Chapitre 27

- Tu es donc majeur, constatai-je.

- Effectivement. Tu avais oublié la date de ma naissance ?

- Non, dis-je sur le bout des lèvres.

Pourquoi lui en voulais-je ? Aucune raison, cette grossesse me déréglait complètement, je n'étais plus qu'instinct, sans réflexion, au moment où j'avais le plus besoin d'être prudente.

- Il me semble pourtant que je n'ai pas eu de cadeau, déclara Misha, un brin provocateur. Tu me dois des révélations...

- La vision de mon corps déformée ne te suffit pas, lui rappelai-je en désignant mon ventre arrondi.

- Loin de là, affirma-t-il. Que fais-tu ici ?

- Je ne peux pas avoir cet enfant à la Grand'Astrée. Tu sais très bien que cette terre est hostile aux grossesses.

- Aucune astréienne n'est pourtant tombée enceinte dans ce monde-ci non plus.

- C'est parce que je l'étais déjà avant de rejoindre la Grand'Astrée, ce que n'ont jamais pu faire les autres astréienne.

- Cela ne me dit pas ce que tu fais réellement ici ? insista-t-il. Dis-moi la vérité.

- Yaël a estimé que les marais qui nous entourent nous offrent une porte de sortie rapide vers la Grand'Astrée.

- Tu détournes ta réponse. Que fais-tu ici, Izi ?

Je détestais lorsqu'il était aussi perspicace.

- Je prépare ma vengeance, cela ta va comme réponse ! lui criai-je presque au visage.

- Elle est plus honnête.

Il me regarda sans plus rien ajouter. Il attendait sans doute que je poursuive, mais j'étais agacée, énervée de me sentir aussi impuissante alors que Théo avait besoin de moi.

- Le Prince ? questionna-t-il.

- Qui d'autre ?

- Comment puis-je t'aider ? me répondit-il aussitôt.

Je le regardai, étonnée, je ne m'étais pas attendu à cette question.

- Pourquoi voudrais-tu m'aider ? Yaël te l'a demandé ? Tu n'en as pas marre de lui obéir aveuglément et d'accomplir ce que tu n'as pas envie de faire. Tu n'as plus besoin de m'espionner, Misha.

- C'est ce que tu crois ? me demanda-t-il, blessé. Tu n'as donc pas encore compris qu'aucun astréien ne fait rien contre sa volonté ? Je suis ici de mon fait, Izi, et j'aimerais être là pour toi, mais si ma présence te dérange, je m'en vais. Tu n'as qu'un mot à dire.

Je ne dis rien, je n'avais pas envie qu'il s'en aille. Il se dirigea vers la cuisine et ouvrit quelques placards.

- Qu'est-ce qu'il y a à manger ? demanda-t-il soudain comme si cette conversation n'avait pas existé.

- Sers-toi, prends ce que tu veux, répondis-je.

- Et toi, tu veux quoi ?

- Je n'ai pas faim.

- Dommage, parce que pour établir une stratégie valable il faut alimenter son corps. Je nous prépare donc quelque chose et on réfléchit à comment on va faire payer le Prince de s'en être pris un jour à l'une des nôtres !

Je souris intérieurement et protestai pour la forme, il était si facile de céder face à son obstination. Il apporta un reste de tourte avec de la salade, puis me demanda sans détour.

- C'est quoi le plan ?

- Il n'y a pas de plan Misha, m'exaspérai-je.

- Il était donc vraiment temps que j'arrive ! Je suppose que sa mort te ne satisfait pas, sinon Yaël s'en serait déjà occupé. Tu veux sa destitution ?

Je fus un peu surprise de sa clairvoyance.

- Oui, mais c'est plus compliqué que ça. Le Prince... c'est mon oncle et il connaît notre lien de parenté, c'est pour ça qu'il souhaite ma mort. Il craint que j'offre un héritier au royaume de Hululy. Une prémonition de Yorï qui a pris forme. J'attends un fils.

- C'est plutôt une bonne nouvelle.

- Tu trouves que le fait qu'on veuille ma mort et celle de mon enfant est une bonne nouvelle ?

- Non, mais permettre de voir la pire crainte du Prince se produire est plutôt réjouissant, non ? Si Yorï l'a prédit, ton fils récupérera le trône.

Il dit cela avec une certitude non feinte.

- Je ne crois pas que c'est ce que Yaël souhaite.

Je me sentais obligée de lui avouer. Je savais qu'il serait du côté de Yaël.

- Mais tu es là, entourée d'ouvrages historiques sur ton royaume. Qui te les a apportés ?

- Il essaie de m'occuper, je m'ennuie ici toute seule !

- En te donnant les armes nécessaires pour élaborer ta stratégie ? Étrange choix pour une personne qui ne te soutiendrait pas.

- Ce n'est pas si simple, soupirai-je.

- Ça ne l'est jamais. Alors qu'as-tu appris ? dit-il en désignant les manuscrits.

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