Chapitre 56

- Et moi je peux t'assurer du contraire, tonna Yaël en arrivant derrière nous.

Misha était à ses talons. Je ne les avais pas entendus s'approcher et je restai encore sidérée par les propos de Théo. Les dieux... s'il savait...

- Je suis heureux que tu fasses enfin ton apparition, Yaël. Cette discussion te concerne, affirma mon cousin. Rappelle tes hommes, il n'y aura pas de guerre.

- Et pour quelles raisons ferais-je cela ? demanda Yaël, sans dissimuler un sourire.

- Qu'est-ce que tu nous caches Théo ? Qu'est-ce qu'on ne sait pas ? De quoi est-ce que tu parles ? le questionnai-je à mon tour avec empressement.

Je sentais l'étau se resserrer sur nous. Théo n'était pas là par hasard. Qu'est-ce que le Prince mijotait ? Tout le monde m'avait dit que mon cousin était sa carte majeure. Il était en train de la jouer.

- Vous croyez vraiment que Storm se laissera prendre le pouvoir si facilement ? Après tout ce qu'il a fait pour l'obtenir ? Sincèrement ? nous demanda Théo à son tour. La première chose qu'il a faite a été de remplacer les cavaliers rouges et il l'a fait sans peine. Un groupe de personnes l'avait déjà approché pour lui proposer ses services. Et aussi étonnant que cela puisse paraître, ils sont encore plus redoutables que ne l'étaient les cavaliers rouges.

Yaël échangea un bref regard avec moi. J'aurais aimé avoir les mêmes discussions silencieuses qu'il entretenait avec Stan parce que je restais dans le flou complet. Savait-il de qui Théo parlait ? Pire que les cavaliers rouges ? Était-ce seulement possible ?

- Qui ? finis-je par demander.

- Tu le sauras bien assez vite.

Voyant que Théo ne comptait pas m'en dire plus, je décidai d'agir. Je me jetai sur lui et posai mes mains sur sa tête sans lui demander son accord pour me saisir directement des informations à la source. Théo était humain, il était lisible pour moi. S'il ne voulait pas me dire exactement les choses, je pouvais à présent me servir dans ses pensées.

Il ne m'en empêcha pas et il me laissa même faire sans protester. Toutefois, à mon grand désarroi, je ne vis rien. Absolument rien. Aucune vision. Devant mon air incrédule, Théo se mit à sourire.

- Pas avec moi, cousine.

Une pierre. Cela ne pouvait s'agir que de cela. C'était la seule chose que je connaissais qui bloquait nos pouvoirs. D'un geste brusque, j'écartais les pans de sa chemise à sa recherche. J'avais vu juste. Il portait une amulette sertie d'une pierre rouge, pourtant cette couleur n'avait rien à voir avec celles de Kamilla et je doutais un instant qu'il s'agisse réellement de ça. Ce n'était peut-être qu'un bijou. Mais je me rappelais que si Chase avait connaissance de nos pouvoirs et des pierres, Storm aussi et par conséquent, Théo également.

Que savait-il d'ailleurs sur moi exactement ? Il était évident qu'il savait que j'avais un pouvoir et il avait d'ailleurs choisi de se protéger de moi, à juste titre apparemment... Était-ce pour cela qu'il était du côté de Storm ? Me considérait-il désormais comme une étrangère ? Est-ce qu'il me voyait comme une monstruosité qu'il fallait combattre ?

Théo... si tu avais su combien mon âme était restait identique et combien je t'aimais malgré tes choix. Je suis vraiment désolée d'avoir dû en arrivait là, mais je n'avais pas le choix.

Il ne s'attendait pas à ce que je me doute de la présence d'une pierre, mais surtout comme tous les hululiens, il m'avait sous-estimée. Je le bloquai rapidement grâce à une prise que j'avais répété mainte fois avec Misha. Cela me laissa toute l'opportunité de lui arracher l'amulette sans qu'il ne puisse rien y faire.

Je me rappelai alors les paroles de Luka. J'avais cassé le collier de ma mère, j'avais fêlé la pierre quoique de façon très subreptice, et cela avait suffi à briser le charme de Kamilla. Je n'hésitai pas. Je pris mon puggio et tapai de toutes mes forces la pierre rouge avec le manche. Cela m'avait obligée à lâcher Théo, mais il n'avait pas eu le temps d'empêcher la destruction de l'amulette, encore choqué par la rapidité et l'efficacité de mes mouvements. Je ne lui laissai pas plus de temps pour réfléchir à ce qui venait de se passer et le saisis pour placer mes mains sur sa tête, sans lui laisser l'opportunité de s'y opposer.

Les images défilèrent immédiatement dans mon esprit. Les premières me saisirent le cœur. Il s'agissait de nous enfants. Puis, je le vis affronter les cavaliers rouges, à Azadjan. C'était la dernière fois qu'il avait vu ses parents, je fus saisi par sa douleur, son désespoir. Mais le sentiment le plus difficile à accepter fut le réconfort qu'il avait trouvé auprès de Storm par la suite. Son affection pour lui était sincère.

Je vis qu'ils discutaient régulièrement ensemble le soir et que Storm lui avait confiait des éléments de son passé. J'essayai de me concentrer sur les informations qui m'intéressaient, faisant le tri parmi les images. Je fus alors saisi par un échange que Théo eut avec une personne qui l'effrayait. Pas de doute sur ses sentiments, cet homme le terrorisait. Il devait donc être un des nouveaux cavaliers du Prince auquel il venait de faire allusion.

Je plongeai aussitôt dans ce souvenir, mais j'en fus brutalement retiré. Théo m'avait frappé. Je n'en revenais pas, il m'avait frappé assez fort pour que j'en lâche ma prise et me fasse reculer de lui ! Je vis Yaël se rapprocher, mais je lui barrai le passage de mon bras. Cette histoire était une affaire de famille.

- Je ne te laisserai pas lire dans ma tête, astréienne, me cracha Théo au visage comme si cela était une insulte.

Alors il savait. Mais apparemment il n'avait pas compris qu'il n'avait pas le choix. Je lançai mon poing en direction de son visage, or cette fois-ci, il s'était préparé à mon attaque et l'esquiva sans mal. Il ne s'attendit néanmoins pas à ma balayette.

Une fois qu'il fut tombé, je me jetai sur lui, le plaquant au sol et me positionnant sur son buste pour jouir pleinement de ma vision. Celle-ci me liquéfia sur place. Elle ne dura pourtant qu'un instant. Théo se débattit et parvint, une fois encore, à se détacher de mon emprise, mais peu importait, ces quelques secondes m'avaient suffi pour être fixée.

Théo disait vrai. Je ne serai pas reine demain. Par contre, lui, je l'avais vu assis sur le trône et devenir le Prince du royaume de Hululy...


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