Chapitre 9
Une fois chez nous, je ne savais pas très bien par où commencer. J'avais plusieurs choses à lui dire et je ne savais pas dans quel ordre je devais m'y prendre. J'avais peur qu'il s'énerve et qu'il ne me laisse pas le temps de lui dire l'essentiel.
Il instaura immédiatement une distance entre nous et cela ne m'aidait vraiment pas à me sentir mieux. La proximité de ces quelques heures avait été si naturelle que j'avais oublié qu'en aparté il en était autrement. Apparemment, pas lui.
- Je t'écoute, me dit-il en s'adossant contre le mur.
D'instinct, je me dirigeai vers la petite boite qu'Harmonie m'avait offerte lors de ma venue à la Grand'Astrée. Elle y avait enfermé des notes de musique qui tournait en boucle lorsqu'on l'ouvrait. La mélodie vint combler le silence. Yaël quant à lui attendait toujours ma réponse.
- Avant tout, je tiens à te dire que je suis vraiment désolée de m'être enfuie comme ça.
- Ça, tu me l'as déjà dit, me répondit-il froidement. Où étais-tu ?
- Chez les bohémiennes.
Je ne crois pas qu'il avait anticipé une telle réponse. Il attendit que je continue, mais j'avais beau avoir réfléchis depuis des jours à ce que je lui dirais, les mots me manquaient.
Il diminua la distance entre nous, s'approcha de moi tout en me contournant pour refermer le couvercle de la boite et réinstaurer ce silence lourd qui me pesait depuis trop longtemps. Il resta juste devant moi, à quelques centimètres de mon corps, m'intimant de son regard à continuer mon récit.
- Je me suis rendue au village des Ouria. Le collier que tu m'as offert à Émery appartenait à l'une des leurs. Elle y a enfermé ses souvenirs afin de me les transmettre. Je devais y aller. Seule. Et je devais être sûre que personne n'apprenne que j'étais partie là-bas.
- Pourquoi ?
- Au début je ne le savais pas vraiment, confessai-je, j'en avais juste l'intime conviction. J'aurais aimé t'en parler, mais... je ne sais pas, quelque chose m'en empêchait.
Il réfléchit brièvement à ce que je venais de lui confier.
- Quand as-tu su pour le collier ? me demanda-t-il.
- Il m'a attiré dès que je l'ai vu et j'ai eu une vision dès que je l'ai touché.
Il ne dit rien, il n'en avait pas besoin, toute son attitude criait : « Et tu ne me l'as pas dit !? ».
- La bohémienne qui le possédait s'appelait Elija, continuai-je. Elle s'est enfuie de ses terres et est devenue la maîtresse du Prince de Hululy. Elle a participé au meurtre de mon père et à ma traque. C'est elle qui lui a révélé que j'étais à Azadjan.
- Est-ce que tu es allée la rencontrer ?
- Le Prince l'a tuée. Il s'avère que je suis... spéciale pour les bohémiennes. Je fais partie de l'une de leurs prophéties.
- Yöri, gronda-t-il soudain.
- En effet.
Je ne savais pas exactement ce qu'il savait sur les liens qu'entretenait Yöri avec ce peuple. Il ne l'avait pas connu, Yöri s'était éteint il y a bien longtemps.
- Que t'ont-elles appris ?
Nous y étions.
- Elles m'ont révélé la prophétie.
Je la lui répétai mot pour mot, mais Yaël ne dit rien, il ne semblait même pas surpris.
- Elle parle de moi Yaël, ajoutai-je pour être sûre qu'il comprenne ce que j'étais en train de lui révéler.
Il sembla réfléchir, mais ne dit toujours rien.
- J'ai un rôle à jouer, je ne sais pas encore très bien lequel, mais j'ai décidé de l'accepter, continuai-je.
- Pourquoi ne me l'as-tu pas dit avant ? demanda-t-il soudain.
Son ton était ferme et sans appel.
- Shana, la doyenne des bohémiennes m'a affirmé que Yorï avait été assassiné par un astréien.
Ah, voilà une réaction ! Cette information, il ne la détenait apparemment pas.
- Qui ?
- Je ne sais pas, mais je préfère ne faire confiance à personne. Je me sens épiée depuis que je suis à la Grand'Astrée et ce n'est pas que l'attrait de la nouveauté, c'est autre chose.
Yaël se pinça les lèvres, mal à l'aise.
- Je dois bien reconnaître que depuis que tu es revenue, j'ai fait en sorte que tu ne sois jamais seule, concéda-t-il.
- Je m'en suis aperçue ! Mais je pense que tu n'es pas le seul à m'espionner. Ne t'a-t-on rien rapporté d'étrange ? Une personne qui me suivrait ?
Il me fit non de la tête, l'air soucieux.
- Pourquoi me le dire ce soir ? demanda-t-il.
- Joachim n'est pas là et je ne crois pas qu'il y ait d'autres astréiens dotés d'un pouvoir qui permet de surprendre cette conversation, du moins je l'espère ! Je devais prendre le risque, car j'ai des choses plus importantes encore à te confier.
Nous n'avions pas vraiment discuté de mon rôle dans cette prophétie, mais je pris pour acquis ce point puisque contrairement à ce que je craignais, il n'avait pas hurlé que c'était hors de question. Il fallait à présent que je lui raconte la deuxième partie de mon histoire.
- Yorï m'a fait un présent, lui révélai-je.
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