- Yaël.

- Izi !

Il ne se jeta pas sur moi comme je m'y attendais. Il resta là, à me regarder, sans bouger. Il était couvert de sang, mais je savais qu'il n'était pas blessé. Je décidai de le rejoindre, tenant toujours fermement Isaïah dans mes bras depuis que Geoffrey me l'avait ramené.

Avec le décès des astréiens dont j'avais lu les souvenirs, les images qui tournaient en boucle dans ma tête s'estompaient. Je me sentais de nouveau dans le présent et j'étais heureuse de pouvoir profiter pleinement de Yaël. Mes émotions étaient toutes revenues et je voyais la lumière qui émanait de lui comme jamais.

Son sourire était un rayon de soleil dans ce capharnaüm et je le lui rendis avec sincérité. Je lui tendis son fils et il le prit sans hésiter pour le serrer tout contre lui. Peu importait son état, il avait trop attendu ces retrouvailles et le petit semblait heureux de revoir son père.

- Nous avons réussi, me souffla-t-il.

Je ne lui répondis pas. Je me collai contre lui, j'avais besoin de son contact, de sa chaleur.

- Je suis désolée Yaël. Je suis infiniment désolée d'avoir suivi ce chemin. Je crois qu'il faisait partie de ceux qui ne pouvaient être changés.

- Ce n'est pas grave. Ne pleure pas, me consola-t-il.

- Je n'ai pas pu sauver Stan, continuai-je. J'ai essayé des voies différentes, mais si je le sauvais, Misha et Mia mouraient. Je savais que Stan avait décidé de ne pas continuer à vivre sans Anya. Et Misha... il est si jeune. Je suis désolée, je l'ai sacrifié, je ne l'ai pas sauvé.

- Arrête, ce n'est pas ta faute, ne te mets pas dans cet état. Raconte-moi ce qu'il s'est passé.

Je laissai passer un sanglot, incapable de trouver les mots justes pour lui expliquer quoi que ce soit.

- Geoffrey m'a dit que tu avais eu de nombreuses visions, tenta-t-il pour me faire parler. Je ne savais pas dans quel état j'allais te retrouver.

- Ça va mieux, le rassurai-je. Tu dois laisser la vie sauve à Millie et Geoffrey.

- Je ne les ai pas tués, me semble-t-il, me fit-il remarquer avec un sourire.

- Sans lui, nous n'aurions pas pu sauver Isaïah, précisai-je. J'ai vu sa mort Yaël, je...

- Et tu as su modifier le destin, me coupa-t-il, c'est tout ce qui compte. Je suppose qu'on te doit aussi l'intervention d'Ethan pour sauver Mia ?

En effet, je savais qu'Ethan viendrait me retrouver lorsque Geoffrey serait descendu. Je lui avais expliqué la situation comme j'avais pu, puis j'avais fini par lui transmettre directement les images de Mia. Il avait compris qu'il devait attendre que je lui dise le moment exact où il devrait se téléporter pour la sauver.

- Mais je n'ai pas réussi à sauver tout le monde, dis-je tristement.

- Stan est mort en soldat. Il aurait donné mille fois sa vie pour épargner la tienne, m'assura Yaël.

- Yaël, j'ai lu l'avenir. Je ne suis pas la personne à sauver. L'important c'est Isaïah, promets-moi que tu le protégeras quoiqu'il en coute, que jamais tu ne l'abandonneras.

- Voyons Izi, tu sais bien que je veillerai toujours sur lui. Tu n'as pas besoin de me le demander. Cette guerre m'a fait réfléchir, tu sais. Vous êtes ce que j'ai de plus précieux, je ne veux pas de cette vie d'Élu, regarde à quoi cela conduit. Je veux qu'on retrouve ce qu'on avait chez Mélinda. Ce sera au Mont d'Or si tu le décides ainsi, mais je serai là avec toi. Je ne veux plus passer un jour loin de toi, ma reine.

Sa voix était douce, tellement chaude et mélodieuse à mes oreilles.

- Moi non plus, sanglotai-je.

- Arrête de pleurer. Ça va aller, je te le promets.

Misha et Mia firent irruption dans l'entrée, accompagnaient de Mélinda.

- Nous l'avons trouvé attachée dans une cave, nous informa Misha. Est-ce que c'est fini ? demanda-t-il hésitant. Izi, est-ce que ça va ?

- C'est fini, acquiesça Yaël. Retourne à la Grand'Astrée, va trouver Éléanore, elle soignera ta blessure.

Il hocha la tête en signe d'acceptation, malgré les bandages que Mia avait dû improviser, on devinait que la plaie n'était pas belle.

- Attends, dis-je à l'intention de Misha.

Je le rejoignis au niveau de la porte.

- Merci Misha. Merci pour tout ce que tu as fait pour moi depuis mon arrivée à la Grand'Astrée, je n'aurai pas réussi à survivre dans ce monde sans toi.

- Tu t'en serais très bien sortie, me répondit-il avec assurance.

- Sans toi, cela n'aurait pas été pareil, je voulais que tu le saches. File te faire soigner et s'il te plait, continue de prendre soin de Yaël comme tu le fais. Tu comptes pour lui et il aura besoin d'un ami proche avec la mort de Stan.

- Il pourra toujours compter sur moi, rétorqua-t-il du tac au tac.

- Je sais et je te remercie aussi pour cela, lui souris-je.

- Est-ce que ça va Izi ? s'inquiéta-t-il.

- Oui, désolée, c'est l'émotion de tous ces évènements. Tu sais mon pouvoir a pris de l'ampleur ces derniers temps.

- Ne t'inquiète pas. Yaël trouvera une solution pour ça aussi. Je file, ne le dis pas aux autres, mais mon bras me fait un mal de chien, m'avoua-t-il.

- Embrasse Éléanore de ma part.

- Ce sera fait !

Mia et Ethan avaient rejoint Yaël. Geoffrey était également descendu, mais il se tenait à l'écart. Je lui fis un léger sourire. J'étais reconnaissante de son aide. Il avait tenu parole.

- Ça va allait ? me demanda-t-il en pensée.

- Tu devrais aller rejoindre Millie. Elle doit être inquiète. Yaël ne vous pourchassera pas. Vous êtes libres.

Il ne répondit pas de suite, mais il finit par me questionner.

- Tu es au courant pour le trident d'Aequor, n'est-ce pas ?

Je restai silencieuse, mais il insista.

- Izi ?

- Oui, je le suis. Tu devrais partir maintenant.

- Que vas-tu faire ? Qu'est-ce que tu as en tête ?

- Je te remercie pour ton aide Geoffrey, sincèrement, mais la suite ne te concerne pas. Tu dois partir, tu sais bien que tu devras être loin d'ici quand cela arrivera.

- Je... je suis désolé, Izi.

- Je sais Geoffrey. J'ai lu tes souvenirs, je sais que tu étais opposé à ce projet. Je ne t'en veux pas, je t'en veux plus. Tu t'es racheté. Mon fils est sauf, c'est tout ce qui compte. Pars maintenant. Il ne reste plus beaucoup de temps.

Geoffrey se dirigea vers la sortie, s'arrêta à mon niveau et me regarda avec beaucoup d'émotions. Je ne lui avais pas menti, je ne lui en voulais plus. J'avais lu en Geoffrey et c'était un homme bien, peu importait les actes qui l'avaient conduit ici.