♦ Chapitre 34 ♦ La Faim

Je n'étais pas très habile avec mes doigts transformés, et je n'arrivais pas bien à tenir mon téléphone portable.

J'ai tout de même réussis à appuyer sur le bouton vert clignotant pour décrocher. J'ai volontairement formée une bulle de silence imaginaire autour de moi, si bien que je n'ai plus prêtée attention ce qui m'entourait.

J'ai portée l'appareil à mon oreille droite.

- A... Allô ?

Je n'avais bizarrement aucun mal à parler, malgré mes canines maintenant surdéveloppées. La voix inquiète et désorientée de Sophie résonna dans l'appareil.

- Elisa ?! Elisa mon Dieu, c'est bien toi ?

- Euh, ben oui, je-...

- Où es-tu ? Tu vas bien ? Tu n'es pas blessée ?

- Oui... Enfin je-...

Je n'eue même pas le temps de finir ma phrase qu'elle me coupa la parole.

- Bon sang, tout le monde s'inquiète ici ! Ca fait déjà trois jours que tu as disparue...

" Trois jours ?! "

Il est vrai que j'avais pas mal dormi depuis mon arrivée, étant donné le nombre de fois où je mettais évanouie. J'en avais ainsi perdu la notion du temps. Mais j'étais tout de même surprise d'avoir tenue trois jours sans me faire - littéralement - bouffer.

Maintenant que j'y pensais, je ne mettais pas non plus alimenté pendant ces trois jours ! Comment avais-je pu survivre ?

Lorsque mon esprit souleva cette question, mon ventre se mit à gargouiller furieusement, comme en écho à mes pensées. Ma gorge était sèche, et j'avais soif. J'espérais que boire de l'eau me suffirait - je refusais de penser à un tout autre liquide, à tendance rougeâtre.

Pourquoi tu ne répondais pas au téléphone ?  a continué Sophie sans me laisser le temps d'en placer une, ni même de me questionner d'avantage. Je t'ai appelée des centaines de fois ! Oh mon dieu, tu verrais dans quel état est ton oncle. Attends, tu ne t'es pas faite enlevée au moins ?!

- Ecoute, Sophie, calme toi. Je ne peux pas trop te parler pour l'instant. Tout ce que je peux te dire, c'est que je suis en vie, et que je vais bien.

" Du moins pour le moment. "

Des bruits de bataille féroce parvenaient maintenant à mes oreilles, mais je n'y prêtais toujours pas attention.  Plutôt : je ne voulais pas y prêter attention, car c'était impossible d'ignorait. A vrai dire, je refusais de regarder. Peut-être par peur de voir que l'un des deux vampires que je connaissais maintenant assez bien soit mort ? Ce n'était pas comme si je m'étais attachée à l'un d'eux - enfin, je ne le pensais pas - , mais je n'avais pas vraiment l'envie d'assister à des horreurs.

Je me suis détournée quelques instants de la scène, pour me concentrer sur ce que disait Sophie. 

- Mais où es-tu Elisa ? J'ai besoin de savoir ! On a tous besoin de savoir ! Ton oncle devient fou tu sais, il ne sort plus de son bureau et passe son temps à sa fenêtre. Il n'autorise que Cédric à le voir et à lui apporter ses repas.

Mon oncle.

Il devait sûrement savoir où j'étais partie, lui. Mais je ne pouvais rien dévoiler à Sophie, même si cela me faisait mal de lui mentir. De toute façon, si je lui disais que j'étais actuellement entourée de vampires, elle ne me croirait sûrement pas.

Elle avait toujours été saine d'esprit, contrairement à moi qui avait l'imagination facile.

Et puis, il en allait de sa sécurité. J'avais découverts ses horreurs par erreur, et m'étais retrouvée dans le pétrin; hors de question que la même chose lui arrive, étant donnée qu'en plus, elle n'était... qu'une simple humaine, finalement.

J'eue un petit pincement au cœur, en pensant que je n'en étais pas une, moi : j'étais un monstre, comme tout ceux qui m'entourait en ce moment. C'est fou... Ces créatures, que j'appréciais tellement au travers de mes livres, ne faisaient maintenant plus que me dégouter. Et ce, depuis qu'elles s'étaient envolées des pages - où j'aurai préférais qu'elles restent - pour rejoindre la réalité.

- Sophie, je ne peux rien te dire pour le moment. Saches juste que je serai bientôt de retour. Je pense que mon oncle sait déjà où je suis, ne t'en fais pas.

- Qu'est-ce que ça veut dire Elisa ? Quand reviendras-tu ?

- Je sais pas.

- Elisa...

J'ai soupiré. J'avais vraiment mal au cœur en pensant à ce qu'elle devait ressentir.

Distraite, je commis l'erreur de lever les yeux. Mes yeux s'arrondirent lorsque je vis un Orion tout ensanglanté appuyé contre un arbre, respirant avec peine. Ace se tenait devant lui, le sabre en argent de ce dernier à la main.

Les corps de plusieurs vampires de la colonie de Mildred gisaient an sol, un peu partout. Je ne savais pas si ils étaient vivants ou morts, mais toujours était-il qu'aucun d'eux ne bougeaient. Quand à Mildred, elle était hors de mon champ de vision.

Affolée, je me suis empressée d'ajouter :

- Sophie, je dois vraiment te laisser là. Ne t'inquiète pas pour moi.

- Mais...

J'ai raccroché avant qu'elle n'ait fini sa phrase, et je me suis précipitée vers les deux jeunes vampires, en lâchant mon téléphone dans mon empressement - qui partit rejoindre le sol.

Je me suis interposée entre Orion et Ace, stoppant le geste de celui-ci qui avait son arme en l'air, prêt à achever l'autre.

- Dégage de là, m'a dit sèchement Ace.

- Non, ai-je répondu tout aussi fermement. Si c'est moi que tu veux, ne t'en prends pas aux autres !

J'étais moi même surprise du courage avec lequel j'avais prononcé cette phrase.

J'ai désigné la colonie inconsciente et ensanglantée autour de nous, pratiquement certaine qu'il était à l'origine de ce carnage. Sans oublier ce qu'il avait fait à Mildred et Orion.

J'ai jeté un petit coup d'œil à ce dernier par dessus mon épaule pour constater qu'il s'était évanouit, totalement épuisé. Il était dans un sale état.

Une remarque sarcastique d'Ace ramena rapidement mon attention sur lui.

- Tu te mets à les défendre maintenant ?

Dans son sous-entendu, il n'avait pas tort. Je n'aurais pas cru, il y a quelques jours - ou même quelques heures -,  que je prendrais le partit d'un vampire.

" Après tout, je suis comme eux maintenant..."

Une pensée affreuse, mais bien réelle.

- Oh, mais c'est vrai... Tu es des nôtres.

- Tais-toi ! me suis contentée de dire, faisant naître sur ses lèvres pendant quelques secondes son éternel sourire moqueur.

Savait-il lui aussi lire dans les pensées, comme Orion ? Je ne pouvais pas en être sûre, mais en tout les cas, je devais me méfier de lui encore plus que celui aux yeux verts. Je le considérait comme beaucoup plus dangereux, étant donné qu'Orion ne m'avait rien fait et prétendait être " végétarien " - à la façon vampire bien sûr.

Mais sa remarque me fit pincer les lèvres. Il avait touché le point sensible, et il le savait. Suite à mon geste, mes canines pointues couleur ivoire se dévoilèrent.

Les yeux de Ace tombèrent sur celles-ci.

- Tu devrais pourtant en être fière, elles sont aussi belles que les miennes.

Je me suis retenue de penser ou même de prononcer quoique ce soit, mais je bouillonnais intérieurement.

Ses yeux sont remontés le long de mon visage, et il m'a dévoré du regard pendant quelques minutes. Un duel silencieux s'est immiscé entre nous; c'était à savoir lequel de nous deux se détournerait le premier des yeux intenses de l'autre.

Mon ventre choisit ce moment précis pour se remettre à gargouiller, pas du tout discrètement. Un mince sourire se forma sur les lèvres d'Ace.

- Aurais tu faim par hasard ? Ou plutôt... Soif ?

- Non ! Je-...

Tout est ensuite allé très vite.

Il a soudain lâché son sabre pour m'entourer fermement la taille de son bras droit. Sa main gauche vint se déposer sur ma nuque, où il exerça une certaine pression pour que ma tête se retrouve nichée dans son cou.

- Je vais te faire une faveur, a t-il soufflé à mon oreille. Je t'offre quelques gouttes, mais en échange, tu m'en devras aussi.

J'ai tenté de le repousser en protestant, les mains posées sur son torse, mais il était définitivement plus fort que moi - malgré que je sois devenue une vampire.

- Non, lâche moi !

- Ne résiste pas à tes instincts, laisse les te guider...

- Arrête, je ne veux pas !

Mon cœur a pourtant commencé à s'accélérer, et j'ai sentis mes pupilles se gonfler. Certaines veines de mon cou se sont mises à vibrer, lorsque mes yeux se sont déposés sur sa peau blanche.

" Non, tu ne peux pas Elisa... "

Mais le désir grandissant dans mon être était insoutenable, et la faim me tiraillait l'estomac.

Etais-je en mesure d'y faire face et d'y résister ?








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