7.Kanami

Ozia ne s'était pas trompée. Après quelques heures, la pluie tomba dans la région de Shinasa. À l'abri dans la grande suite, Ozia lisait le tome 4 des Chroniques d'Arfas sans rien y comprendre. Quelle idée de prendre cette histoire en plein milieu. De son côté, Daren jouissait de la cheminée crépitante pour lire La Cythia. Pendant ce temps, Miiya préparait des boissons chaudes pour les accompagner dans leur recherche, tandis que les gouttes d'eau frappaient les carreaux de leur fenêtre.

Petit à petit, un voile sombre s'abattit sur la ville. Les ténèbres de la nuit remplacèrent la beauté du jour et le froid s'installa avec lui. Heureusement qu'ils étaient bien au chaud dans leur coin. Ozia, bien installée dans le fauteuil, buvait son thé tout en lisant son livre. Elle ne voyait pas encore le rapport avec ce que lui avait dit la jeune femme. Tout ce qu'elle comprenait pour le moment, c'était qu'elle avait besoin d'une aide extérieure.

La porte s'ouvrit à la volée, faisant sursauter Ozia. Hirelda et Siana pénétrèrent dans la pièce, trempées jusqu'aux os. La respiration haletante, elles avaient couru pour se mettre à l'abri sous cette pluie diluvienne.

– Tout va bien ? se moqua Ozia en ricanant.

Hirelda lui tira la langue.

– Génial ! On s'est pris la pluie !

Siana laissa un long soupir s'échapper.

– Par contre, on n'a rien d'intéressant à vous raconter.

Hirelda se pinça le haut du nez.

– On a été dans une église, et oh leur dieu que c'est barbant. Il n'arrête pas de raconter des histoires et des contes qui montrent Hikari comme la plus belle des déesses. Tu parles... Je vais me doucher.

Hirelda ressortit de la pièce, Siana sur ses talons. Les deux filles réapparurent une demi-heure plus tard après s'être changées dans un beau kimono rose. Les aubergistes leur avaient laissé de nouvelles tenues sur leur lit, sûrement pour qu'ils se fondent un peu mieux dans la masse.

– Vous avez trouvé quelque chose ? demanda Hirelda en s'installant sur l'accoudoir du fauteuil d'Ozia.

Cette dernière ne voulait pas lui raconter son entrevue pour la répéter ensuite à Serah et Violetta. Mais Hirelda se montra tellement insistante qu'Ozia céda à ses caprices. Elle trouva ça louche et lui demanda si elle pouvait observer les autres tomes. Ozia l'invita d'un geste de la main, et à ce moment-là, Nagrir pénétra dans la pièce.

Il n'avait malheureusement rien trouvé de tangible sur la rébellion qui sévissait dans les environs. Il avait quand même appris qu'ils passaient de temps en temps pour coller des affiches sur les murs, incitant les ouailles à se détacher de la déesse. Ils dénonçaient de cette façon les mensonges qu'elle proférait via ses paroles.

Serah et Violetta entrèrent à leur tour dans la pièce.

Les Sages s'arrêtèrent devant tout le monde, surprises.

– Eh bien, vous êtes tous là ? demanda Serah.

– Ouaip ! s'exclama Hirelda. Et notre amie Ozia a peut-être une piste.

Le visage des deux Sages s'assombrit. Elles s'avancèrent jusqu'à elle et se posèrent sur le canapé.

– Tant mieux, avoua Violetta. Mon escapade dans l'hôpital n'a rien donné. Ils soignent les malades et prient sans arrêt...

– J'ai trouvé un bâtiment immense où demeurent les prêtres, expliqua Serah. Ils appellent ça le Hoshi. Mais évidemment, je n'ai pas eu le droit d'y entrer.

Ozia trouvait ces informations intéressantes, mais inutiles pour retrouver les impies. Aussi, elle s'empressa de leur expliquer son entrevue avec l'inconnue. Tout le monde s'intéressa au livre qu'elle tenait entre les mains.

– Je n'arrive pas à comprendre le sens de sa deuxième phrase, avoua Ozia.

– Où se déroule l'histoire ? demanda Serah.

Ozia leva les yeux vers la Sage.

– Euh... Arfas approche de Kanami pour donner l'assaut contre les forces du mal.

Serah sortit une carte de la région en tissus.

– J'ai trouvé ça dans une boutique, ça peut toujours être utile.

Tout le monde se leva pour voir la toile qu'elle étalait sur la petite table. Kanami était un petit village au bord du lac, au sud.

– Tu crois qu'ils sont là-bas ? demanda Violetta.

Serah haussa les épaules.

– Je ne sais pas, mais ça vaut le coup de vérifier. Bon, on partira demain matin à l'aube. Reposez-vous. Bien joué Ozia.

La jeune femme sourit et se leva. Elle allait enfin pouvoir se reposer un peu après cette longue journée de recherche. Elle retourna dans sa chambre qu'elle partageait avec Miiya. Pendant la soirée, avant le dîner tous ensemble, ils durent se résoudre à faire une prière avant d'aller dormir.

Au petit matin, et après un bon petit déjeuner bien mérité, le groupe fit une nouvelle prière. Toujours avec cet œil immense au-dessus de leur tête, ils répétèrent de concert « loué soit la déesse » avant de reprendre leur route. Ozia n'aurait jamais pu supporter ce train de vie abominable. Prier tous les matins et tous les soirs pour une fausse déesse ne l'intéressait guère, surtout quand elle savait que la soi-disant déesse était une Ayashim censée protéger les humains.

Pour se rendre dans le village de Kanami, situé au sud du lac, les Titanomanciens demandèrent leur chemin en cours de route. Heureusement, la pluie s'était arrêtée même si le ciel restait menaçant. On leur indiqua un embarcadère situé au sud, où il était possible d'emprunter une navette pour s'y rendre. Ils louèrent un bateau et rejoignirent la population à l'intérieur. Une fois remplies, les marins ramèrent bruyamment dans la direction de Kanami. Ozia se sentait oppressée en voyant les nombreux navires de guerre sur le chemin, mais cela ne semblait pas déranger la population. Ils discutaient tous de la Grande Prière qui approchait. Un rassemblement de toute la population dans les jardins d'Izuma.

Pendant qu'ils approchaient, Hirelda et Siana discutaient de leur côté. L'Alchimiste lui parlait de ces dernières épreuves pour passer d'un autre niveau, qu'elle avait dû mal à passer. Hirelda l'encourageait à ne pas lâcher, mais cette fois, Siana n'avait aucune intention d'abandonner. Sa détermination à faire face aux épreuves étonna Ozia. Elle avait grandement muri depuis leurs aventures pour aider Noria.

Ils arrivèrent enfin dans le petit village de Kanami. Il s'agissait d'une petite bourgade au milieu d'une étendue d'herbe verte, non loin du bord du lac. Elle jouissait de la même architecture, toujours avec une statue de la déesse Hikari sur la place centrale. Il y avait certes moins de monde que dans la capitale, mais quelques personnes se promenaient dans les rues pavées.

– Comment est-ce qu'on s'y prend ? demanda Siana. Il va y avoir encore du terrain à explorer...

– Je m'en charge, décréta Nagrir avant de disparaître dans une ruelle.

Comme d'habitude, le Wolftang n'en faisait qu'à sa tête. Mais il était si efficace que tout le monde le laissait faire ce qu'il voulait. Pour sa part, Ozia n'avait pas envie de retrouver une bibliothèque et de passer son temps à la fouiller.

Ozia aperçut des soldats en patrouille avec des prêtres. Ils gardaient un œil sur leurs invités de loin.

– Vous pensez que l'on est suivi ? demanda Ozia.

– Évidemment, railla Daren. Nous sommes là pour débusquer les impies qu'ils cherchent partout, alors si on avance, ils ne vont pas se priver.

– Comment fait-on pour les trouver sans qu'il nous voie, alors ?

Hirelda se plaça face au groupe et avança à reculons.

– Et si c'était eux qui venaient à nous ? ricana-t-elle. Après tout, ils sont venus voir Ozia. Peut-être qu'en se servant d'elle comme appât, ils viendront la trouver ?

Les deux Sages s'arrêtèrent, intrigués par la proposition d'Hirelda. Ozia lui darda un regard noir.

– Attends, tu veux te servir de moi ? demanda-t-elle, outrée.

Hirelda haussa les épaules.

– C'est un bon plan, non ?

Ozia réfléchit quelques instants. Personne n'avait de meilleure idée à proposer.

– Je suis étonnée que tu aies un bon plan, pour une fois... murmura Ozia.

Hirelda posa les mains sur ses hanches, la bouche grande ouverte.

– Non mais oh ! Bien sûr que ça m'arrive !

Ses amis pouffèrent. Mais personne ne trouva à redire sur son idée. Aussi, pour le mettre en application, Ozia se sépara du reste du groupe pour déambuler dans les rues de la ville. Un grand marché s'étalait aux abords du lac, qui proposait beaucoup de poisson frais. Leur odeur embaumait la place, tandis que les restaurants de l'autre côté les cuisinaient de différentes manières.

Ozia remarqua une affiche étrange sur un mur. Elle dénotait du reste de l'architecture alliant le rouge et le noir. Le fond du papier était d'un bleu roi, elle se dirigea vers celui-ci. Des gens s'arrêtaient devant, que ce soit pour le lire ou non. C'était très rapide, la déesse Hikari était représentée dessus avec une croix rouge. Il y avait trois phrases qui prouvaient ses mensonges : sa domination par la prière, les faux contes, et la surveillance. Le papier prônait la liberté pour tout le monde.

– Ne lisez pas ces mensonges ! gronda une femme derrière elle.

Ozia fit volte-face. Une prêtresse aux longs cheveux rose s'approcha d'un pas menaçant. Ozia s'écarta de son chemin alors qu'elle arrachait la propagande d'un geste vif.

– La déesse Hikari est d'une grande bonté, expliqua-t-elle. Elle nous offre toute la nourriture dont nous avons besoin, à nous, pauvre pêcheur.

Ozia opina du chef en lui faisant un demi-sourire. Elle n'avait pas envie de vexer la prêtresse, mais encore moins d'écouter ses histoires. Elle préféra continuer de déambuler dans les rues toute la journée. Heureusement, elle mangea avec Hirelda et Siana le midi, afin de ne pas sombrer dans la solitude. Elle n'avait plus l'habitude de se retrouver seule depuis qu'elle avait de bons amis.

De leur côté, l'exploration n'avait rien donné. Le tour du village se faisait rapidement, et personne ne comprenait comment la résistance pouvait être ici. Qu'importe, Ozia retourna se balader dans les rues, seule, puis se dirigea vers les champs à l'extérieur de la ville, au sud. Des paysans s'occupaient des moissons avec les outils dont ils avaient à disposition. Mais toujours aucune trace d'une quelconque résistance.

Ozia soupira, las de marcher sans but. Elle se demandait combien de temps elle allait encore perdre avant de retrouver son amie. Petit à petit, l'espoir diminuait à mesure où la nuit tombait dans le village de Kanami. Elle s'installa dans un parc qui bordait le village. Elle scruta les quelques cerisiers aux fleurs emportées par le vent.

Tout le monde quittait le parc petit à petit, si bien qu'elle dût faire la prière du soir toute seule. Impossible de ne pas se plier à cette tradition. L'œil magique se trouvait à nouveau dans le ciel pour surveille tout le monde. Les prêtres continuaient de patrouiller dans les environs avec leurs soldats pour vérifier qu'il n'y avait pas d'impies. Une fois terminé, Ozia se posa sur un banc et laissa un long soupir s'échapper.

– Bonsoir.

Ozia sursauta. Devant, quelqu'un s'avança en cherchant à rester dans l'ombre. Quelques lampadaires pas plus hauts qu'un humain offrait un peu de lumière grâce à leur lampion accroché. Le froid s'installait dans le parc, alors qu'un vieil homme à la longue barbe s'approchait d'elle à l'aide de sa canne. Il s'installa à ses côtés et scruta le cerisier d'en face.

– Qu'elle belle nuit, vous ne trouvez pas ?

Ozia ne savait pas quoi répondre. Il portait lui aussi un kimono rose, signe qu'il était sous la domination de la déesse.

– Plutôt fraiche, je trouve, continua Ozia.

L'inconnu ricana.

– Je suis bien d'accord. Vous venez d'arriver en ville ? demanda-t-il.

Ozia opina du chef. Elle ne voulait pas trop rentrer dans les détails. La prudence était de mise dans ce pays impitoyable.

– Comment avez-vous trouvé le tome 4 des Chroniques d'Arfas ?

Ozia hoqueta de surprise. Elle se retint de se tourner vers lui. Au lieu de ça, elle observa les alentours à la recherche d'un garde ou d'un prêtre. Il n'y avait certes personnes, mais elle ne pouvait pas commettre la moindre erreur maintenant.

– C'est un très bon livre, avoua-t-elle. J'ai beaucoup aimé le passage qui se déroule à Kanami.

Le vieil homme sourit et hocha la tête.

– Je suis bien d'accord. Pourriez-vous me le prêter ? J'habite dans la maison au bout des champs. Je vous promets de vous le rendre.

Ozia arqua un sourcil.

– Bien sûr. Je peux passer demain ?

Un sourire s'étira sur le visage marqué par l'âge de l'inconnu.

– Vous pouvez venir maintenant, je vous attendrai pour le thé.

Sur ces mots, il se leva et disparut dans les ténèbres de la nuit. Aussi étrange que cela puisse paraître, Ozia était persuadée d'avoir eu une discussion avec un membre de la résistance. Cela fait, elle s'empressa de retourner à l'auberge du village pour discuter avec les autres. Tout le monde attendait dans la grande salle. Il ne restait que quelques clients à cette heure si tardive, et les odeurs d'alcools trainaient encore.

Tout le monde était content de la voir. Une fois assise, elle raconta l'entrevue avec l'inconnu. Elle resta vague, comme s'il s'agissait d'une rencontre hasardeuse. Les murs avaient des oreilles et elle ne faisait pas confiance au barman ainsi qu'aux derniers clients. N'importe qui pouvait les vendre aux prêtres.

– Je lui donnerai le livre demain, cela lui fera plaisir. Il fait bien trop nuit pour y aller de toute façon.

En prononçant cette phrase, Ozia fit un clin d'œil discrètement au reste du groupe.

– Bon, dommage que nous n'ayons rien trouvé, annonça Serah d'une voix un peu plus forte. Allons dormir, on verra demain.

Ozia retourna dans sa chambre. Avec un futon et une table de nuit, les pièces étaient très petites et n'offraient rien d'autre. Mais qu'importe, Ozia était déjà à la fenêtre pour l'ouvrir. Elle monta sur le rebord, puis marcha sur le toit avec précaution. Quelques lanternes éclairaient les rues pavées, tandis que des gardes patrouillaient. Ils n'étaient pas nombreux, ce qui allait faciliter les déplacements d'Ozia.

– Suis-moi.

Elle sursauta. Nagrir se trouvait à ses côtés. Son cœur rata un battement. Elle reprit une respiration normale avant de le dévisager d'un air sévère.

– Tu m'as fait peur ! Ça ne va pas ! chuchota-t-elle.

– J'ai compris ce qu'on devait faire, continua-t-il en ignorant sa colère. Allons-y.

Nagrir descendit rapidement du toit, Ozia sur ses talons. Ils sautèrent de balcon en balcon avant d'arriver au sol. D'ici, Nagrir lui montra le chemin en restant dans l'ombre. Il avait l'habitude de se mouvoir dans les ténèbres. Grâce à ça, ils esquivèrent facilement les patrouilles et ils arrivèrent dans les champs. Cette fois, plus personne ne risquait de les trouver.

Au loin, Serah et Violetta attendaient déjà près d'une grange. Ozia reconnut l'homme âgé à leur côté, en train de s'occuper des chevaux. Ozia et Nagrir les rejoignirent rapidement.

– Oh vous voilà, dit-il à l'intention d'Ozia. Je vois que vous avez amené tous vos amis.

– Il en manque encore plu...

Alors qu'elle allait terminer sa phrase, Daren, Miiya, Hirelda et Siana arrivèrent à leur tour en volant, Siana dans les bras d'Hirelda.

– Personne ne vous a vu de là-haut ? demanda Ozia, inquiète.

– T'en fais pas, rassura Hirelda. Daren nous a bien guidé. Apparemment, on est trop nul pour y arriver.

Daren claqua de la langue, sourcils froncés.

– On voit ce que ça a donné à Elekya, votre soi-disant incursion.

Hirelda lui tira la langue. Le vieil homme leur fit signe de le suivre dans sa maison. Très bien rangés, ils possédaient beaucoup de photos de famille. Des cadres étaient accrochés sur tous les murs, ainsi que posés sur les différents meubles dans le salon. Les crépitements des flammes de la cheminée offraient une température douce pour les inviter.

– Je m'appelle Naoko, se présenta le vieil homme. Je suis ravi de vous proposer du thé dans le salon spécial.

Ozia se demandait ce que pouvait être un salon spécial pour le thé. Après un couloir aux parois faites de papier, il bifurqua dans une pièce. Une longue table basse et plusieurs coussins proposaient aux convives de s'installer. Il ferma la porte qui coulissait, puis demanda à ses invités de reculer.

Il retira un tatami qui donnait sur une trappe secrète. Il attrapa l'anneau de métal et la souleva avec difficulté. Nagrir s'élança pour lui donner un coup de main. Naoko, la respiration saccadée, reprit son souffle.

– Merci jeune homme.

Nagrir opina du chef. Naoko leur montra le sous-sol.

– Je vous en prie, vous pouvez y aller.

– On va aller où là ? demanda Nagrir, inquiet.

Ozia s'approcha de la trappe. Il ne faisait pas si noir à l'intérieur. Elle remarqua d'autres lampions qui éclairaient le sol dans le fond.

– Voir des amis, dit-il sans en dire plus.

Ozia et ses amis descendirent les marches. Elles grincèrent sous leur poids, alors qu'ils arrivaient dans la cave. C'était un réseau de tunnels qui menaient dans une prochaine grande pièce. Les murs étaient recouverts de carte des différentes villes. Ozia remarqua que les bâtiments pour les prêtres étaient encerclés. Derrière une ouverture en forme d'arche, elle découvrit une autre bibliothèque.

Et derrière un bureau, en train de lire un livre, Ozia écarquilla les yeux en voyant Kira. La cheffe de la garde. Aussitôt reconnue, la Titanomage se mit en garde. Kira releva les yeux de sa lecture et un demi-sourire se dessina sur son visage.

– Vous nous avez enfin trouvés, dit-elle.

Ozia arqua un sourcil. Elle se tourna vers ses amis qui semblaient aussi perdus qu'elle.

– Bienvenue dans le quartier général de la résistance, expliqua-t-elle.


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