Chapitre 19
Je ne sais pas combien de temps dura mon entrevue avec Kamilla. Plusieurs heures très certainement. J'avais du mal à me remettre de ses révélations. Elle me laissa le temps que je jugeais nécessaire. Les silences n'étaient pas pesants. J'étais dans mes pensées, elle était dans les siennes. Je pensais à Yaël, elle pensait à Yorï.
Puis, au fil de mes réflexions, je la questionnai sur des détails, sur son avis, sur ce dont j'avais besoin d'entendre ou simplement d'exprimer. Elle ne répondit pas toujours, je sentais qu'elle tenait à garder certains de ses secrets, mais je ne creusai pas davantage. Je n'étais pas certaine de pouvoir encaisser une nouvelle supplémentaire.
Elle me promit d'être là pour moi. Je lui répétai pourtant que je quittais la Grand'Astrée et que je ne reviendrai plus. Elle ne me demanda pas pourquoi. Je ne lui dis pas pour l'enfant. Pouvait-elle réellement l'ignorer ? Elle m'assura qu'elle franchirait le portail pour me retrouver, que Yaël n'avait qu'à venir la chercher. Je la remerciai, je ne savais pas ce qui m'attendait, mais j'aurai besoin d'elle. Comme elle me l'avait si justement dit, le silence n'a pas de prix.
Avant mon départ, elle insista pour que je prenne la pierre qu'elle avait créée. Elle m'expliqua qu'elle était issue de la roche, juste derrière sa maison. Elle insufflait dans les plus grosses une énergie qui permettait de créer une cage diffusant son pouvoir lorsque quatre pierres étaient réunies, exactement comme celles que Yaël avait mises dans notre chambre.
En réalité, elle pouvait emprisonner son pouvoir de différentes façons. C'est elle qui faisait également les pierres permettant de cacher notre lumière avec ce qu'elle nommait le sort de dissimulation. Je me disais alors, vu les relations des autres astréiens avec Kamilla, que Yaël devait être le seul à en détenir, à moins que Luka en ait également volé.
La pierre qu'elle me fit emporter me rendrait quant à elle inaccessible mais me priverait aussi de mon pouvoir. Elle agirait de la même façon sur tous ceux se tenant à proximité de moi, comme l'avait fait le collier de ma mère. Heureusement, Kamilla me révéla que, plongée dans l'eau, elle perdait de son efficacité. Je pourrais ainsi la garder à portée de main et m'en servir uniquement lorsque le besoin s'en ferait ressentir.
Elle la glissa dans une gourde et me souhaita bonne chance. Je n'avais aucune idée de la date à laquelle je la reverrai.
Quand je sortis de chez elle, je n'eus que quelques mètres à faire pour retrouver Misha, allongé dans l'herbe, une brindille de paille à la bouche.
- Je croyais que cela devait être rapide, me réprimanda-t-il.
- Je n'ai jamais dit ça !
- J'espère au moins que tu n'es pas venue pour rien.
- Non, je ne suis pas venue pour rien, répondis-je simplement.
- Tant mieux, parce que maintenant, il est trop tard pour rentrer !
- Tu en avais douté un moment ?
- J'espérais pouvoir rejoindre des amis à moi, mais maintenant il est clairement trop tard, râla-t-il. C'est la nuit en plein air qui nous attend.
- Et quoi, cela t'effraie ? rétorquai-je.
- Izi, ne m'énerve pas, je te rappelle que je suis là par pure gentillesse et sans poser de questions.
- Par gentillesse ou par devoir pour Yaël ? répliquai-je.
- Parce que je t'apprécie ! Je n'ai pas de compte à rendre à Yaël, ça te va ? Mais je me demande si je ne devrais pas revoir mon jugement.
Il me regarda sévèrement et je me dis que mes soupçons étaient peut-être infondés. Après tout, j'appréciais Misha.
- Je suis désolée, ce n'est pas facile pour moi en ce moment, m'excusai-je.
- Je sais.
- Non, tu ne sais pas, affirmai-je. Je vais quitter la Grand'Astrée, Misha.
Il redressa vivement son regard vers moi, cherchant sans doute à savoir si j'étais sérieuse.
- Quoi ! Mais pourquoi ?
- Tu le sais très bien ! Je ne suis pas chez moi ici.
- Mais tu n'as même pas encore essayé !
- J'ai besoin de retourner chez moi, de voir mon cousin, de me sentir parmi les miens.
- Mais c'est ici chez toi.
- Pas pour moi ! protestai-je.
Je voyais bien qu'il ne comprenait pas mon choix. Il s'était totalement renfrogné.
- Je comprends mieux pourquoi Yaël était contrarié. Tu n'es qu'une égoïste, me lança-t-il.
- Misha, je ne te permets pas, tu n'as aucune idée de la situation.
- Alors, explique-moi mieux. Comment se fait-il qu'au bout d'à peine deux mois tu baisses les bras ? Tu me déçois, je te croyais plus combative.
- Je me bats justement pour ce que je crois, tentai-je d'argumenter.
- Désolé que Yaël et ton peuple n'en fassent pas partie.
Il monta sur son cheval sans plus tarder, mais je n'en avais pas fini avec lui. J'appelai aussitôt Elya pour le suivre et finir cette discussion.
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