4.Le barrage Sizu

Accoudée sur le bastingage, Ozia observait les terres qui défilaient sous ses yeux. L'aéronef, un grand galion de métal avec des moteurs à essences de feu et un ballon dirigeable, s'élançait vers Shinasa. Après quelques heures, il survolait la région d'Argos qu'Ozia connaissait bien. D'ici, elle pouvait voir à quel point les royaumes étaient minuscules par rapport au monde. La cité d'Unvalia était bien petite face aux grandes immensités de terre alentour. La forêt abritant le village d'Ylvea s'étendait contre une montagne. Derrière, la région de Gorth offrait un repos éternel au Titan de la terre. Cette immense jungle aux cimes si épaisses qu'il n'était pas possible de voir ce qui se dissimulait en dessous.

Le vent fouettait sa chevelure indigo, tandis que ses amis s'occupaient comme ils pouvaient. Hirelda et Nagrir discutaient dans la cale de la façon dont ramener Noria. Siana trainait sur le bateau pour profiter de la mer qu'elle ne voyait pas si souvent. Pendant ce temps, l'équipage faisait tout pour maintenir l'aéronef en état de marche. Les ordres fusaient à droite à gauche. Les Sages Serah et Violetta attendaient sur le pont, assises sur une banquette. Miiya, l'Aspirant de Violetta, était venue avec plaisir. C'était la première fois qu'elle volait à travers les cieux. Ses longs cheveux de givre ondulaient avec le vent. Ses yeux verts scrutaient tout ce qu'elle pouvait, un large sourire sur le visage. Elle portait une longue tunique sans manche avec un pantalon, le tout alternant des carreaux bleus et blancs.

Le petit nouveau dans le voyage, c'était Daren Kork. Le pauvre vomissait par-dessus bord, malade d'être à une si haute altitude. Il allait un peu mieux depuis que Violetta lui avait donné un élixir. Très gentil, il prenait souvent des nouvelles des voyageurs pour savoir si tout se passait bien. Mais il n'arrivait pas à rester aussi aimable face à Ozia et ses amis. Pour lui, c'était une honte d'avoir osé pénétrer dans le bureau de sa supérieure.

Il arriva face à Ozia, toujours cet air méprisant sur le visage. Elle n'avait pas envie de l'entendre lui faire des remontrances. Préparée à l'envoyer balader, elle se redressa et l'affronta du regard. Vêtu d'une tunique noire ornée de lettres d'or brodées sur celle-ci, il portait une longue veste avec un haut col. Il la scruta d'un air supérieur, tout en ajustant sa paire de lunettes rectangulaire.

– Si c'est pour me faire d'autre remontrance, tu peux partir, prévint Ozia.

Daren croisa les bras. Il fit la moue et semblait réfléchir à ce qu'il allait dire.

– Je ne viens pas pour ça...

– Alors pour quoi ?

Il soupira puis s'appuya sur le bastingage.

– J'aimerais savoir ce qui vous a pris. Je ne comprends toujours p...

– Lâche-nous ! gronda Ozia.

Daren se redressa, une lueur colérique dans le regard.

– Tu sais très bien ce qu'il s'est passé. Tu es l'Aspirant de Serah, non ? Elle a bien dû t'expliquer. Ce qu'il faudrait, c'est que tu acceptes qu'Elekya et ses Sages ont des secrets pas très nets dans leur tiroir !

Daren n'aimait pas cette vérité. Une grimace déforma son visage, alors qu'il détournait le regard. Lui qui, depuis son enfance, vivait dans cette formidable cité, on l'avait bercé d'illusions. L'Académie d'Elekya lui répétait qu'ils étaient les garants de la justice, de quoi grossir les chevilles de n'importe qui. Le combat de Noria et ses amis avaient révélé des choses inavouables. Pour taire les rumeurs, les Sages furent obligés de révéler la vérité à leurs Aspirants.

– Je n'arrive pas à croire à cette personne enfermée dans une prison secrète, admit Daren. Encore moins à ce cycle. On ferait exprès d'infecter les Titanomanciens avec de la corruption ? C'est n'importe quoi !

Ozia pouvait comprendre à quel point c'était difficile pour quelqu'un qui baignait dans les mensonges depuis toujours. Même si les Titanomanciens faisaient le bien autour d'eux, il ne fallait pas oublier ce qu'ils pouvaient causer dans les ténèbres.

– Il va bien falloir t'y faire, déclara Ozia. Si tu n'en es pas capable, tant pis pour toi.

Ozia se retourna et quitta sa place. Elle n'avait pas envie d'argumenter sur tout ça. Elle se dirigea vers l'avant du bateau. Elle préférait rester seule, scrutant les régions du monde qui défilait sous ses yeux. Au loin, elle remarqua une gigantesque tornade qui ne semblait pas bouger. Statiques, ses vents violents empêchaient l'aéronef de s'en approcher. Le capitaine la contourna et continua sa route.

Hirelda la rejoignit après quelques heures. Assises l'une à côté de l'autre à même le sol, elles observèrent l'horizon de nuages.

– Tout va bien ? demanda Hirelda.

– Désolée, j'avais besoin de m'isoler un peu. J'essaye de faire le tri dans tout ce qui se passe. Et...

Ozia laissa échapper un long soupir.

– Je suis inquiète pour Noria et Allen.

– Je sais, moi aussi, avoua Hirelda. Mais ne t'en fais pas, on va les retrouver.

Ozia aurait aimé avoir la même conviction que son amie, mais c'était loin d'être le cas. Même si elle était prête à tout pour ça, elle ne savait pas ce qu'elle allait faire. Ils partaient tous pour découvrir l'existence d'un Titan encore inconnu à ce jour, sans avoir la certitude d'y dénicher un moyen de sauver Noria.

***

Le lendemain matin, Hirelda se réveilla doucement dans leur cabine. Il ne leur restait plus beaucoup d'heures de voyage, mais qu'est-ce qu'on pouvait s'ennuyer sans la téléportation. Rester plusieurs jours sur un aéronef était d'un ennui mortel. Elle ne savait pas quoi faire pour occuper son temps. Comme elle avait fait une méditation pour son entrainement, la protection de son esprit était trop faible pour en faire une nouvelle.

Tout le monde semblait déjà levé. Elle se redressa de son lit de fortune horriblement inconfortable. Elle se frotta le dos douloureux, puis se rendit à la fenêtre. Elle retira le rideau pour voir à quel point la journée était bien avancée. Son estomac gronda, signe que midi approchait déjà. Elle bailla à s'en décocher la mâchoire, puis se dirigea vers la sortie. Elle se demandait ce que pouvait faire le reste de ses compagnons pendant ces journées interminables.

En ouvrant la porte en métal, elle se trouva nez à nez avec Siana. Le poing tendu vers la porte, elle s'apprêtait à frapper. Surprise, elle croisa les bras derrière son dos et sourit à Hirelda. Mon dieu que ce sourire pouvait lui faire oublier tous les évènements récents. Elle avait l'impression d'être loin de tous les malheurs qui venaient de s'abattre sur ses amis. Siana lui plaisait toujours, et son cœur battant la chamade en était une preuve indéniable. Mais depuis son expérience catastrophique pendant la fête de l'automne, elle n'avait pas retrouvé d'occasion de se retrouver seule avec elle.

– Tiens ! Tu es levée ? demanda Siana.

Hirelda haussa les épaules.

– Comme tu peux le voir. J'ai une faim de loup ! dit-elle en se caressant le ventre. Tu veux manger quelque chose ?

Siana ricana.

– On allait justement se mettre tous à table, tu veux te joindre à nous ?

Hirelda soupira intérieurement. Elle aurait aimé déjeuner qu'en sa compagnie pour une fois, mais elle ne pouvait pas refuser la proposition. Il lui fallait trouver un autre moment pour passer du temps avec elle. Sur ce, elle se dirigea jusqu'à la cantine : une grande salle bruyante où tout le monde prenait son repas. Hirelda récupéra un plateau à l'entrée, puis le cuisinier lui donna le menu d'aujourd'hui.

Pas de restaurant ni de choix. Les vivres avaient une certaine limite. Mais pour un voyage, manger du bon poisson avec des légumes venus de lointaines contrées, Hirelda devait reconnaître qu'ils avaient fait fort. Elle mangea en compagnie de Nagrir et Ozia, discutant de ce qui pouvait les attendre plus loin. Leur conversation se mélangea au brouhaha ambiant, avec des matelots de plus en plus bruyants.

Le repas se termina et chacun partit s'occuper. C'était le moment où jamais. Hirelda se tourna vers Siana, qui la coupa dans son élan.

– On sort ? proposa-t-elle.

Hirelda resta bouche bée. C'était enfin le moment de passer du temps avec Siana. Même si les évènements récents la faisaient culpabiliser de passer du bon temps. Mais elle ne pouvait rien faire d'autre en ce moment. Noria et Allen étaient portés disparus et tant qu'ils n'étaient pas arrivés à Shinasa, elle était totalement impuissante. Raison pour laquelle elle accepta avec plaisir.

Les deux jeunes femmes se rendirent dans un petit salon. Une petite pièce fermée offrant un peu de lecture pour s'occuper durant le voyage. Il n'était pas très grand, mais il permettait à quatre ou cinq personnes de se divertir quelque temps. Installées dans les canapés mis à disposition, Hirelda et Siana scrutèrent la région qu'ils survolaient via les hublots ronds. Une grande forêt s'étendait à l'horizon, alors que des nuages noirs s'approchaient et risquaient de déverser une pluie diluvienne.

– On a une belle vue d'ici, remarqua Siana.

Hirelda hocha la tête.

– C'est vrai.

Elle n'en avait même pas conscience, mais son ton ne laissait pas de place à une conversation. Au fond d'elle, l'inquiétude la rongeait de l'intérieur. Impossible pour elle de faire abstraction de la peur de perdre Noria et Allen. Pourtant, elle se trouvait avec Siana, l'occasion de faire plus ample connaissance, histoire de se racheter sa conduite pendant la fête. Mais elle avait le cœur lourd de peine et elle ne parvenait pas à aligner le moindre mot.

– On va les retrouver, assura Siana.

Hirelda se tourna vers elle. Ses lèvres tremblèrent légèrement. Elle avait beaucoup de difficulté à empêcher les larmes de couler. Mais après tout ce qu'il venait de se passer, ce n'était plus possible. Hirelda renifla avant de se pincer le haut du nez. Elle essaya de se retenir de toutes ses forces, mais quand Siana passa les bras autour de son cou pour se coller contre elle, Hirelda se laissa aller. C'était peut-être raté pour draguer celle qui lui plaisait, mais au moins, elle pouvait pleurer dans les bras d'une amie qui la consolait.

***

Dans la nuit, Ozia se reposa dans une des chambres avec le reste des Titanomanciens, dans des lits superposés. Avec l'équipage et les voyageurs, il manquait rapidement de place dans l'aéronef. Donc les endroits pour dormir étaient communs à tous, en attendant de construire des appareils plus volumineux. Mais impossible pour la jeune femme de fermer l'œil. Toutes les questions lui taraudaient l'esprit et l'empêchaient de trouver le sommeil.

Elle se leva et se dirigea vers l'extérieur. Un ciel parsemé d'étoile s'emparait de la nuit. La lune brillait, tandis qu'ils suivaient toujours la même trajectoire. Le capitaine se faisait relayer par son second pour tenir la barre, tandis que l'équipe de nuit continuait de maintenir l'appareil en état de marche. C'était incroyable le travail abattu pour un aéronef.

En faisant un tour sur le pont, à remplir ses poumons d'air frais, Ozia trouva Nagrir accoudé sur le bastingage. Elle le rejoignit, non sans sentir des frissons lui parcourir le corps. L'été était derrière eux et le froid prenait le dessus.

– Toi non plus, tu n'arrives pas à dormir ? demanda Ozia pour engager la conversation.

Nagrir la scruta de ses yeux de félin d'un beau bleu ciel.

– Non. J'aimerais bien comprendre tout ce bazar. J'ai essayé de contacter Dreyimir en me concentrant, mais elle ne me répond pas, dit-il en triturant son anneau du bout des doigts.

L'anneau de Dreyimir lui permettait d'emprunter ses pouvoirs pendant un temps limité. Cela l'avait aidé à tenir tête à Odiango lors de son combat, mais il n'était pas assez entrainé pour que cela dure dans le temps. Peut-être que ses derniers entrainements lui permettaient de se battre avec les pouvoirs de l'Ayashim plus longtemps.

– Moi aussi... avoua Ozia. J'espère qu'on aura des réponses dans la région de Shinasa. Mais j'aimerais surtout sauver Noria. Et Allen.

Elle ne savait même pas où il se trouvait. Perdu quelque part dans l'immensité du monde, cela n'allait pas être facile de le retrouver. Encore moins sans le système de téléportation qu'Izeris avait mis au point grâce à ses pouvoirs.

– j'aimerais te dire que cela ne sert à rien de se prendre la tête, mais je ne suis pas vraiment un exemple, plaisanta le Wolftang.

Ozia ricana.

– Nagrir ? Essayes-tu de faire de l'humour ?

C'était assez rare, mais il lui adressa un sourire sincère.

– C'était pour détendre l'atmosphère, avoua-t-il.

Ozia opina d'un hochement de tête.

– Ça va, c'était plutôt réussi. Mais tu peux mieux faire, il y a encore du boulot.

Nagrir pouffa. Il posa une main amicale sur l'épaule d'Ozia.

– Aller viens, allons dormir. On a encore pas mal de voyage. Et il faut supporter les regards incessants de ce « Daren ».

Ozia arqua un sourcil.

– Il t'insupporte aussi ?

Nagrir posa les mains sur les hanches. Il fit mine de réfléchir en scrutant l'océan d'étoile. Puis son regard se reporta sur son amie.

– J'ai envie de lui mettre une énorme baffe.

Ozia ne put s'empêcher de rire.

– Mais je laisse Hirelda faire, avoua-t-il. Je sens que ça ne va pas tarder à arriver.

Ozia secoua la tête. Elle repensa à l'impulsivité de son amie. Et effectivement, ces derniers jours, Daren la fusillait souvent du regard. Et il n'y avait rien de pire pour Hirelda, surtout quand la personne ne venait pas lui parler en face. De quoi l'énerver pendant le voyage, jusqu'à ce que sa patience vole en éclat et que sa colère propulse sa main sur la joue de Daren.

Plusieurs jours passèrent. Ozia alternait les discussions avec les Sages et leurs Aspirants. Ils avaient beau faire des plans, personne n'avait une quelconque idée de ce qu'ils allaient découvrir. Même Serah semblait dépasser par les évènements, elle qui passait son temps le nez dans les livres.

– Shinasa en vue ! hurla le capitaine.

Ozia et Hirelda coururent à l'avant de l'aéronef pour voir ce qui les attendait. Au loin, une grande rivière passée entre deux montagnes. Le capitaine amorça une descente vers celle-ci, sûrement pour ne pas attirer les regards de la population. Mieux valait éviter de dévoiler un aéronef de métal s'ils ne connaissaient pas encore cette technologie.

– Tout le monde s'accroche ! hurlaient les marins.

Pour éviter de passer par-dessus bord, les Titanomanciens reculèrent jusqu'au pont et imitèrent les marins. Il tenait les cordes sanglées par des anneaux en métal disposés dans certains coins. L'aéronef amorça sa lente descente. Ozia se demandait si la violence du choc allait réellement les envoyer valser. Mais grâce aux qualités du capitaine, le vaisseau se posa sur l'eau en douceur, même si les voyageurs furent secoués. Ozia hoqueta de surprise et s'accrocha fermement à la corde alors qu'elle se balança vers l'avant. Hirelda la rattrapa et l'aida à rester debout. L'aéronef, devenu maintenant un bateau, tanguait dans tous les sens, ravivant le mal de transport de Daren.

Lorsque l'engin se stabilisa, tout le monde se décrocha pour admirer la vue. Ozia retourna à l'avant du navire. Ils passèrent entre deux montagnes recouvertes de forêts aux feuillages d'un bel indigo. Des oiseaux gigantesques virevoltaient au-dessus des cimes, poussant des cris aigus. Pendant que les marins détachaient les voiles, un des volatiles passa sur le côté pour les observer. Ses plumes blanches brillaient aux lueurs du soleil. Son grand bec recourbé se partageait du noir et du rouge, tandis qu'il planait avec le navire. Quelques battements d'ailes lui suffirent pour prendre de la hauteur et filer à toute vitesse pour les dépasser.

Ozia n'était jamais venu à l'extrême est du continent. Les températures automnales n'avaient pas changé, même si la flore ne ressemblait en rien à la région d'Elekya. Mais le plus inquiétant, c'était l'immense barrage en vue à l'horizon. Un ensemble de murailles qui retenait l'eau. De grandes tours s'élevaient à intervalle régulier. Impossible de savoir si le coin était gardé, mais un mauvais pressentiment s'emparait d'Ozia.

En se rapprochant, des navires de combat apparurent sous leurs yeux ébahis. Leur voile rouge triangulaire flottait avec le vent, tandis que leur bateau possédait un avant pointu capable de percer d'autres bâtiments. Le capitaine ralentit l'allure avec ses marins, et ils s'arrêtèrent devant les grandes portes de l'écluse.

– Jetez l'encre ! ordonna un soldat sur la muraille.

Le capitaine obéit sans discuter.

Des soldats munis d'armure rouge garnie de pointes noires et se terminant en une jupe. Elles émettaient des cliquetis au rythme de leur pas, alors qu'ils utilisaient des planches pour aborder le navire. Munis d'hallebarde, ils pointèrent leurs lames sur les intrus. Ozia était déjà prête à se battre, mais les Sages lui firent signe de se calmer. Une femme d'une quarantaine d'années, la seule à ne pas porter de casque, arriva sur le navire. Le visage balafré, elle observa les inconnus d'un œil inquisiteur. Le vent jouait avec sa chevelure châtain attachée en une queue de cheval haute.

– Qui sont les chefs de votre expédition ? demanda-t-elle.

Serah et Violetta firent un pas en avant pour se présenter.

– Serah Invidia, Sage d'Elekya.

– Violetta Renard, je suis sa collègue de même rang.

La militaire, la main sur le katana à sa ceinture, continua son interrogatoire.

– Je suis Kira Tylika, commandante en chef de la garnison du barrage Sizu. Que venez-vous faire ici ?

– Nous sommes venus enquêter sur l'existence d'un Titan dont nous ignorions l'existence jusqu'à maintenant, expliqua Serah. Nous sommes envoyés par la Sage suprême Valyxia.

Kira fronça les sourcils à ce nom. Personne sur le continent ne pouvait l'ignorer. Les Titanomanciens avaient réussi à se faire connaitre dans le monde entier. Barrer la route à des Sages en missions pouvait leur mettre à dos tous les Titanomanciens d'Elekya.

– Vous n'avez aucun droit ici, pesta Kira.

Ozia écarquilla les yeux. Elle défiait l'autorité de Valyxia comme s'il s'agissait d'un ennemi.

– Ici, nous n'obéissons à la grande déesse Hikari. Seule elle pourra décider d'accepter votre venue sur nos terres.

À ces mots, les soldats tendirent leurs hallebardes vers les voyageurs et s'approchèrent d'un pas menaçant. Ozia voulait se défendre. Après tout, il n'y avait pas l'air d'y avoir de Titanomage dans leur rang. Mais Violetta lui fit signe de se calmer et elle leva les mains en signe de reddition.

– Nous ne voulons aucun mal, tenta d'apaiser Violetta. Nous voulons juste nous rendre dans une région de ce pays. Vous n'entendrez même pas parler de nous.

Mais Kira ne semblait pas de cet avis. Elle hésitait, le pommeau de son sabre fermement empoigné. Les Sages l'affrontaient du regard. La tension était palpable sur le navire. Tout le monde était à cran, et il suffisait d'une étincelle pour que la discussion vire au cauchemar. Mais finalement, Kira lâcha son arme et se détendit légèrement, rapidement imitée par ses soldats.

– Ce n'est pas à moi de vous autoriser à parcourir nos terres, mais à notre sainte déesse Hikari. Suivez-nous !

Les Sages acquiescèrent. De toute manière, ils n'avaient aucune autre solution pour sortir pacifiquement de ce guêpier. Kira resta sur le bateau avec quelques soldats pour les surveiller, tandis que les autres prirent deux navires de guerre pour les suivre. Les portes de l'écluse s'ouvrir lentement, puis les bateaux passèrent ensemble.

Les eaux étaient toujours très calmes le long de cette rivière à l'eau très claire. Passé le barrage, les montagnes disparurent petit à petit. Cette fois, une grande plaine d'herbe bleu ciel s'étendait à perte de vue. De l'autre côté, une forêt de cerisier en fleur dont leur belle couleur rosée s'associait avec le bleu de la flore.

Ozia scrutait Kira. Elle ne bougeait pas, clouée sur le pont. Elle gardait elle aussi un œil sur les Sages. Un silence pesant régnait en maître sur le navire. Fini la bonne ambiance des derniers jours, place à une tension palpable. Une poudrière qui pouvait exploser au moindre mot de travers.

Après quelques dizaines de minutes, ils découvrirent une ville bordant la rivière. Ozia n'avait jamais vu cette architecture atypique. Les maisons possédaient toutes des parois semblables aux papiers, le tout soutenu par d'épaisses poutres de bois. Les toits de tuiles rouges descendaient pour se recourber légèrement au niveau des pointes. D'ici, Ozia aperçut des habitants tous vêtus de kimono aux nuances de rose. Comme s'il voulait se fondre dans les forêts de cerisier.

Ils passèrent ce lieu, puis continuèrent de descendre vers le sud. Le spectacle suivant scotcha Ozia contre le bastingage. Hirelda et Nagrir à ses côtés, ils observèrent une cité construite sur un grand lac qui se rapprochait au fil de leur avancée. Majestueuse, son architecture ressemblait beaucoup à la précédente, si ce n'est les énormes quais qui s'étendaient tout autour, avec son lot de bateaux de guerre. Des ponts de bois rouges reliaient divers quartiers, bien animés à cette heure de la journée.

Kira ordonna au capitaine de se mettre sur un quai bien spécifique. Il se trouvait dans le premier quartier, qui ressemblait fort à une défense. Ozia remarqua des soldats en patrouille un peu partout, ainsi qu'un énorme bâtiment d'une dizaine d'étages semblable à une tour. Des artilleries attendaient les envahisseurs un peu partout. Cette forteresse n'était pas près de se faire envahir.

Le capitaine suivit les instructions de Kira sans rechigner à la tâche. Il déplaça l'aéronef jusqu'au ponton. Les marins s'activèrent pour accrocher les cordes tandis que l'ancre fut lâchée. Une fois à quai, Kiara demanda à tout le monde de descendre pour les emmener voir leur déesse. Ozia, les yeux écarquillés, se demandait si elle avait bien entendu. Allait-elle réellement rencontrer une personnalité divine ?


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