Le visage souriant, et l'œil fermé, et l'œil manquant. L'anglais heurté se mêle aux basses sourdes et aux voix saturées, l'œil manquant attire et ne repousse pas. Creux de chair autour de l'os, curiosité et interrogations, dans cette boutique au cœur battant. Je ne sais pas qui il est, je ne connais pas ces fins cheveux noirs et ce côté rasé, je ne connais pas ce dolphin bite autrefois désiré - de nouveau désiré. Je tente d'imaginer, de lui créer un prénom, mais mon esprit est vide, seules mes pommettes remontent. Il est beau, anguleux et androgyne. Que lui est-il arrivé, une partie de sa personne s'est-elle envolée avec son œil ? Non, non. Mon dramatisme lui invente une enfance dans le ghetto, à voler pour survivre, à éviter les balles, à lui qui semblait heureux et épanoui. Mais peut-être n'est-ce pas contradictoire, je ne connais rien à sa vie, je ne connais rien à la vie.

      C'est comme lui, avec son skate et ses bouteilles de bières, la beauté créée par le sourire ou créée par le ciel sombre, ou constante... J'ai souri à mon tour, murmurant un timide hallo. Tout ces gens, tout ce monde, tout ce monde m'attire, je voudrais le connaître, mais comment ? Je ne compte que sur les autres et les coïncidences, je serai - ou suis-je ? - déçue.