me fais pas tes adieux. Tu vas vivre tu m'entends. Je t'interdis de mourir !

- Je continuerai de vivre à travers Isaïah, dis-je à voix basse.

- Je ne vais pas y arriver, Izi, ne me demande pas ça. Pas sans toi. Izi ! Izi, réveille-toi, reste avec moi. Ne me laisse pas, je t'en prie. J'ai besoin de toi ! Izi ! Izi !

Je sentis du sang remonter le long de ma trachée, j'essayai de lui dissimuler, mais il le vit couler de long de ma bouche. Je n'avais pas vraiment mal, j'avais perdu trop de sang, mon corps était trop faible pour ressentir les blessures de mon corps. Je me concentrai sur le visage de Yaël et la lumière qui nous encerclait. Elle était tellement réconfortante. Elle m'apporta l'apaisement dont j'avais besoin.

Je ne voulais rien montrer à Yaël, mais j'avais peur, si peur. Je sentais la vie m'échapper. Je m'attendais à voir les scènes de ma vie défiler devant moi, mais plutôt que d'être assaillie par mille images comme il en était devenu récurrent, je ne percevais que le présent. Je vis le visage dévasté de Yaël qui n'essayait plus de cacher ses larmes, m'implorant de rester avec lui. J'aurais tellement aimé. J'utilisai mes dernières forces pour caresser son visage et essuyer une de ses larmes avec mon pouce.

Puis, la lumière de notre amour se fit plus faible, je la vis vaciller jusqu'à qu'elle s'éteigne complètement et que je sois plongée à tout jamais dans le néant.


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